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É VOLUTION DE LA TAILLE MOYENNE DES ESPÈCES EXPLOITÉES

Des données de taille et des effectifs des espèces exploitées, collectées au cours des campagnes en mer effectuées de 1982 à 2001, ont été analysées selon différentes approches pour mesurer l’effet de l’exploitation sur les ressources marines en Mauritanie.

3.3.1 Évolution des tailles moyennes

Un indice de taille moyenne a été calculé pour les groupes de poissons les plus ciblés par la pêche. On montre que chez les perciformes le poids moyen de capture a fortement diminué sur la dernière décennie (figure suivante). La baisse est plus nette au nord du Cap Timiris où l’effort de pêche déployé est le plus important.

Figure 3-10 : Poids moyens individuels (kg) par trait de chalutage chez les perciformes

Pour les pleuronectiformes (genre psettodes au nord et autres genres plutôt au sud), une baisse est perceptible, surtout au sud et notamment à partir de 1995. Il faut signaler qu’en zone sud ces espèces, qui vivent avec les crevettes sur les même fonds (à l’embouchure du fleuve Sénégal), sont l’objet de captures accessoires importantes.

Figure 3-11 : Poids moyens individuels (kg) par trait de chalutage des pleuronectiformes

Par comparaison, les résultats de l’analyse d’un groupe d’espèces sans valeur commerciale, les batracoidiformes, très occurrents en zone nord où se déploie une grande part de l’effort de pêche sur les autres espèces ciblées, ne semble pas montrer une variation des tailles moyennes (figure suivante).

Figure 3-12 : Poids moyens individuels (kg) par trait de chalutage des batracoidiformes

3.3.2 Spectres de taille

L’analyse de spectre de taille a été construite sur la base de biomasses par classe de taille et les effets des facteurs tels que la bathymétrie, la zone et la saison ont été testés sur les résultats. Globalement, les pentes et ordonnées à l’origine sont remarquablement stables sur la période (15 ans) malgré l’augmentation de la pression de pêche.

En revanche, la baisse de la taille moyenne des poisons est beaucoup plus évidente sur la même période. Cependant, si l’on considère uniquement les poissons d’intérêt commercial, les résultats attendus, à savoir la hausse de l’ordonnée à l’origine et la baisse de la pente, sont observés (Figures suivantes).

Figure 3-13 a) et b) : Résultats de l’analyse de spectre des tailles, illustrant une évolution différentielle selon que les ressources ont ou non des valeurs commerciales

Ces résultats mettent en évidence un effet net de la pêche commerciale sur la structure démographique des populations marines. La baisse des tailles est confirmée par ailleurs à travers une enquête menée auprès des professionnels. En effet, d’après les différents acteurs rencontrés, la pêche a modifié significativement, ces dernières années, les structures démographiques de certaines espèces exploitées parmi lesquelles le poulpe est

en première place, suivi de la daurade et du thiof. Les captures de ces espèces sont dominées actuellement par les individus de tailles moins importantes, situation qui serait en détérioration continue.

Selon les professionnels de la pêche, la diversité des ressources exploitées est différente suivant le type de pêche considéré. Pour la pêche industrielle, on signale une baisse sensible du nombre des espèces débarquées. Cette diminution serait due à la fois à la rareté des espèces de grande valeur commerciale et au déplacement des activités de la pêche chalutière vers des zones du large moins riches en termes de variété d’espèces.

En revanche, une augmentation du nombre des espèces exploitées est observée au niveau de la pêche artisanale. La diminution des espèces dites nobles et l’apparition de nouveaux marchés en Afrique pour des espèces jadis rejetées expliquent ce phénomène. Aussi, l’utilisation par les pêcheurs de ce sous secteur d’un grand nombre d’engins non sélectifs a-t-il contribué à la capture d’une plus grande variété d’espèces.

3.3.3 Remarques conclusives

Les ressources démersales sont en général dans un état allant de la pleine exploitation à la surexploitation. Les cas avérés de surexploitation concernent les langoustes, le poulpe et le thiof. Plusieurs autres espèces montrent des signes de surexploitation (baisse continue des rendements, des tailles capturées). L’approche écosystémique montre que les ressources démersales ayant une forte valeur commerciale subissent une pression de pêche qui en modifie la structure démographique (élimination des grands individus). La hausse des rendements observée pour des espèces à courte durée de vie telles que les crevettes pourrait s’interpréter comme un déséquilibre du milieu au dépend des espèces à plus longue durée de vie. La situation des ressources pélagiques, qui sont partagées, appelle maintenant à plus de précaution et l’on considère la limitation de l’effort de la pêche industrielle comme une mesure de précaution qui est devenue nécessaire.

Ces résultats sont corroborés par l’opinion des professionnels de la pêche, unanimes sur un constat de baisse des rendements des espèces ciblées par les différentes flottilles mauritaniennes (industrielles et artisanales), en particulier le poulpe et les poissons démersaux. L’allongement des durées moyennes de la marée en est une illustration. Par exemple, pour les congélateurs, la durée de la marée est passée de 25 jours vers les années 1980 à 50 jours au cours des années 1990 puis à 70 jours actuellement. En pêche artisanale la baisse des rendements s’est matérialisée par le passage de la pêche journalière à une situation où les marées deviennent très fréquentes. Pour certains (30% des personnes interviewées) la baisse des rendements est estimée à 80 %, mais la majorité des pêcheurs s’accorde sur un chiffre d’environ de 40 %. Une vingtaine d’espèces commercialisées semble concernée par la chute de l’abondance, avec en premier lieu le poulpe, suivi du calamar et du thiof.

4 Biodiversité et exploitation commerciale des ressources

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