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1 - Modification des rapports entre le Nord et le Sud ?

Un système humanitaire « international » toujours très « occidental »27

Cette première partie aura pour but de mettre au défi ma première sous-hypothèse, à savoir que la localisation induirait potentiellement un changement des rapports entre acteurs du Nord et du Sud au profit de ces derniers. Afin de tenter de défendre mes propos et tester leur pertinence, j’entamerai cette partie par une présentation des rapports entre ces différents acteurs.

Les rapports entre acteurs du Nord et du Sud sont principalement structurés autour de partenariats. Knudsen nous livre une présentation utile des objectifs à la base de ces collaborations. Les principes de partenariat ont été approuvés en 2007 lors du Global Humanitarian Platform (GHP). Ils constituent un effort collectif pour répondre à une réalité humanitaire changeante tout en créant une conception partagée de la manière dont des partenariats efficaces pourraient contribuer à une aide humanitaire, elle aussi, plus efficace (Knudsen, 2011).

27 Ce titre fait référence à une question posée par Van Brabant, demandant si la localisation signale, voire accélère, l’avènement vers un « système international plus international » (Van Brabant, 2016).

Ces principes, au nombre de cinq, sont : l'égalité, la complémentarité, la transparence, la redevabilité, l'orientation vers les résultats et la responsabilité. L’auteur rappelle qu’au cours des dernières décennies une proportion croissante de l'aide, au regard du volume financier, a été fournie par des organisations de la société civile. Dans ce cadre changeant, beaucoup des grandes ONGH internationales ont apporté un support à leurs branches nationales ou aux acteurs locaux, les incluant ainsi dans des réseaux internationaux ayant une portée géographique et financière d’une échelle similaire à celle des agences onusiennes. Face à cette évolution, il était nécessaire de revoir les règles d'engagement entre les agences des Nations-Unies et les organismes non-onusiens afin de refléter une plus grande égalité dans la détermination des priorités, stratégies et réponses. Les principes de partenariats sont donc nés de cette discussion et le GHP est devenu un forum permanent pour le dialogue sur la manière dont ces principes pourraient être mis en pratique (Knudsen, 2011).

Dans le même temps, l’auteure nous rappelle qu’un processus de réforme humanitaire, dans le but d'améliorer la qualité et la prévisibilité des réponses grâce à des mécanismes de leadership, de coordination et de financement améliorés, était en bonne voie. Le partenariat a été ajouté en tant que quatrième pilier dans ce processus de réforme, non seulement en tant que stratégie pour améliorer les résultats mais aussi en tant qu'engagement afin de changer la manière dont les acteurs humanitaires internationaux travaillent ensemble. Les parties prenantes ont convenu que les principes de complémentarité et d'égalité, ainsi que de transparence et de responsabilité, constitueraient la base de partenariats axés sur les résultats au niveau mondial. Depuis leur approbation, les principes sont devenus des points de référence communs (Knudsen, 2011).

Il est donc clair que le partenariat constitue un idéal d’échange, de collaboration et participe notamment à une volonté d’impliquer et prendre en compte les savoirs et valeurs des locaux. Cette rhétorique a aussi pour fonction de prendre en considération les critiques faisant état de l’inefficacité de l’aide et de la faible participation des bénéficiaires (De Leener, 2013). Comme le précise aussi Bouju et Ayimpam, la notion de « partenariat », abondamment utilisée dans la rhétorique de l’aide internationale et dans les relations Nord-Sud, évoque « le respect des différences » et « l'établissement de relations équilibrées entre les partenaires » (Bouju & Ayimpam, 2015). La théorie semble donc nous indiquer que tout a été pensé afin de faire de l’aide une réponse négociée et appropriée.

Cependant, il serait erroné de concevoir tous les partenariats comme semblables. Il en existe une très grande hétérogénéité. Cela peut aussi bien être dû aux enjeux émanant d’un contexte donné qu’être dû aux types mêmes des participants et à leurs façons d’opérer (Ricard et al., 2010). Plusieurs dimensions se trouvent en général simultanément au sein des partenariats. Il existe des partenariats à dimension principalement opérationnelle visant surtout à améliorer la qualité de l’aide, son efficacité ou son acceptation. D’autres auront une visée plus politique et viseront par exemple à défendre la place d’un partenaire sur la scène publique (Ricard et al., 2010).

