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Ces relations de dispersion fixent la vitesse de propagation des ondes dans le milieu non-linéaire. En utilisant l’approximation de l’enveloppe lentement variable (|d2E

dz2| ≪ |kdEdz|) et en introdui-sant le désaccord de phase ∆k = 2kp− k, on obtient une équation différentielle du premier ordre décrivant la propagation du champ harmonique généré :

dE(z)

dz = ι ωpχ(2)

n(2ωp)cEp2(z)eι∆kz (2.4)

À ce stade, on pourrait considérer un rendement de génération faible et supposer que Ep reste quasi-constant, ce qui donnerait l’évolution suivante :

E(z) = ι ωpχ (2) n(2ωp)cEp2zsin∆kz 2 ∆kz 2 (2.5)

Le rendement diverge pour ∆k = 0, donc il est nécessaire de corriger le résultat pour qu’il soit valide pour des rendements non négligeables, où on ne peut pas considérer le champ de pompe constant. Il faut alors reprendre le raisonnement précédent afin d’écrire l’équation symétrique de (2.4), c’est à dire celle qui décrit la variation de l’amplitude Ep(z) de la pompe sous l’effet de la polarisation non-linéaire induite par le champ harmonique E(z) :

dEp(z)

dz = ιωpχ(2)

n(ωp)cE(z)E

p(z)e−ι∆kz (2.6)

On peut montrer [Boy08] que, lorsque le désaccord de phase est nul (∆k = 0), les deux équations (2.4) et (2.6) couplées permettent d’obtenir la solution suivante pour les deux inconnues E(z) et Ep(z) : |E(z)| = s n(ωp) n(ωp) |Ep(0)| tanh γ0z (2.7) |Ep(z)| = |Ep(0)| sech γ0z

où on a noté γ0 le coefficient de gain défini par :

γ0 = ωpχ(2)

n(ωp)c

s

I0

0cn(2ωp) (2.8)

Le rendement de conversion s’exprime donc par

η(z) = tanh2γ0z (2.9)

La longueur caractéristique ℓ = 1

γ0 correspond à un rendement de 58 %.

2.3 Quasi-accord de phase

Nous avons supposé, dans le paragraphe précédent, que l’accord de phase pouvait être réalisé (∆k = 0), c’est à dire que les dipôles excités par le champ à ωp pouvaient rayonner tous en phase à la fréquence 2ωp. Cette condition n’est pas naturellement satisfaite en général, car cela suppose l’égalité des vitesses de phase vφ à ωp et à 2ωp :

∆k = 2kp− k = 2n(ωpp

CHAPITRE 2. PROCESSUS NON-LINÉAIRES DANS LES CRISTAUX MASSIFS 33

Pour que ∆k = 0, il faudrait que n(ωp) = n(2ωp), c’est à dire vφp) = vφ(2ωp). Mais le milieu est en général dispersif, et cette égalité n’est pas satisfaite.

Pour réaliser l’accord de phase, il existe une méthode tirant partie de la biréfringence naturelle de certains cristaux, bien décrite par exemple dans la référence [Boy08]. Cette méthode d’accord de phase présente certains inconvénients :

• En raison de la nature tensorielle de l’indice de réfraction, elle impose une propagation selon une direction appropriée par rapport à l’axe optique du cristal, ainsi que des polarisations bien définies. Ces direction et polarisation ne sont a priori pas celles qui favorisent une non-linéarité maximale, celle-ci étant également de nature tensorielle. • La biréfringence cause un décalage2 entre des faisceaux polarisés différemment, en

raison du fait que le vecteur de Poynting n’est généralement pas parallèle au vecteur d’onde. Le recouvrement spatial diminue avec la longueur d’interaction, ce qui limite l’efficacité du processus. Cette solution d’accord de phase est donc limitée aux cas où une petite longueur d’interaction est suffisante.

La méthode du « quasi-accord de phase », que nous allons maintenant voir, pallie ces incon-vénients et se révèlera plus adaptée aux expériences décrites dans la suite de ce document.

Dans un processus non-linéaire de génération de seconde harmonique où l’accord de phase n’est pas satisfait, l’amplitude du faisceau harmonique n’est pas croissante avec z de façon monotone comme dans l’équation (2.7). On peut montrer qu’elle présente une périodicité caractérisée par une longueur de cohérence Lcaprès laquelle l’échange d’énergie dominant s’inverse : l’harmonique perd de l’énergie au profit de la pompe. La démonstration analytique de l’effet d’une telle périodicité dans le cas d’un fort rendement a été faite par Armstrong et collaborateurs [ABDP62] et nous nous contenterons ici de montrer son effet dans l’approximation de la pompe constante. La période optimale est identique dans les deux régimes.

