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Agriculture (gypse, struvite, CaCO 3 )

5. VALORISATION DES SELS

5.2. V OIES DE VALORISATION DES SELS

5.2.6. Agriculture (gypse, struvite, CaCO 3 )

5.2.6.1. Gypse

Les gypses synthétiques peuvent être valorisés, selon leur qualité, en amendement ou en engrais.

Amendement

Le gypse a plusieurs rôles dans le sol [15] :

- Amélioration de la structure des sols argileux en permettant aux argiles de former un réseau de micropores à son contact,

- Echange d’ions pour désaliniser les sols sodiques,

- Correction du pH des sols acides  Le pouvoir neutralisant du calcium est possible après dissolution du SO42- qui est absorbé par les végétaux,

- Amélioration du drainage dans le sol, - Rétention des métaux lourds (sulfogypse).

Dans le cas où des boues à base de gypse issues du traitement d’effluents sont épandues sur les sols agricoles, l’arrêté du 8 janvier 1998 s’applique. Cet arrêté mentionne les valeurs limites que les boues doivent respecter dans le cadre d’un épandage. Les éléments-traces métalliques (ETM) et les composés-traces organiques (CTO) sont en particulier contrôlés (Tableau 41).

Tableau 41 : Valeurs limites autorisées dans les boues pour les paramètres ETM et CTO selon l'arrêté du 8/01/1998.

Eléments

Valeurs limites en mg/kg de Matière

Sèche (MS)

ETM

Cd 10

Cr 1 000

Cu 1 000

Hg 10

Ni 200

Pb 800

Zn 3 000

Cr + Cu + Ni + Zn 4 000

CTO

Total des 7 principaux PCB 0,8

Fluoranthène (HAP) 5

Benzo-fluoranthène (HAP) 2,5

Benzopyrène (HAP) 2

De plus, l’arrêté du 8 janvier 1998 fixe des critères d’innocuité du point de vue microbiologique, ainsi que des critères de qualité agronomique : MS, Matière organique, pH, azote total, azote ammoniacal, rapport C/N, phosphore total (en P2O5), potassium total (en K2O), calcium total (en CaO), magnésium total (en MgO), oligo-éléments (B, Co, Cu, Fe, Mn, Mo, Zn), etc.

Selon le Code de l’Environnement, un plan d’épandage doit être réalisé. Ce plan est composé:

- d’une étude préalable  caractéristiques des boues, du sol et les modalités techniques,

- d’une synthèse des activités d’épandage  parcelles, caractéristiques des boues, du sol, etc,

- d’un programme prévisionnel annuel  Description des parcelles réceptrices (caractéristiques et cultures),

- d’un bilan annuel de programme d’épandage  Suivi de la qualité des épandages (caractéristiques, origine, provenance) [223].

Le gypse peut potentiellement être valorisé comme amendement sous réserve qu’il respecte les réglementations précitées et que des sols agricoles, géographiquement proches du lieu de production, puissent accepter ces boues.

Engrais

Le gypse peut servir d’engrais soufré mais cette voie de valorisation est très peu utilisée car le soufre des engrais sur le marché est plus facile d’utilisation. C’est également un réactif pour fabriquer du sulfate d’ammonium [15].

5.2.6.2. Carbonate de calcium

Les techniques de décarbonatation de l’eau potable permettant la valorisation de carbonate de calcium en tant que matériau de construction sont présentées au §5.2.3.2 (Gyrazur et Actina).

Le carbonate de calcium peut aussi être valorisé, selon sa qualité, en tant qu’amendement calcique pour l’agriculture.

Lors de la décarbonatation en décanteur à recirculation de boue, le calcaire est précipité sous forme de carbonate de calcium à l’aide de chaux ou de soude. Après décantation, l’eau est récupérée en surface et filtrée. Une partie des boues est recirculée et l’autre est déshydratée. Ces boues de carbonate de calcium peuvent être utilisées en tant qu’amendement calcique ou compostées en mélange avec des boues de station d’épuration [215].

Dans le cas où ces boues sont épandues, elles sont soumises aux prescriptions liées à l’épandage selon l’arrêté du 8 janvier 1998 et le Code de l’Environnement résumées dans le §5.2.6.1.

