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L’ajustement compensatoire peut être analysé soit sous l’optique de l’acte normal de gestion214 , soit au regard du principe de pleine concurrence

214 En vertu du principe de non immixtion dans la gestion, l’administration fiscale ne doit pas se substituer au contribuable qui est le seul juge de l’opportunité et des actes de gestion qui conviennent le mieux à son entreprise. Bien que l’administration fiscale ne soit pas habilitée à s’immiscer dans la gestion des entreprises (CE 7 juill. 1958, n° 37.977), le Conseil d’Etat lui reconnaît le droit d’apprécier si l’acte consistant à prendre en charge une dépense ou à renoncer à une recette procède ou non d’une gestion commerciale normale et d’en tirer les conséquences sur le plan fiscal. L’acte anormal de gestion constitue l’opération qui, se traduisant par une dépense ou une perte de recette, ce n’est pas justifiée par les intérêts de l’exploitation commerciale. C’est le cas par exemple de la cession à un associé d’une immobilisation à un prix inférieur à sa valeur (la jurisprudence a fixé depuis longtemps la règle selon laquelle, lorsqu’une société cède un bien à l’un de ses associés ou à son dirigeant, le prix de cession doit être calculé à partir de la valeur vénale et non à partir du prix de revient – CE 20 juin 1984, n° 35 964 : RJF 8-9/84, n° 982), ou d’un supplément de prix important payé au fournisseur, ou d’un abandon de créance pour des raisons étrangères à l’exploitation ou encore de prêts ou avances consentis sans intérêts ou assorties d’intérêts réduits. Pour que les les charges soeint déductibles elles doivent être engagées normalement dans l’intérêt de l’entreprise, sans qu’il y ait lieu de rechercher si les opérations étaient obligatoires (CE 3 juill. 1985, n° 45.543) ou conformes aux usages (CE 28 sept. 1993 1985, n° 34.426).Chaque filiale est autonome sur le plan juridique par rapport à sa maison-mère. Ainsi, la gestion normale ou anormale doit être appréciée au niveau de chacune des entreprises membres du groupe. En ce sens, un acte sera considéré comme «normal» s’il sert aux intérêts de la société, soit directement, soit indirectement, en favorisant l’activité d’une autre entreprise ayant des relations privilégiées avec elle. En ce qui concerne la nature de ces « relations privilégiées », le Conseil d’Etat estime qu’il s’agit essentiellement de relations entre sociétés mères et filiales, même si d’autres critères peuvent être pris en considération (DAVID, Cyrille, FOUQUET, Olivier, P^LAGNET, Bernard, RACINE, Pierre-Op.cit., 2003,p. 558). D’autre part, aux yeux du Conseil d’Etat il n’existe pas d’intérêt général du groupe qui transcenderait les intérêts particuliers des entreprises liées. Une société mère peut consentir des avances sans intérêt à une de ses

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filiales (CE 2 juin 1982, 23 342 , DF 1983.6.191, concl. Schricke : RJF 1982.7.328), sauf si cet abandon ne présente aucun intérêt pour cette société mère ( CE 26 nov. 1982, 24 360, DF 1983.22.1127, concl. Bissara). Ainsi, pour la filiale, l’acte sera anormal s’il est pratiqué dans le seul intérêt de la société mère (CE 26 juill. 1982, 19 645, DF 1983.10.378, concl. Rivière : RJF .1982.10.449 et 439). La distinction entre l’intérêt du groupe et l’intérêt propre d’une filiale est toujours prise en considération par la jurisprudence. La jurisprudence va donc apprécier l’intérêt de chacune des sociétés membres d’un groupe et le juge examinera si l’acte comporte, pour la société en cause, une contrepartie « réelle et suffisante ». D’une manière générale, la jurisprudence estime que les avances consentis par une société mère à sa filiale correspondent, en principe, à une gestion commerciale normale, sauf si la société a poursuivi des fins étrangères à son propre intérêt (par exemple, des avances à fonds perdus consenties par une société qui n’était pas juridiquement tenue d’apporter son aide n’ont pas «le caractère d’une libéralité ou d’un acte de gestion normale dès lors qu’en protégeant les intérêts de ceux qui avaient fait confiance à sa filiale, la société mère sauvegardait son propre renom bancaire…» (CE 20 nov. 1974, 85 191 : RJF 1975.1.22). La prise en charge du déficit d’une filiale étrangère n’est pas, nécessairement un acte anormal, si la participation au règlement du passif a eu pour l’objet, pour la société, le maintien de son

