• Aucun résultat trouvé

1.3 Études existantes de susceptibilité face aux IEM

1.3.1 Études en mode rayonné

Comme mentionné dans la partie1.2.2, les simulateurs de perturbations IEMN rayonnées à onde guidée sont les plus présents dans le monde. Il est donc naturel qu’une majorité d’articles traitant de la susceptibilité de systèmes ou de composants évoquent des essais menés avec ce type de simulateur [47,48,49,50,51,52,53,54,55,56].

Des formes de type « double exponentielle » sont utilisées dans ces articles afin de perturber voire de détruire les équipements testés. Dans certaines des études, le temps de montée du signal a été modifié afin de tester son influence sur la valeur du seuil de perturbation [47,48,49,54,55]. Il en résulte que plus le temps de montée du signal rayonné est court et plus le seuil de perturbation est bas. Cette conclusion est valable pour des

études variées comme sur des ordinateurs [48, 49], des téléphones [57] ou des micro-contrôleurs [47]. L’explication donnée dans [48] est qu’une perturbation avec un temps de montée plus rapide (autour de 100 ps au lieu de 5 ns par exemple) a une densité spectrale d’énergie plus importante, notamment entre 100 MHz et 1 GHz où la majorité de l’énergie est couplée sur le système étudié de par ses dimensions.

Les études réalisées en mode rayonné peuvent être variées (composants, réseaux de distribution en électricité, etc.) et de nombreux équipements grand public ont pu être testés, mais les essais sur des ordinateurs sont les plus présents [48, 49, 50, 51,52, 55, 56]. La majorité du temps dans ces études, des ordinateurs de technologies de générations différentes sont testés afin d’évaluer s’ils sont plus ou moins vulnérables au fil du temps.

Dans [51, 56], R. Hoad et al. ont testé des ordinateurs dans leur boîtier et avec les périphériques sous un simulateur à onde guidée. Des défaillances de deux types ont été rencontrées :

des perturbations nécessitant une intervention manuelle afin de retrouver un fonctionnement normal, pour des champs électriques à partir de 22 kV/m,

des dommages pour des champs à partir de 45 kV/m. Dans ce cas, il a été montré que les alimentations étaient souvent mises en cause.

En revanche dans [48, 55], M. Camp et al. ont testé uniquement la partie électronique des ordinateurs, sans boîtier ni périphériques : la carte mère avec la RAM, le processeur et l’alimentation. Ces essais ont été réalisés sous un simulateur à onde guidée avec l’alimentation en dehors de la zone de test. Dans ce cas, les résonances qui peuvent se créer dans le boîtier ont été évitées et seulement la vulnérabilité de la partie électronique du PC a été testée (hors alimentation). Afin d’identifier la partie de l’ordinateur la plus susceptible, un programme de test avec différentes routines faisant intervenir le fonctionnement de différents composants de l’ordinateur a été utilisé. Durant chaque sous-routine, une perturbation rayonnée a été générée et il a été montré que les composants de la carte mère sont plus susceptibles que la RAM ou le processeur seul.

Par ailleurs, des analyses au microscope optique de processeurs détruits ont été effectuées (figure 1.40). Pour de faibles valeurs de champ électrique, des composants tels que des diodes ou des transistors sont détruits, comme sur l’image (b) de la figure 1.40. Si l’amplitude du champ augmente, la fusion de pistes de circuits intégrés ont lieu, en plus de multiples destructions de composants, comme sur l’image (a), (c) et (d) de la figure 1.40. Enfin, une augmentation supplémentaire du champ à une valeur d’environ 1300 kV/m, entraîne la destruction des fils de bonding, en plus des multiples composants et pistes de circuits intégrés.

Figure 1.40 – Détails de la destruction d’un processeur observé au microscope optique [48]

Finalement, la principale conclusion de ces essais sur des ordinateurs de technologies de générations différentes est que les PC modernes sont généralement moins vulnérables. En effet, les valeurs des seuils de perturbation obtenues diminuent considérablement avec la modernité du PC. D’après R. Hoad et al. dans [51,56], ceci peut être expliqué par l’amélioration de la conception des circuits électroniques d’un point de vue CEM et par la limitation des émissions Radio Fréquences (RF). M. Camp et al. ont ajouté dans [48, 55] que l’augmentation de la fréquence du signal d’horloge dans les PC, mais aussi la réduction de la taille des structures sont autant d’arguments pouvant expliquer cette tendance.

Des études sur des systèmes de dimensions plus importantes ont également pu être réalisées et apportent plusieurs conclusions intéressantes. Des lignes électriques moyenne tension, incluant les transformateurs, ont été testées avec un simulateur à onde guidée générant un champ électrique maximal de 50 kV/m [53]. Le principal objectif de l’étude était la mesure des tensions et courants induits sur les lignes et les transformateurs. Il a été montré que pour un champ IEMN de 20 kV/m, des tensions induites de 400 kV et des courants de 600 A sont possibles lorsque la ligne est chargée aux deux extrémités par son impédance caractéristique.

