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Les raisons des différences de chômage entre Genève et le reste de la Suisse

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Academic year: 2022

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Les raisons des différences de chômage entre Genève et le reste de la Suisse

Y V E S F L Ü C K I G E R * e t A N A T O L I V A S S I L I E V * *

JEL classification: J64, C41

Keywords: Chômage, Flux d'entrée et de sortie, Différences cantonales, Modèles de durée

1. INTRODUCTION

Au cours des dernières années, de nombreuses recherches ont été réalisées en Suisse pour tenter d'expliquer les différences cantonales de chômage (Cf notamment DE Cou- LON, 1999; F E L D et SAVIOZ, 2000; FILIPPINI et R o s s i , 1992, 1993; FLÜCKIGER, 1995;

LAMBELET et al., 1993; ou SHELDON, 1993). Plusieurs de ces études ont analysé en parti- culier la courbe de Beveridge qui met en relation les taux de chômage et de places vacan- tes. La Suisse, comme la plupart des pays de l'OCDE, a enregistré un déplacement à l'ex- térieur de cette courbe, signe d'un fonctionnement moins efficace du marché du travail du point de vue de l'appariement entre les emplois disponibles et les chômeurs. Alors que les analyses de la courbe de Beveridge ont été menées en général à l'échelle natio- nale, l'originalité des contributions d'auteurs tels que DE COULON (1999), FELD et SA- VIOZ (2000) ou FLÜCKIGER et al. (2002) a été d'appliquer cette approche aux données cantonales. Ils ont cherché à examiner notamment si la position des courbes de Beve- ridge différaient de manière significative d'un canton à l'autre pour pouvoir conclure à l'existence d'un fonctionnement plus ou moins efficace de ces marchés régionaux, ce qui semble être effectivement le cas. Dès lors, DE COULON (1999) et FLÜCKIGER et al.

(2002) ont cherché à étudier les divers facteurs économiques et sociaux susceptibles d'expliquer ces différences cantonales.

L'objectif de cet article n'est pas de répliquer ces études antérieures mais d'adopter une approche qui n'a jamais été, jusqu'à ce jour et à notre connaissance, utilisée pour examiner les inégalités régionales de chômage. Elle présente l'avantage de mettre en évidence des résultats qu'une simple analyse des courbes de Beveridge ne permet pas

Université de Genève, e-mail: flueckiger@ecopo.unige.ch.

Université de Genève.

Cet article est issu d'un mandat de recherche réalisé par l'Observatoire universitaire de l'emploi de l'Université de Genève sur mandat du Département de l'économie, de l'emploi et des affaires extérieures (DEEE) du canton de Genève. Pour réaliser cette recherche, les auteurs ont bénéficié des données du système PLASTA et des conseils avisés et précieux fournis par MM. Pierre Fon- taine et Jonathan Gast (seco). Les auteurs demeurent seuls responsables des résultats présentés dans cet article.

Schweiz. Zeitschrift für Volkswirtschaft und Statistik 2002, Vol. 138(4)387-410

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de découvrir. En ce sens, elle vient compléter les conclusions obtenues par les études évoquées précédemment. L'analyse développée dans cet article est basée sur le fait que le taux de chômage est égal au produit entre le taux d'entrée au chômage et la durée du chômage. Il résulte de cette définition que pour comprendre l'apparition d'un taux de chômage élevé, il convient de considérer les caractéristiques individuelles des deman- deurs d'emploi qui contribuent à prolonger le temps passé au chômage tout en étudiant les facteurs qui influencent les taux d'entrée au chômage.

En l'occurrence, nous commencerons par examiner, dans la section 2, les flux d'entrée et de sortie du chômage pour caractériser la situation du canton de Genève par rapport au reste de la Suisse. Le reste de l'article est entièrement consacré à l'analyse de la ques- tion de la durée du chômage pour essayer de déterminer en particulier quels sont les fac- teurs explicatifs des différences individuelles et pour tenter de comprendre pourquoi les demandeurs d'emploi à Genève restent plus longtemps au chômage que dans les autres cantons suisses. Cet examen débutera, à la section 3, par une brève présentation de la base de données utilisée pour mener à bien notre recherche. La section 4 présentera en- suite, après avoir rappelé brièvement les principaux fondements théoriques des modèles de durée, les résultats obtenus dans notre analyse empirique. Cette section précède les conclusions qui mettront en évidence les principales raisons des différences de taux de chômage entre la Suisse et Genève.

2. LES FLUX D'ENTRÉE ET DE SORTIE D U CHÔMAGE À GENÈVE ET EN SUISSE

Cette section a pour objectif de mettre en exergue les différences apparentes entre Ge- nève et la Suisse en termes de taux d'entrée et de sortie du chômage. A ce sujet, il convient de préciser que les statistiques présentées dans le cadre de cette section concer- nent l'ensemble des demandeurs d'emploi qu'ils soient ou non considérés comme chô- meurs. Une sortie du chômage correspondra donc à une désinscription de l'état de de- mandeur d'emploi.

L'idée de base de l'analyse développée dans cette section est fondée sur l'identité sui- vante qui met en relation le nombre de demandeurs d'emploi et les flux qui affectent ce

"stock":

Stock fin période = Stock début + Flux d'entrée - Flux de sortie (1) En d'autres termes, le nombre de demandeurs d'emploi observé à la fin d'une période est le résultat du nombre de demandeurs d'emploi enregistré au début de cette période auquel on ajoute les personnes qui sont entrées en cours de période tout en déduisant les individus qui sont parvenus à quitter le chômage avant le terme de la période examinée.

Le nombre de demandeurs d'emploi augmente, au cours d'un mois donné, dès que les entrées sont supérieures aux sorties.

Pour comparer l'intensité des flux d'entrée au chômage en Suisse et à Genève, nous

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DIFFERENCES DE CHOMAGE ENTRE GENEVE ET LE RESTE DE LA SUISSE 389

avons divisé, pour chaque mois considéré au cours de la période de 1992 à la fin de l'an- née 2000, le nombre de nouvelles inscriptions au chômage par la population active occu- pée. Cela nous a permis d'obtenir la probabilité pour une personne employée à Genève ou en Suisse de perdre son emploi et de se retrouver parmi les demandeurs d'emploi. La figure 1 reproduit l'évolution de ces deux courbes au cours des années 90. Rappelons que cette période a été caractérisée, tout d'abord, par un climat conjoncturel très mo- rose qui s'est traduit par une hausse des licenciements et ensuite, à partir de 1998, par une amélioration de la situation conjoncturelle qui a permis un recul progressif du taux d'entrées comme on peut s'en apercevoir à la lecture de la figure 1. Cette figure nous permet de constater que, même si les différences ne sont pas très importantes entre les deux courbes, il n'en reste pas moins que l'économie genevoise se caractérise par une probabilité d'entrée au chômage significativement supérieure en période notamment de mauvaise conjoncture. Cette différence semble s'être néanmoins estompée depuis 1998, en raison sans doute de l'amélioration du climat conjoncturel qui a marqué les der- niers mois de la période que nous avons examinée.

