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Genre et autorité: quels liens ? Les enseignant-e-s vu-e-s par les adolescent-e-s

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Master

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Genre et autorité: quels liens ? Les enseignant-e-s vu-e-s par les adolescent-e-s

MENOTTI, Mathilde

Abstract

Dans mon mémoire, je m'intéresse à la question de l'autorité des professeurs en lien avec celle du genre. De nombreux propos entendus lors de mes stages ou expériences semblent sous-entendre qu'enseignants et enseignantes ne partent pas égaux concernant leur autorité face à des élèves. J'ai donc interrogé des adolescents de 15-18 ans afin de connaître leurs points de vue sur la question, vu qu'ils se trouvent constamment confrontés à l'autorité professorale. J'ai essayé de voir, à travers leurs discours et opinions, si le sexe des enseignants a un impact sur leur autorité et sur les attitudes des élèves en classe. Je me suis également intéressée à leur manière de percevoir l'autorité des remplaçants. J'ai pu entendre certains stéréotypes de sexe, liés à l'environnement social dans lequel se trouve l'enfant, à sa culture, à son éducation et à son vécu, qui m'ont permis de faire le lien entre le genre et l'autorité.

MENOTTI, Mathilde. Genre et autorité: quels liens ? Les enseignant-e-s vu-e-s par les adolescent-e-s. Master : Univ. Genève, 2010

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:12519

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GENRE ET AUTORITE : QUELS LIENS ? Les enseignant-e-s vu-e-s par les adolescent-e-s

MEMOIRE REALISE EN VUE DE L’OBTENTION DE LA LICENCE MENTION ENSEIGNEMENT

PAR

Mathilde Menotti

DIRECTEUR DU MEMOIRE Claude Laplace

JURY

Mireille Cifali

Christine Del Notaro

GENEVE 09 2010

UNIVERSITE DE GENEVE

FACULTE DE PSYCHOLOGIE ET DES SCIENCES DE L’EDUCATION SECTION SCIENCES DE L’EDUCATION

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Résumé

Dans mon mémoire, je m’intéresse à la question de l’autorité des professeurs en lien avec celle du genre. De nombreux propos entendus lors de mes stages ou expériences semblent sous-entendre qu’enseignants et enseignantes ne partent pas égaux concernant leur autorité face à des élèves. J’ai donc interrogé des adolescents de 15-18 ans afin de connaître leurs points de vue sur la question, vu qu’ils se trouvent constamment confrontés à l’autorité professorale. J’ai essayé de voir, à travers leurs discours et opinions, si le sexe des enseignants a un impact sur leur autorité et sur les attitudes des élèves en classe. Je me suis également intéressée à leur manière de percevoir l’autorité des remplaçants. J’ai pu entendre certains stéréotypes de sexe, liés à l’environnement social dans lequel se trouve l’enfant, à sa culture, à son éducation et à son vécu, qui m’ont permis de faire le lien entre le genre et l’autorité.

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Remerciements

Je tiens à remercier les différentes personnes qui ont été présentes pour m’aider à avancer dans ma recherche et pour me soutenir. Je remercie donc :

Mr Claude Laplace, mon directeur de mémoire, pour ses conseils, son dynamisme et les interrogations qu’il a suscitées.

Les membres de ma commission de mémoire qui sont Mireille Cifali et Christine Del Notaro.

Tous les adolescents et adolescentes qui ont accepté l’entretien et se sont dévoilés pour permettre ma recherche.

Mon relecteur et ma relectrice qui ont eu la patience et l’envie de se plonger dans la lecture de mon mémoire.

Ma famille et mes amis pour m’avoir encouragée.

Merci à vous tous, sans qui ce travail de réflexion et de recherche n’aurait pas été possible.

