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2.2 Identification des facteurs d’influence prépondérants

2.2.3 Actions hydriques et thermiques

Les effets mécaniques d’origine hydrique ou thermique sont souvent considérables et peuvent être, dans certains ouvrages, largement dominants par rapport aux actions de nature strictement mécanique (ex. : barrages ou massifs de fondation pour les effets thermiques, en- ceintes de confinement et chaussées en béton pour les effets hydriques et thermiques), tout particulièrement au jeune âge mais aussi tout au long de la vie des ouvrages en béton. En ef- fet, l’hydratation du ciment est un processus très lent, qui n’est jamais totalement épuisé dans les bétons courants, se poursuivant après la prise. Ces effets créent un déséquilibre avec le milieu, qui génère des flux, respectivement de chaleur ou d’eau, et par conséquent des gra- dients, respectivement de température ou de potentiel hydrique, se traduisant par une évolu- tion continue des propriétés physiques et mécaniques du béton. Les déformations observées ne sont donc jamais uniformes et ne sont pas une simple fonction de la seule variation locale d’hygrométrie ou de température, mais font toujours intervenir un comportement de structure. 2.2.3.1 Influence de l’hygrométrie sur les capteurs à fibre optique

Les actions de l’humidité, de l’immersion ou des ambiances corrosives, sont particuliè- rement pernicieuses à long terme pour les matériaux constituant les capteurs à fibre optique, comme pour notamment la silice de la fibre optique ou l’adhésif utilisé pour lier la fibre opti- que à la gaine mécanique. Malgré la grande passivité chimique de la silice, le contact avec de l’eau ou l’humidité la fragilise. Le revêtement primaire de la fibre optique est notamment ap- pliqué pour pallier à ce type d’agression. L’humidité est un facteur très dégradant en collage car elle agit par capillarité au niveau des interfaces ayant pour effet de diminuer l’adhésion. Lorsque l’atmosphère est très humide, il convient de protéger les bords extérieurs du joint par un produit étanche. Le capteur à fibre optique peut-être rendu insensible aux actions hydri- ques, en choisissant en conséquence les matériaux du capteur ou/et en leur apportant une protection adéquate, ce qui est en général couramment fait.

2.2.3.2 Influence de la température sur les capteurs à fibre optique

La température est sans nul doute le facteur d’influence d’origine naturelle, ou d’origine industrielle, le plus gênant pour l’extensométrie, présent en toute circonstance. En effet, les

ouvrages de Génie Civil sont soumis tout au long de l’année à des variations de température pouvant aller jusqu’à plusieurs dizaines de degrés Celsius. Ces variations participent active- ment à l’évolution dans le temps des propriétés physico-chimiques des différents constituants du capteur. Ces derniers, soumis à une répartition de température non uniforme ou à une va- riation de température d’ensemble, se déforment.

En effet, en tout point d’un corps élastique linéaire, homogène et isotrope, passant d’une température uniforme T0à une température uniforme T1, et soumis à aucune force extérieure,

les déformations dans toutes les directions de ce corps vérifient la loi linéaire de dilatation thermique suivante :

avec : α : coefficient de dilatation thermique linéaire du corps Sans considération de l’effet thermique, l’incertitude de mesure d’un capteur à fibre optique de déformation est souvent annoncée par son constructeur autour de ∆εmesurées = 10µm.m–1. En

considérant par exemple un coefficient de dilatation thermique linéaire global du capteur de

10.10–6 °C–1, une variation de température de 1 °C, dans le cas d’une dilatation libre, fait dou-

bler cette incertitude, d’où, la nécessité d’une correction thermique.

Les dilatations peuvent en plus être gênées. En effet, dans la plupart des cas le béton ne se déforme pas librement car l’ouvrage n’est pas isostatique. Par exemple, deux poutres en béton, l’une libre et l’autre encastrée entre deux murs empêchant toute dilatation (cf. Figure 2.6), chauffées uniformément ne se comportent pas de la même manière. La première se dilate librement, sans création de contraintes. La deuxième ne pouvant pas s’allonger, des contrain- tes apparaissent au sein du matériau, induisant une compression de la poutre. Dans ce cas les variations de température induisent donc à la fois des variations de déformations mais aussi des contraintes internes. C’est aussi ce qui se qui se produit au niveau des constituants du capteur avec en plus, pour chaque matériau en présence des coefficients de dilatation propre, pouvant être différents. Ces différences peuvent être la source de perturbations supplémentai- res dans le mesurage de déformation.

