• Aucun résultat trouvé

Les agents de contraste ParaCEST

Dans le document en fr (Page 45-51)

Chapitre 1 : Introduction

1.3 Les agents de contraste pour l’IRM

1.3.2 Les agents de contraste ParaCEST

Une nouvelle catégorie d’agents de contraste IRM apparait dans les années 2000 : les agents CEST ou paraCEST. Contrairement aux agents de contraste à base de gadolinium ou de manganèse, ce n’est pas la modification du temps de relaxation des protons de l’eau qui va entrainer l’apparition d’un contraste, mais les effets de l’application d’une impulsion de pré- saturation sur un système avec des protons en échange chimique.

45

Figure 1.10 : Représentation schématique des agents PARACEST impliquant un échange chimique entre un proton du complexe et un proton de la molécule d’eau

CEST est l’acronyme de l’anglais Chemical Exchange Saturation Transfer (Transfert de Saturation par Echange Chimique). L’échange chimique correspond dans ce cas à l’échange entre un proton labile de l’agent de contraste et les protons des molécules d’eau du solvant. Il est donc nécessaire que l’agent de contraste possède des fonctions chimiques avec des protons labiles telles que les fonctions –NH, -OH, -SH, ou encore H2O présent dans la première sphère de coordination du métal (figure 1.10). Pour que l’effet CEST puisse être observé, il faut que l’échange chimique entre les deux environnements magnétiques distincts ne soit pas trop rapide. En effet, la constante de vitesse d’échange des protons (kex) doit être inférieure à la différence des déplacements chimiques des deux systèmes (équation 1.16).

∆𝜔 ≥ 𝑘

𝑒𝑥 (1.16)

Pour un système remplissant ces conditions, le mécanisme du transfert de saturation par échange chimique est représenté en figure 1.11, où les deux environnements en échange chimique sont notés A et B. En RMN ou IRM, l’intensité du signal est proportionnelle à la magnétisation suivant l’axe z, donc l’application d’une impulsion de pré-saturation va avoir pour effet de réduire l’intensité du signal voir même de le faire disparaitre si la saturation est totale.

k

ex Ln3+ H H H H

46

L’application d’une impulsion de pré-saturation sur le système B va modifier la distribution de spin de ce système. Dans le cas où la relaxation des protons du système B est plus rapide que l’échange chimique avec le système A, les spins excités par la pré-saturation vont retourner à leur état d’équilibre décrit par la distribution de Boltzmann et il n’y aura pas d’effet visible sur le signal RMN des spins de A. En revanche si l’échange chimique entre les systèmes A et B est plus rapide que la relaxation du système B, les densités de spins vont se rééquilibrer entre les états excités et d’équilibres des deux systèmes, provoquant une altération de la distribution de spin du système A et, une réduction de sa magnétisation. De ce fait, la pré-saturation va entrainer la diminution de l’intensité du signal du système B mais aussi celle du système A provoquée par le transfert de saturation [60].

Figure 1.11 : Représentation schématique de l’expérience CEST [60]

L’effet CEST peut être décrit par l’équation 1.17 [61] :

%𝐶𝐸𝑆𝑇 =

𝑀𝑆 𝑀0

=

1 1+𝑘𝑒𝑥 𝑥𝐶𝐴 𝑇1

+ [

𝑘𝑒𝑥 𝑥𝐶𝐴 𝑇1 1+𝑘𝑒𝑥 𝑥𝐶𝐴 𝑇1

] 𝑒𝑥𝑝 [−

1+𝑘𝑒𝑥 𝑥𝐶𝐴 𝑇1 𝑇1

× 𝑡

𝑠𝑎𝑡

]

(1.17)

47

MS et M0 représentent l’intensité du signal de l’eau pendant et avant la saturation appliquée à une fréquence donnée, kex correspond à la constante de vitesse d’échange des protons des deux systèmes, T1 est le temps de relaxation longitudinale, tsat correspond au temps de saturation et

xCA est le rapport entre la concentration en proton labile de l’agent de contraste et la concentration en proton labile du solvant.

