• Aucun résultat trouvé

2. Mesure de l’effet de contraintes mécaniques 47

2.2. Dispositif expérimental

2.2.6. Échauffement

Lors du processus de mesure de l’effet de contraintes mécaniques, deux phéno-mènes causent un échauffement du cristal, et donc un décalage de la fréquence du trou brûlé :

— le mouvement de la platine de translation motorisée pour changer le nombre de poids présents sur le cristal provoque une élévation de la température de la platine expérimentale ainsi que de tous les éléments qui y sont fixés ;

— une partie de la relativement forte puissance optique du laser maître envoyée sur le cristal, en excluant la fraction réfléchie, est absorbée par le matériau. Si la présence de la poudre semble permettre une meilleure homogénéité des contraintes appliquées, elle provoque aussi une réduction de l’efficacité du transfert thermique entre le cristal et la plaque de cuivre à 4 K sur laquelle il repose. De ce fait, et comme la platine de translation permettant de bouger les poids est située relativement loin du cristal en raison de la séparation en deux supports, l’échauffement dû à la puissance du laser maître devient prédominant.

Amplitude et constante de temps de l’échauffement

Pour mesurer l’importance de cet effet, on brûle un trou dans l’absorption du cristal en l’absence de rayonnement issu du laser maître, et après un temps de thermalisation de quelques minutes pour compenser l’échauffement dû à la puissance de brûlage, le laser maître est envoyé à travers le cristal et le profil d’absorption du trou est scanné répétitivement. En supposant que la vitesse de scan (de 100 kHz/s) est suffisamment plus élevée que la vitesse du déplacement du trou en raison de l’échauffement, il est possible de relever la position du trou à différents moment et de tracer cette évolution. Cette mesure est répétée pour 4 valeurs différentes de la puissance du maître et les données sont présentées sur laFigure 2.8.

Un ajustement par une loi exponentielle permet d’estimer les caractéristiques de la réponse du cristal à l’échauffement. Dans tous les cas, la constante de temps peut être estimée entre 45 et 60 secondes, le régime stable étant atteint après quelques centaines de secondes. On constate également que l’amplitude de l’échauffement semble être assez important. Pour une puissance de 1,1 mW et en considérant une loi enT4pour la sensibilité à la température telle que celle proposée dans la référence [33], le décalage en fréquence de 90 kHz du centre du trou correspondrait à une élévation d’environ 1,7 K à partir de la température du brûlage de 3,15 K.

Optimisation du refroidissement par le cryostat

Pour compenser la suppression de la laque d’argent, un système de chambre interne hermétique est en développement sur notre cryostat. Il s’agit de pouvoir disposer d’une enceinte fermée nomméeInner Vacuum Can, entièrement à 4 K contenant une pression donnée de l’ordre de la centaine de millibars d’hélium gazeux à la même température. Ce réservoir jouerait le rôle de thermostat pour permettre un retour à l’équilibre plus rapide, voire limiter l’échauffement dû au déplacement des poids.

De nombreux essais ont été réalisés pour mettre en place un tel dispositif en collaboration avec le fabricant du cryostat. Cependant, une telle mise en œuvre présente certaines difficultés de conception mécanique. Il est notamment complexe de réaliser une enceinte hermétique à 4 K. Le design proposé est une cloche en cuivre doré de 20 cm de diamètre intérieur pour environ la même hauteur comportant les deux accès optiques nécessaires et étant contenue dans le bouclier à 50 K présenté sur laFigure 1.5. Cette enceinte dispose d’une sortie de pompage vers l’extérieur, et d’une entrée d’hélium (vers l’extérieur également). La voie d’alimentation en

0 50 100 150 200

Dur´ee apr`es lib´eration du laser maˆıtre [s] 0 20 40 60 80 Fr ´equence centrale du tr ou br ˆul ´e [kHz] P(ML) = 1,1 mW P(ML) = 0,5 mW P(ML) = 0,3 mW P(ML) = 0,1 mW

Figure 2.8. – Évolution de la fréquence centrale du trou en fonction du temps pour différentes puissances de laser maître envoyées sur le cristal. L’origine des temps correspond au moment où commence l’éclairement par le maître (caché lors du brûlage du trou). Les lignes en pointillé représente des courbes exponentielles ajustées aux données.

0 5 10 15 T(IVC) [K] 0 2 4 6 8 10 12 Dur´ee [h] 10−7 10−5 10−3 P(OVC) [mbar]

Figure 2.9. – Évolution de la température dans la chambre interne (notée T(IVC)) contenant initialement 100 mbar d’hélium et de la pression dans la chambre externe (notée P(OVC)) après quelques heures de refroidisse-ment.

hélium est composé d’un mince tuyau en cuivre suffisamment long pour assurer une descente en température de l’hélium entre la bouteille et l’intérieur de la chambre. Des essais de descente en température ont été réalisés ; les courbes représentant certaines grandeurs liées au cryostat sont représentées sur laFigure 2.9.

