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B. Cyclisations sur des oléfines

II. Les dérivés stannylés

2. Allylation par extrusion de dioxyde de soufre

a) Premières réactions intermoléculaires : les aryles allylsulfones comme agents allylants

Il y a presque 20 ans, une réaction d’allylation radicalaire employant des sulfones allyliques a été développée au laboratoire.146 Le bilan général et le mécanisme de cette transformation sont présentés sur le schéma III-20.

Schéma III-20 – Mécanisme de l’allylation par extrusion de dioxyde de soufre

Un radical issu de l’AIBN s’additionne sur l’alkyle-allylsulfone, ce qui libère un radical alkylsulfonyle après β-élimination. Ce dernier peut à nouveau s’additioner sur une alkyl- allylsulfone et rentrer dans une réaction dégénérée, ou perdre une molécule de dioxyde de soufre et engendrer un radical R•

. Ce nouveau radical s’additionne alors sur une aryle- allylsulfone et fournit après β-fragmentation le produit de la réaction. Le radical arylsulfonyle libéré lors de cette dernière étape propage la chaîne. Le succès de ce procédé radicalaire d’apparence simple repose sur l’utilisation de l’aryle-allylsulfone. Celle-ci joue le rôle d’oléfine-relais et protège le produit d’arriver des réactions secondaires potentielles avec les radicaux R• et ArSO

2•.

Ce protocole a été modifié dans le but de piéger le radical R• intermédiaire par des oléfines activées. Cette modification consiste à omettre l’aryle allylsulfone et à la remplacer par une oléfine électro-déficiente. L’alkyle allyle sulfone est alors utilisé en large excès et joue à la fois le rôle d’agent allylant, de précurseur radicalaire et d’oléfine-relais. De plus, si l’on choisit le radical libéré (après initiation et extrusion de dioxyde de soufre dans le milieu) à caractère nucléophile (radical benzylique dans ce cas), il s’additionnera préférentiellement sur une oléfine pauvre en électron avant de subir la réaction d’allylation. Ce principe est illustré sur le schéma III-21.

Schéma III-21 – Piègage du radical intermédiaire par le N-phénylmaléimide

Ce procédé à plus tard été étendu par Kim à l’utilisation de radicaux alkyles primaires non stabilisés par une insaturation.147

147 (a) Kim, S.; Lim, C. J. Angew. Chem., Int. Ed. 2002, 41, 3265. (b) Kim, S.; Lim, K.-C.; Ryu, I. Adv.

b) Développement et applications : les alkyles allylsulfones comme agents allylants

Schéma III-22 – Mécanisme de la réaction d’allylation avec l’allyléthylsulfone

Malgré son efficacité, la méthode présentée précédemment requiert la préparation de chaque alkyle allylsulfone de départ. Dans le but de faciliter l’applicabilité et de généraliser cette méthode, un nouveau procédé a été mis au point au laboratoire.148 Il consiste à utiliser l’allyle éthylsulfone comme agent allylant, l’AIBN comme initiateur radicalaire et des dérivés iodés ou des xanthates comme précurseurs de radicaux.

148 (a) Le Guyader, F; Quiclet-Sire, B.; Seguin, S.; Zard, S. Z. J. Am. Chem. Soc. 1997, 119, 7410. (b)

Le mécanisme de cette réaction présenté sur le schéma III-22 est similaire à celui de la précédente méthode, excepté le fait que c’est l’alkyle allylsulfone qui joue le rôle d’agent allylant. C’est alors le radical éthyle libéré par l’allyle éthylsulfone qui abstrait l’atome d’iode ou s’additionne sur le thiocarbonyle du xanthate pour propager la chaîne (Schéma II-22).

Cette méthode présente l’avantage d’utiliser une seule allyle sulfone aisément accessible,149 et des précurseurs radicalaires complémentaires, qui permettent l’introduction de divers groupes fonctionnalisés. Elle a par la suite été exploitée par Kim150 pour préparer des cétones α,β-insaturées à partir d’α-acéto- ou d’α-benzoyle xanthates et par Skrydstrup151 pour effectuer des allylations directes de glycines (Schéma

III-23).152

Schéma III-23 – Applications synthétiques de l’allylation avec perte de dioxyde de soufre

Au laboratoire, cette stratégie a été adaptée pour effectuer la synthèse de pyrroles en un seul pot, à partir d’α-cétoxanthates et de la N-éthylsulfonylénamide.153 Comme illustré sur le schéma III-24, l’imine formée par addition-élimination radicalaire cyclise spontanément pour fournir le pyrrole correspondant.

149 L’allyle éthylsulfone est synthétisable en une étape par oxydation du sulfure de vinyle et d’éthyle

commercial.

