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a) La révocation du sursis

Aux termes de l’art. 46 al. 1 1ère phr. CP, « [s]i, durant le délai d’épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu’il y a dès lors lieu de prévoir qu’il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel ».

Conformément à la lettre de l’art. 46 al. 1 CP, la nouvelle infraction commise par le condamné doit être un crime ou un délit134 – la négligence étant par ailleurs suffisante135 –, de sorte qu’une contravention ne suffira pas à permettre au juge de révoquer le sursis136.

Contrairement à l’octroi du sursis où l’on applique la notion de récidive spéciale137, une récidive générale suffit pour permettre la révocation du sursis138. Par ailleurs, en sus du fait que le crime ou le délit soit commis durant le délai d’épreuve, il faut pouvoir prévoir que le condamné commettra de nouvelles infractions139, notion qui englobe également les

132 FF 1999 II 1787, p. 1860; CRCPI-KUHN,art. 45 N 3; Petit Commentaire CP, art. 45 N 1; TRECHSEL/PIETH, Art. 45 N 1; ROSSIER, p. 216; BSK StGB I-SCHNEIDER/GARRÉ,Art. 45 N 1.

133 CRCPI-KUHN,art. 45 N 6; Petit Commentaire CP, art. 45 N 3; TRECHSEL/PIETH, Art. 45 N 2.

134 VIREDAZ/THALMANN,N 143; CRCPI-KUHN,art. 46 N 5; STRATENWERTH/WOHLERS, Art. 46 N 1;

135 CR CP I-KUHN, art. 46 N 7; TRECHSEL/PIETH, Art. 46 N 1; Petit Commentaire CP, art. 46 N 4;

STRATENWERTH/WOHLERS, Art. 46 N 1.

136 VIREDAZ/THALMANN,N 143; CRCPI-KUHN,art. 46 N 5.

137 Cf. supra note 55.

138 CRCPI-KUHN,art. 46 N 6; VIREDAZ/THALMANN,N 143; Petit Commentaire CP, art. 46 N 4.

139HURTADO POZO, N 1554; CR CP I-KUHN, art. 46 N 11; KILLIAS/KUHN/DONGOIS, N 1364;

STRATENWERTH/WOHLERS, Art. 46 N 2.

contraventions140. Pour juger du risque de commettre de nouvelles infractions, il convient de procéder à l’évaluation de l’ensemble du comportement du condamné pendant le délai d’épreuve, et non pas de se satisfaire de son comportement en lien avec le nouveau crime ou délit141. La révocation du sursis ne pourra donc intervenir que si la nouvelle infraction laisse entrevoir une réduction sensible des perspectives de succès de la mise à l’épreuve142 amenant ainsi le juge à constater un pronostic défavorable143. A noter que même si toutes les conditions de la révocation du sursis sont réunies, le juge ne pourra pas révoquer le sursis si les conditions d’une exemption de peine sont données (art. 55 al. 1 CP)144.

b) Le cumul des deux peines ou la peine d’ensemble

Si le juge révoque le sursis ou le sursis partiel, il pourra soit modifier le genre de la peine révoquée pour fixer, avec la nouvelle peine, une peine d’ensemble conformément à l’art. 49 CP (art. 46 al. 1 2ème phr. CP) soit cumuler la peine révoquée et la nouvelle peine145. En revanche, il ne pourra prononcer une peine privative de liberté ferme que si la peine d’ensemble est de six mois au moins ou encore si les conditions prévues à l’art. 41 CP sont réalisées (art. 46 al. 1 in fine CP).

La possibilité146 laissée au juge de fixer une peine d’ensemble uniquement dans le cas où les peines ne sont pas de même genre n’est pas restée sans critiques147. Le Tribunal fédéral a toutefois clairement tranché la question en prévoyant qu’il n’était pas possible, conformément à la lettre de l’art. 46 al. 1 2ème phr. CP, de fixer une peine d’ensemble pour des peines de même genre148.