Que signifie véritablement le partenariat dans l’action humanitaire et à quoi ressemble-t-il en pratique ? Il est évident que des partenariats efficaces sont plus que de simples relations mécaniques où des acteurs s’uniraient pour atteindre un ensemble d’objectifs communs en se divisant les responsabilités et planifiant le travail de manière commune (Street, 2011). Ils impliquent également des enjeux sous-jacents de pouvoir, de positionnement et de styles de travail.

Eberwein distingue deux formes de partenariat. Le partenariat « patronage », qu’il définit comme une forme de partenariat caractérisé par la dominance d’un des acteurs, et le partenariat « stricto sensu », qu’il définit au contraire comme une relation entre égaux (Ricard et al., 2010). Selon Street, bon nombre des plus grandes ONGH internationales choisissent principalement un rôle d’exécuteur direct (« direct implementer ») ou adoptent une approche plus mixte, employant leur propre personnel pour définir et gérer les projets ainsi que pour soutenir des partenaires locaux (Street, 2011). Si les principes de partenariat semblent offrir une base consensuelle pour établir les rapports entre acteurs du Nord et du Sud, leur mise en œuvre demeure un défi dans la pratique (Knudsen, 2011).

Lors d’une table ronde portant sur les partenariats entre acteurs du Nord et du Sud, Kamel Mohanna28 partagea l’une de ses expériences en tant que représentant d’ONG nationales au Liban (Ricard et al., 2010). Il raconta le déroulement d’une réunion rassemblant des représentants de bailleurs, d’ONG européennes et libanaises. L’objet de cette rencontre était de discuter des projets que le bailleur venait d'approuver. D’après lui, les ONG nationales étaient alors réduites à un rôle assez passif. Cette rencontre était donc l’occasion d’en toucher un mot. Pourtant, il a été confronté au fait qu’il était demandé aux ONG nationales de se plier à la volonté du représentant de l'ONG partenaire. Leur seule fonction était en effet d’assumer les tâches qui faciliteraient l’intervention des partenaires. Aussi, leur accès aux documents officiels se faisait selon le bon vouloir du représentant de l'ONG européenne. Il précise que d'un point de vue juridique, cela n'était même pas dans leur droit car les contractants étaient le bailleur et l'ONG européenne partenaire. Leurs interventions durant la réunion ne devaient se résumer qu’à remercier les « généreux donateurs », discuter certains aspects pratiques, faire l'exposé du contexte sociopolitique, donner le maximum de données et d'informations et respectueusement remercier et confirmer la pertinence de l'intervention. Cette situation paraît bien loin des principes d’égalité mentionnés plus haut. S’il semble clair qu’établir un partenariat ne constitue pas une finalité mais demeure un moyen afin de permettre une aide plus adaptée, la relation décrite ci-dessus semble plus être assimilable à une stratégie opportuniste d’accès au terrain. Comme l’affirme Mohanna, « Ce n'était en tout cas aucunement l'arène adéquate pour discuter ouvertement et démocratiquement du partenariat et des moyens de l'améliorer pour opérer une révision des rapports

28 Kamel Mohanna est président de l’association Amel International-Liban et coordinateur général du collectif des ONG libanaises et arabes.

de force totalement en faveur des ONG européennes ! » (Ricard et al., 2010). Bien évidemment, il ne faut pas tomber dans l’excès et généraliser ces défaillances à l’ensemble des partenariats. Néanmoins, si cela ne représente qu’un exemple, ce récit est exemplaire de la crispation possiblement ressentie par les acteurs du Sud concernant un certain mépris des partenaires du Nord.

L’analyse de Bouju et Ayimpam illustre parfaitement les enjeux derrière ces relations partenaires-donneurs et partenaires-receveurs (Bouju & Ayimpam, 2015). Leur étude nous offre une critique intéressante des limites et conséquences en lien avec l’élaboration de partenariat pour les acteurs du Sud. Si leur recherche s’établit au Burkina Faso, les éléments observés et les conclusions sont facilement applicables à plus d’un contexte géographique.

