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A. Réduction énantiosélective de l’acétophenone

Chapitre III : Complexation du platine avec des aminoalcools

IV. A. Réduction énantiosélective de l’acétophenone

Pour tester l’activité de nos ligands, nous nous sommes inspirés des travaux de M.

A. Pericàs décrivant un procédé d’hydrogénation asymétrique de cétones prochirales dans l’eau.54 L’originalité de ce procédé repose sur le fait que l’acétophénone (réactif) est utilisé comme solvant organique. Ceci est illustré sur la Figure IV-1 :

Figure IV-1 : Utilisation d’un catalyseur hydrophobe en milieu aqueux.

Comme illustré sur le schéma ci-dessus, la réaction se produit au sein même de l’acétophénone (faiblement soluble dans l’eau). Il faut donc une agitation vive pour former une émulsion afin que tous les partenaires de la réaction puissent se rencontrer.

Nous avons donc étudié la réduction de l’acétophénone (IV.1) en phényléthanol (IV.2) avec un catalyseur au ruthénium (IV.3) (Schéma IV-1) :

O OH (-)-éphédrine (-)-noréphedrine L-valinol Pseudoéphédrine L-prolinol

Ph

II.2 II.3 II.4 IV.4 II.6

II.18 II.7

Schéma IV-1 : Réduction asymétrique de l’acétophénone dans l’eau en présence de [RuCl2(p-cymene)]2

Les résultats obtenus sont rassemblés ci-dessous (Tableau IV-1) :

Entrée Ligand t (h) conv. (%) ee (%) Enantiomère

Tableau IV-1 : Réduction de l’acétophénone dans l’eau en présence de [RuCl2(p-cymene)]2

On peut remarquer que sans ligand (Tableau IV-1, entrées 1 et 2) ou avec des ligands possédant une certaine rigidité comme le prolinol (Tableau IV-1, entrée 3) et les iminosucres (Tableau IV-1, entrée 4 et 5), la réaction n’a pas lieu. Même en utilisant un

catalyseur de transfert de phase pour améliorer la solubilité des iminosucres (II.18) et (II.7) dans l’acétophénone, siège de la réaction, aucune conversion n’est observée (Tableau IV-1, entrées 6 et 7). En revanche avec des aminoalcools « classiques », les taux de conversion sont bons voire excellents avec des excès énantiomériques assez bons (Tableau IV-1, entrées 8 à 11) en comparaison avec ceux obtenus dans la littérature54. En ce qui concerne les excès énantiomériques, une substitution de la fonction amine semble améliorer les valeurs (Tableau IV-1, entrées 10 et 11 vs entrées 8 et 9). Les configurations obtenues semblent également être influencées par l’orientation du substituant en position

# de la fonction alcool ; en effet, un substituant situé à l’arrière (configuration S pour la pseudoéphédrine) permet l’accès au phényléthanol de configuration R (Tableau IV-1, entrées 8 et 9) alors qu’un substituant situé vers l’avant (configuration R pour l’éphédrine et la noréphédrine) permet l’accès au phényléthanol de configuration S (Tableau IV-1, entrées 10 et 11).

Le mécanisme que nous proposons pour cette réaction s’inspire des travaux de Noyori en 200698 et d’une équipe mexicaine en 200599 ; la première étape consiste en un échange de ligands pour former le complexe intermédiaire (IV.6) (Schéma IV-2) :

Ru Cl Cl

Cl +II NH

R2 R3 OH R1

H2O 2h, 20°C

Cl Ru+II NH R2 R3

O R1 IV.5

IV.6

Schéma IV-2 : Echange de ligands sur le ruthénium

L’espèce active (IV.7) est ensuite générée en présence de formiate de sodium (Schéma IV-3) et la réduction de la cétone peut alors se produire :

98 C. A. Sandoval, T. Ohkuma, N. Utsumi, K. Tsutsumi, K. Murata, R. Noyori Chem. Asian. J. 2006, 1-2, 102-110.

99 N. A. Cortez, C. Z. Flores-López, R. Rodríguez-Apodaca, L. Z. Flores-López, M. Parra-Hake, R.

Somanathan Arkivoc 2005, vi, 162-171.

