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La maîtrise du sida : une analyse comparative des réactions organisationnelles au vih/sida en Europe de l'Ouest

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La maîtrise du sida : une analyse comparative des réactions organisationnelles au vih/sida en Europe de l'Ouest

CATTACIN, Sandro, PANCHAUD, Christine Isabelle

Abstract

La réflexion autour des politiques sociales s'inscrit aujourd'hui dans le débat sur la question du rôle et de l'intervention des pouvoirs publics dans une situation de crise de l'Etat social et souligne l'importance des acteurs non étatiques. Nous avons élaboré une typologie des politiques de lutte contre le vih/sida en analysant le welfare mix présent dans ces politiques, c'est-à- dire l'ensemble des producteurs du bien-être étatiques et non étatiques et la division des tâches existant entre eux, le contenu des politiques de lutte contre le vih/sida et les processus politiques en action au sein de ces politiques. Les trois types de réponses identifiés vont au-delà des dichotomies proposées jusqu'ici dans le domaine du vhi/sida et présentent des variantes inattendues par rapport aux expectatives des typologies générales de l'Etat social. Nous nous trouvons ainsi dans une situation où les Etats sociaux sont en train de se restructurer pour aboutir à d'autres constellations internes et externes. Cette situation changeante, où les modèles traditionnels peuvent être "trahis" par des nouvelles [...]

CATTACIN, Sandro, PANCHAUD, Christine Isabelle. La maîtrise du sida : une analyse

comparative des réactions organisationnelles au vih/sida en Europe de l'Ouest. Politiques et Management Public, 1995, vol. 13, no. 2, p. 47-95

DOI : 10.3406/pomap.1995.3393

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:41011

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Sandro Cattacin Christine Panchaud

La maîtrise du sida : une analyse comparative des réactions organisationnelles au vih/sida en Europe de l'Ouest

In: Politiques et management public, vol. 13 n° 2, 1995. 50e numéro. Cahier 2. pp. 47-95.

Résumé

La réflexion autour des politiques sociales s'inscrit aujourd'hui dans le débat sur la question du rôle et de l'intervention des pouvoirs publics dans une situation de crise de l'Etat social et souligne l'importance des acteurs non étatiques. Nous avons élaboré une typologie des politiques de lutte contre le vih/sida en analysant le welfare mix présent dans ces politiques, c'est-à- dire l'ensemble des producteurs du bien-être -étatiques et non étatiques- et la division des tâches existant entre eux, le contenu des politiques de lutte contre le vih/sida et les processus politiques en action au sein de ces politiques. Les trois types de réponses identifiés vont au-delà des dichotomies proposées jusqu'ici dans le domaine du vhi/sida et présentent des variantes inattendues par rapport aux expectatives des typologies générales de l'Etat social. Nous nous trouvons ainsi dans une situation où les Etats sociaux sont en train de se restructurer pour aboutir à d'autres constellations internes et externes. Cette situation changeante, où les modèles traditionnels peuvent être "trahis" par des nouvelles expériences, va dans le sens d'un futur possible qui verrait une gestion différente de tout le secteur social.

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Cattacin Sandro, Panchaud Christine. La maîtrise du sida : une analyse comparative des réactions organisationnelles au vih/sida en Europe de l'Ouest. In: Politiques et management public, vol. 13 n° 2, 1995. 50e numéro. Cahier 2. pp. 47-95.

doi : 10.3406/pomap.1995.3393

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pomap_0758-1726_1995_sup_13_2_3393

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LA MAITRISE DU SIDA :

Une analyse comparative des réactions organisationnelles au vih/sida en Europe de l'Ouest

Sandro CATTACIN Christine PANCHAUD

Résumé La réflexion autour des politiques sociales s'inscrit aujourd'hui dans le débat sur la question du rôle et de l'intervention des pouvoirs publics dans une situation de crise de l'Etat social et souligne l'importance des acteurs non étatiques. Nous avons élaboré une typologie des politiques de lutte contre le vih/sida en analysant le welfare mix présent dans ces politiques, c'est-à-dire l'ensemble des producteurs du bien-être -étatiques et non étatiques- et la division des tâches existant entre eux, le contenu des politiques de lutte contre le vih/sida et les processus politiques en action au sein de ces politiques. Les trois types de réponses identifiés vont au-delà des dichotomies proposées jusqu'ici dans le domaine du vhi/sida et présentent des variantes inattendues par rapport aux expectatives des typologies générales de l'Etat social. Nous nous trouvons ainsi dans une situation où les Etats sociaux sont en train de se restructurer pour aboutir à d'autres constellations internes et externes. Cette situation changeante, où les modèles traditionnels peuvent être "trahis" par des nouvelles expériences, va dans le sens d'un futur possible qui verrait une gestion différente de tout le secteur social.

* Université de Genève, Département de Science Politique

Revue POLITIQUES ET MANAGEMENT PUBLIC, Volume 13, n° 2, Cahier 2, 1995.

© Institut de Management Public - 1995.

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48 Sandro CATTACIN et Christine PANCHAUD

La réflexion autour de la politique sociale s'est orientée ces dernières années dans deux directions nouvelles. D'une part, on constate un premier développement de ce domaine de recherche dans le sens d'un passage d'une opérationnalisation de la politique sociale centrée sur la compréhension de l'activité étatique vers des approches cherchant plutôt à comprendre le système du bien-être en analysant tous les producteurs du bien-être. Cette approche nouvelle s'intéresse non seulement à l'Etat et à la famille, mais également à d'autres expressions organisationnelles de la société civile telles que les organisations sans but lucratif (ou non-profit organizations), -la Croix- Rouge est un bon exemple- et les associations, ainsi que certains acteurs privés fonctionnant plutôt selon une logique de marché, comme par exemple les hôpitaux privés. Cette orientation correspond -pour citer Peter Flora (1986)- à la recherche du degré d'étatisme (stateness) d'un système du bien- être. Ce type de réflexion amène, en d'autres termes, à se demander quels sont l'importance et le rôle de l'Etat dans un welfare System ou encore dans une politique sociale particulière, en particulier lorsque l'Etat n'est plus forcément l'acteur le plus puissant.

D'autre part, on note un intérêt croissant pour des analyses portant sur les conditions de concurrence et surtout de coopération qui s'instaurent dans un champ concret de la politique sociale. Dans ce contexte on parle par exemple, pour citer l'approche qui nous inspire le plus, de welfare mixet de synergetic

welfare mixes (Evers 1993), c'est-à-dire d'arrangements institutionnels entre des acteurs de statut juridique différent (on parle souvent alors d'acteurs publics et privés), produisant une politique publique relative à un problème concret. L'approche du welfare mix conçoit la société comme un lieu qui connaît trois principes d'organisation purs : l'organisation bureaucratique, l'organisation selon les règles du marché et l'organisation par la solidarité.

Ces trois principes correspondent à trois types d'organisation sociale : l'Etat, le marché et la famille. Entre ces types d'organisation sociale se trouve un

"champ intermédiaire" formé par des acteurs ayant des principes d'organisation mixte. Certain appellent ce champ le "tiers secteur" ou le "non- profit sector". Nous préférons, à la suite d'auteurs comme Bauer (1990) ou Billis (1989), mais aussi encore une fois d'EvERS (1991), ne pas parler de secteur afin de ne pas impliquer l'existence dans cette zone intermédiaire d'un principe d'organisation dominant, d'une logique d'action homogène ou d'acteurs structurellement similaires. En effet, notre intention principale est de faire en premier l'inventaire des rapports existant entre les différents acteurs (et non entre les secteurs) et, après seulement, de mettre en évidence les relations -les synergies- existantes ou possibles.