140 Petit Commentaire CP, art. 46 N 10; GREINER, p. 127.

141 Arrêt du Tribunal fédéral 6B_714/2015 du 28 septembre 2015, consid. 2.4; ATF 128 IV 3, consid. 4b, JdT 2004 IV 34; ATF 103 IV 138, consid. 2; CRCPI-KUHN,art. 46 N 8.

142 Arrêt du Tribunal fédéral 6B_105/2016 du 11 octobre 2016, consid. 1.1; ATF 134 IV 140, consid. 4.2 et 4.3;

FF 1999 II 1787, p. 1862; CRCPI-KUHN,art. 46 N 8; KILLIAS/KUHN/DONGOIS, N 1364; Petit Commentaire CP, art. 46 N 1.

143 CRCPI-KUHN,art. 46 N 8; KILLIAS/KUHN/DONGOIS, N 1364.

144 HURTADO POZO, N 1556; CRCPI-KUHN,art. 46 N 12.

145 CRCPI-KUHN,art. 46 N 13.

146 Il s’agit bien d’une Kann-Vorschrift. Cf. notamment ATF 134 IV 241, consid. 4.4; JEANNERET,Réforme, p.

366.

147 Cf. à ce sujet notamment : CR CP I-KUHN, art. 46 N 15; VIREDAZ/THALMANN, N 148; BSK StGB I-SCHNEIDER/GARRÉ, Art. 46 N 37; STRATENWERTH, p. 164 s.; STRATENWERTH/WOHLERS, Art. 46 N 4;

TRECHSEL/PIETH, Art. 46 N 5.

148 Arrêt du Tribunal fédéral 6B_442/2015 du 27 janvier 2016, consid. 1.1; ATF 138 IV 113, consid. 4, JdT 2013 IV 63; ATF 134 IV 241, consid. 4.4.

Une autre question s’est posée en doctrine, à savoir s’il était possible de modifier le genre de la peine antérieure au détriment du condamné. Une partie de la doctrine est très vite intervenue en s’y opposant et en considérant qu’il est plus que douteux du point de vue de l’Etat de droit (« rechtsstaatlich mehr als bedenklich ») que l’on puisse convertir une peine plus légère en une peine plus lourde149. Le Tribunal fédéral est cette fois allé dans le sens de la majorité en arrivant à la conclusion qu’il n’était pas possible de modifier le genre de peine en défaveur du condamné dès lors que cela contredirait la ratio legis de cette disposition150.

2. Absence d’un pronostic défavorable (al. 2)

En revanche, « [s]’il n’y a pas lieu de prévoir que le condamné commettra de nouvelles infractions, le juge renonce à ordonner la révocation. Il peut adresser au condamné un avertissement et prolonger le délai d’épreuve de la moitié au plus de la durée fixée dans le jugement. Il peut ordonner une assistance de probation et imposer des règles de conduite pour le délai d’épreuve ainsi prolongé. Si la prolongation intervient après l’expiration du délai d’épreuve, elle court dès le jour où elle est ordonnée » (art. 46 al. 2 CP).

Cette « clause de la seconde chance »151 impose au juge de renoncer à la révocation s’il n’est pas en mesure de poser un pronostic défavorable152. Dans ce cas, il devra, parmi les possibilités offertes par la loi, choisir la solution la plus appropriée et la mieux à même d’atteindre le but espéré, à savoir le maintien d’un comportement futur adéquat du condamné153.

3. Dispositions complémentaires (al. 3-5)

D’après l’art. 46 al. 3 CP, « [l]e juge appelé à connaître du nouveau crime ou du nouveau délit est également compétent pour statuer sur la révocation ». En revanche, si le condamné se soustrait à l’assistance de probation ou viole des règles de conduite, justifiant ainsi une

149 BSK StGB I-SCHNEIDER/GARRÉ,Art. 46 N 34; STRATENWERTH, p. 164. Contra : CRCPI-KUHN,art. 46 N 16. 150 Arrêt du Tribunal fédéral 6B_436/2013 du 27 juin 2013, consid. 1.3; ATF 137 IV 249, consid. 3.4.3, JdT 2012 IV 205.

