Marcel
Proust
La fin de la jalousie
Gallimard
Marcel Proust
La fin
de la jalousie
et autres nouvelles
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Ces nouvelles sont extraites du recueil Les Plaisirs et les Jours, suivi de L’Indifférent et autres textes
(Folio Classique n°þ2538).
© Éditions Gallimard, 1993.
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Marcel Proust naît le 10 juillet 1871 à Paris dans une famille intellectuelle et bourgeoise. De santé fragile, il est un lecteur précoce et, au lycée Condorcet, un élève brillant.
La fin de ses études secondaires, en 1889, s’accompagne du début de sa vie mondaine : étudiant en lettres, droit et sciences politiques, il fréquente les salons du faubourg Saint- Germain. Fondateur du Banquet, il écrit pour diverses autres revues chroniques, poèmes et textes brefs, qui constitueront, en 1896, le recueil intitulé Les Plaisirs et les Jours. À partir de 1899, délaissant la rédaction de son premier roman, Jean Santeuil, engagée quelques années plus tôt, il traduit et pré- face l’œuvre de John Ruskin et compose notamment, rédac- teur pour Le Figaro, nombre de pastiches (qui seront repris dans Pastiches et mélanges, en 1919). La mort de sa mère, avec laquelle il entretenait une relation fusionnelle, en 1905, le marque profondément. De santé toujours fragile, il s’isole.
Du côté de chez Swann, premier volume d’À la recherche du temps perdu, paraît en 1913. Pendant la guerre, réformé, il consacre la grande majorité de son temps à l’écriture. En 1919, il reçoit le prix Goncourt pour À l’ombre des jeunes filles en fleurs. Souffrant d’une pneumonie, l’écrivain meurt trois ans plus tard, le 18 novembre 1922. Les tomes suivants de la Recherche sont parus entre 1920 et 1927.
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Lisez ou relisez les livres de Marcel Proust en Folioþ:
À L A R E C H E R C HE DU TE M P S P E R D U
I.þD U C ÔT É D E C H E Z S W A N N (Folio classique noþ1924 et Folioplus classiques no 246)þ/þU N A M O U R D E S W A N N (Folio noþ780 et Folio classique noþ6439)
II.þÀ L ’ O M B R E D E S J EU N E S F I L LE S E N F L E U R S (Folio classique no 1946)
III.þL E C Ô T É D E G U ER M A N T E S (Folio classique noþ2658) IV.þS O D O M E E T G O M O R R H E (Folio classique noþ2047)
V.þL A P R I S O N N I È R E (Folio classique no 2089) VI.þA L B E R T I N E D I S P A R U E (Folio classique noþ2139) VII.þL E T E M P S RE T R O U V É (Folio classique noþ2203) C O N T RE S A I N T E - B EU V E (Folio essais noþ68)
L E S P LA I S I R S E T L E S J O U R S suivi de L ’ I N D I F F É RE N T et autres textes (Folio classique noþ2538)
E S S A I S E T A R T I C L E S (Folio essais noþ236) L ’ A F F A I R E L E M O I N E (Folio 2þ€ noþ4325) J O U R N É E S D E LE C T U R E (Folio 2þ€ noþ6242)
V A C A N C E S D E P Â Q U E S et autres chroniques (Folio 2þ€ noþ6727) PROUST_mep.fm Page 8 Mardi, 14. janvier 2020 3:01 15
Violante ou la mondanité
«þAyez peu de commerce avec les jeunes gens et les personnes du monde... Ne désirez point de paraître devant les grands.þ»
Imitation de Jésus-Christ
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I
EN F A N C E M É D IT A T I V E D E V I O L A NT E
La vicomtesse de Styrie était généreuse et tendre et toute pénétrée d’une grâce qui char- mait. L’esprit du vicomte son mari était extrê- mement vif, et les traits de sa figure d’une régularité admirable. Mais le premier grena- dier venu était plus sensible et moins vul- gaire. Ils élevèrent loin du monde, dans le rustique domaine de Styrie, leur fille Vio- lante, qui, belle et vive comme son père, cha- ritable et mystérieusement séduisante autant que sa mère, semblait unir les qualités de ses parents dans une proportion parfaitement