Lier ces deux aspects -l'un visant plutôt à la compréhension d'une constellation, l'autre cherchant à mettre en évidence les dynamiques à l'intérieur de cette constellation- indique l'existence, dans la recherche contemporaine en politique sociale, d'une sensibilité majeure à la compréhension complexe (du point de vue des acteurs impliqués, mais aussi du setting institutionnel) de la production et de la réalisation d'une politique sociale. Cette sensibilité guide aussi ce texte, qui se propose d'analyser la politique en matière de vih/sida dans les pays d'Europe occidentale. Nous

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procéderons plus précisément à une analyse, au niveau des Etats-nations ^, des différentes réponses organisationnelles au vih/sida en ayant recours en premier lieu à des données issues d'une étude menée par un groupe international de chercheurs, à savoir la "WHO/Eurocentre-Collaborative Study on Managing Aids"2, données qui seront complétées par l'analyse de sources secondaires^.

Analyser la Les pistes de recherche de la science politique dans le domaine du vih/sida politique du suivent essentiellement deux directions : d'une part on se pose la question de vih/sida la réaction d'une administration publique, mais aussi, dans le sens plus large

d'une société face à un risque de santé publique concernant l'ensemble de la collectivité. La réponse à cette question demande une analyse des réactions des institutions et de la société à l'égard de cette maladie. Nous sommes ici confrontés à des recherches de type évaluatif concernant le dispositif de programmes et de mesures élaboré dans le domaine du vih/sida et portant sur des aspects organisationnels. Ce type de réflexion suppose en fait une analyse de la division du travail existant entre les acteurs sociétaux ou, pour utiliser le vocabulaire introduit plus en haut, une compréhension du welfare mix qui s'est instauré dans le champ du vih/sida. D'autre part, la science politique cherche a comprendre comment les caractéristiques spécifiques du vih/sida sont prises en considération par les programmes et mesures spécifiques.

Ces deux pistes de réflexion concernent, en d'autres termes, les instances et 1 Cette analyse correspond à la première partie de notre projet de recherche sur les réponses organisationnelles au vih/sida en Europe de l'Ouest, projet financé par le Fonds national suisse de recherche sur le sida (fonds n° 93-7143). Dans une deuxième partie de cette recherche, nous approfondirons l'analyse en étudiant un nombre plus restreint de pays, à savoir : l'Allemagne, l'Autriche, la France, l'Italie et la Suisse.

2 Cette étude est menée sur l'égide de Bernd Marin et Patrick Kenis de l'Eurocentre de Vienne et compte une dizaine de pays participants (voir Marin/Kenis, 1989). Pour les résultats intermédiaires de cas déjà analysés voir : Amaro, 1990 ; Amaro et al., 1992 ; Anciaux/Weil, 1992 ; Bùtschi/Cattacin, 1994 ; de Vroom, 1992 et 1990 ; de Vroom/Kester, 1991 et 1990 ; Fasolo, 1993 ; Guzei et al., 1992 ; Kenis/Nôstlinger, 1993 et 1993a ; Kester/de Vroom, 1993 ; Pestoff et al., 1990 ; von Walden Laing, 1992 et 1991 ; von Walden Laing et Pestoff, 1993.

3 Pour l'Autriche, la Belgique (communauté flamande), l'Italie, le Portugal, la Suède et la Suisse les sources principales proviennent du projet "Managing AIDS" déjà cité, complétées par des sources secondaires. Pour les autres pays, nous avons consulté principalement des sources secondaires émanant des gouvernements ou des organisations sans but lucratifs et des associations ainsi que des documents édités par l'OMS et le Conseil de l'Europe. Nous avons essayé aussi souvent que possible de confronter les sources d'origines différentes afin d'en contrôler la validité. La majeure partie de ces sources est classée par pays dans la

bibliographie.

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50 Sandro CA TTACIN et Christine PANCHAUD

le contenu des programmes de lutte contre le vih/sida. Dans ce texte nous cherchons à combiner ces deux pistes de recherche, notamment en identifiant les arrangements institutionnels de prise en charge des champs les plus importants du vih/sida, mais aussi en analysant l'insertion des politiques du vih/sida dans le référentiel plus général d'une politique sociale. La relation explicative des rapports entre instances et contenu des programmes sera donnée par l'introduction d'une dimension dynamique dans l'analyse. Cette dimension, que nous appellerons le processus politique, permettra de comprendre les décisions prises dans ce domaine par une analyse des rapports de forces et des dynamiques de pouvoir dans les pays considérés.

En ce qui concerne le mode d'analyse plus directement lié aux caractéristiques du vih/sida, nous avons décidé, de manière pragmatique, de regrouper les activités les plus importantes dans une sous-division en champs. En effet, les champs d'intervention des organisations et institutions présentes dans le domaine du vih/sida sont nombreux et forment un éventail d'activités allant du travail d'éducation jusqu'aux soins apportés aux malades, en passant par le conseil personnalisé, la recherche et la défense d'intérêts. Ces activités ne se distinguent pas seulement par leur nature, mais aussi par leur type. Par exemple, certains services sont de type monopolistique ou certaines activités produisent des biens publics, alors que d'autres sont destinés à une clientèle spécifique (groupes cibles, membres).

Bien que toutes les organisations et institutions puissent réaliser l'ensemble de ces activités, chacune se cristallise le plus souvent autour de l'une des six catégories d'activités suivantes : 1. la prévention ; 2. les soins et les services psycho-sociaux ; 3. le contrôle et la coordination politique ; 4. la recherche, la surveillance et les services d'évaluation ; 5. les pressions politiques, l'organisation de défense des droits de l'homme et civils ; enfin, 6. les activités de support financier^. Il nous faut encore préciser que nous avons considéré, pour l'analyse qui suit, exclusivement la première décennie du vih/sida, c'est-à-dire la période allant de 1981 à 1991.

Dans les pages suivantes, nous présenterons, pour une partie de ces champs^ du domaine du vih/sida, des analyses agrégées basées sur les données dont nous disposons pour l'instant. Les champs traités seront la prévention, les soins, la coordination politique et le contrôle et, dans une moindre mesure, la recherche. Ces analyses chercheront d'abord à identifier pour chaque champ les variantes de welfare mixet de programmes existants, puis les contenus et les processus politiques. Enfin, nous chercherons à déterminer, en mettant de côté la différenciation en champs et de manière exploratoire, des types de politique en matière de vih/sida.

1 Ces catégories sont issues du projet international sus-mentionné "Managing Aids" ; elles regroupent une centaine d'activités spécifiques au domaine du vih/sida.

2 Les champs sont choisis uniquement selon le critère de la disponibilité suffisante d'information pour mener une recherche comparative.

