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Conditionnel, spermatozoïdes et téléphones portables

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2460 Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 19 décembre 2012

actualité, info

Augmenter l’activité physique chez l’enfant : rien ne sert de faire courir ?

«Bouger plus, manger mieux», nous dit-on.

En pratique, les interventions visant à chan- ger les habitudes alimentaires de l’enfant se soldent souvent par un échec. Augmenter l’activité physique (AP) semble a priori plus faisable, notamment dans le cadre de pro- grammes scolaires ou parascolaires. Est-ce vraiment si simple de «Bouger plus» ? Dans une revue systématique avec méta-analyse de 30 essais contrôlés, incluant au total plus de 6000 enfants de moins de dix-sept ans, dans lesquels l’AP a été mesurée par accélé- romètre, Metcalf et coll. ont évalué l’effet d’interventions visant à augmenter l’AP des enfants. Différents types d’interventions, d’une durée minimale de quatre semaines, étaient testés (par exemple des sessions d’AP pendant ou après l’école pour dix-neuf de ces études, des approches comporte- mentales auprès des enfants ou des parents, ou de l’AP à faire à domicile). En moyenne, les interventions n’ont augmenté que de maniè re minimale l’AP quotidienne : la diffé- rence standardisée moyenne pour l’AP totale était de 0,12 (IC 95% : 0,04-0,20) et pour l’AP modérée à intense de 0,16 (IC 95% : 0,08-024), ce qui correspond à environ quatre minutes supplémentaires par jour d’AP modérée ou intense. L’effet n’était pas signifi- cativement différent en fonction de l’âge des participants, de la durée de l’intervention, de la qualité de l’étude ou du fait que l’interven- tion incluait ou non des sessions d’AP.

Commentaire : L’environnement familial, socia l et physique (espace de jeu, aménage- ment urbain) de l’enfant influence le niveau d’AP qui, comme les habitudes alimentaires, est difficile à modifier. Dans cette revue, le peu d’effets des interventions est surprenant mais pourrait s’expliquer notamment par des méca- nismes de compensation (par exemple, une intervention poussant un enfant à être plus actif à l’école pourrait s’accompagner d’une baisse de l’AP hors de l’école) ou de rempla- cement (les sessions d’AP de l’intervention remplaçant des sessions d’AP d’intensité égale). Au regard de ces résultats, faut-il aban- donner les interventions visant à augmenter l’AP ? Certainement pas, mais il reste beau- coup à faire pour identifier lesquelles sont à même d’augmenter l’AP chez les enfants.

Drs Clemens Bloetzer et Arnaud Chiolero CHUV, Lausanne Metcalf B, et al. Effectiveness of intervention on physical activity of children : Systematic review and meta-analysis of controlled trials with objectively measured outcomes (EarlyBird 54). BMJ 2012;

345:e5888.

Conditionnel, spermatozoïdes et téléphones portables

«Mode conditionnel», le voilà bien l’ennemi contemporain. Nous n’avons rien, person- nellement, contre lui. Les maîtres d’école le classaient après l’indicatif et avant le sub- jonctif, étant bien entendu que le martial impératif sortait généralement du rang. Au chapitre de la grammaire, rien de bien com- pliqué à l’exception des exceptions. Le mode était le mode (modus, manière), rien d’autre qu’un trait grammatical qui dénotait la ma- nière dont on voulait que le verbe s’expri- mât.

Rien de radicalement différent, au fond, avec le mode tel qu’il est aujourd’hui devenu.

Exemple : pour la génération montante, je suis présentement en mode écriture. Dans quel ques minutes je serai, si tout va bien, en mode correction ou en mode relecture. Puis, bien tôt, en mode envoi. Ainsi nos machines scandent-elles désormais nos vies. Mais sera it-ce bien nouveau ?

Avec l’indicatif, pas de soucis. Le fait évo- qué est bien là dans sa splendeur, qu’il soit ou non au présent. L’impératif ordonne, et le monde s’en trouve généralement fort aise.