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harmonieuse. Mais les aspirations changean- tes de son cœur et de sa pensée ne rencon- traient pas en elle une volonté qui, sans les limiter, les dirigeât, l’empêchât de devenir leur jouet charmant et fragile. Ce manque de vo- lonté inspirait à la mère de Violante des in- quiétudes qui eussent pu, avec le temps, être fécondes, si dans un accident de chasse, la vi- comtesse n’avait péri violemment avec son mari, laissant Violante orpheline à l’âge de quinze ans. Vivant presque seule, sous la garde vigilante mais maladroite du vieil Augus- tin, son précepteur et l’intendant du château de Styrie, Violante, à défaut d’amis, se fit de ses rêves des compagnons charmants et à qui elle promettait alors de rester fidèle toute sa vie. Elle les promenait dans les allées du parc, par la campagne, les accoudait à la terrasse qui, fermant le domaine de Styrie, regarde la mer. Élevée par eux comme au-dessus d’elle- même, initiée par eux, Violante sentait tout le visible et pressentait un peu de l’invisible.
Sa joie était infinie, interrompue de tristesses qui passaient encore la joie en douceur.
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Violante ou la mondanité 13
I I
S E N S U AL I T É
«þNe vous appuyez point sur un ro- seau qu’agite le vent et n’y mettez pas votre confiance, car toute chair est comme l’herbe et sa gloire passe comme la fleur des champs.þ»
Imitation de Jésus-Christ
Sauf Augustin et quelques enfants du pays, Violante ne voyait personne. Seule une sœur puînée de sa mère, qui habitait Julianges, château situé à quelques heures de distance, visitait quelquefois Violante. Un jour qu’elle allait ainsi voir sa nièce, un de ses amis l’ac- compagna. Il s’appelait Honoré et avait seize ans. Il ne plut pas à Violante, mais revint. En se promenant dans une allée du parc, il lui apprit des choses fort inconvenantes dont elle ne se doutait pas. Elle en éprouva un plaisir très doux, mais dont elle eut honte aussitôt. Puis, comme le soleil s’était couché et qu’ils avaient marché longtemps, ils s’assi- rent sur un banc, sans doute pour regarder les reflets dont le ciel rose adoucissait la mer.
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Gustave Boulanger, Portrait de Madame Lambinet, née Nathalie Sinclair (détail). Musée Lambinet, Versailles. Photo © RMN / Agence Bulloz.
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Proust
La fin de la jalousie
Profondément épris de la belle Françoise Seaune, Honoré de Tenvres s’émeut sans cesse de cet incroyable amour. Jusqu’au jour où on lui dit qu’elle a la réputation d’être une femme facile. Bouleversé, il découvre bruta- lement les tourments de la jalousie…
Mondains, voluptueux et cruels, les personnages de ces nouvelles de Proust virevoltent avec un raffi nement qui annonce les héros d’À la recherche du temps perdu.
Ces nouvelles sont extraites du recueil Les Plaisirs et les Jours suivi de L’Indifférent et autres textes (Folio classique n° 2538).
Marcel Proust
La fin de la jalousie
et autres nouvelles
La fin de la jalousie
et autres nouvelles
Marcel Proust
Couverture : Gustave Boulanger, Portrait de Madame Lambinet, née Nathalie Sinclair (détail). Musée Lambinet, Versailles.
Photo © RMN / Agence Bulloz.
Cette édition électronique du livre
La fin de la jalousie et autres nouvelles de Marcel Proust a été réalisée le 02 mars 2022
par les Éditions Gallimard.
Elle repose sur l’édition papier du même ouvrage (ISBN : 9782070359158 - Numéro d’édition : 430800).
Code Sodis : U44943 – ISBN : 9782072984655 Numéro d’édition : 441110.