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arrangements Les institutionnels de lutte contre le vih/sida

Prévention

Le champ de la prévention regroupe d'une part des activités liées à la prévention générale ou "tous publics", qu'il s'agisse de campagnes dans les médias, de campagnes d'affichage ou encore de brochures distribuées dans les ménages ou largement mises à la disposition de la population. L'autre groupe d'activités concerne la prévention destinée à des publics spécifiques, avec d'un côté des groupes professionnels concernés par le sida (par exemple le personnel soignant ou pénitentiaire) et, de l'autre côté, des groupes qui, par leurs pratiques, sont les plus exposés aux risques d'infection (principalement les homosexuels, les toxicomanes, les prostituées et leurs clients).

a) le welfare m/x dans le champ de la prévention

Nous constatons que le welfare mix dans ce champ s'organise en fonction des publics visés et qu'il est caractérisé pour chacun de ces publics soit par une prévalence d'acteurs privés1, soit par une prévalence d'acteurs publics, soit enfin par la présence équilibrée des deux types d'acteurs. La collaboration plus ou moins étroite qui s'établit entre les types d'acteurs permet encore de spécifier le welfare mix. Le tableau 1 montre les différents cas de figure possibles. Globalement, la France se révèle être le pays où la présence des acteurs publics est la plus importante, alors que les Pays-Bas se trouvent à l'autre extrême avec une majorité d'acteurs privés, quel que soit le type de public visé. Le cas le plus courant est celui d'une division du travail entre les deux types d'acteurs, la prévention "tous publics" étant élaborée et mise en oeuvre principalement par des acteurs publics alors que la prévention destinée à des publics spécifiques ou des groupes-cibles est du ressort des acteurs privés, souvent subventionnés par des fonds publics. Cette division du travail est en général explicite et négociée, mais elle peut aussi naître de l'absence de volonté ou du refus des acteurs publics de s'adresser à certains groupes-cibles (aux homosexuels en particulier), comme c'est le cas en Suède ou dans les pays catholiques du sud de l'Europe. Cette prévalence d'acteurs publics n'empêche pas une collaboration entre acteurs au niveau de l'élaboration et la formulation des campagnes et des messages destinés à l'ensemble de la population. Les pouvoirs publics, de leur côté, gardent un droit de regard implicite sur la prévention réalisée par les acteurs privés du fait qu'ils subventionnent bon nombre de ces acteurs. Un dernier cas de figure, moins courant que le précédent, est celui d'une mixité d'acteurs pour les deux types de prévention, ce qui indique, sauf exception, une collaboration étroite des acteurs privés au processus d'élaboration et de réalisation de la prévention.

Pour l'ensemble de ce texte, l'expression "acteurs privés", sauf indication contraire, désigne des organisations privées sans but lucratif.

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Tableau 1: prévalence du type d'acteurs dans le welfare mix, selon le public visé

France Italie Autriche Belgique Portugal Suède Suisse Allemagne Danemark Royaume-Uni

prévention tous publics

publics publics publics publics publics publics mixte mixte mixte publics

prévention publics spécifiques

mixte privés ' privés privés privés privés privés privés mixte mixte 2

Pays-Bas prives prives

1 ) la prévention auprès des toxicomanes par injection intraveineuse est mixte

2) la prévention auprès des toxicomanes par injection intraveineuse et des bi- et homosexuels est mixte; la prévention auprès des minorités linguistiques relève des acteurs publics

Sources: les informations sur les pays en italique sont tirées du projet Managing Aids; autres sources voir la bibliographie classée par pays.

Les chiffres plus détaillés ^ que nous possédons pour certains pays offrent une image plus nuancée (tableau 2).

Tableau 2: le welfare mix général: proportion d'activités de prévention réalisées selon le type d'acteurs

acteurs publics acteurs privés Italie

Suisse Pays-Bas Autriche Suède Belgique (Portugal

48% 45%

40% 39%

30% 20%

0%

51 % l 55% 60%

61 % 70% 77% 2 100 %) 3

1) le 1% d'activités manquant pour l'Italie représente la part des entreprises privées à buts lucratifs 2) les 3 % d'activité manquant pour la Belgique représentent la part des entreprises privées à buts lucratifs 3) ces chiffres ne sont pas vérifiés

Sources: Managing Aids

1 Les chiffres cités représentent le nombre d'activités répertoriées systématiquement (institutions, organisations sans but lucratif, associations, etc.) selon les acteurs actifs de façon significative dans le champ de la prévention.

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Le tableau 2 montre d'abord que les acteurs publics réalisent au maximum 48 % et au minimum 20 % des activités de prévention, soit la moitié ou moins de l'ensemble de ces activités. Ces résultats donnent des indications d'une part sur le degré de centralisation des activités pour la prévention générale, mais peuvent également être le reflet du niveau d'engagement global des pouvoirs publics dans ce champ ou encore de la répartition du travail entre acteurs. En Belgique, la modeste présence publique est le signe d'un engagement global limité des acteurs publics, qu'ils appartiennent à l'une ou à l'autre communauté. La Suède est l'exemple d'une centralisation importante de la prévention tous publics, renforcée par une division des tâches qui limite clairement le champ d'action des acteurs publics à la prévention générale.

L'Italie, la Suisse et les Pays-Bas illustrent la situation d'une prévention fortement décentralisée aussi bien au niveau des acteurs publics que privés.

b) le contenu de la prévention

Le deuxième élément permettant de caractériser la prévention est celui du style général de la prévention^. Il peut être cerné à partir du contenu des différentes campagnes ou actions menées par les acteurs auprès de la population générale d'une part, et auprès des trois groupes-cibles retenus d'autre part. Nous nous sommes plus particulièrement intéressés aux contenus suivants :

- promotion de l'utilisation de préservatifs,

- informations 'techniques" (modes de transmission du virus),

- solidarité (tolérance, non-discrimination des malades et des personnes infectées),

- fidélité envers le conjoint,

- responsabilisation (envers soi-même et/ou envers les autres).

Le ton plus ou moins direct et plus ou moins moralisant ainsi que le moment où le sujet a été traité sont deux autres critères de différenciation. Nous avons ainsi identifié cinq styles de prévention (voir tableau 3) :

- direct et pas moralisant, - direct et peu moralisant,

- indirect, pas ou peu moralisant, - direct et moralisant,

- indirect et moralisant.

Les contenus considérés comme moralisants sont ceux qui réunissaient plus d'un aspect relevant de cette catégorie comme la promotion de la fidélité ("unsere Treue schutzt uns beide') ou de relations de couple "normales", la culpabilisation du malade ou l'utilisation du levier de la peur {"don't die of ignorance') ainsi que la promotion du préservatif comme protection envers l'autre (utilisation du préservatif en cas de doute sur le partenaire). Les Nous avons pris en considération particulièrement les messages préventifs émis pendant la première décennie du vih/sida (jusqu'en 1991).

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contenus peu moralisants ne citent que l'un des éléments énumérés ci- dessus et s'intègrent dans un ensemble plus neutre. Les contenus pas moralisants ne citent aucun de ces éléments. Le style a été considéré comme indirect lorsque plusieurs messages, voire l'ensemble des messages, ainsi que la formulation générale sont indirects ou très allusifs. Les messages ou approches suivants illustrent cet aspect : "open your eyes so that AIDS doesn't close them" ou indication d'un numéro de téléphone pour en savoir plus avec le slogan "le sida ne passera pas par moi" ou encore : "Schutz aus Liebe". "Put a condom on yourself, put it on him" représente un bon exemple d'un message direct. En règle générale, un style indirect va de pair avec une campagne de basse intensité et au profil bas alors qu'un style direct s'inscrit dans le cadre de campagnes plutôt intensives, différenciées selon les groupes-cibles et pragmatiques (une liste de quelques contenus relevés dans différentes campagnes nationales figure en annexe).