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SOMMAIRE

I. Introduction ... 6

1.1 Motivations et intérêts personnels : ... 6

1.2 Enjeux professionnels, scientifiques et signification sociale : ... 8

1.3 Délimitation du projet de recherche : ... 11

II. Objet de recherche et problématique ... 14

2.1 Questions de recherche : ... 14

2.2 Hypothèses de recherche : ... 15

III. Dispositif de recherche et type d’analyse ... 20

3.1 Justification du choix méthodologique : ... 20

3.2 Choix des sujets interrogés : ... 21

3.3 Variables possibles lors du déroulement des entretiens : ... 22

3.4 Les questions du guide d’entretien : ... 23

3.5 Traitement des données : ... 23

IV. Cadre théorique ... 25

4.1 Sexe et genre : ... 25

4.1.1 La socialisation différenciée ... 27

4.1.2 L’identité sexuée ... 32

4.1.3 Les stéréotypes de sexe ... 37

4.1.4 Les différences culturelles ... 40

4.2 L’autorité : ... 43

4.2.1 L’autorité de statut ... 43

4.2.2 L’autoritarisme ... 47

4.2.3 La permissivité ... 48

4.2.4 L’autorité éducative ... 50

4.2.5 La discipline scolaire ... 51

4.2.6 La loi et les règles ... 53

4.2.7 Le respect ... 56

4.2.8 L’autorité naturelle ... 57

V. Analyse des données ... 60

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5.1 L’autorité vue par les adolescents : ... 60

5.2 L’autorité des enseignants aux yeux des adolescents, à quoi sert-elle ? ... 64

5.3 Quelles pratiques de discipline estimées nécessaire par les jeunes ? ... 69

5.3.1 Règles et sanctions ... 69

5.3.2 S’adresser à toute la classe, un élève : une entité dans un groupe ... 71

5.4 Quels comportements des professeurs sont attendus par les élèves ? ... 73

5.4.1 Etre sûr de soi et bien dans sa peau, se remettre en question ... 73

5.4.2 Utiliser l’autodérision et l’humour, dire la vérité ... 75

5.4.3 Utiliser le comportement non-verbal et verbal ... 77

5.4.4 Aimer sa matière et en faire partager le goût ... 79

5.5 Variables soulevées par les adolescents concernant l’autorité de leurs enseignants : ... 80

5.5.1 Le nombre d’élèves ... 80

5.5.2 Le public et les élèves, leur éducation, leurs parents ... 82

5.5.3 La vision de l’école, la maturité des élèves et le discours des enseignants ... 83

5.5.4 L’âge de l’enseignant et le rapport de séduction ... 85

5.6 Les représentations de l’autorité liées au genre : ... 86

5.6.1 Lorsque les adolescents parlent de leurs professeurs. ... 86

5.6.2 Est-il plus facile d’être un homme ou une femme pour enseigner ? ... 88

5.6.3 Points de vue différents entre adolescents et adolescentes sur la question de l’autorité et du sexe de l’enseignant. ... 93

5.6.4 Les professeurs et les expériences des adolescents influencent leurs discours. ... 94

5.6.5 Impact de l’image première du professeur chez les jeunes. ... 95

5.7 L’autorité des remplaçants : ... 97

5.7.1 Autorité et sexe des remplaçants. ... 97

5.7.2 Deux points de vue différents sur le statut et l’autorité accordés aux remplaçants par les adolescents. ... 99

VI. Conclusion ... 103

6.1 Retour réflexif : ... 103

6.2 Bilan personnel : ... 107

6.3 Prolongements possibles : ... 108

VII. Bibliographie ... 111

Livres liés aux concepts de l’autorité et de la discipline: ... 111

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Livres liés au concept genre : ... 111

Livres sur la méthodologie : ... 112

Mémoires lus : ... 113

Cours suivis : ... 113

Webographie : ... 113

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I. Introduction

1.1 Motivations et intérêts personnels :

Je m’intéresse à la question de l’autorité liée à la question du genre, par le biais de différents vécus d’adolescents. Je cherche à savoir si les enseignants et les enseignantes sont égaux par rapport à leur autorité face à des élèves. Cette problématique me vient en premier lieu de ce que j’ai pu observer lors des camps de vacances comme monitrice, ainsi que de mes discussions avec de jeunes élèves lors de répétitoires et enfin de discussions que j’ai pu avoir lors de mon parcours avec différents enseignants.

