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Mesure de la consommation de phytomicronutriments. Identification de nouveaux biomarqueurs d’exposition chez l’homme.L’approche métabolomique

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Academic year: 2021

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Submitted on 27 May 2020

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Identification de nouveaux biomarqueurs d’exposition

chez l’homme.L’approche métabolomique

Claudine Manach

To cite this version:

Claudine Manach. Mesure de la consommation de phytomicronutriments. Identification de nouveaux biomarqueurs d’exposition chez l’homme.L’approche métabolomique. Innovations Agronomiques, IN-RAE, 2014, 42, pp.11-26. �hal-02630395�

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Mesure de la consommation de phytomicronutriments. Identification de nouveaux biomarqueurs d’exposition chez l’homme.

L’approche métabolomique Manach C.

UMR 1019 INRA- Université d’Auvergne, Unité de Nutrition Humaine, Centre INRA Auvergne-Rhône-Alpes, Site de Theix, F-63000 Clermont-Ferrand

Correspondance: claudine.manach@clermont.inra.fr Résumé

L’étude des effets santé des phytomicronutriments nécessite de pouvoir caractériser de manière précise leur exposition, et ce à l’échelle de l’individu pour prendre en compte des facteurs tels que la génétique. La métabolomique est une approche holistique qui ouvre de grandes perspectives dans ce domaine, avec la possibilité d’analyser simultanément des centaines des métabolites de phytomicronutriments dans le sang et l’urine, sans connaissance préalable des composés recherchés. Cette approche exploratoire s’est déjà révélée efficace pour identifier de nouveaux biomarqueurs de consommation d’aliments sources de phytomicronutriments et elle pourrait amener à la découverte de nouveaux bioactifs. Au-delà la consommation, la métabolomique permet d’évaluer l’exposition interne des sujets. En effet pour une même consommation, des différences importantes de concentrations en phytomicronutriments peuvent exister dans le sang ou les organes, en raison d’une variabilité interindividuelle pour la digestion et le métabolisme des constituants alimentaires. Grâce à la métabolomique, l’impact de choix alimentaires ou encore de modes de production des aliments sur l’exposition réelle des consommateurs peut être mesurée par un profil complet de métabolites de phytomicronutriments dans les fluides biologiques. Ces avancées dans l’évaluation des expositions pourraient se traduire à terme par des recommandations nutritionnelles améliorées et une meilleure qualité nutritionnelle des aliments.

Mots-clés: bioactifs végétaux, fruits et légumes, biomarqueurs d’exposition, métabolomique

Abstract: Assessment of phytochemicals intake. Discovery of new intake and exposure biomarkers using metabolomics

Elucidation of the health effects of dietary phytochemicals requires a better assessment of their intake. Assessment must be available at the individual level to take into account intrinsic factors such as genotype. Metabolomics is a holistic approach that opened new avenues in the field. It makes possible the simultaneous analysis of hundreds of phytochemical metabolites in biofluids, without prior knowledge of the expected compounds. This exploratory approach already demonstrated its usefulness for the identification of a range of new biomarkers of plant food intake, and may also lead to the discovery of new bioactives in the future. Beyond dietary intakes, metabolomics allows assessment of internal exposures. For a same dietary intake, marked differences may exist in blood and tissues concentrations of phytochemical metabolites because of between-subjects variations in absorption and metabolism of food components. With metabolomics, the impact of dietary choices or of methods of food production can be appraised on the actual exposure of consumers using the analysis of a comprehensive profile of phytochemical metabolites in biofluids. These advances in exposure assessment may finally lead to refined dietary advices for plant foods and phytochemicals and to a better nutritional quality of food.

Keywords: mass spectrometry-based metabolomics, phytochemicals, plant foods, biomarkers of intake, exposure assessment.

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1. L’importance des produits végétaux et la diversité de leurs micro-constituants dans notre alimentation

Les aliments d’origine végétale représentent une part importante de notre alimentation, même si elle est variable en fonction des préférences alimentaires. Leur consommation devrait encore être favorisée dans les décennies à venir compte-tenu des enjeux de durabilité des systèmes agro-alimentaires qui tendent vers un remplacement des produits animaux par des produits végétaux pour diminuer les coûts énergétiques et pollutions diverses. Une consommation accrue de produits végétaux est également souhaitable en termes de santé des populations et de prévention des pathologies liées au vieillissement, telles que cancers, maladies cardiovasculaires, diabète, maladies neurodégénératives. En effet, les études d’observation de populations ou d’intervention nutritionnelles contrôlées sur volontaires ont bien démontré que les régimes alimentaires les plus protecteurs se caractérisent tous par une proportion importante d’aliments d’origine végétale (Katz et Meller, 2014). L’étude d’intervention PREDIMED1 en Espagne a encore récemment montré les bénéfices d’une diète méditerranéenne pour

réduire les maladies cardiovasculaires, en particulier en diminuant la pression sanguine, en améliorant le métabolisme du glucose, les profils lipidiques, et en diminuant les processus d’inflammation et le stress oxydant (Chiva-Blanch et al., 2014).