Tableau 3: style de prévention

contenu pas moralisant peu moralisant moralisant style

direct (1)

Danemark Pays-Bas

Suisse (2) Espagne Allemagne (3)

Belgique France

Royaume-Uni (4)

Suède (5) Autriche

Italie indirect

Sources: Managing Aids: matériel de prévention des différents pays; autres sources voir bibliographie classée par pays

Pour la prévention auprès des homosexuels, il s'agit de différencier la prévention, et plus largement l'information, faite de manière interne et sans soutien des acteurs publics de celle élaborée en collaboration ou soutenue financièrement par les pouvoirs publics. C'est de ce deuxième type de prévention dont il est en principe question dans le tableau 4. L'Italie et l'Autriche qui ont peu ou pas développé cette prévention font partie des pays ayant un style indirect et moralisant. Le cas de l'Autriche s'explique du fait qu'il y est interdit de transmettre tout message faisant la promotion de pratiques homosexuelles. La Suède a développé rapidement une campagne destinée aux homosexuels, cependant elle a été réalisée dans une stricte séparation des tâches, les acteurs publics ne s'adressant pas du tout aux homosexuels, mais se limitant à financer la prévention par ailleurs entièrement à la charge des acteurs privés.

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La prévention destinée aux homosexuels est également à mettre en relation avec, d'une part, les caractéristiques des mouvements homosexuels dans chaque pays, telles que les présentent Pollak (1992a) et Duyvendak, Willem et Koopmans (1991), et, d'autre part .avec les relations qu'ils ont pu établir avec les acteurs publics. Ainsi en Italie et en Espagne, ces mouvements sont plutôt faibles et morcelés. De plus la différentiation régionale qui caractérise ces deux pays (différentiation du point de vue des clivages culturels, politiques, mais aussi économiques) se traduit par une grande diversité organisationneile. En Suisse, en Allemagne et en Autriche, il ne préexistait pas de mouvement homosexuel important au niveau national. Par contre, les nombreux lieux de rencontre et de sociabilité plus au moins organisés existants ont constitué dans ces pays une base organisationneile suffisante pour permettre une mobilisation rapide et consistante des homosexuels autour de la question du vih/sida^ . Dans les pays Scandinaves où le mouvement homosexuel a une plus longue tradition d'organisation et de défense d'intérêts aussi au niveau national, la réaction a pu être rapide encore que relativement différenciée en fonction d'autres facteurs, en particulier culturels. La situation de départ est par contre différente en France et au Royaume-Uni où le relativement important mouvement homosexuel existant dans les années 70 s'est trouvé assez fortement affaibli au début des années 80. Les efforts de mobilisation et d'organisation d'une réaction collective ont été par conséquent plus difficiles à réaliser.

Tableau 4: la prévention vih/sida officielle auprès des homosexuels en regard du style général de la prévention

contenu style

direct

indirect

pas moralisant DK: (— ) NL: oui

peu moralisant CH: préservatif (87) E: (— )

D: safer sex & gênerai health prévention B (— )

F: peu visés jusqu'en 1993

moralisant UK: 1989 S: dès 1987-88 A: pas de campagne

officielle I: pas de campagne

officielle NB: l'absence de données ( — ) ne signifie pas l'absence de prévention

Sources: Managing Aids; matériel de prévention des différents pays; autres sources voir bibliographie classée par pays

Sur l'importance des structures organisationnelles préexistantes, même quand elles sont faiblement développées, pour les processus de mobilisation voir McCarthy/Zald, 1987 ; spécifiquement pour les mouvements des homosexuels : Duyvendak/Koopmans, 1991.

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Tous les pays étudiés ont développé un message à l'intention des toxicomanes par voie intraveineuse. On peut noter cependant une différence dans le temps de réaction, le sida n'ayant pas été perçu au départ comme un problème aussi aigu et en relation aussi étroite avec la consommation de drogues par voie intraveineuse. Nous avons ici défini des tendances nationales qui "gomment" une diversité parfois importante à l'intérieur d'un même pays et qui s'explique du fait de la gestion souvent locale ou régionale des problèmes liés à la toxicodépendance. Le tableau 5 montre cependant clairement que la teneur du message est de deux ordres qui correspondent aux deux grandes options en matière de politique de lutte contre la toxicomanie. L'approche de la réduction des risques ^ est partagée par les pays dont la prévention n'est pas ou que peu moralisante. Certains de ces pays ont cependant développé des messages mixtes allant aussi ou surtout dans le sens de l'abstention, la réduction des risques n'étant qu'un pis-aller ou une attitude très controversée, en France en particulier. Un pays ayant par ailleurs une approche très moralisante, l'Italie, semble avoir adopté une attitude plus clairement tournée vers la réduction des risques et la promotion du préservatif auprès des toxicomanes en particulier. Seules l'Autriche et surtout la Suède ont une approche centrée exclusivement sur l'abstention.

Tableau 5: la prévention vin/sida auprès des toxicomanes (par voie intraveineuse) en regard du style général de la prévention

style pas moralisant peu moralisant moralisant

option direct réduction

des risques mixte

DK: "harm réduction"

NL: oui CH: seringues stériles et pas d'échange

E: don't fix & safer fix UK: don't fix & don't share needles (88) indirect réduction

des risques mixte

B: danger of needle share (90) D no drugs, safer fix

safer sex & gênerai health prévention

I: don't share needles préservatifs

abstention F: seringues propres S : no drugs

A: don't fix (89) Sources: Managing Aids; matériel de prévention des différents pays; autres sources voir bibliographie classée

par pays

Pour une présentation et discussion de cette approche, voir Manconi, 1991.

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L'inclusion de la prévention du sida dans les programmes scolaires (tableau 6) semble être acquise dans tous les pays étudiés et on ne note pas de différences, à ce niveau de données agrégées, entre les styles de prévention. Il est probable que dans les pays à longue tradition de l'enseignement de l'éducation sexuelle dans les écoles, comme la Suède ou le Danemark, la prévention du sida ait pu être facilement intégrée. On doit cependant se poser la question de la systématicité, de la profondeur et du contenu de cette prévention. Dans les Etats fédéralistes, elle peut varier fortement d'une unité territoriale à l'autre, comme le montre une étude réalisée en Suisse (Panchaud et al., 1 992 et 1 993) ou encore, de façon générale, selon le directeur d'établissement (Montagnier, 1994). Quant à la personnalité de l'enseignant, elle est également un facteur à ne pas négliger pour l'évaluation de la prévention dans le cadre scolaire.

Tableau 6: inclusion de la prévention vin/sida dans les programmes scolaires (scolarité obligatoire) en regard du style général de la prévention

contenu style

direct

indirect

pas moralisant DK: oui NL: 1991

peu moralisant CH

E:

D: B:

F:

: en principe oui, dépend des cantons (89)

1992

oui 1990 (Flandres) 1989 en principe*

moralisant UK

S:

A:

I:

: 1992

éducation sexuelle (1977)

oui, mais problématique

1993, en principe*

* signifie qu'il y a de très grandes différences selon le directeur d'établissement en France et pour l'Italie que cette prévention est restée lettre morte dans la grande majorité des cas.

NB: l'absence de données ( — ) ne signifie pas l'absence de prévention

Sources: matériel de prévention des différents pays; autres sources voir bibliographie classée par pays, en particulier Bauer (1992), Montagnier (1994) et Pollack (1992a).