Figure 2.6 Dilatation libre et dilatation gênée de poutres en béton

Soit un capteur à fibre optique noyé dans une poutre en BO de section rectangulaire,

soumise à une variation de température uniforme dans le volume de T0 à T1 (T1 étant supé-

rieure à T0), et libre de se dilater dans une direction donnée. Le capteur est composé de la fi-

bre optique, supposée entièrement en silice, et de son conditionnement à géométrie cylindri- que essentiellement en invar, choisi ici pour son très faible coefficient de dilatation thermique linéaire (cf. Figure 2.7). Toutes les liaisons, fibre optique / conditionnement et conditionne-

ment / béton, sont supposées pour simplification comme parfaitement adhérentes, sans glis-

(

T1−T0

)

⋅ α = ε a a))PPoouuttrreeeennbbééttoonnlliibbrreeddeesseeddiillaatteerr a alllloonnggeemmeenntt d diillaattaattiioonnlliibbrree b b))PPoouuttrreeeennbbééttoonneennccaassttrrééee c coonnttrraaccttiioonn d diillaattaattiioonnggêênnééee

sement ni frottement. Les coefficients de dilatation thermique linéaire des différents maté- riaux en présence, sont les suivants [LIDE, 1993] :

αbéton = 12.10–6°C–1

αinvar = 0,9.10–6°C–1

αsilice = 7,2.10–6°C–1

Le couplage entre ces matériaux crée des tensions non négligeables. Isolé, le béton se dilate librement, passant de, L0 à T0, à, L1 à T1. Cependant dans l’exemple, l’invar freine la dilation

du béton, puisqu’il ne se dilate pas (négligeable1 par rapport aux autres matériaux) et que le module d’élasticité longitudinale de l’invar est plus élevé que celui du béton (Einvar > Ebéton).

Le béton passe en fait de L0 à L2. De même pour la fibre optique qui passe en dilatation libre

de L0 à L3. Comme pour le béton, le conditionnement freine cette dilatation (Einvar > Esilice).

Cependant, les liaisons entre matériaux étant considérées comme parfaitement adhérentes et

αbéton> αsilice, le conditionnement est entraîné par le béton, et, entraîne lui-même la fibre opti-

que. La fibre optique passe en fait de L0 à L4 qui peut être, suivant les caractéristiques mécani-

ques et les dimensions des matériaux, supérieure ou inférieure à L3 (inférieure sur la figure).

Figure 2.7 Exemple de dilatations différentielles entre la fibre optique et le béton

La déformation mesurée, résultant de l’allongement de la fibre optique rapportée à sa base de mesure, est différente de la déformation de la poutre en béton :

Cet exemple simple met en évidence trois types de dilatation thermique des matériaux constituant le capteur sources de perturbations dans le mesurage de déformation, nommées pour la présente étude, dilatation propre, dilatation gênée et dilatation entraînée. En réalité c’est encore plus complexe puisque le conditionnement de la fibre optique est composé de différents matériaux, ayant en général des coefficients de dilatation linéaire tous différents les uns des autres y compris de celui du béton (ex : 45.10–6°C–1 pour une liaison entre la fibre

optique et la gaine mécanique en résine époxyde, 17,3.10–6 °C–1 pour une gaine mécanique en

1 Pour 1°C de variation thermique, la dilatation libre provoque pour chaque matériau isolé les déformations sui- vantes :

εbéton = 12µm.m–1 εinvar = 0,9µm.m–1 εsilice = 7,2µm.m–1

(

L2−L0

)

allongementbéton >

(

L4 −L0

)

allongementfibreoptique ⇒εbéton >εfibreoptique

béton T T00 état initial conditionnement fibre optique T T11 d diillaattaattiioonnlliibbrree L0 L1 – L0 L3 – L0 L4 – L0 ( (ccoouuppeelloonnggiittuuddiinnaalleeddeell’’eennsseemmbblleeppoouuttrree//ccaapptteeuurrààffiibbrreeooppttiiqquuee)) L2 – L0

acier inoxydable). De nombreuses solutions techniques ont été étudiées et développées ces dernières années, afin de résoudre ce problème de correction thermique, dont notamment celles décrites dans [BELLEVILLE et DUPLAIN, 1993], [HENRIKSSON et al., 1996], [RIOUBLANC,

1997], [LIU et al., 1998] ou [SMITH et al., 1999].

2.2.3.3 Synthèse

Le concepteur et l’utilisateur ont donc à leur disposition différents moyens pour appré- hender l’influence de l’hygrométrie et de la température sur la mesure réalisée par des cap- teurs à fibre optique de déformation. De plus, pour les ouvrages considérés, les actions hydri- ques et thermiques sont à majorité d’origine climatique. Les actions thermiques de ce type sont essentiellement cycliques, et leurs effets mécaniques à long terme dépendent donc de l’écart entre la température initiale et la température moyenne de l’endroit où se situe l’ouvrage. Les actions hydriques peuvent également être de type cyclique, mais le séchage est

1000 à 10000 fois plus lent que le refroidissement [PRAT et al., 1997]. Par conséquent, l’effet

de ces actions sur le comportement à long terme est insensible aux cycles courts, parce que lié avant tout aux hygrométries moyennes des périodes les plus sèches de l’année. Le capteur noyé au sein du béton ne subit en général pas de variation brutale d’hygrométrie et de tempé- rature, contrairement au capteur fixé en surface d’ouvrage qui lui est directement exposé aux variations climatiques. Des études spécifiques pour chaque type de capteur sont donc néces- saires, ce qui n’étaient pas en accord avec notamment les contraintes expérimentales de l’étude. Dans la présente étude, afin de réduire les principales sources de variations des dé- formations, le milieu de mesure est considéré comme chimiquement stable, et isotherme. Ce qui se traduit par des températures et des hygrométries constantes pour tous les matériaux étudiés.