150 Lee, J. Y; Kim, S. Bull. Korean Chem. Soc. 2006, 27, 189.

151 Blaksjaer, P.; Pedersen, L.; Skrydstrup, T. J. Chem. Soc., Perkin Trans. 1 2001, 910.

152 Pour des applications de cette méthode en synthèse totale, voir: (a) Nouguier, R.; Gastaldi, S.; Bertrand,

M.; Renaud, P. Tetrahedron Lett. 1999, 40, 3371. (b) Villar, F.; Andrey, O.; Renaud, P. Tetrahedron Lett.

1999, 40, 3375. (c) Nouguier, R.; Gastaldi, S.; Stien, D.; Bertrand, M.; Villar, F.; Andrey, O.; Renaud, P.

Tetrahedron: Asymmetry 2003, 14, 3005.

Schéma III-24 – Synthèses de pyrroles par allylation radicalaire

Comme nous l’avons vu au paragraphe II.E, les méthodes d’allylation employant des dérivés d’allylétain ne sont pas compatibles avec la substitution de la position 1. Afin de pallier ce problème, la méthode d’allylation des xanthates par l’éthyle allylsulfone présentée au schéma III-22, a été étendue à des sulfones allyliques substituées en position 1.154 Au laboratoire, le docteur Nicolas Charrier a montré que l’utilisation de sulfones portant un groupement iso-propyle permet d’effectuer les réactions d’allylation à plus basse température qu’avec celles portant un simple éthyle, et ce avec de bons rendements (Schéma III-25). Le radical iso-propyle étant plus stable que son homologue éthyle, l’étape d’extrusion du dioxyde de soufre devient plus rapide ce qui évite la réaction parasite de réarrangement.

Schéma III-25 – Allylation avec des allylsulfones substituées en position 1

Cette méthode s’est révélée efficace et particulièrement intéressante pour la synthèse de motifs diène-1,4 présents dans de nombreux produits naturels155 tels que le leucotriène A4,156 le (-)-mycothiazole157 ou encore l’amphidinolide A.158 Comme nous le voyons au travers des exemples présentés sur le schéma III-25, cette approche modulaire fonctionne avec des allylsuflones mono- et di-substituées en position 1 et tolère un grand nombre de fonctions chimiques. Le contrôle de la géométrie de la double liaison nouvellement formée est néanmoins modeste et reste un défi synthétique.

Fuchs a parallèlement développé un outil complémentaire à ces réactions d’allylations en remplaçant le groupement alkyle présent sur l’allylsulfone par un groupement trifluorométhyle. Il a ainsi pu effectuer des réactions d’alcynylation, de vinylation159 et par la suite d’allylation160 de composés non-préfonctionnalisés possédant des atomes d’hydrogènes activés vis-à-vis de l’abstraction d’hydrogène (Schéma III-26).

Schéma III-26 – Allylation utilisant les triflones de Fuchs

155 Micalizio, G.; Macklin, T. K. Nature Chem. 2010, 2, 238. 156 Claesson, H.-E.; Haeggström, J. Eur. J. Biochem. 1988, 173, 93. 157 Sugiyama, H.; Yokokawa, F.; Shioiri, T. Org. Lett. 200, 2, 2149.

158 (a) Maleczka, R. E. Jr.; Terrell, L. R.; Geng, F.; Ward, J. S. III Org. Lett. 2002, 4, 2841. (b) Trost, B. M.;

Chisholm, J. D.; Wrobleski, S. T.; Jung, M. J. Am. Chem. Soc. 2002, 124, 12420.

159 (a) Gong, J.; Fuchs, P. L. J. Am. Chem. Soc. 1996, 118, 4486. (b) Xiang, J.; Fuchs, P. L. J. Am. Chem.

Soc. 1996, 118, 11986. (c) Xiang, J.; Jiang, W.; Gong, J.; Fuchs, P. L. J. Am. Chem. Soc. 1997, 119, 4123.

(d) Xiang, J.; Jiang, W.; Fuchs, P. L. Tetrahedron Lett. 1997, 119, 6635.

160 (a) Xiang, J.; Evarts, J. ; Rivkin, A. ; Curran, D. P.; Fuchs, P.L. Tetrahedron Lett. 1998, 39, 4163. (b)

Dans ces transformations, le fort caractère électrophile du radical trifluorométhyle a été exploité pour abstraire l’un des hydrogènes activés du composé de départ et ainsi propager la chaîne radicalaire (Schéma III-26).161 On notera toutefois que la réaction n’est efficace que si le substrat de départ possède un nombre limité d’hydrogènes activés et si le réactif d’allylation est substitué en position 2 avec un groupement électro- attracteur. La réaction requiert de plus une grande dilution et les substrats non symétriques posent des problèmes de régiosélectivité.

2.

Allylation

d’organoboranes

par

des

aryles