Les constituants clés et les mécanismes moléculaires par lesquels les aliments d’origine végétale exercent des effets protecteurs pour la santé ne sont pas encore complètement élucidés mais sont certainement multiples. Ces aliments sont généralement pauvres en calories, riches en fibres alimentaires, minéraux et vitamines, et de plus en plus de données indiquent que leurs nombreux phytomicronutriments peuvent contribuer par des mécanismes divers (inflammatoires, anti-oxydants, inducteurs des systèmes de détoxification, hypolipémiants, régulateurs d’expression de gènes, protecteurs de la fonction vasculaire …) à leurs effets positifs sur la santé.

La chimie des phytomicronutriments est complexe. Au minimum 1000 phytomicronutriments sont présents dans les aliments que nous consommons régulièrement, dont des centaines ont été très peu étudiés jusqu’à présent. Les grandes familles de phytomicronutriments sont les polyphénols, qui représentent environ la moitié des phytomicronutriments connus des aliments, les terpènes, qui comprennent notamment les caroténoïdes et les phytostérols, et les composés contenant de l’azote, en particulier les glucosinolates et les alcaloïdes, aux côtés de classes mineures telles que les thiosulfinates de l’ail et de l’oignon (Figure 1).

A la complexité des phytomicronutriments naturellement présents dans les plantes alimentaires, s’ajoute celle de leurs dérivés résultant de la transformation des aliments, par exemple lors de fermentation, de torréfaction, ou de cuisson. Il s’agit notamment de composés oxydés, hydrolysés ou de produits de condensation. Globalement, la composition des aliments en phytomicronutriments est insuffisamment caractérisée. Certains facteurs agronomiques sont connus pour affecter les teneurs en phytomicronutriments, comme le choix de la variété cultivée, les pratiques de culture, les conditions climatiques ou le stade de maturité à la récolte. L’influence de modes de conservation ou de transformation des aliments d’origine végétale sur la teneur finale en phytomicronutriments a été étudiée pour certains composés modèles, notamment des polyphénols ou des caroténoïdes, mais reste insuffisamment explorée pour l’ensemble des phytomicronutriments et des aliments.

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Un niveau supplémentaire de complexité correspond aux métabolites produits dans l’organisme. En effet, les phytomicronutriments ingérés avec les aliments sont absorbés chez l’homme au niveau de l’estomac ou de l’intestin, à des degrés divers en fonction de leur structure chimique, de leur matrice alimentaire, et de caractéristiques liées à l’individu comme son génotype pour certaines enzymes ou transporteurs intestinaux, la composition de sa microflore intestinale, ou son âge (Manach et al., 2004; Rodriguez-Mateos et al., 2014). Les composés absorbés peuvent ensuite être métabolisés par des enzymes intestinales ou hépatiques, avec des réactions de biotransformations diverses (hydrolyse, hydroxylation, conjugaison avec l’acide glucuronique ou des sulfates…) qui peuvent produire pour chaque composé absorbé de un à plusieurs dizaines de métabolites qui se retrouvent dans le sang et les organes avant d’être excrétés dans les urines. A titre d’exemple, une étude récente a identifié 32 métabolites différents de l’anthocyane cyanidine 3-glucoside dans le sérum et l’urine de huit volontaires sains ayant consommé cette molécule sous forme pure (de Ferrars et al., 2014). Si l’on considère une moyenne de 10 métabolites pour chacun des 1000 phytomicronutriments présents dans les aliments courants, et sans compter les composés dérivés liés aux procédés de transformation des aliments, cela signifie que plus de 10 000 métabolites de phytomicronutriments sont potentiellement retrouvés dans le sang et les organes chez l’Homme.

La grande complexité des phytomicronutriments et de leurs métabolites a certainement freiné la considération de leur importance dans les effets santé des produits végétaux.

2. L’approche métabolomique pour aborder la complexité des expositions aux phytomicronutriments.

La métabolomique est une nouvelle approche qui rend possible la caractérisation de l’exposition aux phytomicronutriments dans toute sa complexité. La métabolomique a émergé des progrès des techniques de spectroscopie, en particulier de la spectrométrie de masse haute résolution, et des progrès de la bioinformatique. C’est une approche dite « ouverte », basée sur le fait que l’on n’analyse plus seulement ce que l’on connait, mais que l’on met en œuvre des techniques de détection sensibles et universelles qui permettent de détecter simultanément dans un échantillon d’aliment ou de fluide biologique (urine, sang, salive…) non seulement les quelques dizaines de composés connus mais aussi

Figure 1 : Les principales familles de phytomicronutriments présents dans nos aliments

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des centaines de composés présents dans l’échantillon mais encore inconnus (Theodoridis et al., 2012; Wishart, 2008). Pour un échantillon d’aliment, il peut s’agir de composés présents naturellement dans la plante d’origine, ou issus d’une contamination, d’une attaque bactérienne, ou d’une réaction chimique se produisant lors de la transformation de la plante en aliment. Pour un échantillon biologique, les composés détectés peuvent provenir du fonctionnement normal de l’organisme, ou révéler un processus pathologique, ou encore refléter les expositions externes de l’individu : médicaments, pollution, et bien entendu alimentation. Dans le cas qui nous intéresse, l’approche métabolomique peut permettre de retrouver dans un échantillon d’urine ou de sang les molécules qui proviennent de la digestion des aliments consommés. Cette partie des métabolites présents dans les échantillons biologiques qui dérivent directement de la digestion des aliments s’appelle le « Food metabolome » (Figure 2) (Manach et al., 2009; Scalbert et al., 2014). Les profils de food metabolome analysés dans les fluides biologiques dépendent donc à la fois des consommations alimentaires du sujet et de sa capacité métabolique.