La figure 1 montre que les différences de chômage entre Genève et la Suisse, ne pro- viennent manifestement pas des disparités observées entre les probabilités d'entrée qui seraient nettement supérieures à Genève que dans le reste du pays. Au contraire, il ap- paraît qu'à partir de 1998, au moment où le rapport entre le taux de chômage genevois et suisse a augmenté, les taux d'entrée enregistrés à Genève sont restés très proches de ceux observés en Suisse. L'origine du différentiel de chômage doit donc être plutôt trou- vée du côté des taux de sortie et, en conséquent, de la durée du chômage que nous exa- minerons de plus près dans les sections suivantes.

Figure 1: Flux d'entrée au chômage à Genève et en Suisse, 1992-2000

- • - taux d'entrée GE

— taux d'entrée CH

1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000

(4)

Si l'on examine maintenant les taux de sortie mensuels du chômage, mesurés comme le rapport entre le nombre de personnes qui sortent par rapport au nombre de demandeurs d'emploi inscrits, on observe une nouvelle fois des différences marquées entre Genève et le reste de la Suisse. En étudiant de plus près la figure 2, on peut même affirmer que ces disparités sont plus nettes que celles observées au niveau des probabilités d'entrée.

La figure 2 nous permet surtout de constater que contrairement aux courbes précéden- tes qui avaient tendance à se rapprocher en bonne conjoncture, les taux de sortie gene- vois et helvétiques tendent au contraire à s'écarter l'un de l'autre lorsque la situation macroéconomique s'améliore.

Sur la base de la figure 2, nous serions tentés de dire que la différence principale entre Genève et la Suisse est le manque de réaction conjoncturelle du taux de sortie genevois qui ne profite pratiquement pas de l'amélioration de la situation économique enregis- trée au début de l'année 1998 à une période où le reste de la Suisse observe une hausse significative de son propre taux de sortie. Cela est d'autant plus surprenant que nous avions pu observer que Genève avait bénéficié, au cours de cette période particulière, comme le reste du pays, d'une diminution du taux d'entrée provoquée par l'embellie conjoncturelle qui est pourtant restée quasiment sans effet sur la probabilité de sortie.

Figure 2: Probabilités mensuelles de sortie du chômage à Genève et en Suisse, 1992-2000

1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000

Sur la base des figures 1 et 2, nous pouvons en conclure que l'origine du problème gene- vois doit être trouvé du côté de la réinsertion des chômeurs et de leur durée de chômage plus longue qu'ailleurs. C'est ce constat qui nous a décidé à examiner de manière beau- coup plus minutieuse la durée de chômage des personnes inscrites à Genève et dans le

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DIFFÉRENCES DE CHÔMAGE ENTRE GENÈVE ET LE RESTE DE LA SUISSE 391

reste de la Suisse pour essayer de comprendre les facteurs susceptibles d'influencer le temps que certaines personnes passent au chômage avant de parvenir à en sortir et met- tre ainsi le doigt sur des variables explicatives des différences cantonales. C'est ce que nous ferons dans le cadre des sections suivantes en commençant par décrire, à la section 3, les données utilisées pour réaliser notre analyse empirique.

3. BASE DE DONNÉES UTILISÉE

Les données utilisées pour notre recherche nous ont été fournies par le Secrétariat d'Etat à l'économie (seco). Elles ont été tirées de la base de données administrative PLASTA. Elles se rapportent en l'occurrence à la population des chômeurs inscrits dans les cantons de Genève et de Bâle-Ville ainsi qu'à un échantillon aléatoire et repré- sentatif de 15% de tous les chômeurs enregistrés en Suisse. La base de données PLASTA est le système de placement et de statistique du marché du travail. Elle est constituée par les Offices Régionaux de Placement (ORP) qui enregistrent les inscrip- tions et les désinscriptions des demandeurs d'emploi. Le seco centralise l'information fournie par tous les ORP.

Les statistiques PLASTA portent sur les "chômeurs inscrits", c'est-à-dire les "person- nes annoncées auprès des offices du travail, qui n'ont pas d'emploi et sont immédiate- ment disponibles en vue d'un placement". L'information récoltée concerne la personne et son parcours au chômage. De ce fait, certaines données sont stables et ne changent pas durant la période de chômage: le sexe, le niveau de qualification, la profession ap- prise, etc. D'autres données sont susceptibles de changer avec le temps, notamment l'état civil et l'âge.

Malgré un très grand nombre de caractéristiques individuelles collectées par PLASTA, les données ne sont pas toutes fiables et utilisables. Ainsi, PLASTA fournit en principe des informations relatives à l'expérience acquise dans la profession exercée, la profession apprise ainsi que la profession recherchée. Cependant, ces données ne sont pas disponibles pour tous les demandeurs d'emploi. De ce fait, nous ne pouvons pas faire une distinction entre les personnes sans expérience professionnelle et les personnes pour lesquelles ces indications ne sont pas disponibles. La connaissance des langues étrangères pourrait compléter l'information sur le capital humain mais elle n'est pas fiable pour la même raison.1 Des considérations de fiabilité nous ont donc contraints à exclure ces variables de notre étude. Enfin, les variables retenues ne tiennent pas tou- jours très bien compte de l'hétérogénéité des demandeurs d'emploi. Ainsi, la variable catégorielle d'état civil réunit les personnes mariées dans le même groupe que les per- sonnes séparées. Dans ce cas particulier, le biais n'est pas important étant donné le nom-

1. PLASTA ne contient aucune inscription concernant cette variable pour une grande partie des de- mandeurs d'emploi. Il n'est pas possible de savoir si ces personnes ne maîtrisent aucune langue étrangère ou si les informations sont simplement manquantes.

(6)

bre relativement faible de personnes séparées en comparaison avec celui des personnes mariées.

La base de données qui nous a été transmise par le seco recense toutes les personnes qui étaient au chômage dans les cantons de Genève et de Bâle-Ville durant la période allant du 1er juin 1998 jusqu'à la fin du mois de mars 2001. Cette période d'observation est suffisamment longue (34 mois) pour prendre en considération le chômage de longue durée qui s'élève à plus d'une année. Les enregistrements concernent seulement le der- nier épisode de chômage de chaque demandeur d'emploi. Cela nous évite de modéliser les interdépendances dans les durées des épisodes du chômage expérimentés par le même individu.

