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Le pavillon des miroirs

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Le pavillon des miroirs

Le pa vil lon de s m ir oir s

Sergio Kokis

SergioKokis

roman

Le pavillon des miroirs

Photo:NicolasKokis

« Il était une fois un petit garçon appelé Conrado. Un beau jour, devant toute la confu- sion du monde, il cessa de parler. Au début, soulagé, il ne savait pas encore très bien ce qu’il faisait. Puis, trouvant la situation confortable, il prit la décision de ne plus rien dire, de ne plus jamais parler de sa vie. Il devenait alors, de son plein gré, ce qu’il avait toujours été, un specta- teur. La vie était l’affaire des autres, entrecou- pée d’images publicitaires et de changements brusques de sens. Lorsqu’elle devenait insup- portable, il lui suffisait de fermer les yeux comme on ferme la télévision. »

Sergio Kokis, né à Rio de Janeiro en 1944, vit à Montréaldepuis une quarantaine d’années et il a fait de la langue française son outil d’ex- pression littéraire. Après son début en 1994 avecLe pavillon des miroirs (gagnant de quatre prix), l’œuvre de cet artiste peintre devenu aussi écrivain compte maintenant dix-sept titres, dont plusieurs traduits en langues étrangères.

ISBN 978-2-923844-02-2

9 7 8 2 9 2 3 8 4 4 0 2 2

25 $

Extrait de la publication

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La collection

est dirigée par

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Dans la même collection

Esther Croft,Tu ne mourras pas, nouvelles.

Sergio Kokis,La gare, roman.

Sergio Kokis,Le retour de Lorenzo Sánchez, roman.

Sergio Kokis,Un sourire blindé, roman.

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Le pavillon des miroirs

Extrait de la publication

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Du même auteur

Les langages de la création, Québec, Nuit blanche éditeur, 1996.

Dissimulations, Montréal, Lévesque éditeur, 2010.

La gare, Montréal, Lévesque éditeur, 2010.

– Prix France-Québec, prix des lecteurs, 2006.

Le retour de Lorenzo Sánchez, Montréal, Lévesque éditeur, 2010.

Un sourire blindé, Montréal, Lévesque éditeur, 2010.

À paraître chez Lévesque éditeur Les amants de l’Alfama.

L’amour du lointain.

L’art du maquillage.

– Grand Prix des lectrices deElle Québec, 1998.

Errances.

Le fou de Bosch.

Kaléidoscope brisé.

Le magicien.

– Prix Québec-Mexique, 2003.

Le maître de jeu.

Negão et Doralice.

Saltimbanques.

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Sergio Kokis

Le pavillon des miroirs

roman

Extrait de la publication

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Catalogage avant publication

de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada Kokis, Sergio, 1944-

Le pavillon des miroirs : roman (Prise deux) Éd. originale : Montréal : XYZ, 1994.

Publ. à l’origine dans la coll. : Romanichels.

ISBN 978-2-923844-06-0 I. Titre.

PS8571.O683P39 2010 C843’.54 C2010-941524-8

PS9571.O683P39 2010

© Lévesque éditeur et Sergio Kokis, 2010 Lévesque éditeur 11860, rue Guertin Montréal (Québec) H4J 1V6

Téléphone : 514.523.77.72 Télécopieur : 514.523.77.33 Courriel : info@levesqueediteur.com Site Internet : www.levesqueediteur.com

Dépôt légal : 3etrimestre 2010 Bibliothèque et Archives Canada Bibliothèque et Archives nationales du Québec

ISBN 978-2-923844-06-0 (édition papier) ISBN 978-2-923844-14-5 (édition numérique)

ISBN 978-2-923844-24-4 (édition ePub)

Distribution au Canada Distribution en Europe

Dimedia inc. Librairie du Québec

539, boul. Lebeau 30, rue Gay-Lussac

Saint-Laurent (Québec) H4N 1S2 75005 Paris

Téléphone : 514.336.39.41 Téléphone : 01.43.54.49.02

Télécopieur : 514.331.39.16 Télécopieur : 01.43.54.39.15

www.dimedia.qc.ca www.librairieduquebec.fr

general@dimedia.qc.ca libraires@librairieduquebec.fr

Production : Jacques Richer Conception graphique et mise en pages : Édiscript enr.

