• Aucun résultat trouvé

Chapitre 3 L’apprentissage du patrimoine

1. Éducation pour le patrimoine

Le musée de Rumilly et les fêtes, proposent – de manière plus ou moins explicite suivant le contexte – ce que l’on peut considérer comme une éducation pour la reconnaissance du patrimoine, ou en d’autres termes une éducation pour le patrimoine [Barthes et al., 2014]. L’éducation pour le patrimoine œuvre pour la reconnaissance de ce dernier en tant que tel et relève de deux niveaux d’apprentissage. Le premier concerne les connaissances et faits concrets liés aux éléments patrimoniaux tandis que le deuxième concerne l’apprentissage des règles, valeurs et codes permettant la mise en patrimoine d’un objet et le développement d’une sensibilité patrimoniale.

Le musée de Rumilly est donc un espace non-formel d’apprentissage offrant dès lors des outils et des activités qui diffèrent d’espaces d’apprentissages formels. Il propose ainsi une grande diversité d’activités en lien avec son exposition permanente ou bien ses expositions temporaires. L’analyse des brochures, et donc des activités proposées par le musée, démontre qu’il existe des étapes dans les apprentissages liés au patrimoine. Ainsi, en premier lieu, le musée propose des activités « découvertes » aux classes de maternelle : elles offrent un apprentissage sensoriel, centré sur la vue et l’observation, du lieu muséal et du patrimoine. En

121 second lieu, à partir du CP et jusqu’au CE2, ce sont des activités de type « expérimentale » qui sont produites pour les enfants. Ces dernières ont pour but d’approfondir l’approche sensorielle par une participation plus grande des enfants devant leur permettre de décrire les objets patrimoniaux observés. En troisième lieu, les activités proposées plus spécifiquement pour les classes de CM1 et CM2, sont « analytiques ». Les enfants sont alors sollicités à associer des connaissances spécifiques à l’observation et la description des éléments patrimoniaux. L’apprentissage pour reconnaitre le patrimoine et l’établissement d’une relation à celui-ci dans le musée se font ainsi selon des étapes progressives, qui mêlent apprentissage des codes et valeurs patrimoniales, transmission de connaissances et apprentissage d’une sensibilité patrimoniale.

Poursuivre par l’analyse d’une de ces activités m’a permis de voir comment les différents types d’apprentissages sont mis en place dans le musée. J’ai alors pu, à ce moment-là, distinguer deux niveaux dans l’éducation pour le patrimoine : un niveau explicite qui concerne les savoirs à la fois liés aux règles et aux codes des institutions muséales mais aussi liés aux connaissances historiques, informations, etc. ; un niveau plus implicite qui concerne la transmission de valeurs patrimoniales et d’une sensibilité patrimoniale liées à un objet. En effet, dans un premier temps, ce sont les règles et les codes de l’univers muséal qui sont exposés et rappelés aux enfants : ne pas toucher les objets, ne pas courir, etc. Ces règles et codes participent à un apprentissage de la « bonne » distance à établir avec l’objet patrimonial. Ce sont également des informations et connaissances historiques à propos de Rumilly qui sont transmises lors des activités. Dans un second temps, l’activité muséale participe à la transmission des valeurs participant à la « fabrique du patrimoine » [Heinich, 2009]. Ainsi, l’activité mise en place par la médiatrice présente des valeurs patrimoniales (historique, authenticité, rareté, beauté, etc.), donnant alors une image particulière des objets patrimoniaux aux enfants. Ces objets, sélectionnés pour figurer dans le musée et dans l’activité, deviennent exemplaires de ce qu’est le patrimoine et sont au service d’une éducation au patrimoine.

Les fêtes participent également à une éducation pour le patrimoine, bien que de manière plus implicite. L’apprentissage des manières de faire la fête, suivant le type de fête et leur lien avec le patrimoine, participe à donner un cadre définissant le patrimoine.

La fête patronale et le carnaval de Rumilly, dont la vocation patrimoniale n’est pas explicite, participent tout de même à une reconnaissance des différents types d’éléments patrimoniaux de la ville. J’ai pu constater que, depuis leur création, la fête patronale et le Carnaval ont connu des réadaptations constantes à l’environnement économique et sociale de la ville. Néanmoins

122 certains de leurs éléments centraux sont maintenus et prônés comme patrimoine local. Aujourd’hui, ces aspects persistent et se concentrent autour des enfants et des familles offrant ainsi une vision des éléments patrimoniaux de Rumilly.

La Balouria, fête thématique récente, propose quant à elle de mettre en valeur le patrimoine savoyard de Rumilly. Centrée autour des thèmes de la nature et des vieux métiers, elle favorise des situations d’apprentissages au patrimoine en proposant aux enfants des activités autour de celui-ci. Les types d’objets proposés lors de ces activités participent à donner aux enfants une idée de ce que comprend le patrimoine.

Les parcours festifs, et les fêtes en général, participent également et peut être davantage que le musée, à l’apprentissage d’émotions patrimoniales. C’est par des expériences patrimoniales, sensorielles et corporelles, pendant les fêtes que les enfants peuvent établir un lien, physique et mental, avec le patrimoine. Ces parcours proposent aussi des éléments patrimoniaux « types » qui participent à l’éducation au patrimoine des enfants.

En d’autres termes, dans le musée comme dans les fêtes, la découverte du patrimoine par les enfants, leur permet potentiellement de développer une relation avec ce dernier. En étant confrontés à des productions patrimoniales, dans le musée et dans les fêtes, les enfants sont donc exposés à une éducation pour le patrimoine. Ils apprennent à reconnaitre le patrimoine par le biais de l’apprentissage des normes et valeurs patrimoniales institutionnelles et festives, des connaissances et savoirs liés aux objets et par le développement d’une sensibilité patrimoniale.