Ricard souligne comme limite de la notion de partenariat le rapport asymétrique inévitable qui résulte de la situation financière (Ricard et al., 2010). L’un possède des fonds et les cède à un autre qui les reçoit. Cette différence de moyens engendre souvent une asymétrie importante au sein de la relation entre les partenaires du Nord et ceux du Sud. Le déséquilibre dans les rapports contribue fortement à déboucher sur un partenariat de type « patronage ». « Cette relation particulière

d’inégalité structurelle aboutit de fait à un rapport de patronage, ou de clientèle, très éloigné de l’idéal de relations équilibrées entre partenaires qui est connoté par la notion de partenariat» (Bouju & Ayimpam, 2015 : 3). Le proverbe bien connu selon lequel « la main qui donne est toujours au-dessus de celle qui reçoit » demeure une réalité souvent peu réfutable.

Le financement de l’aide n’est pas un dû mais se mérite. Ce n’est qu’au prix d’un alignement, une mise en conformité vis-à-vis d’un bailleur, que l’accès devient possible. Le partenaire qui possède les ressources financières détient un certain pouvoir sur les récipiendaires et occupe de ce fait une position dominante dans la relation.

Par ailleurs, les normes imposées par les bailleurs, occidentaux pour la grande majorité, afin d’être reconnu comme partenaire légitime peuvent constituer des obstacles pour les organismes du Sud. Le parcours du combattant pour les acteurs du Sud afin de se voir accordé des subventions commence dès la phase d’appel d’offres. Une candidature adéquate doit impérativement correspondre à un format de réponse précis et respecter des procédures déterminées et encadrées par des règles de gestion financières mais aussi par « un cadre de pensée » bien défini (Bouju & Ayimpam, 2015). Cela peut être source de soucis pour certains. Les plus petits organismes, ayant moins d’expérience ou pouvant compter sur des moyens moindres, ont plus de chance de butter dès les premières marches (Bouju & Ayimpam, 2015). Il est évident qu’il est donc nécessaire de posséder une certaine expérience des mécanismes d’appel à propositions et de gestion des financements. Les moins expérimentés peuvent aussi éprouver des difficultés à comprendre le jargon administratif utilisé, les temporalités et les codes de la bureaucratie de l’aide (Bouju & Ayimpam, 2015). Les conditions imposées par les bailleurs fonctionnent comme un filtre sélectionnant dès les premières phases qui est apte à se voir

reconnaître comme partenaire. «Le processus d’instrumentation tend à sélectionner les partenaires en

fonction de leur capacité supposée à se conformer aux normes du modèle technique et gestionnaire imposé » (Bouju & Ayimpam, 2015 : 5).

Dans le cas où les acteurs arrivent à s’entendre et où un partenariat peut être contractualisé, des mécanismes de contrôle des fonds alloués seront imposés. Des procédures de justification comptable assurant la redevabilité financière du récipiendaire seront alors prescrites (Bouju & Ayimpam, 2015). Si un certain contrôle semble justifié, son application n’est pas sans conséquence pour les partenaires du Sud. « Ce n’est pas le principe d’un contrôle bureaucratique d’attribution et d’usage de l’aide financière qui est contesté, c’est son organisation, la complexité des règles de gestion des subventions, la lourdeur des audits mensuels imposés par les différents bailleurs qui posent problème » (Bouju & Ayimpam, 2005 : 7). « Le contrôle se fait dans un maquis de règles complexes et de procédures changeantes qui coexistent, s’entremêlent, se contredisent parfois et

engendrent la confusion » (Bouju & Ayimpam, 2015 : 7). Tel que le soulignent Bouju et Ayimpan dans leur article, le fait que Philippe Lavigne Delville (Lavigne Delville, 2015) ait observé les mêmes reproches au Niger nous conforte à penser que cela a une portée générale.