Figure 2 : Le concept du « Food métabolome »

La Figure 3 représente les principales étapes d’une étude métabolomique. La première étape consiste en une analyse de tous les échantillons par une ou plusieurs techniques, généralement spectrométrie de masse haute résolution et/ou Résonance Magnétique Nucléaire (RMN), avec des méthodes optimisées pour détecter le plus de composés possibles. Les matrices de données sont ensuite analysées par des méthodes statistiques dites multivariées, adaptées à ce type de données complexes. Cette étape permet de visualiser la discrimination entre les groupes expérimentaux par exemple consommateurs et non consommateurs d’un aliment, et de lister les signaux détectés qui contribuent le plus à la discrimination. La troisième étape, la plus difficile aujourd’hui, est de mettre un nom sur chaque signal discriminant. La stratégie de base est de comparer les données spectrales recueillies pour le signal avec celles disponibles dans des bases de données de composés telles que « Human Metabolome Database » ou des librairies de spectres telles que MassBank.

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Figure 3 : Schéma simplifié d’une analyse métabolomique

La métabolomique peut être employée dans un but descriptif et permettre en amont de l’analyse du food metabolome d’élargir notre connaissance de la composition en phytomicronutriments des aliments. Par exemple, son application à la tomate en 2008 a permis de découvrir plusieurs centaines de nouveaux phytomicronutriments (principalement flavonoïdes et glycoalcaloïdes) dans cet aliment pourtant parmi les plus étudiés au monde (Iijima et al., 2008). La métabolomique a déjà été appliquée pour caractériser la composition d’un éventail d’aliments tels que la pomme, le raisin, les baies, le melon, les agrumes, la poire, la mangue, la pomme de terre, l’avocat, le brocoli, le maïs, le riz, le blé, le vin la bière, le café, le thé. Cependant, il faudra encore au minimum 5 à 10 ans pour couvrir l’ensemble des principaux aliments consommés (Oms-Oliu et al., 2013). Le potentiel de l’approche est énorme pour explorer et valoriser la biodiversité des plantes alimentaires.

La métabolomique peut aussi être discriminative et permettre d’authentifier l’origine d’un aliment, de vérifier sa non-adultération, de comparer des cultivars, de suivre l’impact de différents modes de production ou de préparation domestique sur la composition des aliments et donc sur l’imprégnation finale du consommateur aux phytomicronutriments. Par exemple, la composition chimique d’une lignée de tomate OGM a pu être comparée à celle de divers cultivars traditionnels pour rechercher s’il y avait équivalence de composition en utilisant des profils métabolomiques non ciblés donc couvrant également les composés encore inconnus (Kusano et al., 2011). Toujours sur la tomate, l’origine chinoise ou italienne de triples concentrés a pu être discriminée par une analyse métabolomique (Consonni et al., 2009). Dans une autre étude, les changements de profils de métabolites ont été suivis au cours des différentes étapes de transformation de la tomate en sauce (Capanoglu et al., 2008). Dernier exemple, la comparaison des profils métabolomiques de pâtes alimentaires complètes ou raffinées a montré que de nombreux phytostérols, policosanols, acides gras insaturés, acides aminés et caroténoïdes étaient plus concentrés dans les pâtes complètes que dans les pâtes raffinées (Beleggia et al., 2011).

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Ces exemples illustrent le niveau de précision et le pouvoir de discrimination de l’approche métabolomique dans l’analyse de la composition des aliments en phytomicronutriments et son intérêt pour étudier les différents déterminants de cette composition.

3. L’évaluation des consommations de phytomicronutriments

3.1 Les questionnaires alimentaires

La métabolomique peut aussi être très utile pour améliorer l’évaluation des consommations de phytomicronutriments. Celle-ci est aujourd’hui très imparfaite. Elle se fait principalement par l’évaluation de la consommation des principaux aliments sources de phytomicronutriments. Des questionnaires alimentaires de différents types permettent de recueillir les déclarations de consommation des individus. Les questionnaires dits de fréquences alimentaires (FFQs) collectent les consommations habituelles des sujets par la déclaration de leurs consommations moyennes par semaine au cours de l’année précédente. Les questionnaires dits de rappels des 24 heures, enregistrent les consommations récentes et sont souvent répétés pour pouvoir représenter les consommations habituelles. Les méthodes de questionnaires présentent des limites inhérentes bien connues, tels que les problèmes de mémoire, de sur-estimation ou sous-estimation de certaines consommations perçues par la société comme valorisantes ou au contraire non-souhaitables, une simplification des consommations déclarées, et une difficulté à estimer la taille des portions consommées (Tucker et al., 2013).