Tout commence généralement à tanguer avec le subjonctif. Ah, le subjonctif… Jusqu’à son nom qui est incompréhensible ; quand il ne nous subjugue pas. Il faudra pourtant bien un jour le dire, à tous ces petits enfants fran- cophones, que ce mode mal-aimé est avant toute chose la tentative de refléter un imper- ceptible mouvement de l’âme. On veut dire par là une pensée, un sentiment, des désirs.

Nous sommes avec lui dans les délicieux in- terstices qui sont ceux du possible, du doute, de l’émotion, parfois même de la volonté en gestation, de l’obligation émergente. Encore eût-il fallu que nous le sachions. Le subjonc- tif n’est que fleurs. C’est ce parfum que l’on n’oubliera plus qu’après la mort. Et encore.

Et on voudrait aujourd’hui, dit-on, lui faire sa fête !

Basculer dans le conditionnel, voilà bien une autre paire de manches. Si le médecin s’en accommode volontiers, le scientifique n’y goûte guère. Il en ferait volontiers l’éco- nomie. Ecoutez bien : même les hypothèses se construisent sans lui. On apprend à s’en passer. Si un mode doit monter à l’échafaud, ce sera bien le conditionnel. On peut com- prendre : à quoi rimerait le fait de vouloir à tout prix évoquer un fait qui n’est pas, qui

n’a pas été et dont rien ne nous assure qu’il sera ? Pourquoi se placer sous la coupe du hasard, maintenant que la fatalité n’est plus ? A quoi riment ces concessions hypothétiques introduites à grand renfort de

«si» ? Chez les petits peut-être : on dirait que quand tu serais grand(e) tu serais un(e) doc­

teur(e). C’est char mant. Mais pas après l’âge de raison, par définition.

On nous mande d’ailleurs, depuis les fronts diplomati- ques des guerres du langage, que le statut des territoires du mode conditionnel serait dé- sormais paradoxalement con- testé. On assimilerait doréna- vant plutôt ses temps à des temps de l’indicatif (pour le conditionnel présent et passé 1re forme), voire de l’impro- bable du subjonctif (passé 2e

forme). Pas sera-t-on bientôt de Le tueur se serait caché dans les bois environnants ; il aurait violé sa victime avant de l’égorger à Johan est en retard ; il aura sans doute violé sa victime avant de l’égorger. La nuance, comme on le voit, est assez mince entre le conditionnel et le futur antérieur. Elle n’est pourtant pas totalement inutile, en médecine légale par exemple.

Dans le premier cas, nous avons affaire à une hypothèse, une tournure, fréquemment employée par les journalistes pour bien mon- trer qu’ils ne reprennent pas à leur compte le fait qu’ils citent (procédé de modalisation).

Dans le second cas, il s’agit souvent de se rassurer en transformant une hypothèse en quasi-certitude. Fatigué ou pressé, le journa- liste (généralement audiovisuel) aura aussi une solution nettement moins élégante. Il dira : c’est une information à mettre au condi­

tionnel (…). Moins élégante, certes, mais qui peut avoir pour effet paradoxal de faire se lever l’oreille ou la paupière de l’auditeur.

Deux exemples récents illustreront notre propos.

Les ondes téléphoniques

On apprenait il y a quelques jours à Bruxelles que des eurodéputées réclamaient haut et fort une nouvelle législation euro- péenne. L’objet : informer les consomma- en marge

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Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 19 décembre 2012 2461 teurs des risques de tumeurs au cerveau en

cas d’utilisation intensive du téléphone por- table ; une décalque téléphonique en somme de ce qui existe sur les paquets de cigarettes.

«Comme pour le tabac ou pour l’amiante, il faut de toute urgence légiférer sur les dan- gers de l’utilisation intensive du téléphone portable. (…) C’est une catastrophe sanitaire d’ampleur qui nous attend d’ici à quelques années si nous ne faisons rien» a déclaré l’eu- rodéputée française (Vert) Michèle Rivasi.