Parmi tous les demandeurs d'emploi, seuls ceux qui sont devenus chômeurs après le 1er juin 1998 sont retenus. Cela nous évite le biais de sélection endogène qui apparaît lorsque l'échantillon étudié est tiré à une date donnée. Avec ce mode de tirage, on ob- tient un "stock" de chômeurs observé à cette date. Si le taux d'entrée au chômage varie dans le temps, cela implique que pour les générations les plus anciennes de chômeurs, on n'observe que des périodes longues de chômage, alors que pour les personnes qui sont entrées au chômage juste avant le tirage de l'échantillon, on observe toutes les périodes de chômage. Le biais de sélection endogène mène à une surestimation des durées espé- rées du chômage. Après avoir éliminé les personnes dont les épisodes de chômage sont soumises à la sélection endogène, il nous reste une population de 13'197 chômeurs pour le canton de Bâle-Ville, de 30'918 personnes pour Genève et, finalement de 57*153 indi- vidus enregistrés dans d'autres cantons suisses.

Les variables retenues pour expliquer les durées de chômage concernent les caracté- ristiques individuelles démographiques (sexe, âge, état civil), le capital humain (qualifi- cation), le type d'activité (branche économique, fonction) et le vécu professionnel des individus. Nous y avons ajouté également la nationalité et le type de permis de séjour.

Nous comparons également les durées de chômage dans les cantons de Genève et de Bâle-Ville car, sur de nombreux points, ces deux cantons ont des similitudes évidentes tout en manifestant des différences ne serait-ce qu'en termes de durées du chômage comme on le verra plus loin.

Nous considérons les caractéristiques individuelles comme invariables dans le temps.

Ainsi, pour ce qui concerne l'âge et les autres variables susceptibles de changer dans le temps (état civil, etc.), nous prenons leurs valeurs au début de l'épisode du chômage.

Enfin, les durées des épisodes de chômage sont exprimées en jours calendaires.

Le tableau 1 présente les durées de chômage pour les échantillons de chômeurs sépa- rés selon leur canton de résidence.

(7)

DIFFÉRENCES DE CHÔMAGE ENTRE G E N E V E ET LE RESTE DE LA SUISSE 393

Tableau 1: Statistiques descriptives relatives à la durée du chômage moyenne enregistrée à Bâle-Ville, à Genève et en Suisse (juin 1998-mars 2001)

Situation à la fin de l'épisode

du chômage Bâle-Ville

Durée du chômage (en jours)

Genève Suisse

Moyenne N Ecart- Moyenne N Ecart- Moyenne N Ecart-

type type type Episode terminé

par l'embauche Episode pas encore achevé

107 145

5976 102 3249 142 Episode terminé 125

par la perte de suivi dans le système PLASTA Tous les épisodes de chômage

122 3972

13197 130

123

158 13657 145 248 10513 207 171 6748 159

191 30918 176

105 32843 104 160 12758 156 160 11552 155

128 57153 131

Comme on peut le constater à la lecture de ce premier tableau descriptif, les durées mo- yennes de chômage enregistrées à Genève sont non seulement très différentes de celles observées dans le reste de la Suisse mais elles diffèrent également significativement des durées enregistrées dans le canton de Bâle-Ville dont on soulignait pourtant auparavant les similitudes avec le cas genevois (de par son caractère urbain et frontalier notam- ment).

Le tableau 2 affine la description des personnes inscrites au chômage dans les cantons de Genève et de Bâle-Ville en utilisant pour ce faire les différentes variables disponibles dans notre base de données. Pour déterminer si les différences entre les moyennes mises en exergue par ce tableau sont significatives ou non, nous avons conduit différents tests statistiques qui nous ont permis de constater qu'à l'exception d'une d'entre elles ("cadre ou indépendant"), les cantons de Genève et de Bâle-Ville se distinguent l'un de l'autre de manière très significative sur toutes les dimensions retenues pour décrire les popula- tions au chômage.

La richesse des informations contenues dans ce tableau ne nous permet pas de

commenter toutes ses lignes mais nous laissons le soin au lecteur de se forger une image

des personnes qui se trouvent au chômage dans les deux cantons retenus pour mener à

bien notre analyse. Néanmoins, qu'il nous soit permis de relever quelques points remar-

quables. Tout d'abord, on constatera que le pourcentage de personnes qui reviennent

dans la vie active après une interruption de carrière est à Genève très nettement supéri-

eur à celui observé à Bâle-Ville (14,1 % contre 2,7% seulement).

(8)

Tableau 2: Statistiques descriptives des chômeurs du canton de Genève et de Bâle-Ville Variables

Durée du chômage (en jours) Age

Nombre d'épisodes de chômage durant les 2 dernières années Hommes Marié Qualifié Semi-qualifié Cadre ou indépendant Spécialiste Etudiant ou apprenti Etranger permis B Etranger permis C Etranger autres permis

Secteur d'activité soumis à des variations cycliques Secteur d'activité administrations publiques Premier emploi Retour dans la vie active

Autre situation avant chômage Commune (l-4'999) habitants Commune (20'000-99'999) habitants

Commune >100'000 habitants

Entrée au chômage en 1998

Entrée au chômage après janvier 2000 Taux de chômage cantonal au moment de l'entrée au chômage

Min

6 15 0

0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0

0

0 0 0 0 0

0 0 0 2

Bâle-Ville (N = 13'197) Max

1096 64 3

3.7410 Moyenne

121.9725 34.8753 0.0786

0.5569 0.4651 0.5257 0.0519 0.0655 0.4684 0.0639 0.1914 0.2633 0.0181 0.2968

0.0165

0.0530 0.0273 0.1129 0.0023 0.0452

0.9526 0.1828 0.4944 2.4700

Ecart- type 122.6925

11.1678 0.2879

0.6361 Min

6 15 0

0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0

0

0 0 0 0 0

0 0 0 4.4000

Genève (N = 30'918) Max

1097 65 3

6.1180 Moyenne

191.2486 35.6747 0.0650

0.5042 0.4962 0.6277 0.2144 0.0641 0.6267 0.0884 0.1343 0.2931 0.0288 0.2277

0.0479

0.0717 0.1413 0.0734 0.0780 0.1306

0.5384 0.2046 0.4481 5.0064

Ecart- type 176.4595

10.9957 0.2661

0.6506

Test de la diff. des moyen-

nes

§

§

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

§ Différence des moyennes entre Genève moins 5 % (test de Student)

* Différence des moyennes entre Genève moins 5 % (test de Khi-carré)

et Bâle-Ville statistiquement significative au niveau d'au et Bâle-Ville statistiquement significative au niveau d'au