Cl Ru+II NH R2 R3

O R1

Ru+II N R2 R3

O R1

H Ru+II NH R2 R3

O R1 HCOONa CO2

OH

*

O Base

- HCl

IV.7 IV.8

IV.6

Schéma IV-3 : Réduction asymétrique de l’acétophénone en phényléthanol

Comme la réaction ne fonctionne pas avec le prolinol ou les iminosucres, nous pouvons avancer deux raisons possibles : soit ceux-ci sont probablement trop rigides ou encombrés, donc l’acétophénone (IV.1) ne peut pas se placer correctement afin d’être protonée, soit tout simplement, le complexe intermédiaire (IV.6) ne se forme pas.

Il serait peut-être intéressant de suivre la formation des complexes intermédiaires par spectroscopie de masse afin de comprendre le phénomène et privilégier l’une ou l’autre des hypothèses.

IV.B. Réduction énantiosélective de la (E)-2-benzylidène-1-tétralone

Au laboratoire, il y a quelques années, a été étudiée l’hydrogénation asymétrique pallado-catalysée d’énones en présence d’aminoalcools chiraux conduisant aux cétones correspondantes optiquement actives.100 Les travaux ont consisté notamment à élucider le mode d’interaction de ces aminoalcools chiraux. Deux voies mécanistiques (Schéma IV-4) pouvaient être envisagées : une addition-1,4 de H2 sur l’énone conduisant à une espèce énolique (voie a) ou une hydrogénation diastéréosélective d’un intermédiaire formé de façon réversible (de type imine en équilibre avec la forme oxazolidine) par réaction de l’aminoalcool avec l’énone (voie b).

100 C. Thorey, F. Hénin, J. Muzart Tetrahedron: Asymmetry 1996, 7, 975-976 et références citées.

O

Schéma IV-4 : Réduction pallado-catalysée d’énones en présence d’aminoalcools chiraux

Pour trancher entre ces deux hypothèses, le laboratoire a mis au point une méthode de synthèse des énimines originales101 et étudié leur hydrogénation. C’est la liaison C=N qui est hydrogénée avant la C=C conjuguée. La voie b peut alors être écartée. Le mécanisme proposé serait alors l'hydrogénation-1,4 de l'énone de départ conduisant à une espèce énolique (voie a) qui se tautomériserait de façon asymétrique en présence de l'aminoalcool chiral.102

Pour une première étude avec nos complexes, nous avons choisi d’étudier la réduction de la (E)-2-benzylidène-1-tétralone (Schéma IV-5) :

101 S. Bouquillon, F. Hénin, J. Muzart Synth. Commun. 2001, 31, 39-45.

102 C. Thorey, S. Bouquillon, A. Hélimi, F. Hénin, J. Muzart Eur. J. Org. Chem. 2002, 2151-2159.

HN EtOH ou Toluène ou THF de 1 à 41 h et de 20 à 50 °C

Schéma IV-5 : Réduction de la (E)-2-benzylidène-1-tétralone

Nous avons donc réalisé cette réaction en présence de différents solvants et à différentes températures. Les résultats de l’étude sont rassemblés dans le Tableau IV-2.

Entrée Système “Pd / L“ Solvant T (°C) t Rendement

Tableau IV-2 : Réduction de la (E)-2-benzylidène-1-tétralone

Si l’on compare avec les résultats optimaux obtenus lors de la précédente étude (Schéma IV-4), nos résultats sont ici assez décevants. En effet, nous attendions une amélioration par rapport aux résultats précédemment obtenus en catalyse “hétérogène“57, car les espèces dans le cas présent sont toutes solubles dans le milieu (Tableau IV-2, entrées 2 à 9). Il est à remarquer que les rendements et les excès énantiomériques obtenus en présence de palladium sur charbon et de prolinol sont comparables à ceux obtenus lors des travaux antérieurs réalisés au laboratoire. Ensuite avec le complexe du palladium(II) (PdCl2(L-prolinol)2), à température ambiante, il semble que l’utilisation de l’éthanol pendant un temps de réaction de 6 heures soit “optimale“ (Tableau IV-2, entrée 3 vs entrées 2, 4 et 5). L’augmentation de la température accélère la réaction (Tableau IV-2, entrée 6 vs entrée 3) mais l’excès énantiomérique s’en trouve diminué. Enfin, nous

pouvons aussi remarquer que le complexe Pd(L-prolinate)2 se comporte comme le complexe Pd(éphédrinate)257 en activant la réaction à température ambiante mais sans excès énantiomérique notable (Tableau IV-2, entrée 9).

Ces tests ont été réalisés avec le prolinol mais des tests catalytiques sont envisagés avec d’autres ligands pour augmenter les excès énantiomériques et également obtenir l’autre isomère.

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