Une difficulté majeure consiste à être capable de fermer hermétiquement l’enceinte à température ambiante et à ce que la descente en température ne crée pas de fuite du fait de la contraction différentielle des matériaux impliqués. Un joint indium est réalisé et serré par des vis en inox réparties autour de la cloche en cuivre par des rondelles en molybdène, combinaison qui assure une bonne tenue du joint à basse température. Cependant, de nombreux autres raccords sont nécessaires, pour les fenêtres, les lignes de pompage et alimentation en hélium ou l’accès électrique par l’extérieur.

Cette difficulté à maintenir l’étanchéité à très basse température peut se voir sur laFigure 2.9. On voit qu’après un certain temps de descente de la température de la chambre interne (similaire à ce qu’on observe sur laFigure 1.6sans hélium), des remontées périodiques de plus de 5 K apparaissent avec une période de quelques heures. Similairement, on voit que la pression dans la chambre externe (qui est censée être de l’ordre de quelques 108mbar) remonte avec la même période dans

l’heure qui précède le pic de température et redescend immédiatement après. Ce phénomène semble directement lié à la différence de déformation des matériaux avec la descente en température : en raison de la contraction différentielle, en dessous d’une certaine température, une fuite apparaît (hausse de la pression dans la chambre externe). L’hélium qui s’échappe crée un contact thermique avec l’extérieur qui provoque un réchauffement de tout le cryostat (pic visible sur la température de la chambre interne), et donc une fermeture de la fuite. Le pompage continu lors de cette expérience de l’enceinte à 300 K rétabli un vide suffisant, permettant à la température de redescendre et le cycle se répète. Il va de soi qu’au bout d’un certain temps, la chambre pression dans la chambre intérieure tend vers 0, mais la fuite semble être suffisamment faible devant le volume de la chambre interne pour que ce temps soit très long. Quoi qu’il en soit, un tel comportement rend l’utilisation d’une pression d’hélium gazeux impossible sans une optimisation plus poussée du système qui reste à faire au moment de la rédaction de ce manuscrit.

Suppression du laser maître

Pour supprimer l’échauffement dû au laser maître, il est nécessaire de diminuer fortement la puissance provenant de ce laser. Cependant, cette réduction pose deux problèmes :

— le maître est utilisé pour créer un signal de battement permettant une mesure hétérodyne par des photodiodes rapides ;

— la relativement haute puissance du maître par rapport à l’esclave permettait d’obtenir un niveau de signal relativement élevé et donc un rapport signal à bruit suffisant.

Pour pouvoir obtenir un bon rapport signal à bruit en n’utilisant que quelques dizaines de nanowatts, il est nécessaire de remplacer les photodiodes amplifiées par gain transimpédance par d’autres détecteurs présentant un niveau de bruit plus faible et une amplification plus importante. Les caractéristiques des photodiodes à avalanche modèle APD-410A/M commercialisées par Thorlabs semblent permettre d’obtenir un rapport signal à bruit suffisant pour réaliser cette mesure (gain de conversion potentiellement 15000 fois supérieur).

L’inconvénient de ces photodiodes est qu’elles présentent une bande passante très inférieure à celles utilisées précédemment (10 MHz contre 1,2 GHz). Dans ces conditions, il n’est pas possible de continuer à utiliser le laser maître comme oscillateur local pour générer un battement. Pour remédier à ce problème, le laser maître est supprimé totalement du faisceau atteignant le cristal, et le battement nécessaire à la détection est obtenu en utilisant seulement le laser esclave. Pour cela, le modulateur acousto-optique est alimenté par un signal permettant de générer deux modes de

fréquences différentes dans le spectre de la lumière envoyée vers le cristal (voir

Appendice A). Ceci revient, dans le programme décrit à lasous-section 1.4.2, à mettre deux valeurs non nulles dans le vecteur utilisé pour générer le signal de pilotage de l’AOM.

En faisant varier la fréquence des deux modes pour balayer une plage de fréquence inférieure à la séparation entre les deux, on peut relever sur cette plage le spectre de transmission et de déphasage du cristal. La chaîne de traitement radiofréquence entre les détecteurs et la plateforme d’acquisition peut être simplifiée, et le masque utilisé pour filtrer le signal reçu est adapté pour correspondre à la fréquence du battement. Cette méthode a permis de réaliser les mesures présentées dans la suite de ce chapitre en utilisant pour la lumière incidente sur le cristal une puissance de 40 nW répartie sur les deux modes. Cette faible puissance permet d’une part d’éviter le chauffage du cristal, d’autre part d’éviter que le mode de référence ne brûle un trou lors desscansrépétés pour relever l’évolution du spectre du trou brûlé.

2.3 Sensibilité d’un trou brûlé à une pression