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DIFFÉRENCES DE CHÔMAGE ENTRE GENÈVE ET LE RESTE DE LA SUISSE 395

Une autre différence frappante concerne la part des activités économiques qui subissent des fluctuations cycliques ou saisonnières plus marquées. Dans le canton de Bâle-Ville, quasiment un chômeur sur trois provient de ces activités alors que ce pourcentage ne dé- passe pas 23 % à Genève. En revanche, on observe que le pourcentage de personnes is- sues de l'administration publique est nettement supérieur à Genève qu'il ne l'est à Bâle- Ville. Cette différence est suffisamment importante pour qu'on s'intéresse de plus près à ces personnes qui auraient occupé un dernier emploi dans l'administration avant de tomber au chômage. Nous y reviendrons dans un prochain tableau qui nous permettra de confirmer l'hypothèse selon laquelle cette population se distingue nettement des au- tres chômeurs. En fait, cette catégorie regroupe une très forte majorité de personnes qui, après avoir achevé une premier délai cadre d'indemnisation fédérale, ont obtenu un em- ploi temporaire cantonal (ETC) dans l'administration publique avant de recommencer un nouveau délai cadre LACI. Dans le système PLASTA, ces personnes sont alors in- scrites comme provenant de l'administration publique. Dans les faits, il s'agit donc de chômeurs qui recommencent une nouvelle période d'indemnisation fédérale après avoir bénéficié d'un emploi temporaire cantonal.

Le tableau 3 reproduit les statistiques descriptives pour le canton de Genève en les comparant cette fois-ci avec celles observées pour l'ensemble de la Suisse (à l'exception de Genève et de Bâle-Ville). Ce tableau nous permet de constater une nouvelle fois tou- tes les différences statistiquement significatives qui séparent Genève du reste de la Suisse, le canton de Bâle-Ville présentant en l'occurrence une population au chômage beaucoup plus semblable à celle du reste du pays. Nous avons reproduit également dans ce tableau certaines données statistiques qui nous permettent de capter quelques-unes des différences structurelles entre les cantons suisses que nous utiliserons dans le cadre de nos estimations empiriques des modèles de durée.

Cette brève partie descriptive est complétée par le tableau 4 qui présente les différen- ces apparentes entre les chômeurs issus du secteur de l'administration publique et toutes les autres personnes en provenance d'une autre activité. Ces disparités sont illustrées dans les trois cas de figure que nous avons retenus. Elles nous semblaient intéressantes à examiner de plus près compte tenu du fait que, excepté à Bâle-Ville, ces personnes ont des durées de chômage significativement supérieures à la moyenne et qu'elles représen- tent, notamment à Genève, une part non négligeable des individus inscrits.

Ce tableau confirme largement nos hypothèses selon lesquelles nous avons à faire à deux groupes de la population de chômeurs significativement différents l'un de l'autre.

Cette différence s'observe notamment au niveau de la durée de chômage (en particulier à Genève où elle atteint 14,3 % alors qu'elle ne s'élève qu'à 7,8 % dans le reste de la Suisse). De ce point de vue, il est intéressant de constater qu'à Bàie la durée du chômage des personnes issues de l'administration est plus faible que la durée moyenne des autres chômeurs alors que l'inverse est observé à Genève. Les différences sont également ma- nifestes au niveau de l'âge (et sur ce plan Genève se distingue une nouvelle fois assez nettement des deux autres cas de figure) et du nombre d'épisodes de chômage vécu au cours des deux années ayant précédé l'inscription. Ces quelques observations permet-

(10)

tent en tous les cas de se rendre à l'évidence: cette population issue de l'administration publique regroupe des individus fragilisés et sans aucun doute des chômeurs ayant béné- ficié, à Genève en tous les cas, d'un emploi temporaire cantonal qui leur a permis d'ou- vrir, dans un délai de 12 mois, un nouveau droit à des indemnités fédérales.

Toutes ces statistiques descriptives sont intéressantes et utiles car elles nous permet- tent de formuler certaines hypothèses qu'on ne peut pas vérifier pourtant sur la base de ces seuls tableaux. En effet, il faudrait pouvoir examiner, toutes choses égales par ail- leurs, l'influence exercée par une variable particulière sur la probabilité de rester au chô- mage. Or, ceci n'est possible que dans le cadre d'une estimation économétrique des modèles de durée qui nous permettra de contrôler l'influence exercée par toutes les va- riables intégrées dans notre base de données PLASTA. Ce sera précisément l'objectif de la section 4 qui présente les résultats des analyses empiriques que nous avons pu effec- tuer sur la base des données que nous venons de présenter.

Tableau 3: Statistiques descriptives des chômeurs du canton de Genève et du reste de la Suisse (à l'exception de Bâle-Ville et Genève)

Variables

Durée du chômage (en jours) Age

Nombre d'épisodes de chômage durant les 2 dernières années Hommes Marié Qualifié Semi-qualifié Cadre ou indépendant Spécialiste

Etudiant ou apprenti Etranger permis B Etranger permis C Etranger autres permis

Secteur d'activité soumis à des variations cycliques Secteur d'activité administrations publiques Premier emploi Retour dans la vie active

Suisse 15 % sans Min

6 14 0

0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0

0

0 0

Max

1044 65 4

GE et BS (N Moyenne

128.4441 35.0393 0.1023

0.5364 0.4729 0.5937 0.1186 0.0633 0.5183 0.0730 0.1327 0.2487 0.0258 0.3086

0.0255

0.0584 0.0351

= 57'135) Ecart-

type 131.3552

11.8244 0.3272

Min

6 15 0

0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0

0

0 0

Genève (N = 30'918) Max

1097 65 3

Moyenne

191.2486 35.6747 0.0650

0.5042 0.4962 0.6277 0.2144 0.0641 0.6267 0.0884 0.1343 0.2931 0.0288 0.2277

0.0479

0.0717 0.1413

Ecart- type 176.4595

10.9957 0.2661

Test de la difT.

des mo- yennes

§

§ p.a.

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

*

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DIFFÉRENCES D E C H Ô M A G E E N T R E G E N È V E E T LE RESTE D E LA SUISSE 397

Variables

Autre situation avant chômage

Commune (l-4'999) habitants

Commune (20'000-99'999) habitants

Commune >100'000 habitants

Entrée au chômage en 1998

Entrée au chômage après janvier 2000 Part des services dans l'activité économique du canton Part des femmes dans la population active du canton Part des travailleurs à temps partiel dans la population active du canton Part des étrangers dans la population active du canton Part des frontaliers dans la population active du canton Ratio des places vacantes dans le canton

Taux de chômage cantonal au moment de l'entrée au chômage

Suisse 15% sans GE et BS (N Min

0 0 0

0 0 0 0.5458

0.3765

0.1831

0.1337

0.0000

0.0458

0.3000 Max

1 1 1

1 1 1 0.7753

0.4294

0.2957

0.4628

0.1872

0.3218

6.3430

Moyenne

0.1649 0.3931 0.1553

0.1332 0.2063 0.4460 0.6955

0.4116

0.2564

0.2400

0.0323

0.1033

2.6522

= 5T135) Ecart-

type

0.0704

0.0128

0.0280

0.0803

0.0491

0.0608

1.1481 Min

0 0 0

0 0 0 0.8331

0.4305

0.2380

0.4221

0.1242

0.0823

4.4000

Genève (N = 30'918) Max

1 1 1

1 1 1 0.8331

0.4305

0.2380

0.4221

0.1242

0.0823

6.1180

Moyenne

0.0734 0.0780 0.1306

0.5384 0.2046 0.4481 0.8331

0.4305

0.2380

0.4221

0.1242

0.0823

5.0064 Ecart-

type

-

-

- - -

0.6506 Test de

la difT.

des mo- yennes

*

*

*

*

*

*

p.a.

p.a.

p.a.

p.a.

p.a.

p.a.