5.2.6.3. Struvite

La struvite (MgNH4PO4) est un minéral riche en phosphore ce qui lui confère une valeur agricole. C’est en effet un engrais stable dont le pouvoir fertilisant est équivalent aux engrais TSP (superphosphate triple) et SSP (superphosphate simple), du commerce, et supérieur aux phosphates naturels [224].

Les caractéristiques chimiques de la struvite sont présentées dans le Tableau 42 : Tableau 42 : Caractéristiques chimiques principales de la struvite [224]

N P2O5 K2O MgO Eau libre MO

5 % 25 % 0 % 17 % 10 % 10 %

Deux procédés de précipitation de la struvite (réaction Figure 55) sont commercialisés par Veolia et Naskeo environnement. Ces procédés permettent de déphosphater un effluent tout en récupérant un sel valorisable en agriculture.

PO43- + NH4+ + Mg2+ + 6H2O MgPO4NH4,6H2O Struvite

Figure 55 : Réaction de précipitation de la struvite STRUVIA™ (Veolia)

Le procédé STRUVIA™ de Veolia est basé sur le principe de précipitation du phosphore sous forme de struvite. Les effluents phosphorés sont introduits dans un Turbomix (breveté par Veolia Water Technologies) où la struvite précipite grâce à l’augmentation du pH et à l’injection de sel de magnésium (MgCl2). Le mélange est ensuite dirigé vers un décanteur lamellaire pour séparer la struvite. Celle-ci est égouttée et stockée avant son conditionnement et les effluents sont traités sur place ou en station d’épuration [225].

Cette technologie peut être installée dans les stations d’épuration municipales, des industries agroalimentaires ou de l’agrochimie ou encore dans des usines de méthanisation.

En 2013, une unité prototype a été installée sur la station d’épuration de Bruxelles Nord dans le cadre du projet européen P-rex. Ce projet a pour objectif d’évaluer les performances de différents procédés de récupération du phosphore dans les eaux usées. Le but final est de pouvoir diminuer les quantités de phosphore dans les rejets et d’obtenir des produits valorisables [226]. Les rendements d’élimination du phosphore pour le procédé STRUVIA™ étaient supérieurs à 85%. Au Japon, les distilleries de Hakusyu et de Kyoto utilisent ce procédé dans leurs stations de traitement d’eaux usées [227].

Naskeo [224]

Le procédé développé par Naskeo environnement est principalement destiné aux stations d’épurations pour diminuer la quantité de phosphore rejeté dans le milieu récepteur et réduire les consommations de matières (réactif) et d’énergie.

Le développement de ce procédé a débuté en 2007 en laboratoire puis un pilote à l’échelle industrielle a été mis en place à la station d’épuration de Castres en 2014. Cette station de 130 000 équivalent habitants était dans l’obligation d’améliorer ses performances de traitement du phosphore, la limite de rejet passant de 2 mg/L à 1 mg/L en 2017. Le procédé de déphosphatation biologique ne permettait pas d’atteindre cette nouvelle limite de rejet.

Le procédé Naskeo (Figure 56 et Tableau 43) fonctionne en continu sur les jus de déshydratation issus des filtres à bandes. De l’oxyde de magnésium, sous-produit de l’industrie du magnésium, est mélangé à l’effluent. L’augmentation du pH et la réaction entre le magnésium et les phosphates provoque leur précipitation. En sortie du réacteur, 85 à 90% du phosphore est abattu, produisant 35 tonnes de struvite par an.

Tableau 43 : Capacité de traitement nominale

Ce procédé est encore à l’état d’innovation avec une seule référence de taille industrielle en France. Il est limité dans son développement par l’absence de normes européennes et françaises sur la valorisation de la struvite produite. Ce sel est actuellement stocké par la station d’épuration.

A terme, la struvite pourrait être valorisée en engrais. Des tests ont montré que les teneurs en éléments chimiques sont constantes au cours du temps ce qui démontre la stabilité du produit. De plus, elle apporte le phosphate nécessaire à la croissance des plantes et son évaluation écotoxicologique ne montre pas d’effets négatifs sur les milieux terrestre et aquatique.

Figure 56 : Schéma du procédé de Naskeo de la Station de Castres