Les messages officiels destinés aux prostituées que nous avons pu relever pour l'instant sont peu nombreux mais deux approches principales s'en dégagent. D'un côté, comme en Suisse et en Allemagne, la prévention s'adresse explicitement autant aux prostitué(e)s qu'à leurs clients ("Freier nur mit" et "toujours avec"). L'autre direction est celle de la protection des personnes supposées saines, les clients, en prenant des mesures de limitation d'activités (en imposant par exemple des contrôles médicaux ) ou d'interdiction totale de travailler pour les prostituées. En Autriche ou en Suède par exemple, le message transmis est celui d'une interdiction faite aux femmes de se prostituer si elles sont séropositives.

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58 Sandro CA TTACIN et Christine PANCHAUD

c) le processus politique dans le champ de la prévention

Pour tenter de montrer les grandes lignes du processus politique de la prévention, nous avons retenu trois événements-clés différents, à savoir la première intervention officielle préventive adressée à l'ensemble de la population, sous forme d'affiche ou de brochure distribuée à tous les ménages, la mise sur pied d'un programme d'action global, plus ou moins concret selon les pays, et enfin la première mesure politico-administrative de contrôle des risques épidémiologiques (définition officielle du mode de déclaration obligatoire des cas de sida).

Nous avons ensuite considéré les moments et la séquence temporelle caractérisant ces événements.

Les dates des premières campagnes nationales tous publics s'échelonnent sur cinq ans de 1983 à 1988, celles de la définition d'un programme national de lutte contre le vih/sida sur 4 ans, de 1985 à 1989. Quant aux premières réactions politico-administratives relatives au contrôle des risques épidémiologiques, elles couvrent également 5 ans de 1982 à 1987. La succession de ces différents événements n'est cependant pas homogène.

Considérant le décalage entre la première réaction politico-administrative, telle que nous l'avons précisée ici, et les deux jalons marquant une action concrète de lutte contre la maladie, trois types de réactions se dégagent du tableau 7^ :

- une réaction politico-administrative rapide, suivie d'un "vide" relativement long ;

- une réaction politico-administrative rapide, suivie d'une action rapide ; - une action rapide précédant la réaction politico-administrative.

L'Autriche, la France et l'Italie relèvent du premier modèle. Si ces pays ont réagi également parmi les premiers sur le plan administratif, ils ont eu une réaction retardée sur le plan de la systématisation de la prévention dans un programme national et de la première campagne tous publics. Le Portugal et la Belgique relèvent également de ce modèle et sont caractérisés par une prévention d'une intensité particulièrement faible, à laquelle s'ajoute pour la Belgique une absence presque complète de l'Etat national, la prévention étant du ressort avant tout des communautés. Le Royaume-Uni et la Suède ont eu une réaction du deuxième type : réaction politico-administrative rapide, suivie de près par une action préventive tous publics, accompagnée d'un programme national concret de lutte contre le vih/sida. La Suisse et l'Allemagne ont eu une réaction administrative retardée, postérieure à la systématisation de la prévention, relativement précoce, dans un programme national et à la réalisation d'une campagne tous publics. L'absence aux Pays- De façon générale, il peut sembler que les différences de "timinef' ne sont pas si importantes, mais, dans le cas du vih/sida, la rapidité à traiter le problème de façon adéquate est très importante, dans la mesure où un délai d'une année dans la prévention peut causer sans nécessité de nombreuses morts et souffrances additionnelles.

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La maîtrise du sida : une analyse comparative des réactions 59 organisationnelles au VIH/SIDA en Europe de l'Ouest

Bas de réaction politico-administrative formelle pour le contrôle du risque épidémiologique et le retard dans la systématisation de la prévention dans un programme national et une campagne tous publics au niveau national peuvent s'expliquer par leur pratique traditionnelle de limitation des activités réglementaires et législatives aux seuls cas que l'autorégulation sociale, soutenue et subventionnée par l'Etat, ne parvient pas à maîtriser.

Tableau 7: décalage temporel entre les mesures de contrôle épidémiologique et les mesures préventives concrètes

1ère action de prévention grand public '

programme national de prévention du vin/sida

mesures relatives au contrôle du risque épidémiologique2 nesures préventives concrètes retardées

Austria France Italy Portugal

Belgium

1987 1987 1988 1987 1987

1986*

1989 1987 1986*

1987*

3.83 8.83 8.83 1985 1986 réaction administrative et mesures concrètes rapides

United Kingdom 1986 1985

Sweden 1985 1986

réaction administrative retardée, mais mesures concrètes rapides

Switzerland 1986 1985

Germany 1985 1986

1982 3.83 9.87 12.87- cas particulier

Netherlands 1983 1987

* signifie qu'il ne s'agissait pas de programmes d'action à proprement parler 1) campagne d'affiches ou distribution d'une brochure à tous les ménages

2) définition d'une prodédure administrative de déclaration obligatoire des cas de sida au niveau national

Sources: Managing AIDS et bibilographie classée par pays en particulier Freemann (1992), Pollack (1990 et 1990a), Reutter (1992), Setbon (1993)

Soins et prise en charge psycho-sociale

Le champ des soins et des services psycho-sociaux contient deux grands groupes d'activités centrales dans la maîtrise du vih/sida, d'une part, les soins médicaux (et les activités de type médical telles que le test vih) et, d'autre part, les services liés à la prise en charge psycho-sociale.

a) le welfare mix dans le champ des soins et de la prise en charge psycho sociale

Les welfare mix qui se sont instaurés dans ce domaine ne montrent à première vue aucune similarité régulière, à l'exception d'une présence toujours relativement importante aussi bien des institutions étatiques que des

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60 Sandro CATTACIN et Christine PANCHAUD

organisations sans but lucratif. Plus précisément, pour chaque pays pour lequel nous disposons de chiffres précis, nous observons un minimum de 20 % d'activités réalisées par l'un ou l'autre type d'acteurs. Le tableau 8 montre plus en détail les proportions entre acteurs publics et acteurs privés dans sept pays européens^.

Tableau 8: le welfare mix général dans le domaine des soins et des services psycho sociaux

acteurs publics acteurs privés

Belgique 21 % 79 %

Pays-Bas 25 % 69 % 1

Suède 27 % 73 %

Autriche 42 % 58 %

Italie 42 % 58 %

Suisse 52 % 48 %

Portugal 80 % 20 %

1) Les 6 % d'activité manquant dans la figure des Pays-Bas concernent des activités produites par des entreprises for-profit.

Source: Managing Aids

Ces chiffres indiquent l'existence de trois cas de figure : un pays, le Portugal, connaît une forte présence étatique ; trois pays, l'Autriche, l'Italie et la Suisse, présentent une relation plutôt équilibrée entre acteurs publics et privés ; enfin, la Belgique, les Pays-Bas et la Suède montrent une prévalence d'acteurs privés.

Cette sous-division en trois groupes est aussi confirmée, comme le montre le tableau 9, si on différencie encore le champ en distinguant les activités de soins médicaux de celles de prise en charge psycho-sociale, et si on inclut aussi d'autres pays pour lesquels nous possédons des informations moins détaillées, mais suffisantes pour les classer.

Le tableau 9 indique cependant aussi qu'en ajoutant ces précisions, les pays s'agencent légèrement différemment au sein des trois grands groupes de welfare mix.

- Deux pays, la Belgique et les Pays-Bas, se trouvent dans la classe des welfare mix avec une prévalence d'activités fournies par des acteurs privés (pas de changement par rapport au tableau 8).

Les chiffres cités représentent le nombre d'activités répertoriées systématiquement (institutions, organisations sans but lucratif, associations, etc.) selon les acteurs actifs de façon significative dans le champ des soins et des services psycho-sociaux.