§

§ Différence des moyennes entre Genève et Suisse statistiquement significative au niveau d'au moins 5 % (test de Student)

* Différence des moyennes entre Genève et Suisse statistiquement significative au niveau d'au moins 5 % (test de Khi-carré)

p. a. Test de différence des moyennes pas applicable

(12)

Tableau 4: Statistiques descriptives - chômeurs des cantons de Genève, de Bâle-Ville et de la Suisse à l'exception de Genève

Echantillons séparés selon le critère "avoir été employé dans les administrations publiques avant l'inscription au chômage"

Variables

Durée du chômage (en jours) Age

Nombre d'épisodes de chômage durant les 2 dernières années Hommes Marié Qualifié Semi-qualifié Cadre ou indépendant Spécialiste

Etudiant ou apprenti Etranger permis B Etranger permis C Etranger autres permis Premier emploi Retour dans la vie active

Autre situation avant chômage

Commune (l-4'999) habitants

Commune (20'000-99'999) habitants

Commune > ÎOO'OOO habitants

Bâle-Ville Non admin.

(N = 12'979) Moyenne

122.0775

34.8511 0.0780

0.5566 0.4675 0.5218 0.0522 0.0650 0.4652 0.0642 0.1934 0.2654 0.0183 0.0539 0.0277

0.1118

0.0023

0.0452

0.9525

Administra- tion (N = 218) Moyenne 115.7202

36.3119 0.1147

0.5780 0.3211 0.7569 0.0367 0.0917 0.6606 0.0459 0.0734 0.1376 0.0046 0 0

0.1789

0

0.0413

0.9587

Genève Non admin.

(N = 29'436) Moyenne

189.9882 35.5028 0.0624

0.5038 0.4998 0.6240 0.2162 0.0640 0.6233 0.0914 0.1379 0.2969 0.0295 0.0753 0.1484

0.0695

0.0782

0.1310

0.5380

Administra- tion (N = 1'482)

Moyenne 216.2827 39.0877 0.1154

0.5135 0.4244 0.7011 0.1788 0.0668 0.6937 0.0297 0.0634 0.2166 0.0135 0 0

0.1511

0.0749

0.1215

0.5466

Suisse (excepté Genève) Non

admin.

(N = 57'610) Moyenne

128.0851 34.9899 0.1007

0.5371 0.4758 0.5872 0.1170 0.0633 0.5141 0.0727 0.1371 0.2515 0.0258 0.0595 0.0355

0.1624

0.3821

0.1504

0.1581

Administra- tion (N = 1'497)

Moyenne 138.0741

36.7956 0.1376

0.5324 0.3667 0.7321 0.0942 0.0655 0.6159 0.0648 0.0441 0.1603 0.0147 0 0

0.2098

0.3026

0.1850

0.2558

(13)

DIFFÉRENCES DE CHÔMAGE ENTRE GENÈVE ET LE RESTE DE LA SUISSE 399

4. ESTIMATIONS DES FONCTIONS DE HASARD

Cette section est entièrement consacrée à une analyse microéconomique basée sur les données individuelles relatives aux chômeurs inscrits à Genève, à Bâle-Ville et dans le reste de la Suisse et à leur durée de chômage. Il s'agit en particulier de déterminer l'in- fluence exercée par les caractéristiques personnelles sur la durée du chômage. Cela nous permettra de comprendre pourquoi la durée du chômage est plus longue à Genève qu'ailleurs.

La réponse à cette question est importante pour plusieurs raisons. Tout d'abord, le bien-être d'une personne au chômage dépend plus du temps passé sans emploi que du fait d'avoir eu l'expérience d'un épisode de chômage. KIEFER (1988) fait remarquer que, de ce point de vue, le taux de chômage est une statistique moins utile que la durée moyenne du chômage. D'autre part, comme nous l'avons dit auparavant, le taux de chô- mage étant le produit du taux d'entrée au chômage par sa durée moyenne, pour comprendre l'apparition d'un "stock" de chômeurs important, il convient de considérer les facteurs et les caractéristiques individuelles des chômeurs qui contribuent à prolon- ger le temps passé au chômage.

Pour examiner le lien entre les caractéristiques individuelles des chômeurs et la durée de leurs épisodes de chômage, nous avons procédé aux estimations des modèles de du- rée. En l'occurrence, nous avons supposé que les fonctions de hasard de base, ou les taux instantanés de transition vers l'emploi, sont constants par morceaux. De surcroît, nous avons émis l'hypothèse que l'effet des variables explicatives sur le hasard de base est log-linéaire et multiplicatif (voir LANCASTER, 1990, pour une présentation complète des modèles de durée).

Sur la base des différents échantillons décrits à la section précédente, nous avons es- timé l'influence exercée par les variables exogènes retenues sur la durée de chômage. En l'occurrence, nous avons tout d'abord effectué une estimation sur l'ensemble de la popu- lation concernée avant de considérer uniquement les personnes inscrites à Genève et à Bâle-Ville.

Le tableau 5 présente, à la deuxième colonne, les résultats obtenus sur la base de l'échantillon suisse y compris les données pour les cantons de Bàie et de Genève. Pour dis- tinguer les personnes inscrites dans ces deux cantons des autres chômeurs, nous leur avons simplement attribué dans l'estimation une variable muette égale à 1. Seules les variables explicatives ayant un effet significatif ont été retenues et reportées dans ce tableau comme dans les prochains présentés dans cette section.2 Nous avons également choisi de ne présenter que les résultats relatifs aux probabilités de transition vers l'emploi.3

Une nouvelle fois, les résultats sont trop nombreux et trop riches pour pouvoir être

2. Seuls les coefficients significativement différents de 0 au niveau de significativité d'au plus 10%

ont été retenus dans le modèle.

3. Les lecteurs intéressés par les estimations relatives aux sorties du système PLASTA peuvent consulter l'étude de FLÜCKIGER et al. (2002).