Lorsque les données de consommation sont recueillies, elles peuvent être converties en données d’apport en phytomicronutriments à l’aide de tables de composition des aliments qui donnent les fourchettes de teneurs en phytomicronutriments des principaux aliments consommés dans une population. Aujourd’hui, il n’existe malheureusement que peu de tables de composition des aliments en phytomicronutriments (Scalbert et al., 2011). La base de données Phenol-Explorer créée en 2009 par l’INRA est l’une des plus complètes et des plus utilisées pour les polyphénols. Elle intègre depuis peu des facteurs de rétention indiquant les pertes de polyphénols associées à la conservation ou la cuisson des aliments (Rothwell et al., 2013). Les bases de l’USDA sont également des tables de références pour les polyphénols, et pour quelques caroténoïdes et phytostérols.

L’évaluation par cette approche des consommations de certains polyphénols a permis de rechercher des associations statistiques entre leur consommation et l’incidence de nombreuses pathologies (Cassidy et al., 2013 ; Michaud et al., 2000 ; Wedick et al., 2012 ; Zamora-Ros et al., 2014). Néanmoins, l’imprécision de l’évaluation des apports rend plus difficile la mise en évidence des corrélations existantes (Giovannucci, 2002). De plus, il est important de réaliser que pour des familles entières de phytomicronutriments, telles que les terpènes ou les alcaloïdes, il n’existe aujourd’hui aucune table de composition des aliments et il est donc impossible de calculer leur consommation à partir de questionnaires alimentaires.

3.2 Les biomarqueurs de consommation des aliments

Les méthodes classiques basées sur des questionnaires alimentaires ne sont donc pas suffisantes et une alternative s’est développée avec la mesure objective de biomarqueurs de consommation dans les fluides biologiques. Les biomarqueurs sont indépendants de toutes les erreurs et imprécisions associées aux méthodes de questionnaires et leur sont donc complémentaires. Certains biomarqueurs sont des nutriments ou micronutriments qui reflètent leur propre statut ou indirectement la consommation d’aliments les contenant. Aujourd’hui, il existe un nombre limité de biomarqueurs de consommation d’aliments d’origine végétale et leur validation est souvent incomplète. Les principaux biomarqueurs proposés sont la vitamine C ou les caroténoïdes plasmatiques pour évaluer la consommation de fruits et légumes, les alkylrésorcinols plasmatiques pour certaines céréales complètes, les isoflavones pour le soja, le lycopène pour la tomate, les carotènes pour la carotte, le

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resvératrol pour le vin rouge, le tyrosol pour l’huile d’olive, des métabolites de la caféine, l’acide chlorogénique ou l’acide hippurique pour le café, l’hespérétine pour l’orange, la naringénine pour le pamplemousse, l’acide allylmercapturique pour l’ail, les acides isothiocyanates mercapturiques pour les légumes de la famille des Brassicacées (choux, radis…) et l’acide gallique ou l’acide 4-méthylgallique pour le thé et le vin (Baldrick et al., 2011 ; Hedrick et al., 2012 ; Jenab et al., 2009 ; Scalbert et al., 2014 ; Vermeulen et al., 2003 ; Wishart, 2008).

Tous ces biomarqueurs ont été identifiés par une approche dite « basée sur hypothèse ». Cette approche requiert qu’un composé spécifique de l’aliment ciblé soit connu, que son métabolisme dans l’organisme soit décrit et qu’une méthode d’analyse fiable et sensible puisse être développée. Dans ce cas, généralement un seul composé est utilisé pour caractériser la consommation d’un aliment ou groupe d’aliments, ce qui peut manquer de spécificité. Par exemple, la vitamine C est considérée comme un biomarqueur de la consommation de fruits et légumes dans leur ensemble, alors que certains d’entre eux sont nettement plus riches que d’autres, que la vitamine C est largement utilisée dans l’agro-alimentaire comme conservateur anti-oxydant (E300), et que la vitamine C est parfois consommée sous forme de suppléments. Un autre inconvénient des biomarqueurs uniques est leur forte dépendance vis-à-vis de facteurs pouvant influencer leur concentration (Manach et al., 2009). Par exemple, pour une même quantité de caroténoïdes absorbés, leur concentration plasmatique, utilisée aussi comme biomarqueur de consommation de fruits et légumes, peut varier en fonction de la teneur en lipides du repas consommé, ou en fonction de facteurs génétiques affectant la capacité de l’individu à absorber et métaboliser les caroténoïdes (Jenab et al., 2009). Les biomarqueurs découverts grâce à une approche sur hypothèse peuvent donc parfois manquer de spécificité et de précision et sont loin de couvrir la large diversité d’aliments consommés par l’homme. De nouveaux biomarqueurs plus nombreux et plus robustes sont donc nécessaires.