Tout d’abord, lors de mes expériences en tant que monitrice de camp de vacances, j’ai été frappée par les différences entre une femme et un homme concernant leur manière de se faire obéir par les enfants. J’ai pu remarquer des écarts quant à l’obéissance de certains enfants envers une monitrice ou un moniteur. Il arrive que les enfants se taisent plus rapidement quand c’est un jeune homme qui hausse le ton que lorsque c’est une femme. Je me suis souvent demandé pourquoi, trouvant cela plutôt injuste. J’ai pu y réfléchir et formuler quelques hypothèses. La première d’entre elles serait que les enfants se taisent peut-être plus vite car ils ont peur d’une réaction plus rapide et dure du moniteur. Peut-être que l’homme véhicule une image plus agressive que la femme qui se lierait à une peur plus importante de la part des enfants, qui obéiraient donc plus rapidement et se soumettraient plus facilement aux ordres. Je pense aussi que la posture joue un rôle, or, celle du moniteur est peut-être plus imposante que celle d’une monitrice. La volonté de faire taire les enfants peut aussi, par exemple, avoir un impact sur l’obéissance de ces derniers.

Les jeunes relèvent aussi les différences de volonté, l’envie de s’imposer ou non et les différentes attitudes à leur égard. Les implicites et le comportement non-verbal ont une grande importance dans une relation. Effectivement, le regard de la personne par exemple a un impact sur l’attitude de l’autre. Peut-être que celui du moniteur était plus foudroyant, plus expressif et donc plus convaincant que celui de la monitrice. Ses gestes étaient peut-être plus démonstratifs et clairs pour l’enfant qui leur portait donc plus d’attention. Je pense aussi que ces différences s’expliquent par l’image que l’homme a dans la société. Il a généralement une figure plus autoritaire que la femme. Ce fait m’a été confirmé par une élève de 4P, me disant

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7 qu’elle aimerait bien avoir un enseignant pour voir comment son attitude en classe et son enseignement seraient. Elle rajouta que, pour elle, ce serait probablement très différent et difficile car un homme est plus strict et plus sévère qu’une femme.

Mon autre expérience est liée à plusieurs discussions que j’ai pu avoir avec des enseignants du primaire ou du secondaire. Souvent, ils me disent qu’être un homme assure une certaine méfiance de la part des élèves de primaire. Ils sembleraient donc, selon les opinions de certains enseignants, qu’il soit plus impressionnant pour les apprenants d’avoir affaire aux hommes plutôt qu’aux femmes. Déjà parce qu’ils sont plus rares dans les écoles et ensuite parce qu’ils sont avantagés par leur sexe qui leur confère une voix grave et une posture plus imposante. En effet par leur rareté, les élèves seraient plus impressionnés et intimidés d’avoir affaire à un enseignant. De plus, les élèves généralisent aussi, ont des préjugés et véhiculent des stéréotypes en disant qu’un homme est plus impressionnant, possède une grosse voix et est plus sévère. Certains professionnels de l’enseignement véhiculent aussi des représentations. Dans leurs discours, j’ai pu entendre qu’il était plus facile pour un homme de se faire obéir, ils ont moins besoin de crier pour se faire respecter. Alors que pour d’autres enseignants, c’est plutôt le physique, l’attitude et l’apparence qui ont un effet sur l’agir des élèves. Ce qui voudrait dire que le sexe de l’enseignant n’est plus à prendre en compte du point de vue de l’autorité. En effet, une femme peut également avoir un physique imposant, une grosse voix. Mais en ce qui me concerne, selon des dires de certains, étant femme, petite et en plus pourvue d’une voix douce, il me serait plus difficile de faire respecter les règles et d’asseoir mon autorité.