(14)

tous commentés. Nous nous contenterons de le faire pour les variables qui nous sem- blent les plus intéressantes. En premier lieu, on relèvera que le type de permis de travail a une influence significative et négative sur la probabilité de quitter le chômage pour l'emploi, ce qui signifie que la population étrangère en Suisse subit une durée de chô- mage supérieure à celle des autres chômeurs. En particulier, il apparaît que c'est la caté- gorie des " autres étrangers " (composée de saisonniers et de réfugiés) qui a le plus de difficultés à quitter le chômage (par rapport à la population suisse choisie comme réfé- rence) suivie par les détenteurs de permis B et finalement par les chômeurs étrangers ayant un permis d'établissement. L'effet exercé par la population étrangère sur le taux de chômage, relevé dans de nombreuses études (Cf notamment DE COULON, 1999), s'exerce donc par le biais d'une durée de chômage prolongée qui contribue à augmenter, toute choses égales par ailleurs, le taux de chômage.

Ce premier résultat nécessite sans doute une interprétation prudente. En effet, il faut rappeler que les modèles de recherche d'emploi, qui représentent la référence théorique pour l'application des modèles de durée, définissent la probabilité de sortir du chômage vers l'emploi comme le produit de la probabilité de recevoir une offre de travail multi- pliée par la probabilité d'accepter cette offre (LANCASTER, 1990). Le fait d'accepter ou non un emploi dépend du salaire proposé et du salaire de réserve. Bien que ce soit l'em- ployeur qui décide du montant de salaire qui sera proposé, la décision d'accepter ou non cette offre revient en fin de compte au demandeur d'emploi. Ainsi, il est possible que les étrangers connaissent moins bien le marché du travail que les Suisses et qu'ils reçoivent en conséquence moins de propositions d'emploi. De surcroît, ils peuvent être victimes de discrimination à l'embauche et recevoir de ce fait des offres de salaires moins élevées que celles qui sont proposées aux Suisses. Cependant, si ces personnes sont moins exi- geantes que les Suisses quant au niveau de salaire demandé, elles pourraient fort bien expérimenter des durées du chômage qui ne sont pas plus longues que celles vécues par les nationaux, ce qui ne semble pas être le cas dans notre estimation. Sur la base de ce seul résultat, il n'est pas possible de trancher. Ce que l'on sait en revanche c'est que la présence d'une main-d'œuvre étrangère contribue à accroître la durée et le taux de chô- mage enregistrés, effet que l'on retrouvera également lorsque nous limiterons notre exa- men aux seuls cantons de Genève et de Bâle. Avant de commenter plus en détail les au- tres résultats, il faut signaler que cet effet lié à la main-d'œuvre étrangère a été obtenu en contrôlant pour le niveau de qualification. On ne peut donc argumenter sur ce point en prétendant simplement que cet effet serait la conséquence du faible niveau de quali- fication de la population active étrangère.

En consultant le tableau 5, on observe que toutes les variables relatives aux niveaux de qualification ou d'expérience professionnelle ont le signe attendu. En particulier, les personnes qualifiées (surtout) mais aussi les personnes semi-qualifiées ont une probabi- lité significativement plus élevée de quitter rapidement le chômage pour retrouver un nouveau travail par rapport à la catégorie des individus sans qualification. La même ob- servation peut être faite lorsque l'on considère les cadres ou les spécialistes ainsi que les étudiants et les apprentis qui souffrent surtout d'un chômage de nature frictionnelle liée

(15)

DIFFÉRENCES DE CHÔMAGE ENTRE GENÈVE ET LE RESTE DE LA SUISSE 401

au fait qu'ils font pour la première fois leur entrée sur le marché du travail, transition qui nécessite un certain délai mis à profit pour sonder les opportunités d'emploi.

La lecture du tableau 5 met en exergue que les personnes qui retournent dans la vie active après une interruption de carrière mettent plus de temps à retrouver un travail que celles qui étaient occupées avant de tomber au chômage. Il faut sans doute y voir l'effet d'une dépréciation du capital humain subie par les personnes qui se retirent tem- porairement du marché. L'effet négatif associé à la variable "premier emploi" concerne des personnes qui n'ayant pas exercé d'activités professionnelles, se décident à entrer pour la première fois sur le marché bien après la fin de leur formation, ce qui engendre des difficultés supplémentaires liées à l'absence de toute expérience professionnelle.

Comme nous l'avions déjà soupçonné auparavant, les personnes qui proviennent de l'administration publique ont manifestement plus de difficultés à retrouver un emploi, toutes choses égales par ailleurs, que des personnes issues d'autres activités. A l'opposé, il se confirme que les personnes engagées dans des activités dites cycliques ont certes plus de chance d'entrer au chômage mais elles y restent moins longtemps.

Le tableau 5 confirme également ce que nous pressentions à savoir que l'effet de l'âge sur la durée du chômage est très significatif: il indique en l'occurrence que les personnes plus âgées éprouvent plus de difficulté à retrouver un emploi et que leur durée de chô- mage s'en trouve donc prolongée. Si les jeunes font effectivement face à un risque plus élevé de tomber au chômage la durée de cet épisode est nettement plus courte que celle de leurs aînés qui en revanche ont un risque plus faible de perdre leur emploi.

Finalement, le dernier résultat qui ressort clairement de ce tableau est le fait que, mal- gré toutes les variables explicatives intégrées dans nos estimations empiriques et malgré les variables propres spécifiques à chaque canton introduites dans le tableau 5, nous ne sommes pas en mesure de capter tous les effets susceptibles d'influencer la durée du chômage si bien que les variables muettes relatives au canton d'appartenance semblent avoir un impact significatif sur la probabilité de trouver un emploi. En l'occurrence, il s'avère que des variables inobservables ou inobservées tendent à réduire la probabilité de transition vers l'emploi pour les chômeurs genevois et à l'accroître au contraire pour les chômeurs bâlois. Il est fort probable que la forte hétérogénéité de la population inté- grée dans l'échantillon suisse ne puisse pas être expliquée par les caractéristiques indivi- duelles des chômeurs ni par les variables économiques censées capter les spécificités cantonales.

C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de limiter notre analyse aux cantons de Genève et de Bâle-Ville en partant de l'idée que ce choix permettrait aussi de limiter l'hétérogénéité des données du fait des similitudes maintes fois évoquées entre les deux cantons. Les résultats de ces nouvelles estimations sont présentées dans la troisième co- lonne du tableau 5. Elle reprend la même structure explicative que l'estimation précé- dente, raison pour laquelle nous ne reviendrons pas sur les résultats qui ont déjà été commentés dans le cas de l'ensemble de la Suisse, sauf s'il s'avère que le signe attaché au coefficient est différent.