3.3 Les biomarqueurs issus de la métabolomique

La métabolomique s’est imposée depuis quelques années comme une approche très fructueuse pour découvrir rapidement de nombreux biomarqueurs de consommation. C’est une approche dite « data-driven », ou « guidée par les données », qui ne requiert pas de connaissance préalable de la composition de l’aliment. Les biomarqueurs sont découverts sur la base de l’observation de leur apparition ou de leur forte augmentation dans les fluides biologiques après consommation de l’aliment. Deux types de protocoles d’étude existent. Le premier consiste en une intervention nutritionnelle au cours de laquelle les volontaires consomment un aliment d’intérêt pendant une durée allant d’une journée à plusieurs semaines, en plus de leur diète habituelle ou d’une diète expérimentale contrôlée. Le second est une comparaison de deux groupes de sujets choisis dans une étude observationnelle, ou cohorte, pour représenter des consommations très contrastées de l’aliment choisi. Ainsi, les composés détectés en forte concentration dans les urines ou le sang des forts consommateurs et absents ou très faiblement concentrés chez les faibles consommateurs sont identifiés comme des biomarqueurs potentiels. En raison de nombreux facteurs confondants dans les études de cohortes, toutes les origines alimentaires et métaboliques du biomarqueur candidat doivent être recherchées pour vérifier sa spécificité pour l’aliment ciblé.

La Figure 4 représente à titre d’exemple les résultats d’une étude d’intervention contrôlée réalisée sur volontaires sains pour rechercher par une approche métabolomique de nouveaux biomarqueurs de consommation du jus d’orange. Douze personnes ont consommé pendant quatre semaines, en plus de leur alimentation habituelle, 500 millilitres par jour soit de jus d’orange soit d’une boisson contrôle fournie par les expérimentateurs et ce en deux périodes distinctes dont l’ordre était choisi aléatoirement pour chaque volontaire (protocole dit « en cross-over »). Les urines de 24h ont été recueillies en fin de chaque période expérimentale et analysées par spectrométrie de masse haute résolution avec une méthode optimisée pour détecter le plus de métabolites possible dans les échantillons. Des analyses statistiques adaptées à ce type de données complexes (Partial Least Square-Discriminant Analysis,

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PLS-DA) ont clairement montré la discrimination des urines collectées après un mois de consommation de jus d’orange de celles collectées après consommation de la boisson contrôle.

Au total 105 signaux contribuaient à la différenciation des urines. La Figure 5 permet de visualiser l’intensité de ces 105 signaux discriminants dans les urines de volontaires à la fin des deux périodes : période boisson contrôle à gauche vs jus d’orange à droite, avec la couleur rouge représentant une forte intensité dans les urines et le vert une faible intensité. La quasi-totalité des signaux discriminants présentait une concentration fortement augmentée dans les urines correspondant à la supplémentation de jus d’orange.

Un travail d’identification des signaux a permis de mettre un nom sur les métabolites caractérisant la consommation de jus d’orange. Certains étaient des biomarqueurs attendus, comme les glucuronides d’hespérétine et de naringénine, des polyphénols trouvés spécifiquement dans les agrumes. D’autres étaient des métabolites de terpènes, phytomicronutriments peu étudiés, mais pouvant présenter des effets santé importants d’après la littérature scientifique relative aux plantes médicinales. Enfin, l’un des plus forts signaux associés à la consommation de jus d’orange dans notre étude était la proline bétaïne. Fait intéressant, la proline bétaïne a été identifiée comme associée à la consommation d’agrumes dans une dizaine d’études indépendantes, réalisées sur diverses populations européennes, toutes utilisant la métabolomique mais avec des méthodes analytiques différentes. La proline bétaïne a été quantifiée dans un large panel d’aliments et a été retrouvée pratiquement exclusivement dans les agrumes. Elle a été dosée dans les urines de centaines de sujets d’études épidémiologiques et sa concentration était effectivement corrélée à la quantité d’agrumes consommée déclarée par les volontaires dans les questionnaires alimentaires.

Cet exemple de la proline bétaïne comme nouveau biomarqueur de la consommation d’agrumes a servi de preuve de concept pour démontrer la puissance de l’approche métabolomique pour découvrir de nouveaux biomarqueurs alimentaires. En quelques années, des dizaines d’études ont été réalisées avec une approche métabolomique pour rechercher les métabolites sanguins ou urinaires associés à la consommation d’autres aliments, tels que le café, le chocolat, les légumes crucifères, les céréales complètes, le saumon, les baies, les noix, ou la viande rouge. Environ 150 nouveaux biomarqueurs de consommation ont été proposés, pour une vingtaine d’aliments différents, et de manière intéressante, environ 75% de ces nouveaux biomarqueurs candidats sont des phytomicronutriments (Scalbert et al., 2014). De par sa nature holistique, la métabolomique révèle généralement non pas un seul

Figure 4 : Discrimination des urines analysées par métabolomique (spectrométrie de masse et analyse statistique PLS-DA)

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biomarqueur candidat, mais un panel de métabolites associés à la consommation d’un aliment. L’utilisation d’une combinaison de molécules de différentes familles comme biomarqueur de consommation permet d’augmenter sa spécificité et de diminuer sa dépendance envers les facteurs affectant la concentration de chacun des composés. Les biomarqueurs de consommation issus de la métabolomique devraient donc être plus robustes que les biomarqueurs classiques.

