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IV.3 Influence des fibres courtes de carbone sur la stabilité du PEEK sous irradiation

V.1.1. i Évolution des relaxations dipolaires

À basse température, les temps de relaxation associés au modeγ ne sont pas modifiés par le vieillisse-ment, que ce soit dans les échantillons irradiés à température ambiante ou à 165 °C. Cette tendance est confirmée par les paramètres d’ajustement qui évoluent très peu avec la dose. Ce résultat est cohérent avec les observations faîtes en analyse mécanique dans le Chapitre IV mais également avec les spectres RMN. Le vieillissement n’est pas assez important pour modifier la réponse des entités relaxantes associées au modeγ, même après irradiation à 165 °C.

Relaxationα

La Figure V.1 montre que les temps de relaxations associés au modeα sont décalés vers les hautes températures. Ce décalage se voit également par l’augmentation des temps de relaxation à une tem-pérature donnée associée une diminution des cinétiques de relaxation. Avec l’augmentation de la température d’irradiation, le vieillissement entraîne un décalage plus important. Des études ont mis en évidence qu’une augmentation de la densité de réticulation conduisait à une augmentation des temps de relaxation associés au modeα, i.e. un ralentissement des cinétiques de relaxation [222, 223]. Cette observation est cohérente avec l’hypothèse d’une densité de réticulation plus élevée qui limite d’autant plus la mobilité.

La Figure V.2 présente l’évolution avec la dose des paramètres Tetαf pour le PEEK irradié à tempé-rature ambiante et à 165 °C. L’irradiation induit une augmentation du paramètre T. Cette évolution est cohérente avec l’augmentation de Tgen analyse calorimétrique et de Tαen analyse mécanique.

Après irradiation à 165 °C, l’augmentation avec la dose de Test plus importante ce qui est expliquée par la densité de réticulation plus élevée.

Figure V.2 – Évolution avec la dose des paramètres Tetαf pour les échantillons irradiés à température ambiante (TA) et à 165 °C.

Pourαf, une évolution opposée est observée entre les deux températures d’irradiation. Comme pour l’aire de la relaxationα en analyse mécanique décrite précédemment confère (Chapitre IV), ces évolutions trouvent leur origine dans la compétition entre amorphisation et réticulation :

• Après irradiation à température ambiante, une légère augmentation deαf est observée avec la dose. Elle est expliquée par l’effet prédominant de l’amorphisation. La phase amorphe est moins contrainte par les cristallites dont la quantité est plus faible ce qui conduit à une augmentation du coefficient d’expansion du volume libre. Cet effet du taux de cristallinité sur l’expansion du volume libre est similaire à son effet sur le coefficient de dilatation thermique du polymère : plus le taux de cristallinité augmente et plus ce coefficient est faible [224]. Néanmoins, l’effet de l’amorphisation est probablement contrebalancé en partie par la réticulation qui limite la dilatation du volume libre.

• Avec l’augmentation de la température d’irradiation, le vieillissement entraîne une diminution importante deαf. Les analyses calorimétriques ont montré que l’irradiation au-dessus de la tempé-rature de transition vitreuse favorise la réticulation sans modifier l’amorphisation des échantillons. Ainsi, cette évolution indique que l’effet de la réticulation est devenu prédominant devant celui de l’amorphisation. La réticulation limitant la dilatation du volume libre, cela conduit à une diminution deαf.

Évolution de la dynamique relaxationnelle au voisinage de Tg

Afin d’étudier l’influence du vieillissement sur la dynamique relaxationnelle, l’évolution de la fragilité avec la dose a été étudiée. Le concept de fragilité a été introduit pour la première fois par Angell pour décrire le comportement en température de la viscosité des liquides formateurs de verre [225]. Par la suite, ce concept a été utilisé pour décrire la dépendance en température des temps de relaxation [226]. Plus un matériau est fragile au sens d’Angell et plus la dépendance en température des temps de relaxation obéit à une loi VTF. Inversement, les temps de relaxation d’un matériau dit fort obéissent à une loi d’Arrhenius. Ce paramètre décrit la vitesse à laquelle la mobilité des séquences de chaînes diminue à l’approche de la transition vitreuse depuis l’état fondu (T > Tg) : plus la fragilité augmente et plus la mobilité diminue rapidement à l’approche de Tg.

On définit l’indice de fragilité m comme :

m = µd log(τHN) d (Tg/T) ¶ T=Tg = Tg αf(Tg− T0)2ln(10) (V.1)

La Figure V.3 présente les courbes de fragilité (log(τHN) vs Tg/T) du PEEK vierge, irradié à température ambiante (34 MGy) et à 165 °C (34 MGy). Les valeurs de Tgutilisées sont celles mesurées au second balayage afin de s’affranchir des contraintes internes. Ces courbes ont été décalées verticalement afin de les faire coïncider en Tg/T = 1 à un tempsτ = 100 s, i.e. le temps de relaxation théorique de la viscoélasticité à T = Tg. L’insert de la figure présente l’évolution avec la dose de l’indice de fragilité calculé à partir de l’équation V.1 et des paramètres d’ajustement VTF (confère Tableau V.1).

Figure V.3 – Évolution des courbes de coopérativité du PEEK vierge, irradié à température ambiante et à 165 °C. :

Dans le PEEK vierge, l’indice de fragilité calculé est de 127. Cette valeur est cohérente avec celles reportées pour le PEEK dans la littérature qui sont de l’ordre de 150 [227, 228](28). Le PEEK a un comportement fragile au sens d’Angell.

Après irradiation, une augmentation de l’indice de fragilité avec la dose est observée. Cette augmen-tation est linéaire dans le cas des échantillons irradiés à température ambiante. Après irradiation à 165 °C, une augmentation plus importante de m est observée. Cette augmentation de la fragilité avec la densité de réticulation a déjà été observée dans la littérature [223]. Dans le cas du PEEK, Al Lafi a reporté une diminution de l’indice de fragilité m avec la dose malgré une augmentation de la densité de réticulation après irradiation ionique sous air [227]. Cependant, il attribue cette diminution à l’oxydation du PEEK qui entraîne une augmentation du nombre de groupes polaires dont l’effet est prédominant devant celui de la réticulation. Dans notre cas, l’irradiation étant réalisée sous vide, le PEEK ne s’oxyde pas et cette augmentation de m est expliquée par la réticulation : au-dessus de Tg, les nœuds de réticulation modifient le ralentissement de la dynamique relaxationnelle à l’approche de la transition vitreuse.