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Section II ème : L’émergence d’un statut juridique permanent en faveur des P.E.D

A- La réaffirmation de la nécessité d’un traitement spécial et différencié pour

1/ L’absence de texte général

B - Les P.E.D : Un statut juridique équivoque

Si la partie IV de l'accord général du G.A.T.T a été entièrement consacrée aux P.E.D, rien de tel n'a été relevé dans les accords de l'O.M.C. Certes, des dispositions sont bien consacrées à ces pays mais, elles ne sont pas rassemblées dans une partie spécifique de manière à éviter toute équivoque de différenciation de traitement.

N’est-on pas alors, en état de se demander si les dispositions de l'O.M.C ne traduisent pas un retour en arrière ?

1 - L’absence de texte général

Outre deux décisions prises lors des négociations de l'Uruguay round, l'une relative à l'engagement des pays développés à mettre effectivement en œuvre les mesures spéciales prévues en faveur des pays les moins avancés et à prendre en compte leur besoins spécifiques,133 la seconde se rapporte aux mesures appropriés à prendre en faveur des pays en

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A. KRIEGER-KRYNICKI, L’Organisation mondiale du commerce, Paris, Vuibert, 2005, p. 217.

132

T. BERANGERE, op. cit., pp. 36.

133

Voir la décision sur les mesures en faveur des PMA, acte final reprenant les résultats des négociations commerciales multilatérales du cycle d'Uruguay, disponible sur le site internet de l’OMC, op.cit. , p. 419.

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développement importateurs nets de produits alimentaires134, on ne retrouve aucun texte général qui traite spécifiquement des problèmes des P.E.D.

Cette lacune a fait l'objet d'observations de la part de la doctrine : Philippe Vincent considère que « l'absence de texte général a des répercussions concrètes et amène à rechercher des éléments d'un traitement spécial dans les différents accords de l'OMC ».

Cet auteur souligne également que « lorsque des articles d'un accord sont consacrés aux pays en développement, ils se caractérisent souvent par leur caractère lapidaire, ou ne font référence qu'aux pays les moins avancés »135

Selon cet auteur, la prise en compte d'une catégorie particulière, les PMA, est un moyen de faire appliquer les dispositions normales des accords aux autres pays en développement.

Il est plus juste de reconnaître que les P.M.A. ont plus besoin d'aide et de soutien pour leur éviter une marginalisation dans le système commercial multilatéral et un accroissement de la pauvreté. Mais, n'est-on pas en droit de se demander qu'en est-il des autres pays en développement ?

Philippe Vincent semble donner une réponse lorsqu'il estime que :

« L’absence de texte général constitue incontestablement un recul pour les pays en développement. Elle ne signifie pas qu'un traitement différencié ne sera plus appliqué à ces pays: la décision adoptée à l'issue du Tokyo round n'est pas abrogée pour autant. Le traitement différencié ne constitue cependant un droit que pour les PMA. Les autres pays devront désormais négocier ce traitement différencié. Ce qui marque un brutal retour en arrière de la part des pays développés, et un retour à la philosophie libérale de l'accord général de 1947 »136.

Cette position diffère de celle de GUY FEUER qui estime que :

134

Idem, p. 429.

135

P. VINCENT, op. cit. , p. 493 ; T. BÉRANGÈRE, op. cit., p. 36.

136

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" Les textes de Marrakech ne se bornent pas à proclamer le principe du traitement spécial

et différencié. Dans la plus part des cas et c'est là leur grand intérêt par rapport au passé et pour l'avenir, ils énoncent et réglementent le contenu de ce traitement. Ils vont donc plus avant dans le concret que les textes antérieurs137"

En effet, les accords de l'O.M.C. accordent des avantages aux P.E.D, cependant ces avantages sont discutés et nuancés dans la mesure où ils sont soumis à négociations et parfois se voient contraints de faire des concessions sous forme de compensation en contrepartie d'avantages et surtout une limitation dans le temps. Les P.E.D bénéficient-il réellement d'un traitement spécial et plus favorable ? Rien n'est sûr.

Toutefois, on constatera un maintien relatif d'un statut particulier des PED.

2- La nouvelle approche de l’O.M.C. à l’égard des P.E.D.

On peut constater d'après le développement ci-dessus que le statut juridique réservé aux P.E.D dans le cadre de l'O.M.C. reste presque identique et n'a pas subi de grand changement, par rapport à celui qu'il était dans le G.A.T.T de 1947. D’ailleurs, ce dernier figure sous la nouvelle appellation de GATT 1994 à côté des différents accords annexés à l'accord principal qui est l'accord instituant l'OMC. Dès lors, on peut relever un certain état d'esprit révélateur de la philosophie libérale de l'O.M.C. et de son ambition à intégrer les P.E.D. dans un système commercial global et unifié.

Cet état d'esprit apparaît à travers la lecture de la note interprétative générale relative à l'annexe 1 A (Gatt 1994) qui prévoit une hiérarchie des normes entre les accords c'est-à-dire en cas de contrariété entre une disposition du GATT de 1947 et une disposition de l'accord O.M.C, c'est cette dernière disposition qui s'appliquera138.

Certains accords explicitent certes, le contenu du traitement spécial et différencié accordé aux P.E.D sans pour autant y apporter des détails qui puissent permettre une application rigoureuse et précise à l'ensemble de ces pays.

137

G.FEUER, op. cit. , p. 767.

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Le GATT de 1947, est caractérisé par sa souplesse à l'égard des PED car il leur réserve de réelle préférence discriminatoire par rapport aux pays développés, exprimé par de multiples dérogations et exceptions notamment le S.G.P qui prend en considération les inégalités de développement des Etats.

L'O.M.C. quant à elle, réserve de plus lourdes charges et obligations aux P.E.D. qui désormais ne bénéficient plus de dérogation ou d'exception dans l'application des accords mais seulement d'un allègement de leur contraintes, de reconnaissance des intérêts spéciaux des P.E.D, ou plus généralement de la fixation d'un délai plus long pour la mise en œuvre de leurs obligations, ou encore l'octroi d'une assistance technique139.

Si les P.E.D. bénéficient toujours au sein de l'O.M.C d'un traitement spécial et différencié il n’est pas pour autant plus favorable que celui des pays développés ; leur situation à l'O.M.C est plus complexe que dans le GATT dans la mesure où l'OMC applique une différenciation de régime selon le niveau de développement des pays dans la catégorie même des PED. L'O.M.C prend plus en compte la situation des P.M.A. et leur réserve un traitement spécifique et plus favorable.