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Agriculture et exploitation agricole : définitions et enjeux

2. L’agriculture, de sa modernisation au XX e siècle aux défis du XXI e siècle

2.1. Agriculture et exploitation agricole : définitions et enjeux

Dans le langage commun, l’agriculture est l’ensemble des travaux transformant le milieu naturel pour la production des végétaux et des animaux utiles à l’homme (Le Petit Robert). C’est donc une activité humaine appliquée à des objets biologiques et dont le but est la fourniture de biens et services à l’humanité, essentiellement la fourniture de nourriture et de fibres.

Milhau et Montagne (1964), dans leur manuel, ont développé la définition suivante : "Toutes les activités agricoles se trouvent marquées par cette vocation fondamentale : obtenus à partir de la terre, les produits agricoles sont des produits vivants (ou issus du vivant) qui fourniront la nourriture indispensables aux hommes… Comme toute activité économique, l’activité agricole a pour but la satisfaction des besoins humains. Mais les besoins qu’elle tend à satisfaire sont essentiels, aussi bien par leur importance que par leur permanence (…) pour satisfaire ces besoins importants, anciens et permanents, l’activité agricole va mettre en oeuvre des moyens impliquant l’intervention des facteurs naturels et les phénomènes biologiques (…) La production agricole met en œuvre des phénomènes complexes, parfois mal connus, elle est dominée par son caractère aléatoire. En outre, le producteur agricole doit tenir compte de l’équilibre des espèces vivantes". Ils mettent ensuite l’accent sur la diversité constitutive de l’agriculture, dans ses adaptations aux conditions de milieux et de climat, mais aussi d’organisation sociale.

Le Code civil retient quand à lui une perspective analogue quand il définit l’agriculture par la maîtrise et l’exploitation d’un cycle biologique : "Sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l’exploitation d’un cycle biologique de caractère végétal ou animal (…)", L 311-1 Code rural.

Longtemps, la dépendance de l’agriculture à l’égard de la Nature (comprenant à la fois les éléments biotiques et abiotiques tel le climat) a été considérée comme une caractéristique intrinsèque de cette activité, conditionnant ses caractéristiques économiques (Servolin, 1985). Il y a eu de nombreux débats pour savoir dans quelle mesure l’intégration de l’agriculture dans un système agro-industriel et alimentaire pouvait conduire à relativiser l’importance des processus naturels et de la diversité biologique.

19 Des travaux approfondis sont actuellement menés par un groupe d’agro-historiens, à la demande de l’INRA, sur cette

L. Malassis, dans un ouvrage de synthèse sur l’histoire sociale de l’alimentation et de l’agriculture, Les

trois âges de l’alimentaire, a développé la thèse selon laquelle il fallait plutôt se centrer sur le

"système agro-alimentaire". "Certes, l’agriculture demeurera fondée sur des processus biologiques de production, mais l’industrie, dans le contexte du développement global, modifiera radicalement les conditions de l’activité agricole et alimentaire… L’âge alimentaire nouveau sera agro-industriel, c’est- à-dire que l’industrie jouera un rôle croissant dans la production agricole et alimentaire, et que la chaîne alimentaire elle-même sera industrialisée" (Malassis, 1997).

La définition de l’exploitation agricole "professionnelle" est, en France, sous-tendue par un choix de politique agricole qui consiste à favoriser l’exploitation familiale et à limiter le développement des deux formes opposées, industrielle d’un côté et à temps partiel de l’autre ; tel était l’objectif affiché de la Loi de modernisation agricole de 1962, base de la politique dite de sélectivité. Un tel choix a des implications sur la structure et la dynamique des paysages ruraux, et sur la relation agriculture- biodiversité à l’échelle des paysages.

Au départ, il y a la définition générale de l’exploitation agricole, donnée par la FAO, et qui sert de base aux recensements agricoles (Encadré 2-1). Viennent ensuite des critères secondaires qui peuvent plus ou moins restreindre le champ, soit à travers une liste des activités relevant de l’agriculture, comme dans le droit du travail américain, soit à travers une quantité de travail minimale définissant les exploitations agricoles "professionnelles". Ce critère quantitatif est souvent relié à un enjeu sur le statut social des agriculteurs. Il définit par là même qui sont les bénéficiaires des aides agricoles, ce qui constitue un enjeu non négligeable dans le contexte des soutiens directs à l’agriculture.

La réponse apportée par les différents pays à cette question peut avoir des conséquences importantes pour la nature des rapports entre l’agriculture, les paysages et la biodiversité. Ainsi, les pays qui ont intégré les agriculteurs dans la régime général de protection sociale, en associant le régime de protection à la personne et non à son activité, ont permis le développement de la pluri-activité et une intégration différente de l’agriculture dans les territoires ruraux (cf. notamment la situation de

l’agriculture autrichienne). La France a retenu une option différente, insistant au contraire sur l’autonomie du régime de protection sociale des agriculteurs, et l’attribution de son bénéfice aux seuls agriculteurs reconnus par la profession agricole elle-même comme "professionnels".

Encadré 2-2. L’agro-écosystème

Selon Conway (1987) "agroecosystems are ecological systems modified by human beings to produce food, fibre or other agricultural products. Like the ecological systems they replace, agroecosystems are often structurally and dynamically complex, but their complexity arise primarily from the interaction between socio-economic and ecological processes". Conway propose de caractériser le fonctionnement des agroecosystèmes par quatre propriétés : productivité, stabilité, soutenabilité, et caractère équitable.

Wood, Sebastian et Scherr, dans le cadre de l’Analyse Pilote des Ecosystèmes Globaux (PAGE), définissent les agrosystèmes comme "a biological and natural resource system managed by humans for the primary purpose of producing food as well as other socially valuable non food goods and environmental services" (Wood et al., 2001).

Pour l’OCDE, "An agro-ecosystem is an ecosystem under agricultural management, connected to other ecosystems" (OCDE, 2001, glossary, pp. 389-391).