C’est un sujet qui m’interpelle personnellement car je trouve impressionnant d’entendre ce discours et cette incertitude de la part de certains professionnels ou de parents quant à l’autorité d’une femme. J’aimerai donc savoir ce qu’en pensent les adolescents et voir s’ils tiennent les mêmes propos. J’aimerai également analyser quelles représentations sont véhiculées. C’est également un sujet qui me concerne professionnellement car en tant que future enseignante, je vais devoir faire autorité pour être écoutée par les élèves et pour pouvoir enseigner. Il est nécessaire d’assurer un climat calme et serein pour permettre la construction et la transmission des savoirs, ainsi que l’acquisition de connaissances, dans les meilleures conditions possibles. Instaurer des règles et les faire respecter est donc important.

Or pour cela, il est nécessaire de faire figure d’autorité et d’en avoir car c’est à l’enseignant d’instaurer des règles et de faire de la discipline dans sa classe, avec ses élèves. Hors le contexte de la classe, les règles en famille et en société sont essentielles car elles permettent à

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8 tous de vivre ensemble dans le respect. Or, les règles de la société sont constamment remises en question comme l’est l’autorité des enseignants. C’est donc un sujet d’actualité, très discuté dans notre monde d’aujourd’hui en lien avec les problèmes d’incivilités, de violences et de délinquance.

Par mon parcours universitaire, j’ai également pu constater qu’avec le statut de stagiaire il est plus difficile d’asseoir son autorité car cette dernière est contestée par les élèves. Les stagiaires doivent faire plus de discipline pour obtenir le calme que les enseignants. Les élèves se permettent de parler, de se disperser et ils nous testent, d’autant plus, j’imagine étant une stagiaire de sexe féminin. Effectivement à cause des différentes représentations liées à l’autorité et au genre, les élèves accordent à l’homme peut-être plus d’autorité qu’à une femme et l’écoutent ou lui obéissent plus vite en fonction de l’image qu’il donne de lui et qui se lie à son sexe. Pour expliquer l’indiscipline de certains élèves, il existe également le fait que les stagiaires ne sont pas leur enseignant, ils fonctionnent différemment et les élèves cherchent donc à connaître les limites. Ils se permettent aussi de moins respecter les règles car ce ne sont pas les stagiaires qui rencontrent les parents et mettent les notes. L’enseignant a une certaine légitimité face aux parents que le stagiaire n’a pas et les élèves en sont pleinement conscients. Je me demande comment les adolescents perçoivent l’autorité d’un enseignant par rapport à celle d’un stagiaire ou plus particulièrement d’un remplaçant.

J’aimerais ainsi connaître quelles sont leurs représentations concernant l’autorité des remplaçants et voir s’ils font des différences liées à leur sexe.

1.2 Enjeux professionnels, scientifiques et signification sociale :

La question du genre prend de plus en plus d’ampleur et d’importance dans tous les domaines de la société. Nous le voyons dans les nombreux livres qui paraissent actuellement et qui traitent des problèmes d’inégalité, de mixité, de genre et de stéréotypes. L’égalité homme femme est réclamée, que ce soit au niveau des salaires, des métiers, des offres d’emplois. Bien que comme le définit Choque (2008) « au plan international, les droits des femmes ont été reconnus comme partie “ intégrante, inaliénable et indivisible des Droits Humains“ lors de la conférence de Vienne en Autriche (1993) » (p.10), les inégalités et violence liées au sexe des individus sont toujours présentes. Effectivement la religion, comme les traditions ou certaines politiques d’Etat permettent aux hommes de commettre de nombreuses violences sur les femmes. Elles concernent des souffrances collectives ou intimes et regroupent les agressions,