151 Terme employé notamment par KUHN, p. 104. On pourrait même à notre sens parler de « clause de la troisième chance » dès lors que l’octroi du sursis constitue déjà en quelque sorte une seconde chance.

152 RIBORDY, p. 84; KUHN,p. 104; VIREDAZ/THALMANN,N 144; Petit Commentaire CP, art. 46 N 15; QUELOZ, p.

210.

153 STRATENWERTH/WOHLERS, Art. 46 N 6.

révocation, cette dernière devra être ordonnée par le juge qui a octroyé le sursis154. Si le sursis a été octroyé par un tribunal étranger, le juge suisse ne sera en outre pas compétent pour le révoquer155.

Si le condamné se soustrait à l’assistance de probation ou viole les règles de conduite, l’art. 95 al. 3 à 5 trouve application (art. 46 al. 4 CP). Le juge pourra dans ce cas notamment prolonger le délai d’épreuve de la moitié au plus de sa durée initiale (art. 95 al. 4 let. a CP), ordonner une nouvelle assistance de probation (art. 95 al. 4 let. b CP), modifier les règles de conduite (art. 95 al. 4 let. c CP) ou encore – en tant que ultima ratio et pour autant que le condamné présente un risque sérieux de récidive156 – révoquer le sursis (art. 95 al. 5 CP). La révocation devra dans ce cas, comme nous l’avons vu157, être ordonnée par le juge qui a octroyé le sursis.

Enfin, l’art. 46 al. 5 CP prévoit qu’il n’est plus possible d’ordonner la révocation lorsque trois ans se sont écoulés depuis l’expiration du délai d’épreuve. Ceci vise la situation où une autorité n’apprendrait le motif de révocation qu’après la fin du délai d’épreuve158.

VI. La réforme de 2015 : ce qui va (et ne va pas) changer

La réforme de 2015 a apporté d’importantes modifications dans le domaine du droit des sanctions, et pas seulement s’agissant du sursis. Ainsi, parmi les principales innovations

« hors sursis », on peut notamment citer l’abaissement du plafond des peines pécuniaires à 180 jours-amende et l’instauration d’un plancher de 3 jours-amende (art. 34 al. 1 1ère phr.

nCP)159 ; la suppression de la « clause de sauvegarde » que constituaient les art. 36 al. 3 à 5 CP160 ; l’abaissement du plancher des peines privatives de liberté à 3 jours (art. 40 al. 1 nCP)161 et la rétrogradation du travail d’intérêt général en une modalité d’exécution de la

154 Petit Commentaire CP, art. 46 N 18; SCHWARZENEGGER/HUG/JOSITSCH, p. 147; STRATENWERTH/WOHLERS, Art. 46 N 7.

155 CRCPI-KUHN,art. 46 N 11; Petit Commentaire CP, art. 46 N 19; BSK StGB I-SCHNEIDER/GARRÉ,Art. 46 N 61; TRECHSEL/PIETH, Art. 46 N 10.

156 CRCPI-PERRIN,art. 95 N 21; QUELOZ, p. 210.

157 Cf. supra note 154.

158 CRCPI-KUHN,art. 46 N 19; Petit Commentaire CP, art. 46 N 21; ROSSIER, p. 218; TRECHSEL/PIETH, Art. 46 N 16.

159 RO 2016 1249, p. 1249; JEANNERET, Réforme, p. 348; JOSITSCH/VON ROTZ, p. 497.

160 RO 2016 1249, p. 1250; JEANNERET, Réforme, p. 353.

161 RO 2016 1249, p. 1250; JEANNERET, Réforme, p. 354 s.; JOSITSCH/VON ROTZ, p. 498; WIPRÄCHTIGER, p.

478.

peine (art. 79a nCP)162. Par ailleurs, la future réforme va également engendrer les modifications suivantes s’agissant du sursis :

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