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D. Mélanges d’oxydes

II. Contro le physique de l’interaction gaz/couche sensible

II.2. Alimentation de la couche sensible

Le contrôle de la résistance de mesure d’un capteur MOX se fait de façon générale à l’aide d’un circuit permettant de relever de grands changements de résistances (qui peuvent être de plusieurs décades). En effet, les réactions sous gaz peuvent être très marquées, comme par exemple avec des gaz oxydants, tels que le NO2, venant interagir avec des couches

sensibles très réactives à ces gaz, telles que le WO3 [116].

Nous verrons donc dans un premier temps les différentes méthodes utilisées pour polariser la couche sensible, puis, dans un second temps, nous nous intéresserons aux effets que peut avoir cette alimentation sur la sensibilité des capteurs aux gaz.

II.2.1. Circuits de mesure de la résistance sensible

Le montage électrique le plus simple permettant de mesurer la résistance sensible avec une bonne résolution est le pont diviseur de tension. Avec ce montage, il suffit de mettre en série, avec la résistance sensible, une résistance de charge de valeur connue et du même ordre de grandeur que celle-ci, d’appliquer une tension connue aux bornes des deux résistances, et de relever la tension aux bornes de la résistance de charge. On en déduit la résistance sensible avec l’équation :

. (Équation 1)

C’est avec ce type de montage que sont alimentés les capteurs commerciaux [22, 49]. Il est également possible d’utiliser des montages électriques à base de pont de Wheatstone, mais ils sont moins adaptés nativement à la mesure de plusieurs décades [117], ou à base d’amplificateurs opérationnels [118]. Dans certains autres cas, la résistance sensible n’est pas alimentée en tension continue, mais à l’aide d’un signal périodique (le plus souvent sinusoïdal), et le paramètre fixé est la fréquence de celui-ci [119].

Dans tous ces exemples, la puissance polarisant la couche sensible est un paramètre intrinsèque, étant donné que la mesure de la résistance sensible est effectuée de manière indirecte. Il peut donc sembler intéressant de regarder le comportement des matériaux sensibles lorsqu’on les polarise directement, à l’aide d’instruments de mesures de type SMU (Source Measurement Unit), constitués d’une source de tension et de courant, et d’un multimètre.

II.2.2. Influence de l’alimentation sur la sensibilité aux gaz

Les phénomènes mis en jeu lors de l’alimentation de la couche sensible sont très complexes à décrire étant donné que les différents paramètres intervenant lors de la réaction sont très souvent des variables dépendantes. La réaction principale se produisant à la surface d’un film mince MOX est l'ionisation de l'oxygène adsorbé, créant ainsi une couche de déplétion au niveau des joints de grains [120]. Entre 100 et 500°C, l’interaction de l’oxygène avec la couche sensible entraîne son ionosorption sous forme atomique ou moléculaire, comme le décrit l’équation suivante :

est une molécule d’oxygène, e- est un électron, S est un site de chimisorption non- occupé, sont les espèces oxygénées chimisorbées, et α et β valent 1 ou 2 pour une forme

ionisée simple ou double et pour une forme atomique ou moléculaire respectivement.

Le mécanisme de détection de ces couches minces est basé sur la modulation des barrières de Schottky liée à la réaction avec un gaz, changeant ainsi la résistivité de ces couches [121]. Le modèle couramment employé pour schématiser ces couches constituées de nanoparticules est une chaîne de grains où la conduction est limitée par les barrières de tensions situées aux joints de grains [122].

La conductance peut s’exprimer par :

, (Équation 3)

où G est la conductance, g est une constante déterminée par la géométrie, q est la charge élémentaire, µs est la mobilité des électrons, Nd est la densité des donneurs et Vs est la barrière de potentiel.

Si l’on considère tous les joints de grains, alors les caractéristiques courant-tension (I/V) des couches MOX présentent un comportement non-linéaire, ce qui signifie que leur résistance dépend de l’alimentation [123]. En effet, tant que la mobilité des espèces adsorbées est inférieure à celle des porteurs de charge libres et/ou que le courant de désorption est relativement faible, une région à haute valeur ohmique est formée dans la structure du film mince. Pour des tensions d’alimentation plus élevées, la variation de résistance de cette structure est inférieure à celle à faibles tensions.

Figure 21. Caractéristique courant-tension d’une couche de SnO2 exposée à différentes concentrations de CO

[123]

L’effet de l’alimentation sur la variation de la résistance sensible diffère selon les caractéristiques de la couche : la nature de l’oxyde métallique, la méthode de dépôt, l’épaisseur du dépôt,… mais aussi selon le gaz en présence [124]. Par exemple, la réponse au monoxyde de carbone peut augmenter lorsque la tension d’alimentation augmente avec une couche SnO2 dopée CeO2 [125], ou alors un comportement plus complexe (passage par un

minimum de sensibilité) peut être observé avec une couche de HfO2 pour ce même gaz [126].

Figure 22. Réponse d’une couche de SnO2 dopée CeO2 (à gauche) [125] et de HfO2 (à droite) [126] au CO Ces exemples permettent de mieux comprendre les phénomènes mis en jeu lors de l’alimentation de la couche sensible et ainsi d’en conclure qu’il est impossible de définir un modèle généralisé prédictif de la sensibilité d’un capteur en fonction de l’alimentation. En

revanche, il apparaît clairement que l’alimentation a un effet sur l’amplitude de la réponse d’un capteur à un gaz donné et que faire varier ce paramètre peut accroître la sélectivité vis-à- vis d’un gaz.

Nous venons donc de voir, au cours de cette partie, que faire varier l’alimentation des résistances chauffantes et sensibles engendrait une variation de la sensibilité des capteurs aux gaz. Ces phénomènes sont dépendants de la nature du gaz pour ce qui est de l’alimentation de la résistance chauffante. Quant à l’alimentation de la couche sensible, ils dépendent de la nature et du type de matériau sensible, et de la nature du gaz.

Nous avons également constaté que l’utilisation de profils dynamiques de températures permettait d’obtenir rapidement une grande quantité d’informations sur la nature des gaz, et que cela offrait une possibilité de classification. Nous allons donc étudier, dans la troisième partie, les outils mathématiques qui permettent de réaliser cela.