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9 les viols, l’esclavage sexuel, l’utilisation des femmes comme otages ou armes de guerre, les harcèlements, les violences verbales et psychologiques ou physiques comme les violences conjugales ou les excisions, les discriminations, les exclusions scolaires, les violences actives ou passives. Or comme le dit Lucas (2009), « cette violence sous toutes ses formes se retrouve dans toute les sociétés et tous les milieux, et ignore, comme le précise le rapport1, les barrières de la richesse, de la culture, de l’origine géographique et de l’âge. » (p.18). Or à travers mon vécu, mes expériences, j’ai pu constater qu’hommes et femmes ne semblaient pas égaux concernant leur autorité. Or je trouve révoltant de penser et de faire en sorte que les hommes aient plus d’autorité que les femmes dans notre société occidentale actuelle. Pour moi, ce fait, qui se lie à notre héritage culturel, notre éducation et nos représentations, constitue une « violence » pour les individus de sexe féminin. Je m’insère donc, en quelque sorte, dans un mouvement féministe, en étudiant les liens entre le genre et l’autorité.

Effectivement, certains mouvements féministes essayent d’alerter l’opinion publique, des efforts sont faits pour sensibiliser les gens à ce problème de discrimination et d’inégalité. Des changements sont opérés en politique, dans diverses disciplines scientifiques pour le développement équitable et durable. Certains chercheurs, par exemple, remettent en cause le fonctionnement même de la langue française, langue fondamentalement sexiste qui favorise le genre masculin. Effectivement, j’ai trouvé un guide romand d’aide à la rédaction administrative et législative épicène dont l’auteur est Moreau (2001), qui montre cette inégalité. Il dit :

« Comme toutes les langues romanes, le français a la particularité de posséder deux genres grammaticaux - le féminin et le masculin, qui renvoient directement lorsqu’il s’agit d’êtres vivants, aux catégories sexuelles « féminin » et « masculin »-, et nous apprenons dans le langage la hiérarchie des sexes, la valeur sociale des femmes et des hommes. Contrairement à ce qu’affirment certain-e-s, le genre grammatical et le genre sexuel tendent à se confondre pour donner un “sexe“ aux choses, ainsi que l’affirmèrent dès 1927 les grammairiens Damourette et Pichon, dans leur ouvrage Des mots à la pensée. Sans nous en douter, nous répétons et apprenons à l’envi que féminité se conjugue avec passivité et répétition, qu’il faut que le féminin soit inféodé au masculin pour produire, alors que le masculin demeure indépendant, fort, créateur et fécondant. […] Si une femme utilise le masculin elle donne la supériorité aux hommes, elle accuse un complexe d’infériorité. » (p.7)

1 Rapport d’Amnesty international « Contre les violences faites aux femmes », 2004.

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10 Or, cette langue française tend à se transformer et des professionnels veillent aujourd’hui, quand ils rédigent un texte à s’adresser aux hommes et aux femmes. Ils écrivent ainsi un texte que l’on nomme épicène, un écrit égalitaire pour les deux sexes en utilisant par exemple l’accord des adjectifs au nom le plus proche, ou encore le trait d’union et non la parenthèse ou la barre d’exclusion pour nommer les deux genres. Dans ce même guide romand, il est dit :

« Il est difficile de changer les habitudes langagières, de bousculer des coutumes bien ancrées.

Les stéréotypes perdurent dans la langue et il n’est pas aisé d’admettre que l’on a pu, à son insu et contre sa volonté, exclure de son discours une partie de la population. On nous a répété si souvent et en toute circonstance que le masculin était générique, universel, que nous oublions facilement que les temps ne sont pas si lointains où « le candidat » ne pouvait signifier que

“l’être mâle faisant acte de candidature“. La société a changé, les femmes ont conquis les mêmes droits que les hommes : le langage doit en rendre compte. Il faut que chacun et chacune se reconnaissent dans tous les textes administratifs ou législatifs, en employant une syntaxe et une grammaire non sexistes, ou plutôt épicènes, car elles s’adresseront aussi bien aux femmes qu’aux hommes. » (p.3)

J’ai essayé d’être vigilante à la question de l’égalité de genre lors de la rédaction de mon mémoire en utilisant une grammaire et une syntaxe épicène. Il existe cependant un décalage entre la prise en considération du sexisme de la langue et entre vouloir le supprimer.

