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Éloignement des sols propres et le marché

3.3 Enjeux actuels relatifs aux sols peu contaminés excavés au Québec

3.3.6 Éloignement des sols propres et le marché

Comme plusieurs projets sur le marché nécessitent des sols de catégorie A, propres, avec seules des teneurs de fond non dangereuses, et que ces sols se trouvent de plus en plus loin des grands centres urbains au Québec, il serait envisageable d’utiliser les sols A-B comme agent de remplacement.

En effet, le besoin en sols propres (>A et A) est présent au Québec. Ils ont les caractéristiques géotechniques voulues et demeurent sans risque pour la santé et le milieu naturel. Or, l’exploitation

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des carrières et sablières et par corollaire, l’épuisement des ressources ne sont pas des alternatives à envisager, d’autant plus que le tonnage des sols traités ou non (A-B) disponibles est en croissance. Dans une optique de développement durable,le traitement des sols, la minimisation de l’empreinte écologique de la solution choisie et la mise en valeur des ressources vont de pair avec la réutilisation des sols excavés peu contaminés au Québec. En clair, la valorisation de ces derniers est une orientation à privilégier dans l’industrie des sols contaminés actuelle et future (MDDEP, 2012). En effet, si le gouvernement préconise ce mode de gestion des sols au détriment de l’enfouissement et de l’épuisement des ressources, par exemple, il répondra à un autre de ses objectifs de la PPSRTC de 2013, soit de revitaliser le territoire de manière durable. Collectivement, il sera possible de faire baisser la demande en matériaux granulaires non contaminés provenant des sablières et des carrières, par l’utilisation substitue de sols peu contaminés excavés ou traités (Ibid.). Cela favorisera, en fin de compte, la préservation des ressources et du territoire. Outre ce gain environnemental envisageable, l’utilisation de sols légèrement contaminés, traités et ségrégués (séparés physiquement) comme substitut aux sols propres favorisera la réduction de l’émission de gaz à effet de serre, par le transport en autres, la réduction et le contrôle de la contamination.

Or, actuellement, force est de constater que bien qu’il existe une ouverture à la valorisation des sols peu contaminés A-B au Québec, il n’en demeure pas moins que plusieurs facteurs sur le marché influencent négativement celle-ci. D’abord, le besoin et les possibilités actuelles de valorisation sont limités versus la quantité à disposer. En effet, selon plusieurs intervenants dans le domaine, le marché n’est pas assez développé et la clientèle n’est pas encore prête à payer pour atteindre les objectifs de valorisation souhaités. Le fait que l’option actuelle post-traitement, l’enfouissement, ne soit pas chère, et ce, quelque soit la concentration finale du sol influence la donne (Bouchard, 2013). La question est sociale présentement, non seulement économique et environnementale (SLCMD, 2013a). Est-ce que la société désire contaminer les terrains propres restants, est-ce qu’elle veut continuer à transporter des sols contaminés avec tous les inconvénients qui en découlent, veut-elle économiser les ressources pour un développement durable, etc.? Par ailleurs, un sol traité peut voir ses propriétés modifiées, ce qui représente un frein à sa réutilisation dans divers projets de valorisation. Par exemple, s’il y a trop de particules fines pour le recouvrement des matières résiduelles dans un LET, trop de matières organiques pour les exigences de construction des routes, si l’on y trouve trop de mauvaises herbes, plantes envahissantes et organismes nuisibles pour des sols de culture, etc., cela peut désavantager sa mise en valeur (Ibid.). De plus, la qualité des sols est de plus en plus importante pour tout projet. On est rendu à une autre étape, soit celle de réfléchir sur la qualité du sol pour son client (Bégin, 2012). En effet, comme les utilisateurs (ou de leurs ingénieurs) recherchent des sols avec des