Les auteurs ont recours à la notion de « violence structurelle29 » pour décrire les rapports engendrés par cet ensemble d’obstacles normatifs et managériaux (Bouju & Ayimpam, 2005). Lors de mon stage à Conakry, je peux dire que j’ai eu «l’opportunité» d’être un témoin direct de certaines formes de ce type de « violence ». Dans le cadre des programmes subventionnés par le Fonds Mondial (FM), la Guinée essuie en effet une politique de gestion des risques assez contraignante30. Comme le décrit un rapport de Solthis, sous-récipiendaire au même titre que FMG, « si la quasi-totalité des acteurs rencontrés reconnaissent la nécessité de mettre en place des procédures de contrôle des

risques et de limitation des fraudes, notamment dans ces contextes d’intervention marqués par une

forte corruption, force est de constater que les mesures proposées ne sont pas toujours conciliables

avec les contextes dans lesquels elles s’inscrivent » (Solthis, 2014 : 39). À titre d’exemple, les effets secondaires de ces imposants garde-fous ont trait à une problématique monopolisation du temps et à l’accaparement de ressources humaines, à la création de délais qui peuvent provoquer des blocages qui entravent ou retardent les activités, à des surcoûts à charge du bailleur ou des récipiendaires (liés aux déplacements, réaménagements budgétaires, etc.) ou encore à l’inadéquation avec la structuration de

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Comme pour Bouju et Ayimpam, l’acception de la violence structurelle dans ce travail est celle de Joseph Boute (Boute, 1998). « La violence structurelle exprime un rapport de domination intrinsèquement lié à la hiérarchie des rapports sociaux légitimes qui distribuent inégalement les ressources de pouvoir et d’autorité sur le contrôle des ressources entre les positions sociales dominantes et dominées de toute structure sociale » (Bouju & Ayimpam, 2015 : 4).

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En 2013, le FM a entrepris une restructuration importante du portefeuille de la Guinée. À cet effet, le FM a décidé de limiter le nombre de sous-récipiendaires et d’intégrer des ONGI en tant que récipiendaires principaux. Des mesures d’atténuation des risques ont également été mises en place (Zero Cash Policy, agent fiduciaire, etc.). Ces mesures auraient permis de doubler les décaissements du FM vers les récipiendaires principaux et d’améliorer la performance des subventions (Solthis, 2014).

certains partenaires (Solthis, 2014). Si cela pose question, c’est que cela semble pouvoir s’inscrire au détriment des activités. « Trop de contrôle tue la mise en œuvre » (Solthis, 2014 : 27).

L’instrumentation31de l’aide, à l’origine de cette violence, s’opère en parallèle à l’élaboration de contrat de partenariat (Bouju & Ayimpam, 2015). Comme nous venons de le voir, elle porte principalement sur la gestion administrative des dispositifs d’accès aux financements, sur les conventions de financement et la gestion des règles budgétaires et comptables qui organisent la redevabilité des partenaires du Sud (Bouju & Ayimpam, 2015).

C’est l’ensemble du travail de reporting envers les bailleurs qui semble nuisible dans son excès actuel. À ce titre, signalons que certains accords issus du Grand bargain ciblaient justement ce point. L’ambition sera d’alléger une part de la bureaucratie. Comme le dénonce Peter Maurer32, « il (était) absurde de consacrer autant de temps et d'argent à des rapports que personne ne lit » (Parker, 2016). Aussi superficiel cela puisse paraître, un travail de rationalisation de ces tâches lourdes et chronophages pourrait avoir un impact significatif (Parker, 2016).

Une fois les partenariats contractualisés, les objectifs humanitaires sont donc traduits par le partenaire-bailleur en instruments, dispositifs et procédures. Une deuxième forme de « violence » apparaît alors, une « violence symbolique33 » (Bouju & Ayimpam, 2015). Celle-ci est ressentie face aux normes de la culture managériale imposée par la bureaucratie des principaux bailleurs, tels que les agences multilatérales onusiennes, l’Union européenne et la Banque Mondiale. Cette culture managériale répond aux normes du New Public Management (Bouju & Ayimpam, 2015). Ces normes et procédures bureaucratiques, adoptées au nom de l’efficacité et de l’efficience, obéissent à un modèle profondément occidental et ethnocentrique qui s’avère largement inadapté aux réalités des sociétés du Sud. « Ils produisent des effets spécifiques qui structurent l’action, ils imposent leurs

propres contraintes, leurs propres logiques exogènes en fonction de normes d’action préétablies» (Bouju & Ayimpam, 2015 : 5). En bref, cet ethnocentrisme ajouté à l’inégalité en termes de moyens entre acteurs débouche sur des partenariats-patronages structurés par des relations de coopération conflictuelle ne respectant plus les principes et idéaux à l’origine de la notion de partenariat (Bouju & Ayimpam, 2015).

