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Adaptation de l’essai à pH constant et de la méthodologie de découplage des phénomènes

l’eau minérale : développement d’outils d’analyse

2 Adaptation de l’essai à pH constant et de la méthodologie de découplage des phénomènes

De manière à mieux comprendre la lixiviation de mortiers par de l’eau minéralisée, un modèle simple, consistant à découpler les différents phénomènes élémentaires microscopiques mis en jeu pendant la lixiviation, est développé et décrit dans ce chapitre. La stratégie de découplage proposée est adaptée des travaux de thèse de Massaad (Massaad et al., 2016).

Le chapitre précédent a fait état de travaux préliminaires de modélisation numérique de la lixiviation d’un mortier par de l’eau minérale, qui a servi à formuler des hypothèses pour ce qui suit. Le profil des proportions volumiques des minéraux présents dans la matrice cimentaire d’un mortier immergé dans l’eau minérale testée numériquement permet plusieurs constats, et notamment celui de la formation d’ettringite en surface, en plus de la calcite. On retient aussi que la porosité initiale est ouverte et le reste au cours de la dégradation.

L’attaque chimique est le résultat de plusieurs phénomènes élémentaires à l’échelle microscopique attribué à la dissolution des phases de la pâte de ciment, au détachement des particules solides, ainsi qu’à la précipitation des minéraux (Figure 62). Il faut noter que deux types de particules distinctes sont susceptibles de se détacher du matériau lors de l’attaque : les grains de sable, et les éventuels amas de minéraux non dissous. Ces derniers sont considérés dans ce qui suit de deux manières. Les minéraux calciques, qui

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109 seront dissous par la suite dans le bécher rempli d’eau minéralisée, seront donc pris en compte via l’augmentation de la concentration en ions calcium dans l’eau. Les minéraux qui ne feront pas augmenter le taux de calcium dans l’eau seront pris en compte ici dans le décrochement des granulats.

Dans la méthodologie, il est considéré que les minéraux dissous et les granulats décrochés sont remplacés par de l’eau libre, tandis que la précipitation qui se produit occupe, a contrario, les volumes occupés par l’eau libre, donc occupe la porosité initiale et celle nouvellement engendrée par la dissolution des minéraux et le détachement des granulats.

Figure 62. Schéma de définition des phénomènes élémentaires (d'après Massaad et al., 2016). Les variations de masse dans l’air et dans l’eau peuvent être écrites suivant les variations de volume élémentaires :

Eq. 37 ( ) ( ) ( ) Eq. 38 avec ΔVdiss la variation de volume due à la dissolution des minéraux, ΔVprec la variation de volume due à la précipitation des minéraux, ΔVgra la variation de volume due au décrochement des granulats, ΔVporo la variation de volume correspondant à l’eau libre, ρdiss la masse volumique des minéraux dissous, ρprec la masse volumique des minéraux précipités, la masse volumique des granulats et ρeau la masse volumique de l’eau. La variation de la quantité d’ions calcium en solution est décrite via :

Eq. 39 avec la quantité de portlandite dissoute en mole, la quantité de monosulfoaluminates dissous en mole, la quantité de C-S-H de molarité 1.6 dissous en mole, la quantité de carbonate de calcium en mole et la quantité d’ettringite en mole. Les différents minéraux, en dissolvant ou précipitant la

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110 quantité d’une mole, n’échangent pas le même nombre de moles de calcium. Ainsi, lors de la dissolution d’une mole de monosulfoaluminates, quatre moles de calcium sont relarguées dans la solution. Lorsqu’une mole d’ettringite précipite, six moles d’ions calcium sont consommées. La portlandite et le carbonate de calcium ont une stœchiométrie différente : une mole dissoute ou précipitée libère ou consomme une mole d’ions calcium. Expérimentalement, la variation de dureté calcique était accessible, donc les ions calcium. La variation d’ions calcium dans la solution peut être décrite à l’aide des minéraux dissous et précipités, en jeu lors de la lixiviation. Il s’agit, principalement, de la dissolution de la portlandite, des monosulfoaluminates et des C-S-H, ainsi que de la précipitation de carbonate de calcium (Planel et al., 2006) (Kamali et al., 2008). Dans le chapitre précédent, la formation en surface d’ettringite a été évoquée. Il convient de le prendre en compte dans le modèle, et notamment dans l’expression de la masse volumique apparente des minéraux précipités. Ainsi, la masse volumique apparente des minéraux dissous (respectivement précipités) peut s’exprimer comme une combinaison linéaire de celles de la portlandite, des monosulfoaluminates et des C-S-H (respectivement carbonate de calcium et ettringite). La masse molaire apparente est exprimée suivant le même principe :