propre renom commercial (CE 1er juin 1983, 24 427 : RJF 1983.8-9.436). Mail il faut encore que cette prise charge ne soit pas systématique et ne dissimule pas un véritable transfert de bénéfices ver l’étranger (CE 27 nov. 1981 , Plén. 16 814 : RJF 1982.1.17 et 8, concl. Verny). Le versement de subventions à une filiale peut aussi entrer dans le cadre d’une gestion normale lorsque les sociétés sont, en outre, liées par d’étroites relations commerciales (CE 9 oct. 1981, 15 553, DF 1982.4.108, concl. Verny). Par ailleurs, le Conseil d’Etat admet que les relations commerciales entre sociétés mères et filiales puissent être plus « souples » que les transactions entre sociétés complètement indépendantes, et ainsi, que dans ses relations commerciales avec la filiale, une société mère puisse ne réaliser aucun bénéfice, mais elle ne doit aucune perte (CE 24 févr. 1978, 2 372, DF 1978.30.1212, concl. Rivière, RJF 1978.4.122). Par ailleurs, la facturation à un prix inférieur au prix de revient n’est pas un critère suffisant d’une gestion anormale. Il faut, par exemple, que l’administration fiscale établisse que les prix consentis à l’intérieur du groupe étaient sans commune mesure avec ceux de la concurrence (CE 26 juin 1996, 80 178, SARL

« Rougier-Hornitex » : RJF 1996.8-9.560, BCF 1996, 15, concl. Loloum). Toutefois, pour les cessions

d’éléments d’actif (par exemple, des titres) la jurisprudence est plus sévère. En fait, dans ce cas, le prix de cession ne peut pas être o prix de revient mais la valeur vénale réelle (CE 21 nov. 1980, 17 055, DF 1981.7.279 , concl. Rivière , RJF 1981.1.15, chr. Sauvé, RJF 1981.1.2.55 ; CE 26 juill. 1982 , 2 533 et 19 645, DF 1982.10.378, concl. Rivière, RJF 1982.10.449, chr. Racine, p. 439). Le fondement de cette jurisprudence a été exposé par Racine, dans la chr. Précité : « cette dissymétrie s’explique par l’idée que

si la vente d’une marchandise au prix de revient constitue une opération neutre, en revanche, la cession au prix de revient d’un élément d’actif lorsque la valeur vénale est supérieure constitue un appauvrissement de l’entreprise cédante, dans sa substance même ». Si versements ont été faits dans