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L’instrumentation de l’aide est une notion qui « désigne l’ensemble des problèmes posés par le choix et l’usage des outils (des techniques, des moyens d’agir, des dispositifs) qui permettent de matérialiser et d’opérationnaliser l’action

gouvernementale (Pierre Lascoumes et Patrick Le Galès, 2005 : 12) » (Bouju & Ayimpam, 2015 : 4).

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Président du Comité International de la Croix-Rouge.

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La violence symbolique « exprime l’intériorisation de la violence structurelle; elle en est la dimension culturelle s’exprimant par des classifications, des normes et des principes de hiérarchisations ajustés aux classements et aux hiérarchies produits par les institutions sociales et considérées comme légitimes ». Transposée au contexte de la solidarité internationale, elle s’exprime dans les normes de gestion imposées par les agences internationales (Bouju & Ayimpam, 2015).

En conséquence, la non-conformité des partenaires du Sud au modèle imposé est considérée comme un manque, une incapacité. D’après les auteurs, cette violence symbolique s’exprime communément dans des réactions de mépris, des formes d’abus de pouvoir ou de harcèlement face à l’inexpérience qu’ont certains partenaires du Sud du jargon, des codes et des normes de la bureaucratie de l’aide ou face à leur incompréhension de la temporalité de l’appel à propositions ou des mécanismes de gestion des financements (Bouju & Ayimpam, 2015).

En temps de crise, ce mépris peut s’observer dans la tendance à souvent reléguer les ONG nationales au rôle d’auxiliaires, en les excluant des clusters et autres mécanismes de coordination. Un exemple peut être donné avec l’intervention internationale à Haïti. Après le tremblement de terre, les acteurs nationaux se sont retrouvés exclus par les acteurs internationaux (Street, 2011). Or, l'exclusion des nationaux dans les mécanismes de coordination humanitaire a des répercussions directes quant à l'accès au financement. Les ONG nationales participent en effet rarement aux instances où les allocations de financement et les priorités sont discutées (Street, 2011).

La violence symbolique est donc installée au cœur des partenariats humanitaires Nord-Sud. Comme l’affirment les auteurs, «sa spécificité est d’être une violence sans coupable au sens juridique car les inégalités économiques et statutaires qui fondent la relation de domination sont inscrites dans les dispositions juridico-légales des contrats partenariaux » (Bouju & Ayimpam, 2015 : 8). Les normes issues du NPM amènent donc les partenaires-bailleurs à nier les singularités socio-culturelles de leurs partenaires-récipiendaires. « Défaillants en ce qui concerne l’établissement de relations “équilibrées” avec les partenaires du Sud, les partenaires du Nord sont aussi défaillants en ce qui

concerne le “respect des différences” » (Bouju & Ayimpam, 2015 : 4). « Dans l’établissement des

partenariats la question de la différence culturelle est systématiquement occultée alors que ceux qui

s’y investissent tentent d’imposer leurs valeurs et leurs normes en niant plus ou moins consciemment ce qui fonde la spécificité et l'identité du partenaire (De Leener, 2013 : 80, 85-87) » (Bouju & Ayimpam, 2015 : 4).

S’il est important de nuancer la propension critique de cette partie et préciser que des exemples de partenariats équilibrés ne sont évidemment pas à nier, mon objectif est de montrer que les « règles du jeu » sont telles que les acteurs du Sud restent bien souvent dans une position de dépendance. La partie développée montre que les mécanismes d’instrumentation peuvent avoir des effets très contraignants, voire opposés aux principes fondateurs du partenariat. Plus généralement, cela impacte négativement les rapports entre acteurs du Nord et du Sud. Mon intention était d’insister sur le fait que cette situation contribue à mépriser le potentiel des partenaires et parfois à les confiner dans des rôles de simple sous-traitant. Il existe également de nombreuses difficultés pour les acteurs du Sud d’accès direct aux financements internationaux. Cela peut représenter une grande source de frustration pour ces derniers. La situation actuelle est aussi caractérisée par un financement « en

cascade », en référence au nombre important d’intermédiaires imposés. Par ailleurs, cela impacte le

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