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D) Remerciements

5. Discussion

5.1 Activité du SNA avant et après la nuit de sommeil

Le premier objectif de ce mémoire était de comparer l’activité du SNA d’un groupe d’adultes TSA et d’un groupe d’adultes NT durant l’éveil, le soir et le matin. La première hypothèse posait que le groupe TSA montrerait une activité du SNS plus élevée le soir et le matin que le groupe NT. Cette première hypothèse est donc partiellement confirmée. En effet, les résultats montrent que les adultes TSA ont une plus basse activité parasympathique et une plus haute activité sympathique que le groupe NT, mais seulement le matin. La littérature mentionne une activité parasympathique diminuée chez les enfants autistes au repos et lors de certaines tâches cognitives (Kushki et al., 2013; Ming et al., 2005; Vaughan Van Hecke et al., 2009). Nos résultats s’apparient donc en partie à ceux trouvés dans ces études, lesquelles n’avaient pas contrôlé le moment de la journée.

Parmi les mécanismes qui peuvent expliquer cette modulation selon le moment de la journée, il y a l’influence de l’horloge circadienne sur l’activité du SNS et du SNP. En effet, Furlan et al. (1990) ont réalisé une étude qui montre une augmentation drastique de l’activité du SNS le matin et un retrait du tonus vagal le matin au réveil chez des participants NT. Ces résultats ont été répliqués par d’autres études qui montrent que malgré un horaire de sommeil atypique, la VFC présente un rythme circadien avec une augmentation de l’activité du SNS le matin et une augmentation de l’activité du SNP la nuit (Boudreau et al., 2012, 2013). Nos résultats concordent effectivement avec cette augmentation du SNS le matin, pour les deux groupes. Toutefois, le groupe de participants TSA présente une activité sympathovagale anormalement élevée le matin ce qui pourrait suggérer une altération des rythmes circadiens du

SNA dans l’autisme. La littérature montre que la mélatonine présente un profil circadien atypique chez les personnes ayant un TSA (Glickman, 2010; Silver & Rapin, 2012). L’altération du fonctionnement de l’horloge circadienne pourrait donc engendrer une atypie de la VFC le matin et pourrait en même temps expliquer en partie les problèmes d’initiation et de maintien de sommeil retrouvés dans cette population.

Alternativement, l’absence de différence de VFC entre les groupes TSA et NT le soir pourrait suggérer un effet « réparateur » de la journée chez le groupe TSA. En effet, on pourrait croire que les participants TSA présentent une hyperactivité sympathique le matin qui s’estompe au cours de la journée. Par contre, cette dernière hypothèse semble peu probable vu les nombreux défis rencontrés lors de la journée des personnes ayant un TSA (Rapin 1997).

Il n’en demeure pas moins que la différence d’activité du SNA le matin entre les deux groupes reflète une régulation autonomique atypique dans l’autisme. Cette possible dysfonction a été abordée par la théorie polyvagale (Porges, 1995, 2001, 2007). Cette théorie est basée sur le fait que le nerf vague, qui contient à son tour des sous-systèmes spécialisés (les fibres myélinisées et non-myélinisées) régulent les comportements adaptatifs, et joueraient un rôle dans le développement et la régulation des émotions et des interactions sociales. Plus précisément, selon la théorie polyvagale, les réponses comportementales adéquates dépendent du bon fonctionnement des fibres myélinisées du nerf vague. Lors de situations sociales ces fibres donnent la chance aux individus de s’autoréguler en inhibant les réponses sympathiques de lutte ou de fuite, entre autres en diminuant le rythme cardiaque. Porges (2011) suggère alors qu’un SNA qui fonctionne adéquatement impose un cadre optimal pour l’expression des émotions et prédit la qualité de la communication sociale et l’habileté d’autoréguler les émotions et comportements. Un parallèle avec l’autisme peut être inféré de sorte qu’on pourrait penser

que les comportements affectés par un mauvais fonctionnement du SNA se trouveraient au cœur des symptômes de l’autisme. Selon, cette théorie l’atypie du fonctionnement autonomique pourrait expliquer les déficits comportementaux des personnes TSA (Porges et al., 2013). Cette théorie demande d’être formellement testée par une étude explorant expérimentalement les fonctions des fibres myélinisées et non-myélinisées. De plus, une étude longitudinale pourrait explorer le développement des types de fibres du nerf vague dans l’autisme.

Une autre explication possible pour le fonctionnement atypique du SNA dans l’autisme serait la haute prévalence d’anxiété dans ce syndrome. En effet, on estime à entre 7% et 30% la cooccurrence d’un trouble anxieux dans le TSA (Wood & Gadow, 2010). De plus, l’anxiété est étroitement liée avec les symptômes fondamentaux de l’autisme. En effet, les personnes TSA sont souvent en mesure de comprendre la portée de leurs déficits sociaux, ce qui crée de l’anxiété. Par ailleurs, l’anxiété peut exacerber les symptômes de l’autisme de sorte que l’anxiété vécue lors de situations sociales difficiles mènerait les personnes TSA à s’isoler davantage (Lang, Regester, Lauderdale, Ashbaugh, & Haring, 2010; White, Oswald, Ollendick, & Scahill, 2009). Puisque la voie sympathique du SNA est activée lors de la réponse d’anxiété (Kreibig, 2010), l’hyperactivation sympathique dans l’autisme est une observation cohérente. Les recherches futures devraient tester plusieurs autres mesures de fonctionnement du SNA et les mettre en relation avec des mesures du fonctionnement comportemental dans le TSA.

Des structures du système nerveux central peuvent aussi être impliquées dans la production de réponses atypiques du SNA. Il est connu que les personnes avec un TSA présentent des différences structurelles et fonctionnelles des amygdales cérébrales, qui sont des composantes du système limbique responsable et de la régulation des émotions. En effet, les personnes autistes montrent une surcroissance des amygdales tôt dans le développement

(Mosconi et al., 2009) et des activations atypiques lors de tâches sociales et émotionnelles (Amaral & Corbett, 2003). Les amygdales contrôlent aussi les réponses du SNA par l’entremise des projections à l’hypothalamus. Cette structure est aussi activée lors du sentiment de menace et d’incertitude et active la voie sympathique du SNA (Yang et al., 2007). Ainsi les atypies des amygdales cérébrales pourraient être la cause d’un fonctionnement anormal du SNA dans l’autisme. Des investigations plus poussées sur la relation entre ces deux structures devraient être réalisées pour enrichir la compréhension de ces atypies.

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