Eq. 40 Eq. 41 où (respectivement et ) est la proportion de portlandite (respectivement monosulfoaluminates et C-S-H) dans les minéraux dissous, (respectivement ) la proportion de carbonate de calcium (respectivement ettringite) dans les minéraux précipités, la masse molaire du minéral i.

Les variations de volume conséquentes au détachement des granulats sont considérées comme étant proportionnelles à la variation de volume due à la dissolution des minéraux :

Eq. 42

avec la variation de volume due au décrochement des granulats, le coefficient de proportionnalité et la variation de volume totale due à la dégradation.

Cette hypothèse revient à considérer que les granulats sont répartis de façon homogène dans la pâte de ciment. Pour avoir la valeur du coefficient de proportionnalité fgra, il faut s’intéresser à la fois au volume des granulats par rapport à celui de la pâte, et à la granulométrie des granulats utilisés. Une deuxième hypothèse est faite : seuls les granulats de diamètre inférieur à l’épaisseur perdue due lors de la lixiviation se détachent de l’éprouvette. L’évolution de l’épaisseur dégradée est illustrée en Figure 69. Cette dernière a été calculée via l’évolution du volume des éprouvettes durant l’essai de lixiviation. Après environ 250 jours de lixiviation, les épaisseurs perdues ont un ordre de

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111 grandeur semblable de 100 μm. Etant donné que le volume des granulats est 2,2 fois supérieur à celui de la matrice cimentaire, et que le sable contient 5 % de passant à 100 μm, le coefficient de proportionnalité entre le volume perdu du au décrochement des granulats et celui dû à la dissolution des minéraux a été fixé à 0,11.

Les variations d’eau libre sont considérées comme étant proportionnelles aux variations de volume totales :

Eq. 43

avec la variation de volume au déplacement de l’eau libre, le coefficient de proportionnalité et la variation de volume totale due à la dégradation.

Le coefficient de proportionnalité fporo est une inconnue du problème, qu’il conviendra de déterminer. En fonction du comblement de la porosité par la formation de carbonate de calcium ou ettringite, le coefficient sera plus faible ou plus élevé. Ainsi, il est propre à chaque mécanisme de dégradation.

Les variations de volume dues à la dissolution et à la précipitation des minéraux ont pu être exprimées à partir de l’évolution de volume obtenue par pesée hydrostatique et des variations cumulées de dureté calcique , avec la masse volumique apparente des minéraux dissous, la masse molaire apparente des minéraux dissous, la masse volumique apparente des minéraux précipités et la masse molaire apparente des minéraux précipités. est un coefficient représentant la part de carbonate de calcium sur les minéraux précipités. Il est pris égal à 1 par soucis de simplification du modèle. Une simplification similaire est réalisée pour les minéraux précipités.

permet de prendre en compte la stœchiométrie des différentes équations de dissolution. Une mole d’ions calcium en plus peut provenir soit d’une mole de portlandite dissoute, soit d’un quart de mole de monosulfoaluminates dissous, soit d’1/1,6 de mole de C-S-H1.6 dissous, d’une mole de carbonate de calcium dissous. Ce coefficient, par souci de simplification, est pris égal à 1 dans ce travail. Ces deux coefficients pourraient aussi être considérés comme des paramètres inconnus du problème. Eq. 44 Eq. 45 ( ) Eq. 46 ( ) Eq. 47

Les paramètres inconnus du problème final sont donc , , , et fporo. Ils sont obtenus par optimisation du moindre carré entre la variation de masse calculée

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112 et la variation de masse obtenue expérimentalement. La bibliothèque Matplotlib en Python est utilisée pour créer des cartographies de densités, de manière à sélectionner les valeurs optimales des paramètres vis-à-vis du moindre carré, et également les plus probables. Ces cartographies de densité sont obtenues pour chaque paramètre indépendamment. Il convient de vérifier que le cinq-uplet de paramètres les plus probables, optimaux indépendamment, est bien une solution de faible moindre carré.