Figure 5 : Analyse en clustering hiérarchique des intensités des signaux discriminant la consommation de jus d’orange dans les urines 12 sujets après un mois de consommation de boisson contrôle (CO) ou de jus d’orange (JO)

Dans le cadre du projet PhenoMeNEp financé par l’ANR en 2011-2013, notre groupe a comparé les profils métabolomiques de sujets de la cohorte française SU.VI.MAX2 sélectionnés parmi les faibles et forts consommateurs de 20 fruits et légumes différents ou boissons d’origine végétale. La Figure 6 montrent que les urines des faibles et forts consommateurs sont bien discriminées pour la plupart des aliments, en particulier ceux consommés fréquemment et riches en phytomicronutriments, tels que la pomme, les agrumes, la tomate, le thé ou le café.

Parmi les signaux discriminants se trouvent de possibles nouveaux biomarqueurs de consommation, ainsi que des métabolites endogènes dont les variations reflètent les effets santé de la consommation de l’aliment à long terme. L’identification des signaux et l’interprétation de ces données très riches mais aussi très complexes sont en cours. Nous avons découvert de nouveaux biomarqueurs de consommation du café, en particulier des métabolites de terpènes et d’alcaloïdes, beaucoup plus

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spécifiques que les métabolites de caféine ou de l’acide chlorogénique proposés comme biomarqueurs de consommation jusqu’à présent (Rothwell et al., 2014).

Figure 6 : Discrimination des urines de faibles et forts consommateurs de 20 aliments par une approche métabolomique (Projet ANR PhenoMeNEp)

La validation des biomarqueurs découverts dans les différents laboratoires est une priorité pour les années à venir. Elle commence par une comparaison des données observées dans les différentes études disponibles. Pour les biomarqueurs retrouvés de manière systématique, la validation doit se poursuivre par un dosage quantitatif dans plusieurs études indépendantes de l’étude ayant servi à les découvrir. En effet, un bon biomarqueur de consommation doit être utilisable dans des populations variées, indépendamment notamment de leurs habitudes alimentaires. La validation des biomarqueurs de consommation découverts par une approche métabolomique va pouvoir prendre une nouvelle ampleur, grâce au financement récemment accordé par 11 pays dans le cadre de la Joint Programming Initiative Healthy Diet for Healthy Life, pour un grand projet collaboratif, le projet Foodball « Food Biomarker Alliance » dédié à la découverte et à la validation de biomarqueurs nutritionnels. Une base de données en libre accès sera construite dans ce projet pour répertorier tous les biomarqueurs de consommation identifiés, avec des informations sur leur degré de validation et leurs limitations.

4. Mesure de l’exposition interne aux métabolites de phytomicronutriments L’évaluation des consommations de phytomicronutriments permet de rechercher des associations avec divers paramètres santé dans les études d’intervention et d’observation. Cependant, il est essentiel de réaliser que pour une même quantité de phytomicronutriments consommée, l’exposition interne (sang et organes) peut varier d’un individu à l’autre et pour un même individu d’une période à une autre. De nombreux facteurs sont susceptibles de moduler la relation entre quantité consommée et concentration

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de métabolites circulants : génotype, âge, sexe, caractéristiques anthropométriques, composition du microbiote intestinal, état de santé, habitudes alimentaires, mode de vie, etc… Les recherches dans ce domaine sont encore très parcellaires, mais il existe des données très solides concernant des déterminants de la biodisponibilité de certaines familles de phytomicronutriments (Lampe, 2009). Par exemple, des variants génétiques codant pour les protéines impliquées dans l’absorption et le métabolisme des caroténoïdes interviennent dans le statut en caroténoïdes (Borel, 2012). Dans le cas des glucosinolates des légumes de la famille des Brassicacées, ce sont les variants génétiques codant pour des enzymes du métabolisme, les glutathion-S-transférases (GSTs), qui affectent de manière importante la biodisponibilité de ces phytomicronutriments (Gasper et al., 2005). La composition du microbiote intestinal module la production de certains métabolites des phytomicronutriments, tels que l’équol à partir des isoflavones, l’enterolactone à partir des lignanes ou les urolithines à partir des ellagitanins (Espin et al., 2013 ; Landete, 2012 ; Setchell et al., 2013). Un effet genre peut exister aussi, avec par exemple une plus importante glucuronidation du resvératrol du vin observée chez les femmes que chez les hommes (Dellinger et al., 2014).