l’intérêt de cette filiale, cette dernière pourra déduire des sommes versées à sa société mère (CE 20 avr. 1984, 37 098 et 37 099, DF 1984.46.2039, concl. Racine). Tout cela vaut uniquement en ce qui concerne les relations entre sociétés mères et filiales. S’il s’agit de sociétés juridiquement étrangères, le Conseil d’Etat applique avec rigueur les principes de droit commun (CE 7 févr. 1979, 8 475, RJF 1979.3.82). De même lorsqu’il s’agit de sociétés sœurs, c’est-à-dire de sociétés ayant une société mère commune, sans avoir entre elles des relations juridiques, c’est le droit commun qui sera appliquée (CE 4 mars 1985, 41 396, RJF 1985.5.364). Le Conseil d’Etat tient compte aussi d’autres éléments que les liens sociétés mères filiales, ceux-ci considérés toutefois comme secondaires, pour justifier le caractère normal ou anormal d’un acte. Par exemple, si l’entreprise justifie d’un intérêt économiques, la jurisprudence reconnaît le caractère normal d’un acte (CE 3 déc. 1975, 89 412, DF 1976.13-14.467, concl. Fabre). Aussi, des avantages consentis aux entreprises indépendantes constituent, en principe, des actes anormaux, sauf s’il apparaît que la société a poursuivit son propre intérêt en accordant cet avantage, par exemple, une société qui fournit gratuitement sa caution au profit d’une entreprise indépendante, ou l’octroi de prêts sans intérêts, l’abandon de créances consentis par une société au profit d’une entreprise indépendante, constituent, règle générale, un acte anormal de gestion, sauf s’il apparaît qu’en consentent de tels avantages la société a agit dans son propre intérêt lorsque ces avantages sont regardés comme la conséquence d’engagements constituant la contrepartie des avantages que la société retire elle-même directement de son adhésion à une association ou à un groupement et du respect des conditions auxquelles l’appartenance à ce groupement est subordonnée (CE 26 sep. 2001, 219 825, SA Rocadis, RJF 2001.12.1008 ; BDCF 2001.12.7). Le Conseil d’Etat peut aussi combiner les différents critères ci-dessous pour apprécier, au cas par cas, en fonction des circonstances de fait, si l’acte peut être considéré, ou non, comme étant un acte normal de gestion. Au cas où l’acte serait qualifié comme un acte de gestion anormale, les dépenses considérées comme anormales seront réintégrés dans les bénéfices imposables de la société et pourront être considérées comme des revenus distribués aux bénéficiaires. En ce qui

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concerne une avance ou un prêt sans intérêt, ou à un taux d’intérêt très bas, lorsqu’ils sont considérés comme anormaux, l’auteur de l’avance ou du prêt est imposé sur le «manque à gagner». En comparant le montant du taux pratiqué à l’égard de l’autre associé à la rémunération que le prêteur pourrait obtenir d’un établissement financier ou d’un organisme assimilé auprès duquel il placerait, dans des conditions analogues, les sommes d’un montant équivalent, la jurisprudence apprécie le montant « normal » du taux (CE 7 oct. 1988, 50 256, RJF 1988.12.736, concl. Mme de Saint-Pulgent, p. 720). Si la société a emprunté pour consentir l’avance, la réintégration portera, en principe, sur les intérêts qu’elle a elle-même versés (CE 25 nov. 1966, 63 522 et 63 523, DF 1966.52.1217). Si le bénéficiaire de l’avance est un particulier, la non stipulation d’un intérêt constitue, en principe, un avantage imposable au titre de revenus distribués (CE 29 avr. 1985, 39 729, RJF 1985.6.469). Si le bénéficiaire de l’avance est une entreprise aucune réintégration n’est pratiquée (CE 25 juill. 1980, 15 073, DF 1981.42.1851, concl. Lobry). Finalement, en ce qui concerne les abandons de créances entre une société mère et filiale, la jurisprudence fait une distinction entre l’abandon de créance motivé par des considérations commerciales et l’abandon de créance que ne revêt pas de caractère commercial. L’abandon est considéré comme commercial lorsqu’il intervient dans le cadre des relations commerciales marquées et prédominantes de client à fournisseur (ou à prestataire de services) qui peuvent exister entre des sociétés appartenant au même groupe (CE 22 juin 1984, 38 108 et 37 108 et 37 368, DF 1985.8.383, concl. Racine, RJF 1985.2.116). Pour la première hypothèse, l’abandon constitue une charge fiscalement déductible pour la société mère, mais à condition qu’il s’agit d’un acte normal de gestion (CE 27 nov. 1981, 16 814, RJF

1982.1.17 et 8, concl. Verny). Toutefois, si l’abandon de créance est un élément du prix d’acquisition