Illustration de la couverture : Sergio Kokis,Carnaval, huile sur masonite, 76 cm × 91 cm, 1986, collection particulière

Photographie de l’auteur : Nicolas Kokis

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à André, Nicolas et Ilse, mes copains.

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Ils dorment

Ils sont tous couchés Ils dorment

Profondément.

Manuel Bandeira

Extrait de la publication

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Je suis encore petit. Lili aime se frotter contre moi l’après- midi quand on fait la sieste. Elle ôte ses culottes qui sentent fort en disant que c’est parce que le bébé a fait pipi dessus. C’est bon et irritant à la fois ; je me laisse faire sans protester. Je la trouve jolie, ma petite tante, surtout lorsqu’elle ne se fâche pas, qu’elle soupire et me serre entre ses jambes moites. La chaleur de la chambre fermée et une fatigue étrange me poussent vers le sommeil. Ça sent le bébé qui dort, la sueur et les culottes de Lili. Lorsque je me réveille, qu’elle n’est plus là, je ne me sou- viens de rien. Seules les odeurs persistent, mélangées à celle de la moisissure qui envahit les murs. Le soleil frappe de biais les battants fermés des jalousies et tisse des raies brillantes de pous- sière dans la pénombre humide. Très forte envie de pisser. Le même jeu se répète presque tous les jours ; ensuite je me lève las, paresseux.

Il n’y a rien à faire dans cette maison, pas de jouets. Je traîne sous les lits ou je regarde par la fenêtre, c’est tout. Le bébé est encore trop jeune pour jouer et mon frère aîné n’aime pas mes jeux. C’est comme ça depuis toujours, nous sommes un en- semble éparpillé. Plus tard, le bébé sera un peu plus mon com- pagnon, surtout les fois où le grand l’aura frappé. Nous vivons tous entassés dans l’appartement et nous dormons dans la même chambre ; seule Lili dort par terre dans le salon. Mais il manque

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quelque chose pour que ça fasse une famille. Chacun paraît occupé à son propre ennui.

Lili vit avec nous, mais ses quinze ans la poussent vers la rue. Dès qu’elle a fini d’aider ma mère, elle sort pour respirer.

Souvent aussi le soir, lorsque l’avenue est vide d’autos et que les bars ne sont pas encore fermés. Elle vit dans une irritation constante, quelque chose de physique qui la fait se fâcher dès qu’elle n’a plus le bébé dans les bras. Elle est sa marraine. Le parrain est saint Antoine, celui des causes perdues, pour que Lili se trouve un mari le plus vite possible. C’est étrange comme par- fois elle peut être si douce lorsqu’elle n’est pas la proie de ses tentations. Mais c’est plutôt rare. Comme il vaut mieux qu’elle ne sorte pas seule, et que le bébé encombre en ces occasions, elle m’emmène dans ses promenades nocturnes. J’aime beau- coup ça, même s’il faut rester très sage et ne pas avoir l’air d’être dans le chemin des autres. Je me laisse faire car je sais que le vendeur de cigarettes va me donner des boîtes de cigares vides pour jouer, derrière le comptoir, pendant qu’il s’assoit avec Lili.

De belles boîtes qui sentent bon, en bois rouge, entourées d’éti- quettes colorées. Chaque fois j’en emporte quelques-unes, pour moi et pour l’aîné. Entre nos mains, elles deviennent des bateaux, des autobus, des maisons ou même des monstres.

Ici, ça sent très fort le tabac, et aussi la sciure de bois qui couvre le plancher et la vieille bière qui coule encore des ton- neaux empilés. Faut pas trop me salir, ni trop parler. Mais à mesure qu’ils se mettent à rire et à se chatouiller, ils m’oublient tout à fait. Les clients qui boivent sont parfois bruyants, il y en a même qui se battent. D’autres connaissent aussi Lili et viennent lui offrir des limonades. Pendant ce temps, je ramasse des capsules de bière pour ma collection, en m’éloignant sans qu’elle s’en aperçoive. Je vais bavarder avec les ivrognes atta- blés, ceux qui ne sont pas méchants, qui savent que je suis avec

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Lili. Dès que j’ai mes boîtes à cigares, que mes poches sont pleines de capsules et que j’ai bu ma limonade, alors je com- mence à trouver le temps long. Si long que parfois je m’endors dans un coin en attendant qu’elle ait fini de bavarder. Pauvre Lili, ces sorties l’épuisent. Nous revenons tous les deux par les rues vides, à pas rapides parce qu’il est tard, que je m’endors et qu’elle est nerveuse. Je ramène mon butin, content de la soirée.