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La maîtrise du sida : une analyse comparative des réactions 61 organisationnelles au VIH/SIDA en Europe de l'Ouest

Trois pays, la Suède, l'Italie et le Portugal, connaissent une division du travail dans ce domaine. Cette division montre une concentration des activités médicales dans les mains des acteurs publics, alors que les acteurs privés se concentrent sur la production d'activités de prise en charge psycho-sociale. Pour le Portugal, cette division du travail est seulement apparente, les acteurs privés étant presque inexistants et -à l'exception de la Croix-Rouge- pas du tout établis. (Ce résultat relativise, par rapport au tableau 8, l'incidence des acteurs publics, en raison de l'existence d'une nette différenciation dans le welfare mix des sous- divisions).

Quatre pays, l'Allemagne, l'Autriche, le Royaume-Uni et la Suisse, donnent l'image d'une forte présence de l'Etat dans le champ médical et une relation plus équilibrée dans le champ de la prise en charge psycho-sociale (pas de changement par rapport au tableau 8 pour l'Autriche et la Suisse).

Tableau 9: prévalence du type d'acteurs dans le welfare mix pour les soins médicaux et la prise en charge psycho-sociale

soins médicaux prise en charge psycho-sociale Belgique

Pays-Bas Italie Suède (Portugal) Allemagne Autriche Royaume-Uni Suisse

privés privés publics publics publics publics publics publics publics

prives privés privés privés privés (faible)

mixte mixte mixte mixte

Sources: les informations pour les pays en italique sont tirées du projet Managing Aids; autres sources voir bibliographie classée par pays

Avant d'interpréter ces résultats, il pourrait s'avérer intéressant de regarder de plus près des activités plus spécifiques au champ du vih/sida pour confronter ces informations avec la figure générale. Ces activités spécifiques sont celles dont l'introduction est nécessaire pour une prise en charge adéquate du vih/sida et que l'on peut considérer comme étant des innovations nécessaires dans ce domaine. Pour le champ médical, nous avons recensé plus en détail l'activité liée aux soins terminaux, à savoir l'accompagnement médical des malades du sida en stade terminal (y compris les soins palliatifs).

Pour le champ de la prise en charge psycho-sociale, nous avons cherché des données concernant l'organisation de l'accompagnement des personnes séropositives et des malades du sida par des volontaires (en terme technique : le buddy-system). Ces deux activités, bien qu'existant déjà pour

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62 Sandro CA TTACIN et Christine PANCHAUD

d'autres cas que le sida, comme par exemple pour les personnes âgées en fin de vie ou dans le cadre de l'aide aux toxicomanes, exigent cependant des innovations liées aux spécificités du vih/sida : les soins terminaux demandent, d'une part, un savoir approfondi des différents développements et complications de la maladie et, d'autre part, l'accompagnement des personnes touchées par le vih/sida, parce qu'elles sont en général jeunes et au milieu de leur vie, doit développer d'autres aspects que dans le cas plus classique de l'accompagnement des personnes âgées en fin de vie.

Tableau 10: prévalence du type d'acteurs dans le welfare mix pour les soins terminaux et le buddy-system

Belgique (privé/privé) Pays-Bas (privé/privé) Royaume-Uni (public/mixte) Suisse (public/mixte) Allemagne (public/mixte) Autriche (public/mixte) Italie (public/privé) (Portugal) (public/privé) Suède (public/privé)

soins terminaux privés privés privés publics publics publics publics publics

buddy-system privés privés privés privés privés privés privés privés (faible) privés NB: les données du tableau 9 sont reprises ici entre parenthèses

Sources: les informations sur les pays en italique sont tirées du projet Managing Aids; autres sources voir bibliographie;

Le tableau 1 0 montre les prévalences dans les arrangements institutionnels spécifiques à ces deux activités spécialisées. Entre parenthèses sont indiquées les données du tableau précédent, concernant le welfare mix général dans le champ des soins médicaux et de la prise en charge psychos ociale. Nous observons que les trois classes identifiées dans le tableau 9 se

réduisent ici à deux classes. La première compte des pays où l'organisation de l'ensemble de ces services spécialisés est laissée aux acteurs privés (Pays-Bas, Royaume-Uni et Suisse -les données pour la Belgique manquent pour l'instant-). La deuxième, par contre, rassemble des pays où le service spécialisé à caractère surtout médical est mis en place par des acteurs publics, alors que l'accompagnement psycho-social est réalisé de façon prépondérante par des acteurs privés.

Il faut souligner dans ce tableau que la classification précédente ne se retrouve plus dans ces activités. Tous les pays partagent le fait de laisser l'accompagnement psycho-social spécialisé aux acteurs privés, mais se différencient en deux groupes en ce qui concerne l'organisation des soins terminaux, réalisée soit par les acteurs publics soit par les acteurs privés.

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La maîtrise du sida : une analyse comparative des réactions 63 organisationnelles au VIH/SIDA en Europe de l'Ouest

Pour résumer ces données concernant le welfare mix dans les soins et les services sociaux, nous pouvons dire que nous avons un groupe de pays, la Belgique et les Pays-Bas, pour lesquels ce domaine est laissé à l'organisation privée. En ce qui concerne les Pays-Bas, il serait nécessaire toutefois d'approfondir ce résultat avec d'autres informations et de les insérer dans un modèle de politique sociale plus général en raison de ses caractéristiques spécifiques, -en particulier, le fait que les hôpitaux sont tous des fondations privées- ce qui pourrait éventuellement biaiser nos résultats.

Un deuxième groupe réunit des pays où le secteur public prend en charge tous les aspects essentiels liés aux soins et aux services sociaux et où les acteurs privés jouent un rôle complémentaire plus au moins important. Trois variantes se dessinent au sein de ce groupe. Nous constatons, d'une part, une tendance à combiner une forte présence étatique avec une division du travail pour des services plus spécifiques au vih/sida, qui sont alors réalisés par les acteurs privés (c'est le cas du Royaume-Uni et de la Suisse) et, d'autre part, des cas où l'Etat est moins actif que les acteurs privés, mais où il intervient de manière prévalente quand les services concernés comportent un fort aspect médical. La Suède fait par exemple partie de ce groupe. La dernière variante est celle d'un Etat fortement présent dans l'organisation et la réalisation des soins et services sociaux en général et qui, de plus, se montre plus actif que les acteurs privés lorsque le service considéré comporte un aspect médical intrinsèque. Des pays comme l'Autriche, l'Allemagne et l'Italie font partie de ce groupe.

Le Portugal pourrait constituer une ultime variante dont les caractéristiques sont un sous-développement des activités de soins en général et un welfare mix fortement dépendant du secteur public. Le tableau 11 résume ces résultats concernant le welfare mix dans le domaine des soins et des services sociaux.

Tableau 11: groupes d'Etats selon le welfare mix et les services liés aux soins et aux services psycho-sociaux

premier groupe Belgique Pays-Bas deuxième groupe

Suède

Royaume-Uni Suisse Autriche Allemagne Italie (Portugal)

Sources: voir tableaux 9 et

welfare mix général prév. privée prév. privée prév. privée

mixte mixte mixte mixte mixte prév. publique 10

division entre le médical et le psycho-social

privé/privé privé/privé public/privé public/mixte public/mixte public/mixte public/mixte public/privé public/privé

services

"spécialisés"

prév. privée prév. privée médical public

prév. privée prév. privée médical public médical public médical public médical public

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64 Sandro CA TTACIN et Christine PANCHAUD

b) le contenu dans le champ des soins et de la prise en charge psycho-sociale En ce qui concerne ces contenus, nous ne possédons pour l'instant que des données incomplètes par manque d'information, mais aussi en raison d'une difficile systématisation de la différenciation de ces services. Nous pouvons tout de même dessiner quelques lignes directrices qui permettront de mieux s'orienter dans le champ des soins et des services psycho-sociaux.