Il existe aujourd’hui une nouvelle volonté de la communauté scientifique d’explorer de manière approfondie les différences interindividuelles et leurs déterminants. Notre groupe est porteur d’une action COST financée par l’Europe dont l’objectif est de créer un réseau scientifique multidisciplinaire pour étudier cette question de manière intégrée. Ainsi, durant les quatre années de l’Action POSITIVe, des nutritionnistes experts des différentes familles de phytomicronutriments, des généticiens, des cliniciens, des microbiologistes, des biologistes moléculaires, des épidémiologistes, des experts en santé publique, des technologues, des représentants de l’industrie agro-alimentaire, des bioinformaticiens et modélisateurs vont rassembler et partager toutes les connaissances acquises et confronter leurs approches méthodologiques. Ils dégageront les priorités de recherche pour identifier les déterminants les plus importants de la variabilité interindividuelle dans la biodisponibilité des divers phytomicronutriments, afin de pouvoir modéliser et prédire la relation entre quantité consommée et concentrations de métabolites dans l’organisme.

Compte-tenu des variations interindividuelles de biodisponiblité des phytomicronutriments, il est essentiel de disposer de méthodes d’évaluation de l’exposition interne des individus. De nombreuses méthodes sont décrites dans la littérature pour analyser des métabolites de phytomicronutriments dans les urines ou le sang. Ils sont alors des biomarqueurs de leur propre statut. Ces méthodes sont optimisées pour quantifier un faible nombre de composés, généralement d’une même famille. Par exemple, on sait très bien quantifier les métabolites des isoflavones du soja ou les métabolites des catéchines du thé ou du cacao, ou encore les caroténoïdes de la carotte ou de la tomate dans le plasma. De nombreuses études épidémiologiques ont déjà recherché des corrélations entre exposition à des phytomicronutriments mesurée par des biomarqueurs et incidence de pathologies (Zamora-Ros et al., 2014)

Un exemple intéressant de l’intérêt de mesurer l’exposition interne plutôt que la consommation est le cas des isoflavones du soja. Seulement environ 30% des occidentaux sont capables, grâce à une composition particulière du microbiote intestinal, de produire le métabolite équol à partir de la daïdzine du soja. La mesure des concentrations plastiques ou urinaires des métabolites d’isoflavones du soja a permis de montrer dans plusieurs études que non seulement la quantité de soja consommé pouvait être corrélée à des effets santé, mais que la capacité à produire de l’équol avait une influence cruciale, les producteurs d’équol tirant un meilleur bénéfice santé de la consommation de soja que les non producteurs (Setchell et al., 2013).

Si les méthodes de quantification disponibles permettent de mieux explorer les effets santé de quelques familles de phytomicronutriments, elles sont de type réductionniste et ne permettent pas de prendre en compte les synergies éventuelles entre composés, ni de mettre en évidence d’autres bioactifs que ceux qui ont été étudiés jusqu’à présent. Or, il est très probable que d’autres phytomicronutriments aient des effets santé car divers mécanismes d’action, notamment un rôle de molécules signal, continuent d’être

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découverts pour les phytomicronutriments, bien au-delà des effets antioxydants directs qui avaient en grande partie guidé le choix initial des phytomicronutriments d’intérêt.

Du fait de la grande diversité de phytomicronutriments alimentaires, il faudrait combiner de nombreuses méthodes ciblées pour obtenir une couverture suffisante de tous les composés et métabolites d’intérêt. La Figure 7 montre pour un panel de phytomicronutriments alimentaires la diversité des masses et polarités des composés à analyser.

Figure 7 : Visualisation de l’espace chimique des phytomicronutriments alimentaires

Depuis quelques années, se développent des méthodes d’analyses métabolomiques dites ciblées qui permettent de couvrir en une seule analyse une gamme nettement plus large de composés que précédemment, représentant plusieurs familles (Vrhovsek et al., 2012). On peut donc espérer qu’une combinaison de 3-4 méthodes métabolomiques complémentaires pourra être optimisée pour couvrir l’essentiel des métabolites de phytomicronutriments dans les fluides biologiques.

Un profil métabolomique, mesuré par une méthode standardisée, de l’exposition interne de chaque individu à l’ensemble des métabolites de phytomicronutriments pourra alors être relié aux habitudes alimentaires, aux divers paramètres intrinsèques et environnementaux, et aux données relatives à la santé dans les études d’observation et d’intervention. Ceci constituerait une avancée considérable pour découvrir les phytomicronutriments les plus bénéfiques dans nos aliments et les facteurs influençant leur impact. De plus, les relations avec la santé seraient explorées en prenant en compte les capacités métaboliques des individus. La possibilité d’analyser un profil complet de métabolites de phytomicronutriments dans les urines ou le plasma permettra également de suivre l’impact de politiques de santé publique ou de recommandations nutritionnelles. Pour les technologues des aliments et

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l’industrie agroalimentaire, ce profil d’exposition aux phytomicronutriments pourra servir à optimiser les systèmes de production pour une meilleure qualité nutritionnelle des aliments.