Lili ne reçoit que des paquets de cigarettes. C’est plus petit, donc plus pratique pour les garçons qui les mettent dans les poches de sa jupe, bien au fond, en la chatouillant. Chacun ses jouets.

Lili me laisse perplexe. Je ne sais jamais ce qu’il faut faire pour éviter qu’elle ne se fâche. J’ignore ce qui provoque ses colères, mais il vaut mieux que je m’éloigne. À d’autres moments, elle peut être gentille comme tout, alors que je m’attends plutôt à recevoir une bonne raclée. Tiens, à la fête de saint Antoine, par exemple. Nous y allons chaque année. C’est un endroit qui fait peur. Le couvent du Largo da Carioca est une espèce de grande forteresse qui s’élève à pic au-dessus de la place, sans fenêtres, en stuc jaunâtre, presque une prison. Le jour de la fête, très tôt le matin, la place est envahie par une multitude de femmes gémis- santes. Elles y vont pour prier et pour toucher le bas de la robe du saint, en caressant les cuisses de plâtre de la statue. Les moines font semblant de ne pas voir ces choses. Un peu par pitié devant leur désespoir. Mais aussi parce qu’elles remplissent l’écuelle de billets froissés et humides de sueur provenant des bas-fonds de leur lingerie. Tout le monde sait que c’est à saint Antoine qu’il faut s’adresser quand on veut un homme, il est très efficace. Et chez nous, parmi les sœurs de ma mère et ses amies, il est l’objet d’une fidélité à toute épreuve. La preuve, il est le parrain du bébé.

Et c’est peut-être pour ça que Lili ne lâche pas le petit. Elles se sentent un peu gênées d’aller seules à cette kermesse des vieilles filles, alors elles m’en font toujours profiter. L’événement n’est

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Extrait de la publication

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pas sans danger, car la foule se bouscule beaucoup. C’est une masse féminine fondant au soleil, bigarrée et nerveuse. Portant des couleurs voyantes, elles sont toutes voilées : voile blanc pour les vierges, noir pour les veuves et les femmes mariées, bleu pour les autres. Les maris se fâchent quand leurs femmes vont voir le saint, mais c’est plus fort qu’elles.

Il faut attendre longtemps avant de pouvoir s’approcher de l’escalier du couvent où se forme enfin une queue plus organi- sée. Comme je suis petit, je me fais écraser dès le début par d’énormes fesses, des seins qui m’assaillent de toutes parts. Je suis piétiné, palpé, enveloppé d’odeurs pénétrantes, tout en essayant de m’accrocher aux jupes de mes tantes pour ne pas être emporté par ce flot haletant. Puis il y a cette chaleur qui avive l’impatience des femmes, ce soleil à pic et, pire encore, cette vision si désagréable de toutes celles qui sont arrivées plus tôt et qui montent déjà la mince échelle vers l’intérieur de la muraille. C’est le sauve-qui-peut. Comme si la foule devenait une formidable bête, jalouse de la place des premières arrivées, se débattant de peur que le saint ne soit déjà bouffé tout cru lorsque arrivera son tour. La poussée se fait alors par vagues suc- cessives, telle une marée déchaînée. Évidemment, je m’égare, je disparais, je traîne, il faut revenir me chercher, je suis emporté au loin pendant que les tantes essaient de me tirer à nouveau vers elles. On m’écartèle, on me griffe, on m’attrape par les che- veux tandis que j’essaie de ne pas perdre mes souliers. Une hor- reur à n’en plus finir, jusqu’à ce qu’on atteigne enfin la petite passerelle métallique. Je m’attends toujours au pire, et j’y ai droit en effet : on me donne des tapes sur le crâne, des coups de coudes osseux dans le visage, on me pince les bras et le dos.

