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Chapitre 2. Association entre les acides gras et le cancer dans des modèles in vivo et in vitro

2.2 Études in vitro

2.2.1 Le cancer du sein

De façon générale, les acides gras polyinsaturés n-6 ont été associés à une augmentation du développement d’un carcinome mammaire in vivo, mais également à l’induction d’un phénotype invasif et métastatique in vitro. Une étude dans des cellules de cancer du sein T47D a montré que le linoléate est en mesure d’induire la prolifération de ces cellules in vitro (Reyes et al, 2004). Le linoléate stimule également la prolifération des cellules tumorales mammaires humaines MCF-7 in vitro, ainsi que celle de la lignée cellulaire immortalisée mais non-transformée MCF-10A (Grammatikos et al, 1994). Au contraire, l’ajout de linoléate dans le milieu n’induit pas de stimulation de la croissance des cellules épithéliales mammaires humaines isolées de tumeurs bénignes non-cancéreuses cultivées in vitro (Balakrishnan et al, 1989). Un groupe a, par ailleurs, étudié l’effet de différents types d’acides gras sur la prolifération in vitro de cellules d’une lignée dérivée d’un carcinome mammaire de rat induit par le DMBA. L’ajout de linoléate dans le milieu de culture a conduit à une stimulation de la croissance qui fut encore plus marquée lorsque

le linoléate fut remplacé par de l’oléate. Par contre, l’ajout de stéarate, un acide gras saturé, a causé une inhibition de la prolifération de façon dose-dépendante (Wicha et al, 1979). Un traitement à l’oléate semble promouvoir la migration des cellules MDA-MB-231 (Navarro- Tito et al, 2009). La plupart de ces études ayant été effectuées en absence d’albumine et donc dans des conditions non-physiologiques, elles sont à examiner avec précaution. Des travaux complémentaires viennent cependant confirmer l’effet prolifératif du linoléate, et d’autres acides gras insaturés comme l’oléate, liés à l’albumine, sur les cellules de cancer du sein en culture (Park et al, 2000; Rose & Connolly, 1990).

Plusieurs études dans divers types cellulaires ont montré que la lipotoxicité engendrée par l’accumulation d’acides gras à longues chaînes serait spécifique aux acides gras saturés (Cnop et al, 2001; Hardy et al, 2000; Listenberger et al, 2001; Maedler et al, 2001; Wickramasinghe et al, 1996). Hardy et al. (2003) ont montré que le palmitate induit une diminution du potentiel membranaire des mitochondries, ce qui entraîne le relâchement du cytochrome c dans le cytoplasme. Ces effets ne sont pas observés lorsqu’un analogue non-métabolisable du palmitate est utilisé, prouvant l’implication du métabolisme des acides gras dans leurs effets sur la survie des cellules cancéreuses. Le palmitate induirait l’apoptose en causant une diminution des niveaux de cardiolipine, un phospholipide présent dans les mitochondries qui est nécessaire à la rétention du cytochrome c (Hardy et al, 2003).

De leur côté, les acides gras insaturés ont un effet prolifératif et protecteur contre l’apoptose dans les lignées cellulaires en culture (Hardy et al, 2000; Vinciguerra et al, 2009). Le linoléate induit la survie sur plusieurs jours de cellules Caco-2 de carcinome colorectal en culture (Dommels et al, 2003). Des acides gras insaturés, dont l’oléate et le linoléate, induisent la prolifération d’hépatocytes in vitro (Vinciguerra et al, 2009). Ces études montrent que l’effet des acides gras insaturés sur le développement des cellules cancéreuses n’est pas observé uniquement dans des cellules cancéreuses du sein. Cette disparité au niveau de la toxicité entre les acides gras saturés et insaturés est directement liée à la capacité différentielle des acides gras à promouvoir l’accumulation de triglycérides

dans la cellule : les acides gras insaturés induisent une forte accumulation de triglycérides dans les gouttelettes lipidiques des cellules traitées contrairement aux acides gras saturés. Un co-traitement d’acides gras saturés et insaturés prévient la lipotoxicité induite par les acides gras saturés dans des cellules cancéreuses du sein in vitro (Hardy et al, 2000). L’ajout d’oléate stimule l’incorporation du palmitate dans les triglycérides tout en restaurant les niveaux de cardiolipine dans les mitochondries, empêchant ainsi le palmitate d’induire son effet cytotoxique (Hardy et al, 2003). Cet effet protecteur contre l’apoptose apporté par l’oléate a été observé dans plusieurs lignées cancéreuses du sein (Przybytkowski et al, 2007). Un traitement de 24 h à l’oléate protège également, durant plusieurs jours, les cellules cancéreuses de la mort cellulaire induite par l’absence de sérum. Cette capacité anti-apoptotique n’est observée que dans les cellules tumorales ayant un haut potentiel d’accumulation de triglycérides (Przybytkowski et al, 2007). En outre, l’oléate serait toxique dans des cellules dont la capacité de synthèse des triglycérides serait inhibée (Listenberger et al, 2003).

2.2.2 Le cancer de la prostate

Très peu de groupes de recherche ont examiné l’effet des divers types d’acides gras sur la prolifération de cellules tumorales de prostate in vitro et les résultats obtenus sont très divergents. Rose & Connolly (1991) ont observé une augmentation de la prolifération des cellules cancéreuses PC-3 suite à un traitement au linoléate et une diminution en réponse à un traitement par des acides gras polyinsaturés n-3. Aucun des acides gras testés n’a eu d’effet sur la prolifération des cellules de la lignée DU145. De leur côté, du Toit et al. (1996) ont obtenu une augmentation de la prolifération des cellules DU145 en réponse à un traitement à l’oléate et à l’acide eicosapenténoique (un acide gras polyinsaturé n-3) tandis qu’une fois encore le linoléate n’avait aucun effet sur la croissance cellulaire. Un troisième groupe n’a pas observé d’effet de l’oléate ou du linoléate sur les cellules tumorales de prostate DU145 (Motaung et al, 1999). Le faible nombre des études in vitro effectuées et l’hétérogénéité des résultats ne permettent donc pas de tirer de conclusions concernant un

principe général sur l’effet potentiel des divers types d’acides gras sur la prolifération des cellules tumorales de la prostate.

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