«Combien d’années faudra-t-il pour qu’on

réalise qu’il était temps d’agir» a renchéri la Libérale belge Frédérique Ries.

Pour justifier leur initiative, les deux élues de l’Union européenne ont évoqué le cas d’Innocente Marcolini. Il s’agit d’un cadre d’entreprise italien, déclaré invalide à 80%, en octobre dernier, par la Cour de cassation italienne du fait, assure-t-on, de l’utilisation intensive qu’il a pu faire de téléphones por- tables. M. Marcolini vivait avec son télé-

phone collé à l’oreille, ce qu’il n’aurait peut- être pas fait s’il avait été averti des dangers, a estimé Mme Rivasi. Sans doute. Mais faut- il suivre l’eurodéputée quand elle affirme qu’avec cette décision de justice, «le risque de tumeurs au cerveau a été démontré» ?

«Nous savons maintenant qu’il existe un risque élevé de tumeur des nerfs crâniens pour les utilisateurs intensifs de téléphone portable. Il faut que cela se sache, par le biais de campagnes d’information officielles émanant des responsables de santé publi- que de tous les Etats membres de l’Union européenne», assure encore l’heureuse élue.

Elle ajoute que pour l’heure la Commission européenne est quasiment autiste sur cette question. «Les enjeux financiers sont tels que les arguments de précaution ont extrême- ment du mal à porter face à des industriels et à des autorités sanitaires qui affirment que les portables ne sont pas nocifs, faute de preuve du contraire» assure son homologue belge. Faute de preuve du contraire, précisé- ment. Ce qui impose à ces deux femmes d’user du conditionnel et du mode incanta- toire.

Les spermatozoïdes humains

Il faut ici jeter un œil à Human Reproduc­

tion.1 On y apprend que la concentration en spermatozoïdes du sperme des Français a baissé d’un tiers entre 1989 et 2005 ; un cons- tat amplement médiatisé ces derniers jours dans l’Hexagone (comment cela pourrait-il ne pas être le cas ?). On explique que c’est là la «première enquête à l’échelle d’un pays entier» menée sur ce thème. Une enquête me- née à partir des éjaculats de plus de 26 600 hommes accueillis pendant dix-sept ans dans des centres d’études et de conservation du sperme humain. Le nombre des spermato-

zoïdes comptabilisés chez les hommes de 35 ans est passé de 73,6 millions par millilitre de sperme en 1989 à 49,9 millions en moyenne en 2005. Soit une baisse continue de la con- centration de l’ordre de 1,9% par an et une réduction totale de 32,2% au bout de dix- sept ans.

S’inquiéter ? Les concentrations sperma- tiques restent en moyenne dans la norme fer- tile de l’OMS (supérieure à 15 millions/ml).

Certes, mais selon certaines études, des con- centrations inférieures à 55 millions/ml pour- raient influer négativement sur le temps né- cessaire pour parvenir à féconder. Et puis il y a quoi qu’on dise ce «déclin significatif».

Selon les auteurs de l’étude, il s’agit là d’une

«sérieuse mise en garde», même s’il faut «res- ter prudent» sur de possibles liens avec l’en- vironnement (phtalates, bisphénol A, etc.).

«Il reste très difficile à dire si la qualité du sperme a vraiment changé et surtout si nous devons nous inquiéter des menaces environ- nementales qui pèsent sur la fertilité mascu- line» relève Allan Pacey (Université de Shef- field, Grande-Bretagne) dans un commentaire joint à l’étude. C’est ainsi : le pragmatisme insulaire ne goûte guère le conditionnel con- tinental.

Jean-Yves Nau jeanyves.nau@gmail.com

1 Rolland M, Le Moal J, Wagner V, Royère D, De Mouzon J. Decline in semen concentration and morphology in a sample of 26 609 men close to general population between 1989 and 2005 in France. Hum Reprod 2012 ; epub ahead of print.

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