(16)

Tableau 5: Estimation des facteurs explicatifs des probabilités instantanées de transition du chômage vers remploi

Echantillon de 15 % des chômeurs suisses; échantillon des chômeurs genevois et bâlois

Variables

0 - 3 mois 3 - 6 mois 6 - 9 mois 9-12 mois 12-15 mois 15-18 mois 18-21 mois 21-24 mois 2 4 - 2 7 mois

> 27 mois Age/10

Nombre d'épisodes de chômage durant les 2 dernières années Genève

Bâle-Ville Hommes Marié Qualifié Semi-qualifié Cadre ou indépendant Spécialiste

Etudiant ou apprenti Etranger permis B Etranger permis C Etranger autres permis Secteur d'activité soumis à des fluctuations cycliques

Secteur d'activité administrations publiques

Premier emploi Retour dans la vie active Autre situation avant chômage Commune (l-4'999) habitants Commune (20'000-99'999)

15 % des chômeurs suisses Coefficient

estimé -3.3087 -3.2390 -3.5321 -3.6696 -3.7997 -3.9069 -4.0158 -3.8623 -3.3994 -4.2288 -0.2574 -0.2737 -0.1192 0.2663 0.0793 -0.0483 0.2839 0.0612 0.0607 0.1702 0.1751 -0.2498 -0.1668 -0.4716 0.1375 -0.2154 -0.3400 -0.4731 0.2307 0.0978 -0.0768

Ecart-type 0.2103 0.2106 0.2112 0.2122 0.2139 0.2174 0.2242 0.2329 0.2484 0.3806 0.0055 0.0185 0.0295 0.0472 0.0111 0.0126 0.0161 0.0202 0.0253 0.0148 0.0244 0.0195 0.0140 0.0420 0.0119 0.0350 0.0274 0.0347 0.0145 0.0130 0.0172

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Chômeurs de GE et BS Coefficient

estimé -3.9814 -3.8463 -4.0821 -4.2130 -4.2749 -4.4363 -4.4972 -4.4683 -3.6510 -4.2244 -0.2684 -0.3027 0.2422

-

0.0405

-

0.2447 0.2447 0.1491 0.2317 0.2176 -0.1981 -0.0879 -0.7287 0.0585 -0.2864 -0.1771 -0.5725 0.2844

- -

Ecart-type 0.3015 0.3017 0.3023 0.3031 0.3044 0.3066 0.3099 0.3148 0.3171 0.3771 0.0075 0.0294 0.2901

-

0.0147

-

0.0184 0.0184 0.0356 0.0213 0.0366 0.0232 0.0174 0.0628 0.0175 0.0405 0.0370 0.0318 0.0257

- -

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habitants

Commune > ÎOO'OOO habitants -0.2294 0.0183 -0.1058 0.0165

(17)

DIFFÉRENCES DE CHÔMAGE ENTRE GENÈVE ET LE RESTE DE LA SUISSE 403

Variables 15 % des chômeurs suisses Chômeurs de GE et BS Coefficient Ecart-type Coefficient Ecart-type

estimé estimé Entrée au chômage en 1998

Entrée au chômage après janvier 2000

Part des femmes dans la population active du canton

Part des travailleurs à temps partiel dans la population active du canton Part des étrangers dans la popula- tion active du canton

Ratio des places vacantes dans le canton

Taux de chômage cantonal au moment de l'entrée au chômage

* Coefficient statistiquement différent de 0 au niveau de significati vite de 10%

** Coefficient statistiquement différent de 0 au niveau de significativité d'au plus 5 %

Le résultat le plus intéressant de l'estimation présentée dans la troisième colonne du ta- bleau 5, concerne la variable muette associée au canton de Genève pour distinguer dans l'échantillon analysé les personnes résidant dans ce canton par rapport à celles inscrites à Bâle-Ville. Dans ce cas, le coefficient associé à cette variable n'est pas significatif ce qui implique que toutes les variables individuelles intégrées dans l'estimation permet- tent d'expliquer les différences de durée de chômage entre Genève et Bâle. En d'autres termes, si les chômeurs genevois avaient les mêmes caractéristiques individuelles que les chômeurs bâlois, la durée du chômage à Genève pourrait être réduite à la moyenne bâ- loise (elles s'élèvent respectivement à 191 et 120 jours durant la période étudiée), ce qui, toutes choses égales par ailleurs, et en particulier pour un taux d'entrée donné, permet- trait de réduire significativement le taux de chômage genevois.

Finalement, le dernier résultat sur lequel nous aimerions revenir concerne l'impact exercé par le fait d'avoir eu un emploi dans l'administration publique avant l'épisode de chômage examiné. Une nouvelle fois, cette variable exerce un effet négatif significatif sur la probabilité de retrouver un travail. Il est encore plus fort dans l'estimation réduite aux seuls chômeurs des cantons de Genève et Bâle-Ville que celui que nous avions ob- tenu dans le cadre de notre estimation pour l'ensemble du pays. Il est donc possible que cet effet de prolongation du chômage soit lié notamment aux emplois temporaires can- tonaux qui auraient pour effet non pas de réinsérer plus rapidement les personnes dans un emploi sur le marché du travail mais à prolonger leur séjour au chômage. Sachant que Genève se distingue nettement du canton de Bâle-Ville, notamment du point de vue de cette variable particulière, il est possible que ce système soit à l'origine, en partie tout au moins, des différences observées entre les deux cantons. Ce résultat est en soi relative- ment prévisible quand on sait que les participants à ces programmes sont recrutés parmi les chômeurs considérés comme difficiles à placer. Un doute concernant l'efficacité de

-0.0318 0.0183 * 0.2976 0.1247 -0.1019 0.0148 ** -0.3034 0.0773 -1.1300 0.5223 **

-1.7269 0.3795 **

-1.1877 0.1473 **

0.2587 0.1245 **

-0.0539 0.0106 ** -0.2867 0.1157

(18)

ces programmes peut cependant être émis. En effet, les travaux effectués dans le cadre de ces programmes ne doivent pas faire concurrence à l'économie privée. Il est donc possible que l'expérience acquise dans le cadre de ces programmes ne soit pas très valo- risée par le secteur privé.

Pour compléter encore notre analyse, nous avons effectué finalement les mêmes esti- mations mais en séparant cette fois-ci les échantillons pour la population genevoise et bâloise. Les résultats de ces estimations sont reproduits dans le tableau 6. Etant donné la grande similitude des résultats obtenus, nous ne reviendrons pas en détail sur tous les commentaires que nous avons déjà formulés sur la base des tableaux antérieurs. Néan- moins, il est intéressant de relever que l'estimation effectuée pour le seul canton de Bâle-Ville nous indique que le coefficient associé aux personnes issues de l'administra- tion publique n'est pas significativement différent de zéro. Cela signifie que les person- nes qui ont été employées dans l'administration publique à Bâle avant de perdre leur emploi n'ont pas des durées de chômage différentes des autres chômeurs.

