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3. CADRE MÉTHODOLOGIQUE

3.2 A NALYSE DE CONTENU

Dans ce mémoire, j’ai choisi d’analyser les discours que transmettent les jeunes Autochtones sur le territoire et la réserve à travers les courts-métrages qu’ils ont réalisés. Je me base sur les étapes proposées par Bonville (2000) dans son livre intitulé L’analyse de contenu des médias : de la problématique au traitement statistique pour procéder à l’analyse des données. Voici la description de ces étapes :

1. En premier lieu, il y a l’étape de la construction de la question de recherche, de la problématique ainsi que des hypothèses qui en découlent. Ce travail de recherche est présenté dans les chapitres précédant celui-ci.

2. Ensuite a lieu la prise de connaissance des données qui peut se faire par la lecture, l’écoute ou le visionnement de documents. Dans mon cas, la collecte de données s’est effectuée par le biais du visionnement de 400 courts-métrages issus du projet Wapikoni Mobile. Ceux-ci sont accessibles sur le site www.wapikoni.ca. Ces courts-métrages sont classés par année, genre, communauté, nation et langue. Leur durée varie de 10 secondes à 20 minutes. J’ai visionné les courts-métrages de façon aléatoire, c’est-à-dire que j’ai regardé les courts-métrages dans l’ordre qu’ils étaient présentés sur le site (20 films par page sans considération de l’année, du genre, de la communauté, de la nation ou de la langue). Il était important pour moi de ne pas influencer les résultats en choisissant volontairement les courts-métrages. Bien que le visionnement de 400 courts-métrages puisse sembler un exercice fastidieux, cela m’a permis de m’immerger dans la culture et les réalités Autochtones avant de m’improviser « chercheuse » dans un domaine qui m’était quasi inconnu quelque temps plus tôt.

3. La troisième étape consiste à élaborer un système de classification et à classifier les données selon ce système. Dans ce mémoire, les étapes deux et trois se font

simultanément, étant donné que je dois construire les catégories au fur et à mesure que je prends connaissance des données. J’ai donc construit, tout au long du visionnement des courts-métrages, différentes catégories me permettant de regrouper ensemble les vidéos qui abordent le territoire dans une perspective semblable. La grille d’analyse que j’ai utilisée a été inspirée de celle donnée en exemple par Aubert-Lotarski (2007, s.p.) (voir Figure 1) et m’a été utile pour classifier les citations et les idées partagées par les jeunes sur le territoire. J’effectue entre autres une analyse des thématiques partagées par les jeunes lorsqu’ils parlent du territoire. Selon Aubert-Lotarski (2007, s.p.), « les analyses thématiques de contenu cherchent à mettre en évidence les opinions ou les représentations du ou des rédacteurs du texte (ou de la personne qui a tenu les propos transcris dans le texte). »

Figure 1

Grille d'analyse par Aubert-Lotarski

Ma grille d’analyse s’est avérée un peu plus étoffée que celle présentée en exemple par

À la colonne 5 sont inscrites les représentations que les jeunes se font du territoire.

Chaque court-métrage regorge d’informations, de codes, d’allusions, de références, de métaphores, d’opinions, d’émotions, etc. Plusieurs types de langages y sont d’ailleurs mobilisés. Tout d’abord, il y a le langage verbal. Puis, le langage visuel (le choix des images, les gros plans, les longueurs, le choix de couleur, la luminosité, la vitesse à laquelle défilent les images, les superpositions d’images, les assemblages, la composition, le cadrage, les plans-séquences, etc.). À cela s’ajoute l’univers sonore, qui a aussi un impact sur l’expérience que vit celui ou celle qui visionne le court-métrage. Tant les images que les dialogues, les thèmes, les couleurs, les gros plans, les sons, les longueurs, les cadrages, les assemblages peuvent renseigner sur la forme que prend le territoire et ce qu'il représente aux yeux des jeunes.

J’ai tenté d’être le plus réceptive possible afin de maximiser la quantité d’information collectée. Néanmoins, je suis consciente que des éléments ont pu m’échapper, compte tenu de la quantité d’information que recèle chaque court-métrage. De plus, dans le but de ne pas dénaturer les messages des jeunes Autochtones à travers mes interprétations et pour laisser aux autres chercheurs la possibilité d’effectuer leurs propres interprétations de ces discours, j’ai pris soin de rapporter les paroles exactes prononcées par les jeunes dans les courts-métrages.

L’utilisation de citations a donc été privilégiée dans ce mémoire.

Afin de saisir les différentes significations qu’accordent les jeunes au territoire, il est important de comprendre que le territoire est un concept qui se divise en dimensions, puis en indicateurs. Par exemple, comme le présentait Martin (2011) lors d'une conférence portant sur les Autochtones et la protection de l'environnement, la forêt, ou plutôt la protection du territoire, prend pour certains Autochtones une dimension institutionnelle. Le territoire, pour les Aînés, engendre la vie et la culture : il éduque, il guérit, il nourrit, il protège, etc. Comme l'exprime Martin, « vous retrouvez là toutes les institutions d'une société. C'est-à-dire que la forêt est une institution totale, c'est la société. » (Ibid.). Les caractéristiques accordées au territoire (ex. pouvoir de guérison, capacité à nourrir, à protéger, à éduquer) sont donc considérées comme des indicateurs.

À partir de cette approche d’analyse de contenu, les répétitions d’indicateurs dans le discours des jeunes m’ont permis de me renseigner sur la prédominance de certaines tendances au sein de ce groupe. Certes, je n’ai pas l’intention de présenter les conceptions du territoire des jeunes Autochtones qui ont participé au projet du Wapikoni Mobile comme s’ils formaient un bloc monolithique, mais plutôt de présenter l’éventail des représentations.

4. Enfin, en dernier lieu, je m’adonne au traitement des données recueillies, c’est-à-dire à la présentation et à l’explication de celles-ci. Cette étape prend forme dans les deux chapitres suivants, c’est-à-dire la présentation des résultats au Chapitre 4 et l’analyse des résultats au Chapitre 5.