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A.3.b Bilan des résultats expérimentaux en volume

Collier de perles

L’image la plus utilisée pour décrire les complexes polyélectrolytes/tensioactifs formés est celle d’un collier de perles (Figure I-31), où les chaînes de polyélectrolyte s’effondrent partiellement pour laisser les queues des tensioactifs en contact, à l’abri de l’eau.

Figure I-31 : Représentation d’un complexe polyélectrolyte – tensioactif en collier de perle dessinée par

Abuin et Scaiano en 198472

Ce type de structure, différente du cas des polyélectrolytes hydrophobes statistiques, avait déjà été validée expérimentalement dans le cas des complexes polymères non chargés – tensioactifs chargés, par des expériences de diffusion de neutrons73. Dans cette structure, les molécules de tensioactifs forment N agrégats de type micellaire sur la chaîne de polyélectrolyte, chacun de ces agrégats comprenant Nag molécules de tensioactifs. Nag est le nombre d’agrégation qui est

en général plus faible que pour les solutions de tensioactifs seuls.

La technique de fluorescence50,72,74-77 du pyrène et les techniques potentiométriques78-80 permettent de déterminer la CAC d’un système, le nombre de tensioactifs fixés sur les polymères, le nombre d’agrégats N de type micellaire et le nombre d’agrégation Nag. En

particulier, comme nous l’avons mentionné plus haut, il existe une technique potentiométrique utilisant des électrodes spécifiques aux tensioactifs qui permet de déterminer le pourcentage de sites du polyélectrolyte occupé par les tensioactifs. Cette technique permet de tracer des isothermes de fixation d’un système. La rhéologie permet de mesurer la viscosité des solutions et donc de caractériser l’effondrement des chaînes de polyélectrolyte en solution.

Paramètres influençant la complexation polyélectrolyte - tensioactif A l’aide des techniques citées ci-dessus, plusieurs tendances ont été dressées :

- A concentration fixée en polyélectrolyte, lorsque la concentration en tensioactif augmente, les chaînes s’effondrent sur les micelles de tensioactif (prévu par Groot53, et décrit par Plucktaveesak54). Il en résulte une chute de viscosité72, 81. Les complexes, qui deviennent hydrophobes, peuvent précipiter. Des mesures électrophorétiques ont montré que lorsqu’il y a

un excès de tensioactif en solution, les complexes peuvent alors voir leur charge s’inverser60,82

83

. Les complexes se gonflent à nouveau, ce qui était prévu par Groot.

- Comme il a été prédit par de nombreux travaux théoriques, la présence de sel défavorise l’association, ce qui résulte en des CAC plus élevées et une zone de précipitation moins étendue dans le diagramme de phase78, 84. Cependant, la présence d’un sel divalent peut avoir l’effet contraire79. En effet, le polyélectrolyte peut perdre sa rigidité et complexer plus facilement les tensioactifs.

- Lorsque l’hydrophobie du tensioactif augmente, la zone de précipitation est plus étendue, la CAC diminue et les agrégats de type micellaire sont plus gros71, 75, 80.

- Lorsque l’on augmente la concentration en polyélectrolyte, la CAC augmente. La raison invoquée par Hansson et Almgren77 est que l’agrégation devient coopérative lorsque la concentration en tensioactif près du polyélectrolyte excède une certaine valeur critique. Plus le nombre de chaînes de polyélectrolyte augmente en solution, plus les tensioactifs sont distribués sur un grand nombre de chaînes et plus la concentration critique correspond à une grande CAC.

- Lorsque le taux de charge du polyélectrolyte est faible, la précipitation est défavorisée85.

- Lorsque la masse moléculaire du polymère diminue, les agrégats formés sont plus petits, ce qui peut empêcher la séparation de phase71, 86.

Diagramme de phases

Comme nous l’avons vu, les complexes polyélectrolytes/tensioactifs peuvent précipiter et former une phase concentrée en équilibre avec une phase diluée en complexes. Les techniques de rayonnement (statique ou dynamique) comme la diffusion de rayons X87, neutrons73, lumière86 permettent aux expérimentateurs de connaître la forme, la taille et la structure des complexes formés dans les différentes phases du diagramme de phases.

Ilekti et al.87 ont mis en évidence par diffusion de rayons X que les phases concentrées du diagramme de phase sont très souvent organisées : phases hexagonales, phases cubiques, dans lesquelles les chaînes de polyélectrolytes pontent les objets micellaires (Figure I-32-a). Des mesures de rhéologie ont confirmé que ces phases concentrées en complexes peuvent avoir la

structure d’un gel composé de chaînes de polyélectrolyte, connectées entre elles par des micelles de tensioactif88-91.

Enfin, Antonietti 92 a analysé par diffraction de rayons X les précipités séchés provenant de solutions très concentrées en polymère et a mis en évidence des structures organisées lamellaires pouvant comporter des défauts (Figure I-32-b).

a) b)

Figure I-32 : a-Organisation d’une phase concentrée : micelles cylindriques de tensioactif, pontées par

des chaînes de polyélectrolyte87. b- organisation des précipités : structure des lamelles ou lamelles

déformées pour des précipités de PSS (polystyrène sulfonate) et de CnTAB.92

Cas particulier du PSS

Le polyélectrolyte que nous avons utilisé est le polystyrène sulfonate, PSS, qui a un squelette intrinsèquement hydrophobe à cause de ses groupements benzène (Figure I-33-a). Plusieurs études ont mis en évidence le caractère particulier du PSS.

-Gao et al.93 ont mené une étude très intéressante de RMN pour comparer la structure des complexes CnTAB / PSS et des complexes CnTAB / PVS (Polyvinyl sulfonate), qui ne

contient pas de cycle benzénique (Figure I-33-b).

a) b) c)

Figure I-33 : Structure chimique du PSS, polystyrène sulfonate (a) et du PVS, polyvinyl sulfonate (b).

Interaction entre le PSS et le CnTAB.

Leur étude montre que le cycle benzénique du PSS interagit avec les deux premiers atomes de carbone de la chaîne de CnTAB (Figure I-33-c). Pour les deux polyélectrolytes, la tête

cationique du CnTAB est proche des SO3-.

N + (C H 3) 3 (CH-CH2)- SO3- (CH-CH2)- SO3- -(CH-CH2)- SO3- (CH-CH2)- SO3- N + (C H 3) 3 (CH-CH2)- SO3- (CH-CH2)- SO3- (CH-CH2)- SO3- (CH-CH2)- SO3- -(CH-CH2)- SO3- -(CH-CH2)- SO3- (CH-CH2)- SO3- (CH-CH2)- SO3-

-Le diagramme de phase du PSS/C12TAB a été tracé, et montre que la zone de

précipitation n’a pas tout à fait une forme de larme48 (Figure I-34).

Figure I-34 : Diagramme de phase ternaire du PSS et du PAA avec le C12TAB dans l’eau. Les lignes

pointillées représentent les mélanges équimolaires en tensioactif et monomères de polyélectrolyte48.

-Hayakawa et al.78, 79 ont montré par potentiométrie que la CAC des systèmes PSS/C12TAB est beaucoup plus faible que la CAC de polyélectrolytes moins hydrophobes. En

effet, l’attraction supplémentaire entre le benzène du PSS et les queues des tensioactifs favorise l’association. Hansson et Almgren 75, 77 ont montré avec la même technique que la présence de sel défavorise moins l’association lorsqu’il s’agit du PSS que pour d’autres polyélectrolytes moins hydrophobes à cause des interactions entre les cycles benzéniques du PSS et les tensioactifs.