Si l'on se tourne maintenant du côté des résultats pour le seul canton de Genève, nous constatons que, contrairement au cas bâlois, les personnes issues de l'administration pu- blique se distinguent par une probabilité de quitter le chômage qui est significativement plus faible que celle des autres chômeurs. Cela confirme une nouvelle fois l'effet négatif exercé par les emplois temporaires cantonaux sur la probabilité de sortie, la durée de chômage et, par répercussion, sur le taux de chômage genevois en comparaison de Bâle-Ville notamment. On relèvera également que le coefficient obtenu sur cette va- riable particulière (soit -0,35) est nettement le plus élevé de tous les effets estimés dans les estimations précédentes. Cela démontre sans aucun doute que l'impact exercé par les emplois temporaires cantonaux sur la probabilité de sortir du chômage est loin d'être négligeable, même si d'autres coefficients le surpassent, en particulier celui atta- ché à la variable "retour dans la vie active".

L'ensemble des analyses présentées dans cet article nous amène donc clairement à conclure que la participation à des programmes cantonaux d'emplois temporaires contribue à allonger la durée du chômage des personnes qui y sont inscrites. Cependant, malgré leur part de "responsabilité", les emplois temporaires cantonaux ne constituent pas la seule cause des durées de chômage plus longues à Genève qu'à Bâle-Ville ou dans le reste de la Suisse. Plusieurs facteurs tels que la composition de la population active et la structure sectorielle de l'économie cantonale y concourent.

Pour vérifier cette dernière hypothèse, nous avons estimé les probabilités de rester au chômage plus longtemps qu'une certaine durée à l'aide de l'estimateur de Kaplan-Meier (cf. LANCASTER, 1990), et ceci pour les chômeurs de Genève et de Bâle-Ville, mais en excluant les personnes ayant travaillé dans les administrations publiques. Cet estimateur est représenté dans la figure 3. Elle montre que dans le canton de Genève, la probabilité de rester au chômage plus longtemps que toutes les durées représentées sur l'axe hori- zontal est significativement plus élevée que dans le canton de Bâle-Ville. A ce propos, on peut noter que les intervalles de confiance à 95 % tracés pour les fonctions de survie de Genève et de Bâle-Ville ne se superposent à aucun moment. Cela confirme que les

(19)

DIFFÉRENCES D E C H Ô M A G E E N T R E G E N È V E ET LE RESTE D E LA SUISSE 405

emplois temporaires cantonaux ne peuvent être tenus pour uniques responsables des du- rées de chômage plus longues à Genève.

Tableau 6: Estimation des facteurs explicatifs des probabilités instantanées de transition du chômage vers l'emploi ou vers une autre sortie

(Chômeurs de Bâle-Ville et de Genève)

Variables

Période 1 ( 0 - 3 mois) Période 2 ( 3 - 6 mois) Période 3 ( 6 - 9 mois) Période 4 (9-12 mois) Période 5 (12-15 mois) Période 6 (15-18 mois) Période 7 (18-21 mois) Période 8 (21-24 mois) Période 9 (24-27 mois) Période 10 (>27 mois) Age/10

Nombre d'épisodes de chômage durant les 2 dernières années Hommes

Marié Qualifié

Cadre ou indépendant Spécialiste

Etudiant ou apprenti Etranger permis B Etranger permis C Etranger autres permis Secteur d'activité soumis à des fluctuations cycliques Administrations publiques Premier emploi

Retour dans la vie active Autre situation avant chômage Commune (l-4'999) habitants Commune > ÎOO'OOO habitants Entrée au chômage en 1998 Entrée au chômage après janvier 2000

Coefficient estimé -4.8011 -4.6343 -4.8691 -5.1195 -5.1853 -5.4695 -5.3974 -5.2706 -4.8484 -9.9261 -0.2648 -0.3249 0.0600 -0.0664 0.2346 0.1302 0.2651 0.2606 -0.1136 -0.1545 -0.2035 0.0612

-0.1393 -0.5112 0.2173

-0.0787 -0.1667

Bâle-Ville Ecart-type

0.0601 0.0642 0.0734 0.0904 0.1121 0.1587 0.1996 0.2589 0.4142 9.4782 0.0138 0.0516 0.0266 0.0304 0.0346 0.0605 0.0361 0.0610 0.0426 0.0347 0.1126 0.0298

0.0662 0.1088 0.0422

0.0339 0.0300

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Coefficient estimé -5.2048 -5.0800 -5.3117 -5.4127 -5.4767 -5.6204 -5.7002 -5.6856 -4.8319 -5.3453 -0.2705 -0.2887 0.0329 0.0343 0.2468 0.1398 0.2038 0.2009 -0.2481 -0.0601 -0.9067 0.0574 -0.3511 -0.1884 -0.5773 0.3279 0.0661 -0.0900

-0.0980

Genève Ecart-type

0.0421 0.0436 0.0471 0.0512 0.0572 0.0686 0.0849 0.1046 0.1114 0.2333 0.0095 0.0358 0.0177 0.0194 0.0219 0.0445 0.0267 0.0465 0.0302 0.0206 0.0758 0.0217 0.0447 0.0459 0.0336 0.0324 0.0321 0.0182

0.0191

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Coefficient statistiquement Coefficient statistiquement

différent de 0 au niveau de significativité de 10%

différent de 0 au niveau de significativité d'au plus 5 %

(20)

Figure 3: Estimateurs de Kaplan-Meier pour les fonctions de survie avec intervalles de confiance à 95%; transitions du chômage vers remploi pour Genève et Bâle-Ville

(Les personnes ayant travaillé dans les administrations publiques ont été exclues)

1080

5. CONCLUSIONS

L'analyse présentée dans cet article a permis de confirmer qu'une des raisons principa- les du fort taux de chômage genevois est liée aux flux de sortie du chômage qui n'ont que peu profité de l'amélioration conjoncturelle vécue par notre pays depuis 1998. Nous avons donc porté une attention toute particulière dans notre article à la question de la durée du chômage qui est intimement liée à la probabilité de sortir du chômage.

Notre analyse a mis en évidence que les durées moyennes de chômage enregistrées à Genève sont non seulement très différentes de celles observées dans le reste de la Suisse mais qu'elles diffèrent également significativement des durées enregistrées dans le can- ton de Bâle-Ville qui présente pourtant d'importantes similitudes avec le cas genevois (de par son caractère urbain et frontalier notamment). En affinant la description des personnes inscrites au chômage, nous avons pu constater de surcroît que les chômeurs genevois présentent des caractéristiques très différentes de celles de leurs homologues bâlois. Sans entrer dans tous les détails, on relèvera en particulier que le pourcentage de personnes qui reviennent dans la vie active après une interruption de carrière est à

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