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critères géotechniques et de qualité, redonner une utilité aux sols A-B peut être complexe (SLCMD, 2013a). Par exemple, un sol de niveau <A ne contient pas de contamination organique et son contenu en métaux est sensiblement le même qu’un sol d’origine naturelle (propre), en équilibre avec son environnement depuis des années (Ibid.). Par contre, un sol A-B implique nécessairement une dégradation de sa qualité comparativement à un sol de niveau A (Ibid.). En ce sens, un sol excavé catégorisé B ou <B, selon les critères de la Politique, peut être considéré comme un agent de remplacement d’un sol A, pour certains projets. L’acceptabilité du propriétaire du terrain récepteur est aussi importante. Il faut réussir à obtenir son autorisation. Puis, les craintes d’ordre juridique sont encore présentes relativement à la diminution de la qualité du terrain récepteur. Le fait d’utiliser un sol légèrement contaminé au lieu d’un sol propre peut affecter la valeur de revente du terrain.

Somme toute, bien que plusieurs éléments n’encouragent pas le marché des sols A-B, il reste que plusieurs autres facteurs sont favorables à la valorisation des sols A-B. Dans bien des cas, il est possible de décontaminer des sols B-C vers l’atteinte du niveau A-B. Les techniques sont présentes et le développement de celles-ci entraîne une pression à la baisse sur les coûts de traitement versus l’enfouissement, ce qui milite en faveur de la valorisation (SLCMD, 2013a). Effectivement, de plus en plus de techniques existent pour laver et enlever des contaminants inorganiques et mixtes, en plus de permettre de séparer physiquement les différentes fractions granulométriques, en vue de valoriser les plus grossières (>2 mm) (Ibid.). Puis, Réseau Environnement constate aussi qu’il y a une volonté croissante, de la part des entreprises qui traitent et gèrent ces sols, de procéder à leur conditionnement lorsque cela est requis, afin de permettre de rencontrer les différents critères géotechniques exigés par certains projets de valorisation. En plus, dans la nouvelle PPSRTC 2013, le gouvernement entend prôner la valorisation des sols A-B, ce qui poussera le marché à évoluer en ce sens. En effet, dans le plan d’action 2012-2016 de la Politique, il est écrit que « tout sol contaminé excavé qui peut être traité, et par la suite valorisé devrait l’être. Les sols faiblement contaminés peuvent avantageusement se substituer à du matériel propre dans le cadre de divers travaux d’ingénierie ». Nécessairement, ces dires permettent d’envisager positivement la mise en valeur de ces derniers, ce qui est rassurant. Aussi, il faut se rappeler que la valorisation peut représenter un double avantage pour la société, soit de faciliter la gestion des sols traités et, de ce fait, diminuer la pression sur les milieux naturels qui devraient autrement être exploités pour combler la demande (Ibid.). L’espace est d’ailleurs de plus en plus restreint dans les lieux d’enfouissement, ce qui contribue à envisager les possibilités de valorisation. À titre d’exemple, déjà en 2005, en Abitibi, les centres de traitement commençaient à explorer des solutions de valorisation alternatives pour leurs sols traités, parce que les LES à proximité n’acceptaient plus les sols contaminés comme matériel de recouvrement journalier (Plante, 2005).

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En effet, si ce n’est déjà commencé, la PQGMR souhaite mettre une redevance pour réduire l’enfouissement de sols contaminés et soutenir le traitement, la valorisation des sols de même que la réhabilitation des terrains sur le marché (MDDEP, 2012). De surcroît, le nombre de lieux dégradés, aptes à recevoir des sols A-B pour leur réhabilitation ne fait qu’augmenter. Des anciennes carrières, mines, sablières, des vieux sites pollués par des activités industrielles, comme les gares de triage et les stations-services commencent à être ciblées par différents gestionnaires et par le gouvernement pour des projets de réhabilitation durable, utilisant des sols A-B à moindres coûts.

Bref, la valorisation des sols A-B représente une option durable de gestion des sols et de réhabilitation des terrains, sur plusieurs points. Encore faut-il considérer le coût total de gestion et de valorisation des sols peu contaminés qui doivent être inférieur au tarif total de gestion des sols B-C, qui est ordinairement l’enfouissement ou l’utilisation en recouvrement journalier, si l’on veut y tirer avantage (Loubier, 2013).