Pour commencer, nous pouvons nous demander pour chaque pays si les activités de soins et les services psycho-sociaux sont décentralisés, ce qui permet déjà d'indiquer un aspect important de la structure organisationnelle.

Concernant l'existence ou non de services de soins et psycho-sociaux dans le territoire, nous disposons de données relatives à deux activités, à savoir les lieux où le test vih anonyme peut être effectué et les services de soutien psycho-social -deux activités qui sont certainement déterminantes pour ce champ-. En effet, l'accessibilité et la distribution de ces activités dans le territoire sont essentielles dans le domaine du vih/sida. La possibilité de faire le test dans de bonnes conditions, d'être aidé dans des situations souvent angoissantes et de ne pas avoir à chercher trop longtemps ou trop loin un soutien psycho-social sont autant d'aspects intimement liés à la qualité de toute la programmation dans le domaine du vih/sida. Les données que nous possédons indiquent que, dans la majorité des pays de l'Europe de l'Ouest, il est aujourd'hui possible d'effectuer un test anonyme et de recevoir un soutien des services de prise en charge psycho-sociale au niveau au moins de petite région (les Lânderen Autriche, les départements en France ou les cantons en Suisse)^. Ce constat ne nous informe par contre en rien sur la qualité de ces services. Celle-ci peut être évaluée en considérant l'homogénéité de la qualité des services médicaux et de prise en charge sur l'ensemble du territoire, l'intégration ou non des services médicaux et d'aide psycho-sociale et l'existence de politiques précises et systématiques d'intervention dans les structures existantes de prise en charge médicale et psycho-sociale afin de les adapter au défi du vih/sida.

Le tableau 12 illustre quelques réponses et permet d'identifier différents groupes de pays. D'une part, on trouve des pays qui n'ont pas systématisé leurs activités dans le champ des soins et des services sociaux. Parmi ces pays, certains (comme par exemple l'Autriche, la Belgique et le Portugal) ont une approche plutôt médicale -c'est-à-dire une approche qui n'intègre pas les activités psycho-sociales dans les activités médicales- et ne connaissent pas d'interventions systématiques pour améliorer ces services. D'autres pays, par contre, cherchent à intégrer les aspects psycho-sociaux dans les activités médicales et connaissent des interventions politiques visant à garantir l'amélioration du système de prise en charge médicale et psychos ociale. D'autre part, une série de pays ont atteint une distribution dans leur territoire de services de qualité relativement homogène.

1 Ces pays sont au moins l'Allemagne, l'Autriche, la Belgique, le Danemark, l'Italie, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse (Managing Aids et Mann et al. 1992).

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La maîtrise du sida : une analyse comparative des réactions 65 organisationnelles au VIH/SIDA en Europe de l'Ouest

Tableau 12: indicateurs de la qualité des services

Autriche Belgique Portugal France Italie Allemagne Pays-Bas Suède Suisse Royaume-Uni

qualité dans le territoire (homogène/hétérogène)

hétérogène hétérogène hétérogène hétérogène hétérogène hétérogène homogène homogène homogène homogène

intégration du social dans le médical

non non non non non oui oui oui oui oui

mesures politiques régulières pour améliorer la qualité des soins et des services pycho-sociaux

non non non — oui — oui — oui — ) NB: ( — ) = données manquantes

Source: les informations sur les pays en italiques sont tirées du projet Managing Aids: autres sources voir bibliographie classée par pays, en particulier Bauer ( 1992) et Montagnier (1994)

Pour résumer ce paragraphe, on peut dire qu'il existe une différenciation remarquable pour les soins et les services sociaux parmi les pays analysés, à la fois en ce qui concerne le welfare mix et les contenus de ces services. On observe ainsi dans ce champ du domaine du vih/sida des tendances à des welfare mix où l'Etat peut être un acteur soit fort, soit faible d'une part, et d'autre part des tendances à une relativisation plus ou moins importante de l'aspect uniquement médical du traitement des personnes atteintes du vih/sida. Nous nous contentons ici de constater cette diversité qui ne peut probablement être analysée plus à fond qu'en regard du système de soins préexistant dans chaque pays.

Contrôle et coordination politique

Nous tenterons pour ce champ d'analyser comment chaque pays a fait face aux nouveaux enjeux posés par le vih/sida, en particulier dans quelles structures existantes le sida a pu être inclus ou quels mécanismes nouveaux ou spécifiques ont dû être mis en place, ceci aussi bien du point de vue de l'arrangement institutionnel et de la participation de la société civile à la définition et à la coordination de la politique de lutte contre le sida que des mesures de contrôle de l'épidémie qui ont été prises.

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66 Sandro CATTACIN et Christine PANCHAUD

Tableau 13:

a) le welfare mix dans le champ du contrôle et de la coordination politique L'existence d'un organe national de coordination politique est essentielle à la cohérence de la politique, mais représente aussi une opportunité pour inclure de façon formelle la négociation des points de vue entre les différents acteurs du domaine du vih/sida. C'est à ce titre que nous nous y intéressons particulièrement en tant qu'indicateur du welfare mix, du point de vue de la participation des acteurs privés à la définition de la politique de lutte contre le vih/sida. Le but n'est donc pas ici d'évaluer ces organes de coordination en regard de leur fonctionnement et de leurs résultats, mais d'en identifier les acteurs dominants. Dans un premier temps nous en avons analysé la composition globale en fonction des deux types d'acteurs, publics et privés

(tableau 13).

le welfare mix dans les organes nationaux de coordination de la politique sida1

Belgique Royaume-Uni Portugal France Italie Autriche Suisse Pays-Bas Allemagne Danemark Suède

état antérieur

public* (1983) public* (1983/1986) public (1983)

composition actuelle public (1983/1986) public (1985/1986) public* (1985) public* (1989) public* (1987) mixte (1985) mixte (1988) mixte (1985/1987) mixte (1984/1987) mixte (1986)

<public*(1985)>

1) ou mécanisme similaire de coordination de la politique sida fonctionnant de manière significative pour l'élaboration de la politique vih/sida

public* signifie la présence indirecte ou très faible d'acteurs privés (homosexuels par exemple, mais n'ayant pas statut de représentants d'association ou d'organisme privés)

Sources: les informations sur les pays en italiques sont tirées du projet Managing Aids; autres sources voir bibliographie classée par pays, en particulier Freeman (1992), Montagnier (1994), ÔAH (1990), Pollack (1992), Reutter (1992) et WHO (1989 a), OMS (1993a)

Dans un peu plus de la moitié des cas, l'organe de coordination a connu plusieurs états successifs, soit que sa composition ait été modifiée de façon significative, passant d'une composition exclusivement ou principalement publique à une composition mixte (trois cas), soit que son statut ait changé sans que sa composition en soit affectée (trois cas). Il se dessine ainsi trois groupes de pays. Le premier a défini un organe composé d'acteurs publics.