Littéralement écrasé par des masses graisseuses comprimées dans les tissus et les gaines, je me sens alors comme les morceaux de canne à sucre entre les engrenages de la presse à jus.

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Mais je survis. Bien que mes agissements ralentissent leur progression, je ne suis pas vraiment puni en conséquence. Très curieux. À la maison, je peux pourtant recevoir de méchantes raclées sans même savoir pourquoi. Je pense que les affaires du cœur ramollissent les femmes, comme dit mon père. Et qu’en plus la fête de saint Antoine est une chose sacrée, comme ma mère réplique toujours pour contrer le sourire blasphématoire du vieux. Peut-être un mélange de tout ça. Il y a aussi, sans doute, la disposition à la charité qu’apporte la proximité de cette sta- tue de plâtre peinte en couleurs roses sous la soutane de bure. Je crois que s’il y avait des hommes dans la foule, ça tournerait au meurtre. Mais entre femmes, chacune se contente de pousser en se pensant meilleure que la voisine.

La vague continue, morose et puissante à la fois, comme une baleine égarée dans un marécage. Toutes sortes de femmes, riches et pauvres, jeunes et vieilles ; seules les Noires les plus misérables ont dû rester à la maison pour travailler.

Le temps passe, la sueur colle les cheveux sur le front, je me laisse emporter sans plus résister. Un dernier moment de bagarre pour atteindre la passerelle et c’est la montée le long du mur, déjà plus civilisée, avec des regards triomphants et dédaigneux vers la foule qui se presse encore sur la place. On arrange les voiles, on essuie la sueur, les visages se recomposent, les mains se collent en prière et on m’oublie.

Soudain l’obscurité totale remplace le soleil aveuglant. Le couloir est frais comme un souterrain, étroit, sinistre même. La pression des ventres derrière ma tête d’enfant s’atténue et j’ai froid dans le dos. Le bavardage cesse. Le visage sévère, les femmes se mettent à prier et à rêver. L’image du mâle adoré illu- minée par les cierges forme déjà une tache jaune au fond du long passage. Dans cette approche lente, effleurant les parois étroites, ma tête devient lourde : odeur d’encens, fumée de

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chandelles, tout ça mêlé aux parfums sucrés, aux relents de sueur et à d’autres choses encore. Mes yeux brûlent de plus en plus parce que j’essuie les larmes avec mes mains moites, et la fumée devient plus épaisse à mesure qu’on s’approche du saint.

Je le vois mal. Son visage et le petit Jésus qu’il tient dans les bras disparaissent presque parmi les mains avides tâtant ses pieds, cherchant à monter sous la bure, frénétiques. D’en bas je vois nettement les mains des femmes qui sont à ma hauteur, qui descendent le long des jupes en pressant les cuisses, le sexe, tremblantes. Lili a envie de faire pipi et elle se tord les jambes en embrassant les pieds du saint. L’image se laisse faire, l’air béat, mais les visages des femmes prennent de drôles de formes, hagards, les coins des lèvres un peu tordus, parfois les langues pendantes et les yeux dans le vague. Le moment est grave, je sens la tension dans l’air. Le moine reste impassible à côté de l’image, en tendant l’écuelle et en marmonnant des trucs en latin pour ne pas succomber à la tentation.

On me tire soudain vers l’avant avec des gestes brusques, rompant le charme de mes premiers moments mystiques. Je me sens un peu mal à l’aise et j’ai peur, sans savoir au juste de quoi.

