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Oui, vous pouvez le dire (et l’écrire) en français !

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2468 Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 22 décembre 2010

actualité, info

Oui, vous pouvez le dire (et l’écrire) en français !

Heureuse et originale initiative prise (depuis la rue des Pyramides à Paris) par un service du ministère français de la Culture dont nous ignorions jusqu’ici l’existence : la «Dé­

légation générale à la langue française et aux langues de France». Cette dernière vient de nous rappeler que si la langue anglaise étend chaque jour un peu plus son empire dans le monde des sciences, des technolo­

gies et de la médecine, le français est encore bien vivant et n’a pas dit, oserait­on écrire, son dernier mot. C’est l’essentiel d’une pe­

tite brochure intitulée : «Vous pouvez le dire en français ; génétique, biologie». Nous ne résistons pas au plaisir d’en donner ici quel­

ques extraits.

«La mode est aux mots venus d’ailleurs, parfois difficiles à comprendre, à prononcer ou à écrire, pour la plupart des gens, ob­

serve­t­on au ministère – français – de la Culture. Pourtant, le plus souvent, les mots équivalents existent en français. En effet, pour désigner les réalités nouvelles qui se créent constamment, des termes français sont re­

commandés par des spécialistes et publiés avec leur définition au Journal­officiel de la République française (…) et ils doivent être obligatoirement employés par les services de l’Etat en lieu et place de termes étrangers.»

Petite genèse… des termes de la généti que.

On peut faire commencer l’histoire mo der­

ne en 1865 lorsque Johann Gregor Mendel énon ce les lois de transmission de certains caractères héréditaires. Ou, en 1869, lorsque Johann Friedrich Miescher découvre dans le noyau des cellules une substance riche en phosphate, la nucléine, aujourd’hui mieux connue sous le nom d’acide­ désoxyribonu­

cléique et mieux encore sous celui d’ADN.

En 1888, création du terme chromosome par Heinrich Wilhelm Gottfried von Waldeyer­

Hartz. Puis tout s’enchaîne avec, en 1900,

l’apparition du terme génétique, en 1909 gène et génotype, en 1913 la première carte­généti­

que du chromosome X de la mouche droso­

phile. En 1920, on observe le premier emploi de Genom, en allemand. 1961 : François Jacob, André Lwoff et Jacques Monod proposent le concept de programme­génétique. Il y a vingt ans, dix­huit pays se lancent dans le projet­

Génome­ humain dans le but d’identifier les gènes et de décoder les trois milliards de paires de bases du génome humain. Puis le premier chromosome humain est séquencé avant que le premier séquençage ne s’achève en 2003.

Tout ceci est connu et ne pose plus guère de difficultés linguistiques. Les choses sont en marge

L’illettrisme est mort ! Vive le littérisme !

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Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 22 décembre 2010 2469 parfois différentes quand on entre

dans les détails. Ainsi faut­il obli­

gatoirement parler de «réarrange­

ment génétique» pour gene­rearran­

gement, de «recombinaison généti­

que» pour genetic­recombination, de

«transformation génétique» pour ge­

netic­transformation et de «carte gé­

nétique» en lieu et place de genetic­

map. Aucun problème pour «clo­

nage» de préférence à cloning, cette

«multiplication cellulaire in vitro par reproduction asexuée aboutis­

sant à la formation de "clones". Pas de difficultés non plus pour «diag­

nostic génétique» de préférence à genetic­diagnosis : «détection de gè nes d’un organisme par hybridation de son génome avec des sondes molé­

culaires, qui sert pour le diagnostic pré natal de maladies héréditaires».

On choisira «empreinte généti­

que» ou «tra ce génétique» et non ge­

netic­footprint : «carac téristique d’une région spécifique de l’ADN permet­

tant d’identifier une cellule et sa filia tion».

«Génie génétique» doit l’emporter sur genetic­

engineering tandis que seul un accent (aigu) distingue «génome» de son équivalent an­

glais, cet «ensemble du matériel héréditaire composé d’acides nucléiques (ADN ou ARN) d’un organite cellulaire, d’un organisme ou d’une espèce». Guère de souci non plus avec la «thérapie génique» pour gene­therapy ; de même que pour «trans géni que» face à trans­

genic, cet adjectif qui qualifie un être vivant issu d’une cellule dans laquelle a été intro­

duit un ADN étranger.

Plus ardu peut­être : on doit préférer «ba­

listique biologique» à «biolistique» trop pro­

che de l’anglais : biolistics ou biolistic­transfor­

mation, méthode de transformation généti que consistant à bombarder des cellules avec des microbilles métalliques enrobées d’ADN, à l’aide d’un canon à particules (Journal­officiel de la République française du 6 juillet 2008).

On se contentera de «biothèque» pour biolo­

gical­resource­center (BRC). Et par souci de ri­

gueur, dans l’attente des preuves, on préfé­

rera «clonage à fin thérapeutique» à «clo­

nage thérapeutique» (therapeutic­cloning).

Le parthenote prendra le nom d’«embryon parthénogénétique» soit, comme chacun le sait, un embryon obtenu à partir d’un ovule non fécondé (Journal­ officiel de la Républi­

que française du 6 septembre 2008). Et ceci, bien intéressant : on fera une croix sur le trop fameux «bébé médicament» ou «bébé sauveur» pour y substituer «enfant donneur»

(saviour­child,­saviour­sibling), cet enfant «né d’une sélection génétique d’embryons con­

çus in vitro, afin d’être biologiquement com­

pa tible avec un malade de sa fratrie en vue de son traitement par une transplantation cellulaire». Pour finir, sans difficulté aucune, la génomique prendra la place de genomics, la phénogénétique (étude des influences qu’exer ce le milieu sur les caractères propres à un être vivant) celle de phenogenetics et la protéomique (discipline qui identifie les protéines d’une cellule et analyse leurs ex­

pressions, fonctions et interactions) celle de proteomics.

Plus largement tous ceux que les mots (de

la langue française ou pas) passionnent pren­

dront grand plaisir à voyager sur un site 1 du ministère (français) de la Culture. On y découvre actuellement le «mot du mois»

qui n’est autre que «littérisme». «Illettrisme est un mot triplement ingrat, nous explique­

t­on sans rire. D’abord parce qu’il est néga­

tif, et que l’on est contraint de parler de "lutte contre l’illettrisme", ce qui tend à l’assimiler à une maladie ou à un fléau comme le taba­

gisme. D’autre part, parce qu’il est perçu par les professionnels comme stigmatisant et vaguement honteux. Enfin parce qu’il est à l’origine de fautes d’orthographe, beau­

coup de gens oubliant son deuxième "t", ce qui est évidemment ennuyeux dans le cas d’espèce.» A l’inverse «littérisme» – le mot nouveau – est, nous explique­t­on encore,

«triplement intéressant», puisqu’il offre une allure positive à l’action, parce qu’il est bien formé et, enfin, car il peut avantageusement remplacer literacy que l’on importait faute de mieux de l’anglais, mais sans trop savoir s’il fallait en français lui laisser son «c» ou le gratifier d’un «t». L’illettrisme est mort ! Vive le littérisme !

Jean-Yves Nau jeanyves.nau@gmail.com

1 www.franceterme.culture.fr

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