d’actions de la société bénéficiaire de cet abandon il ne sera pas déductible, car il est un élément du prix de revient des actions acquises et non une perte (CE 15 oct. 1982, 26 585, DF 1983.15.754, concl. Rivière). En fait, le Conseil d’Etat apprécie si l’abandon de créance est ou non un élément du prix de revient des titres acquis en se référant au « juste prix » de ces titres. Si la société a acquis des titres à leur « juste prix », les abandons de créance consentis avant l’achat ne doivent pas être ajoutés au prix (CE 23 oct. 1991, 71 792-72 822 ; Electrolux SA, RJF 1991.12.870, concl. Fouquet, p. 852). D’autre part, si l’abandon de créance ne revêt pas un caractère commercial, l’abandon est considéré « financier » (CE 17 déc. 1984, 52 341, Rev.sociétés 1985.1.145, concl. Fouquet), et dans ce cas l’abandon sera regardé comme un acte normal de gestion si la valeur de l’actif net de la filiale est accrue, puisqu’une dette est supprimé au passif, et corrélativement, la valeur mathématique des parts de cette filiale s’accroît. En effet, la valeur de l’actif de la société mère qui a consenti l’abandon est augmentée puisque le parts qu’elle possède dans le capital de sa filiale figurent à l’actif de son bilan. Ainsi, à concurrence de sa part dans le capital de la filiale, l’abandon présente une contrepartie pour la société mère, à savoir l’accroissement de son actif. Toutefois, si l’actif est négatif, la société mère pourra constituer une provision pour dépréciation des titres rarement à zéro la valeur de ceux-ci ; si l’actif demeure négatif après l’abandon de créance, la valeur réelle des titres est toujours de zéro et par conséquent, l’abandon de la créance ne présente aucune contrepartie pour la société mère et constitue donc, pour elle, une perte déductible. Ainsi, l’augmentation de la valeur de titres de la filiale n’intervient que si l’actif de celle-ci est positif. Lorsque l’administration fiscale invoque le caractère anormal d’un acte de gestion à l’appui d’un redressement, elle doit apporter la preuve que cet acte n’a pas été accompli dans l’intérêt de l’entreprise. Toutefois, dans le cas où, du fait de cette procédure, l’entreprise apporte la charge de la preuve, elle doit démontrer l’intérêt que revêt pour elle l’opération contestée. Pour délimiter le droit de l’administration fiscale de procéder à la rectification des déclarations et aussi pour délimiter de droit des entreprises de demander, lorsqu’ils y ont intérêt, à revenir sur les énonciations de leurs déclarations, la jurisprudence fait la distinction entre « erreurs » et «décisions de gestion ». Les erreurs sont classées en « erreurs de fait » et « erreurs de droit ». (CE 4 nov. 1970, 75 564, Bulletin bleu F. Lefebvre, 1972.3.215, concl. Delmas-Marsalet). L’erreur de fait « porte

sur l’existence, la nature, la consistance en la valeur des éléments de patrimoine ou des opérations que la comptabilité a pour tâche » (CE 4 nov. 1970, 75 564, Bulletin bleu F. Lefebvre, 1972.3.215, concl.

Delmas-Marsalet), par exemple, omission involontaire (l’omission volontaire ne constitue pas une simple erreur comptable et est donc opposable au contribuable) d’éléments dans la comptabilité (CE 9 nov. 1960, 45 752, BCD 1960.521) ; une erreur à propos du titulaire d’une créance (CE 11 janv. 1985, 37 020, RJF 1985.3.218). L’erreur de droit porte « sur le mode d’enregistrement comptable d’opérations dont la

nature n’est pas contestée, lorsque la loi fiscale impose aux contribuables, pour ces opérations, une imputation comptable déterminée » (CE 4 nov. 1970, 75 564, Bulletin bleu F. Lefebvre, 1972.3.215,

concl. Delmas-Marsalet) . Si la solution retenue par l’entreprise n’est pas conforme à la loi, elle s’analyse en une erreur passible de redressement, par exemple, le rattachement erroné de créances à un exercice déterminé (TA Paris, 9 juill. 1974, 1934-2293/71, RJF 1975.3.100). D’autre part, la loi fiscale peut ouvrir au cintribuable une faculté de choix entre plusieurs solutions, la choix que le contribuable retient dans sa déclaration procède alors d’une « décision de gestion » qui ne peut être rectifiée ni à son initiative, ni à celle de l’Administration fiscale (CE 11 févr. 1994, n° 117302, RJF 4/94 n° 388). La jurisprudence

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Si la situation est analysée sous l’angle de l’acte anormal de gestion

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