Ces organes ont été créés entre 1983 (Belgique) et 1989 (France). Dans le deuxième groupe de pays, la constitution d'un organe de coordination composé exclusivement d'acteurs publics a été généralement précoce (1983)

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La maîtrise du sida : une analyse comparative des réactions 67 organisationnelles au VIH/SIDA en Europe de l'Ouest

et des acteurs privés y ont été inclus formellement dans un délai de deux à trois ans. Le dernier groupe de pays, qui a tout de suite établi un organe de coordination mixte, est plus restreint. La Suède, où l'organe de coordination a été dissous pour être inclus dans une nouvelle structure plus générale, selon un processus de normalisation, est un cas exceptionnel. Parmi les acteurs privés, une distinction peut être faite entre les organisations traditionnelles et les organisations créées spécifiquement en raison du sida. L'Italie et l'Espagne, dont l'organe de coordination est mixte, n'incluent que des organisations privées traditionnelles et excluent par exemple les associations d'homosexuels.

b) le contenu du champ du contrôle et de la coordination politique

Concernant le contenu de ce champ, nous avons cherché à savoir d'abord quelle est la loi ou le texte légal général servant de base légale ou de référence pour le contrôle de la propagation du vih/sida. La pratique du test, sa place dans la politique générale (comme outil de prévention, comme input pour les données épidémiologiques ou comme outil de diagnostic), le système de reporting pour le sida et la protection de l'anonymat assurée aux malades et aux personnes infectées sont les aspects retenus en ce qui concerne les contenus.

Le tableau 14 montre que, dans la plupart des pays, le sida a été inclus dans la législation existante relative aux épidémies (Suisse) ou aux maladies infectieuses ou soumises à déclaration. Si le système de contrôle et de reporting dépend donc essentiellement des législations existantes, les mesures coercitives qu'elles contiennent ont souvent été assouplies, ayant été jugées contre-productives en raison des caractéristiques mêmes du vih/sida. En effet, le fait que le vih/sida n'ait pas de remède et qu'il puisse être la cause de discriminations graves et difficilement contrôlables autrement que par l'éducation et un changement des mentalités a poussé plusieurs gouvernements à favoriser l'aspect volontaire du contrôle et une plus stricte garantie de l'anonymat que pour les autres maladies soumises à la même

législation.

(24)

68 Sandro CA TTACIN et Christine PANCHAUD

Tableau 14: Insertion du sida dans la législation (lois/règlements généraux) Autriche loi sur le sida (1986/1989)

Belgique —

Pays-Bas —

Allemagne —

Suède loi sur les maladies infectieuses (1985)

communicable diseases act ( 1 .7. 1989) nouveau Danemark maladies transmissibles (act on veneral diseases)

abolition de la loi (1988)

Royaume-Uni loi sur la lutte contre les maladies (1984)1 et the AIDS Control Act (1987) France inclusion dans la liste sur les maladies à déclaration obligatoire (1986) Italie loi sur les maladies infectieuses ( 1 986), loi 1 3 5 ( 1 990)

Suisse loi sur les épidémies (révisée en 1987)

Norvège inclusion dans les prescriptions sur la déclaration des maladies transmissibles/révision lois existantes (1991)

1 ) Angleterre et Pays de Galles

Sources: voir bibliographie classée par pays et OMS (1993a). Conseil de l'Europe (1993)

L'Autriche (1986) et l'Italie (1990) sont les deux seuls pays à avoir promulgué une loi générale spécifique sur le sida. La loi autrichienne fixe l'ensemble des mesures de contrôle de la propagation et l'élaboration d'un plan de diffusion de l'information et des subventions aux activités de consultation et de soins menées par des institutions publiques ou des associations alors que la loi italienne édicté des principes généraux concernant la prévention et la formation de personnels et s'attarde plus longuement sur la définition des structures hospitalières à mettre en place pour la prise en charge des malades.

Dans deux pays le vih/sida a fait évoluer la législation existante dans le domaine des maladies transmissibles. Au Danemark, le vif débat autour de l'inclusion ou non du sida dans la loi existante sur les maladies sexuellement transmissibles (Act on Veneral Diseases de 1973) a entraîné l'abolition de cette loi en 1988, alors qu'en Suède une nouvelle loi sur les maladies transmissibles (Communicable Disease Act) a été adoptée en juillet 1989.

Un seul pays, les Pays-Bas, a volontairement refusé d'intégrer le sida dans la législation générale existante sans pour autant en créer de nouvelle à l'instar de l'Autriche.

Si dans l'ensemble des pays étudiés le test est utilisé avant tout comme un moyen de diagnostic de la maladie, d'une part, et de contrôle des produits sanguins et des organes à transplanter, d'autre part, au-delà de ces caractéristiques communes, le test peut relever de logiques différentes. Il est, en règle générale et ceci dans tous les pays, effectué anonymement si désiré, sur une base volontaire ou avec le consentement explicite de la

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La maîtrise du sida : une analyse comparative des réactions 69 organisationnelles au VIH/SIDA en Europe de l'Ouest

personne, avec quelques exceptions notoires comme en Suède où la recherche d'éventuels partenaires infectés (contact tracing) est obligatoire et où les personnes ayant été exposées au risque doivent se soumettre à un test.

Quatre pays, la France, la Suède, l'Autriche et l'Allemagne, ont adopté une attitude générale d'encouragement à faire le test pour toute la population, mais surtout auprès de certains groupes-cibles, comme les femmes enceintes, les toxicomanes, les prostituées, les recrues et les prisonniers.

Trois logiques sous-tendent cette attitude. Les deux premières s'inscrivent dans une logique de prévention, soit au niveau des individus en postulant qu'il est essentiel de connaître son statut serologique pour se comporter ensuite de façon responsable (Suède), soit au niveau global à des fins de meilleure connaissance de l'épidémie afin d'adopter la meilleure stratégie de lutte contre le vih/sida. La dernière justification, plus récente, argumente en faveur du test du fait qu'une infection par le vih rapidement découverte permet de mieux organiser la lutte contre la maladie.

Les autres pays sont pour l'instant plutôt défavorables, voire très défavorables, comme les Pays-Bas, à la promotion du test. Les arguments avancés sont, là aussi, de deux ordres. Le premier relève du domaine de la prévention et considère que la promotion du test à large échelle comporte le risque de créer un sentiment de fausse sécurité au sein de la population dont une des conséquences peut être un relâchement vis-à-vis des mesures de protection réellement efficaces. Le deuxième argument est d'ordre éthique.

Face à une maladie pour laquelle il n'existe pas de remède pour l'instant, il est jugé éthiquement non défendable d'encourager activement des individus à assumer le poids d'une séropositivité, ceci d'autant plus que l'ignorance de sa propre séropositivité n'empêche en rien quiconque d'adopter des comportements responsables. Dans les faits, même si un débat a eu lieu, aucun pays n'a adopté de loi de dépistage applicable à l'ensemble de la population, ce dépistage ayant finalement été jugé inadapté et trop onéreux par rapport à son éventuelle efficacité.

Tableau 15: systèmes de déclaration sida et VIH

obligatoire Suède (sida 3.83/vih 1985)

Danemark (sida 3.83/vih 6.90) Norvège (sida 8.83/vih 1986) Suisse (sida/vih 9.87) Allemagne (sida/vih (12.87)

sida obligatoire Autriche (3.83) France (1986) Italie (1985)

Espagne (8 provinces)

sida et vih volontaire Belgique Pays-Bas1 Portugal Royaume-Uni Espagne 1 ) pas de système de notification pour le vih

Sources: voir bibliographie, en particulier Conseil de l'Europe (1993)

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