Une ligne d’alimentation de train a été testée avec un simulateur hybride [34], générant un champ électrique horizontal représentatif de l’onde Bell. Pour ce faire, une ligne a été placée directement au-dessus de rails (chargés aux deux bouts par leur impédance caractéristique) sur lesquels une locomotive était positionnée. Il a été montré que le courant couplé, mesuré au-dessus de l’extrémité de la locomotive, avait une valeur de 272 A avec un temps de montée de 20 ns. Ce courant pourrait donc être un sujet de préoccupation pour les systèmes électroniques associés au train.

Une ligne triphasée (en circuit ouvert aux deux extrémités) associée à un quatrième fil de terre (court-circuité à la terre aux deux extrémités) a été testée avec un simulateur hybride [58]

générant un champ électrique crête de 26 kV/m. Dans ce cas, il a été montré que le courant circulant sur un seul fil de phase avait une amplitude de 240 A.

Toutes ces études sur des lignes électriques présentent des résultats assez similaires en termes de courants induits. Elles ont permis de réaliser des modèles de couplage d’une IEMN sur des lignes avec précision.

Par ailleurs, des études de vulnérabilité face aux IEM rayonnées ont également été menées sur des composants comme des micro-contrôleurs [47,49], dans des simulateurs à onde guidée. Face à une impulsion électromagnétique rayonnée (quelques nanosecondes de temps de montée et entre 20 et 400 ns de durée à mi-hauteur), il a été montré que les micro-contrôleurs sont perturbés à partir d’un champ électrique d’une valeur de 30 kV/m [47] ou de 42 kV/m [49] suivant le modèle. Celle-ci passe à 12 kV/m dans le cas d’un champ possédant un temps de montée de 100 ps. Par ailleurs, la susceptibilité des micro-contrôleurs s’avère être très influencée, notamment par la longueur de leur ligne d’alimentation. Dans [50], de petits contrôleurs digitaux ont été testés et il a été montré que les petits composants, de manière générale, sont susceptibles pour des valeurs très élevées de champs, de plusieurs dizaines de kilovolts par mètre, car leur petite surface ne capte que très peu d’énergie.

Enfin, dans la littérature relative aux essais de susceptibilité face aux IEM, quelques articles [47, 48, 49, 59] utilisent deux paramètres afin de décrire les différents effets de défaillance rencontrés sur les composants ou les systèmes étudiés :

Breakdown Failure Rate (BFR) qui correspond au taux de défaillance, c’est-à-dire lorsque la fonction pour laquelle a été conçu le système n’est plus remplie. Dans ce cas, aucun dommage physique n’est observé et le système fonctionne de nouveau normalement après un reset ou un certain temps. Le BFR est défini comme étant le nombre de dysfonctionnements rencontrés lors de la série d’essais, divisé par le nombre d’impulsions appliquées. Il est calculé pour chaque valeur de tension choisie pour l’impulsion,

Destruction Failure Rate (DFR) qui correspond au taux de destruction, c’est-à-dire lorsqu’un dommage physique a lieu et qu’une réparation matérielle doit être effectuée. Il est défini, à chaque niveau de tension, comme étant le nombre de destructions divisé par le nombre d’impulsions appliquées, .

Ces deux notions sont illustrées et les allures des courbes généralement obtenues sont présentées sur la figure 1.41. Le BRF et le DFR fournissent donc le seuil de perturbation et de destruction d’un équipement ou d’un composant.

De nos jours, des thèmes émergeants sont étudiés comme les systèmes photovoltaïques [60] ou encore les Smart Grids [61]. L’inquiétude de W. A. Radasky concernant les Smart

Figure 1.41 – Définitions du BFR et du DFR (a) et allures des courbes généralement obtenues (b) [47]

Grids est que la volonté de rendre intelligent les réseaux de distribution en électricité, par l’introduction de systèmes électroniques, pourrait les rendre plus vulnérables. Ceci pourrait créer des pannes électriques étendues. En effet, les lignes aériennes ou les relais de transmission hyperfréquences avec leurs câbles s’étendant vers le sol possèdent une géométrie de couplage idéale pour l’IEMN. À titre d’exemple, une telle impulsion se couplant sur les câbles de contrôle basse tension d’un poste source pourrait entraîner des niveaux de l’ordre de 20 kV sur les composants électroniques du système de contrôle. Par conséquent, les capteurs de distribution ou encore les SCADA (Supervisory Control and Data Acquision : système de supervision industrielle qui traite en temps réel un grand nombre de mesures et contrôle à distance les installations) qui contrôlent les flux électriques pourraient être endommagés. Sur des lignes desservant les particuliers, plusieurs centaines de kilovolts pourraient être couplés et endommager les équipements connectés, dont notamment les compteurs intelligents à semi-conducteurs.