Les premiers exemples d’agents de contraste CEST exogènes de la littérature sont présentés par Balaban et ses collaborateurs en 2000. L’effet CEST de nombreuses petites molécules diamagnétiques telles que des sucres, des acides aminés ou encore des dérivés de l’acide barbiturique est mis en évidence [62,63]. Cette étude a démontré que les protons liés aux azotes des fonctions amine ou amide et des groupes guanidinium sont très efficaces pour diminuer l’intensité du signal de l’eau dans le cadre d’un transfert de saturation. Ces molécules diamagnétiques possèdent des effets CEST à des déplacements chimiques faibles, très proches du signal de l’eau (allant de 1à 6.3ppm) et présentent une dépendance en fonction du pH et de la température. Par exemple, l’acide barbiturique montre un effet CEST à 5ppm pour des concentrations allant de 15 à 125 mM (figure 1.12).

Figure 1.12 : Spectre CEST de l’acide barbiturique [62]

Eau

CH

2

NH

HN HN O O O acide barbiturique Fréquence de saturation (ppm)

48

D’autres petites molécules diamagnétiques ont montré leur intérêt comme agent de contraste CEST, comme l’Ipoamidol, (utilisé comme produit de contraste pour l’imagerie par rayons X), dont les groupements hydroxyle permettent la création d’une image CEST [64].

L’effet CEST peut également être obtenu à partir de petites molécules endogènes telle que le glycogène, on parle alors de glycoCEST. Le glycogène qui est le produit de la métabolisation du glucose, possède deux effets CEST (à 0.7 et 1.2ppm) provenant des groupements hydroxyle de la molécule [65].

Le point commun de ces molécules diamagnétiques qu’elles soient endogènes ou exogènes est qu’elles possèdent des effets CEST proches du signal de l’eau à des déplacements chimiques Δω ≤ 5ppm.

Ce faible déplacement chimique est un des facteurs limitant pour l’observation de l’effet CEST. Plus Δω sera grand, plus les échanges rapides seront permis, de ce fait, l’efficacité de l’effet CEST peut être augmentée par la maximisation de Δω. Comme nous l’avons détaillé dans le paragraphe 1.2.2, les lanthanides paramagnétiques possèdent la propriété d’induire une augmentation des déplacements chimiques des noyaux environnants (LIS).

Ainsi, des complexes d’ions Ln3+ paramagnétiques peuvent être employés pour augmenter considérablement le déplacement chimique des protons dans leurs complexes et favoriser ainsi l’effet CEST, on parle alors d’agent paraCEST.

Les premiers exemples d’agent de contraste paraCEST sont présentés par D. Sherry et ses collaborateurs (EuDOTAM) [66] et par l’équipe de S. Aime (EuDOTAMGly) [67].

Il s’agit des complexes d’europium(III) comme EuDOTAMGly pour lesquels la molécule d’eau coordinée au centre métallique donne un effet CEST très éloigné du signal de l’eau. Le déplacement chimique des protons échangeables est ici 10 fois supérieur au proton labile –NH de l’acide barbiturique (figure 1.13). La variation du lanthanide des complexes DOTAMGly permet d’obtenir des effets CEST allant de -720 ppm pour le Dy3+ à +500pmm pour le Tm3+

49

Figure 1.13: Superposition à la même échelle des spectres CEST de l’acide barbiturique (bleu) et de EuDOTAMGly (rouge) [69]

En ce qui concerne les agents paraCEST, l’effet CEST peut être dû aux protons de la molécule d’eau qui est directement coordinée au centre métallique de l’agent de contraste, mais également aux protons labiles présents sur le ligand.

Outre le fait que l’effet CEST soit dépendant de la température et du pH, ce qui promulgue un intérêt conséquent pour imager le milieu biologique, un principal avantage de l’imagerie CEST face à l’imagerie T1 est qu’elle soit activable à la volonté de l’opérateur. En effet, ces agents de contraste peuvent être « allumés » et « éteints » à volonté en appliquant et stoppant l’impulsion de pré-saturation ou simplement en changeant la fréquence de celle-ci. De ce fait, un composé comportant plusieurs sites d’échange pourra donner des propriétés CEST différentes en fonction de la fréquence de saturation appliquée.

De plus, de part la similitude au niveau des propriétés chimiques le long de la famille des lanthanides, les complexes formés à partir du même ligand mais de différents lanthanides peuvent permettre, du fait du déplacement chimique induit par l’ion lanthanide, de moduler la fréquence d’activation de l’effet CEST. Ainsi plusieurs agents paraCEST peuvent être administrés simultanément et chacun d’entre eux peut être activé séparément par l’application de la fréquence de saturation appropriée [70-73].

50

1.4 Imagerie moléculaire et agents de contraste

Dans le document en fr (Page 45-51)

Documents relatifs