5. PhytoHub, une nouvelle base de données dédiée aux phytomicronutriments et utilisable en métabolomique

La métabolomique possède un potentiel extraordinaire. Cependant, son utilisation est freinée par la difficulté actuelle à identifier l’ensemble des signaux détectés dans les échantillons biologiques (Scalbert et al., 2014). La technique la plus utilisée, la spectrométrie de masse haute résolution, ne fournit pour chaque signal détecté qu’un temps de rétention (dépendant des conditions analytiques) et une masse exacte. Pour attribuer un nom et une structure chimique au signal détecté, il faut comparer les données expérimentales à celles de composés présents dans des bases de données en ligne telles que Human Metabolome DataBase, Kegg ou MassBank. Malheureusement, ces bases sont encore très incomplètes et ne contiennent que peu de métabolites des phytomicronutriments (Scalbert et al., 2011). Afin que ces métabolites de phytomicronutriments puissent être facilement identifiés dans les profils métabolomiques, nous avons décidé de créer une nouvelle base de données consacrée à ces composés : la base PhytoHub (www.phytohub.eu).

Pour chacun des phytomicronutriments alimentaires (environ 1000 composés), PhytoHub contient de nombreuses informations (Figure 8) : nom, synonymes, identifiants chimiques, structure chimique, formule élémentaire, masse molaire, masse monoisotopique, paramètres physico-chimiques (solubilité, pKa, …), classification, sources alimentaires de chaque composé extraites des articles et ouvrages scientifiques et de tables de composition existantes (Phenol-Explorer, USDA database…), spectres de masse extraits de la littérature et de librairies de spectres existantes sur internet (MassBank, RIKEN ResPect, MetaboHub…) ou fournis par des plateformes partenaires. Une originalité essentielle de PhytoHub est qu’elle compilera tous les métabolites des phytomicronutriments identifiés chez l’Homme. Les données sont extraites de la littérature scientifique par des experts de chaque famille. La publication en ligne des métabolites connus des phytomicronutriments est en cours de réalisation avec des données ajoutées tous les deux mois pour chacune des familles de micro-constituants (terpènes, alcaloïdes, polyphénols…).

Le devenir métabolique chez l’homme de nombreux phytomicronutriments n’est pas connu, ce qui fait que les données qui peuvent être extraites de la littérature sont largement incomplètes. Il existe des logiciels de prédiction in silico du métabolisme, qui prédisent les métabolites les plus probables à partir

de la structure chimique d’un composé et de la connaissance des biotransformations réalisées par les enzymes hépatiques. Cependant, ces outils développés pour l’industrie pharmaceutique sont mal adaptés aux constituants alimentaires et ne prédisent pas le métabolisme réalisé par les bactéries intestinales. Pour PhytoHub, une prédiction du métabolisme des phytomicronutriments sera réalisée. L’approche est d’utiliser les données collectées dans la littérature sur les métabolites connus des phytomicronutriments pour compiler une liste de principales biotransformations et combinaisons de biotransformations observées pour les différentes familles de phytomicronutriments. Un module bioinformatique permettra de reconnaitre dans la structure chimique de n’importe quel composé les groupements fonctionnels susceptibles de réagir avec des enzymes de biotransformation. A partir de cette information et de l’appartenance du composé à une classe de phytomicronutriments, les différentes biotransformations possibles seront appliquées et les métabolites générés. Ainsi, même pour les phytomicronutriments jamais étudiés chez l’homme, les métabolites susceptibles d’être retrouvés dans le sang et les urines seront disponibles dans PhytoHub.

PhytoHub a été donc conçue pour pouvoir être utilisée en métabolomique, dans le but de faciliter l’identification des métabolites de phytomicronutriments dans les profils métabolomiques, mais son intérêt va bien au-delà de cette utilisation. PhytoHub devrait être utile pour toutes les personnes s’intéressant aux effets santé des produits végétaux, notamment pour connaitre les sources

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alimentaires et les métabolites de chaque phytomicronutriment ou pour considérer la complexité de la composition des aliments en phytomicronutriments.

Figure 8 : PhytoHub : contenu et captures d’écran du site internet (www.phytohub.eu)

Conclusion

La composition des aliments en phytomicronutriments est bien plus complexe que ce qui était généralement considéré jusqu’à présent. La métabolomique, approche exploratoire non ciblée, révèle dans les fluides biologiques la présence de nombreux métabolites de phytomicronutriments n’ayant encore jamais été considérés. Il est probable que l’utilisation à grande échelle de la métabolomique conduira à l’identification de nouveaux bioactifs. A l’heure actuelle, après seulement quelques années de développement, elle est employée avec succès pour identifier un large éventail de nouveaux biomarqueurs de consommation des phytomicronutriments et de leurs sources alimentaires. L’objectif suivant est de mettre au point une analyse standardisée du profil complet des phytomicronutriments alimentaires et de leurs métabolites, qui pourra servir de nombreuses questions de recherche en nutrition, en technologie des aliments et en santé publique. L’amélioration rapide des méthodologies et des outils bioinformatiques, par exemple notre base de données PhytoHub, augmente continuellement le potentiel de la métabolomique pour l’évaluation de l’exposition aux phytomicronutriments et l’étude de leurs effets santé.

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