L’idée du quasi accord de phase est qu’il suffit d’inverser le signe de la susceptibilité non-linéaire χ(2) lorsque le couplage d’énergie change de sens et se fait au détriment de l’harmonique, c’est à dire à partir de Lc, puis tous les 2Lc (voir Fig. 2.1), de sorte que l’amplitude du faisceau d’harmonique soit toujours croissante. Le résultat obtenu sur cette figure serait obtenu avec une inversion parfaite correspondant à une fonction créneau :

χ(2)QAP(z) = χ(2)signecos 2π z 2Lc



qu’on peut écrire sous la forme d’une série de Fourier :

χ(2)QAP(z) = χ(2) Q X m=−∞ m impair (−1)m−12 m e ιmKz = χ(2) Q X m=1 m impair xmeιmKz+ c.c. = χ(2) QAP+(z) + χ(2) QAP−(z) où on a posé χ(2)Q = 2 πχ (2) ; K = 2Lc ; xm = (−1)m−12 m ; χ(2)QAP−=χ(2)QAP+ et remarqué que x−m= xm.

L’équation différentielle (2.2) à partir de laquelle on obtient les équations couplées pour les amplitudes non réelles E ne s’applique pas au terme complexe conjugué χ(2)QAP−. Dans cette même équation, si χ(2)= χ(2)

QAP, il faut récrire les équations couplées avec χ(2)

QAP+. Si l’on ne s’intéresse 2. walk-off spatial

34 2.3. QUASI-ACCORD DE PHASE

Figure2.1 –Idée sous-jacente au quasi-accord de phase : l’inversion de χ(2) afin de rendre croissante l’énergie du faisceau généré.

qu’à la composante de degré m, on obtient

dE(z)

dz = ιωpχ

(2)

Q xm

n(ω)c Ep(z)2e−ι(∆k+mK)z (2.10)

Selon l’ordre m, une valeur K différente permet de satisfaire l’accord de phase. Cependant, comme |xm| ∝ m1, il est préférable d’optimiser K pour le premier ordre afin d’avoir le couplage optimal. Pour m = 1, la période du motif d’inversion de la susceptibilité est donc de

K, c’est à dire 2Lc, ce qui rejoint l’idée intuitive que nous avons suggérée au début de cette section.

Idéalement, il faudrait donc réaliser un motif d’inversion de χ(2) sinusoïdal. En pratique, les diverses solutions existantes ne le permettent pas parfaitement : historiquement, elles ont consisté d’abord en un simple empilement de lames de cristal polies et assemblées (de CdTe [PCS76], GaAs [SHS76] ou LiNbO3 [TMA76] par exemple), et plus récemment en une inversion des domaines ferroélectriques du niobate de lithium lors de la croissance du cristal [FK85]. Un brevet, déposé en 1993 par Yamada et al. [YK93] décrit une méthode pour retourner les domaines après la croissance en appliquant une tension intense entre des électrodes juxtaposées, polarisées alternativement avec le pas souhaité. Cette technique d’inversion se traduit par le préfixe Periodically Poled- (PP) utilisé pour différents types de cristaux ferroélectriques (PPLN pour le PP-LiNbO3, PPKTP, PPSLT, etc.).

Le motif résultant n’étant pas sinusoïdal (voir Figure2.2), il existe des couplages entre onde de pompe et harmonique liés aux ordres supérieurs du motif, qui participent également au processus d’échange d’énergie, mais de manière non constructive puisqu’ils ne satisfont pas ∆k − mK = 0 pour m > 1. Leur contribution est donc sans effet notable par rapport à l’ordre 1 après une longueur z suffisamment grande.

La méthode du quasi-accord de phase présente l’avantage de pouvoir s’appliquer à tout maté-riau dont on sait orienter la susceptibilité non-linéaire. Elle permet de privilégier le choix d’une valeur élevée de cette susceptibilité, avec beaucoup moins de contraintes que pour l’accord de phase par biréfringence : la direction de propagation et la polarisation des faisceaux peuvent être choisies de sorte à utiliser la plus grande valeur du tenseur χ(2), et si le cristal ne présente pas de biréfringence dans cette configuration, l’absence de décalage transverse entre les faisceaux

CHAPITRE 2. PROCESSUS NON-LINÉAIRES DANS LES CRISTAUX MASSIFS 35

Figure 2.2 –Photo d’une zone d’un cristal de PPLN illustrant la forme du motif d’inversion du signe de sa susceptibilité non-linéaire. (Image tirée dehttp://www.srico.com/node/8, société SRICO)

(walk-off ) autorise à utiliser une grande longueur d’interaction, favorisant de forts rendements. Le coefficient 2

π entre la susceptibilité naturelle χ(2) et la susceptibilité effective χ(2)

Q constitue un inconvénient largement compensé par tous ces avantages.

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