S’éloignant du saint, la cohue débouche dans l’église pour la prière. Je suis alors laissé à moi-même ; je flâne parmi le troupeau en regardant les images, les sculptures, les peintures et les reflets d’or de cet intérieur baroque. Sous la lumière pâle, les cierges scintillent face aux étoiles dorées des murs bleus. On respire mieux. Dans le silence, un murmure de prières soupirées comme la pluie qui cesse. Parfois un vagissement qui s’échappe d’une de ces têtes voilées en contrition, lointain, suivi de son écho apaisant. L’acte est accompli par ce désir mélancolique d’un prince charmant qui habite chaque pensée. Je déambule, curieux, découvrant la beauté des lieux, tâtant les bancs sculptés, polis par de nombreuses générations de culs insatisfaits. Les images à

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l’intérieur de leurs niches ondoient dans le clair-obscur des cierges tremblotants, pendant que l’encens répand ses effets nar- cotiques sur les paupières lasses. Nous partons à pas lourds par l’autre porte du couvent sans que les femmes se souviennent de mes méfaits. Elles sont devenues très gentilles, douces. Et on m’offre même une glace qui coule le long des doigts, visqueuse sous la chaleur du soleil.

Extrait de la publication

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La chaleur moite d’autrefois n’existe plus que dans ma mémoire. Ici les fleurs de givre couvrent les vitres d’une den- telle épaisse, grise, qu’il faut gratter avec insistance et qui s’em- bue aussitôt. Le froid intense des longs janviers. Pas de neige.

Les rues sont d’une couleur indéterminée, blanc sale des glaces tassées, ici et là des taches ocre de rouille et d’urine. Un mince vernis de bitume patine le tout, égalisant les surfaces et arron- dissant le coin des trottoirs. Une vieille neige d’il y a longtemps est restée là, durcie, pressée, lissée. Les reflets sont mats ; par- fois quelques plaques cassées, épaisses, exhibent des arêtes féroces. Le ciel est d’une couleur vieux plomb oxydé, mais il ne tombe rien. Le soleil de travers qui tranche le monde en diago- nales se fait rare pendant cet hiver.

Vu de l’intérieur, tout semble figé. Mais je sais que le vent est là. Il est toujours là. Hormis le cliquetis sporadique du chauf- fage, le silence est total. Si total qu’il prend la forme d’un bour- donnement sourd dans ma tête. Si j’y prête attention, le bruit du tabac qui brûle dans ma cigarette devient clair comme un feu de broussailles. Je reste ainsi enterré dans un sous-sol, protégé par les fondations de la maison couvertes de glace. C’est comme si le monde n’existait plus.

Le facteur est déjà passé, je l’ai vu. En fait, je le guettais ; je l’attendais comme toujours, rien que pour me montrer prêt, pour

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Extrait de la publication

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Le pavillon des miroirs

L e p av illo n d es mi ro irs

Sergio Kokis

Sergio Kokis

roman

Le pavillon des miroirs

Photo: Nicolas Kokis

« Je suis encore petit. Lili aime se frotter contre moi l’après-midi quand on fait la sieste. Elle ôte ses culottes qui sentent fort en disant que c’est parce que le bébé a fait pipi dessus. C’est bon et irritant à la fois ; je me laisse faire sans protester. Je la trouve jolie, ma petite tante, surtout lorsqu’elle ne se fâche pas, qu’elle soupire et me serre entre ses jambes moites. La chaleur de la chambre fermée et une fatigue étrange me poussent vers le sommeil. Ça sent le bébé qui dort, la sueur et les culottes de Lili.

Lorsque je me réveille, qu’elle n’est plus là, je ne me souviens de rien. Seules les odeurs persistent, mélan- gées à celle de la moisissure qui envahit les murs. Le soleil frappe de biais les battants fermés des jalou- sies et tisse des raies brillantes de poussière dans la pénombre humide. Très forte envie de pisser. » Sergio Kokis est né à Rio de Janeiro en 1944 et vit à Montréal depuis une quarantaine d’années. Il a fait de la langue française son outil d’ex- pression littéraire. Oscillant entre deux passions — il est aussi artiste peintre —, Kokis s’est laissé fasciner par la narration et a écrit dix-sept livres depuis ses débuts comme écrivain en 1994. Parmi ses œuvres les plus connues, soulignons Le pavillon des miroirs, L’art du maquillage, Le magicienet Les amants de l’Alfama, qui lui ont valu des prix presti- gieux. Nombre de ses livres ont été traduits en plusieurs langues.

ISBN 978-2-923844-14-5

17 $

L e p av illo n d es mi ro irs

Sergio Kokis roman

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