Effectivement la réalité d’une rédaction épicène n’est pas évidente. Malgré l’attention que j’essayais de porter à cette écriture épicène, j’ai oublié de nombreuses fois de rajouter le féminin aux noms ou adjectifs, ce qui montre l’ancrage du mécanisme de la langue et de la suprématie du genre masculin chez moi ou chez tout individu. En effet, depuis l’enfance j’ai appris à écrire selon les usages et règles sexistes de la langue française. Ecrire de manière épicène exige une certaine maîtrise et demande donc une habitude quant à l’utilisation de formules épicènes qui n’alourdissent pas le texte. Je ne possédais ni l’habitude ni la maîtrise et donc écrire de manière épicène alourdissait considérablement mon mémoire. Ce sont deux raisons qui expliquent pourquoi j’ai abandonné à grand regret cette écriture. Cependant lorsque je serai enseignante, je serai vigilante à utiliser une écriture épicène et pourrai m’exercer à la mettre en œuvre et l’appliquer lors de la rédaction, par exemple, de lettre aux parents.

Quant aux autres enjeux professionnels, je pense que ce mémoire pourra m’aider en tant que future enseignante, par rapport à mon autorité. Je vais pouvoir obtenir des indices pour savoir comment me positionner face aux élèves, sur les attitudes à développer et sur quelles

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11 pratiques mettre en œuvre en classe. Effectivement, en m’intéressant à la parole des élèves, je vais pouvoir apprendre ce qu’ils attendent d’un enseignant concernant son autorité et sa discipline. Je vais obtenir quelques pistes d’action qui pourront me guider pour savoir sur quelles bases asseoir mon autorité. Je pourrai peut-être comprendre plus en profondeur le fonctionnement de certains élèves grâce aux récits de leur vécu et réfléchir à l’impact de leurs comportements sur mes attitudes et prises de décisions. Ainsi que l’impact de mon comportement sur eux. Je pense que l’attitude des adultes est tout autant à remettre en cause ou tout du moins à interroger, comme nous le faisons des comportements de certains enfants.

Concernant mon sujet, son enjeu scientifique pourrait être d’apporter des connaissances concernant les représentations d’adolescents sur l’autorité des enseignants liée à leur sexe et au concept genre. Un des enjeux pédagogiques est de sensibiliser les étudiants au problème de l’autorité et de sa construction, de donner quelques pistes d’action concernant des pratiques disciplinaires essentielles en classe, cela en fonction du vécu et des dires des adolescents.

Effectivement ils me diront ce qu’ils attendent d’un enseignant et je pourrai le transmettre à travers mon mémoire. Je pourrai également donner certaines représentations stéréotypées qui ont été véhiculées par les adolescents par rapport au genre.

Pour ce qui est de la signification sociale, cette recherche pourrait contribuer à mettre en évidence certaines réalités de notre société, des présupposés, des préjugés et idées préconçues qu’adultes nous transmettons aux enfants et qui se transmettent de génération en génération.

Ou également faire prendre conscience de certaines représentations que les enseignants véhiculent auprès de leurs élèves. Je pourrai parler à d’autres collègues, professionnels et parents, pour essayer de les sensibiliser à ce phénomène de transmission de stéréotypes dans l’idée de changer certains comportements ou représentations sexistes qui sont profondément ancrés dans nos mœurs.

1.3 Délimitation du projet de recherche :

Tout d’abord, je m’intéresse à la question de l’autorité car cette dernière est très discutée et de plus en plus remise en question dans notre société. En effet, comme Guillot (2006) dit,

« La crise de l’autorité se manifeste au sein des familles, dans les établissements scolaires, dans la défiance envers les pouvoirs, en particulier envers le pouvoir politique. Elle se caractérise par le “ déclin de l’institution“, la prolifération des “incivilités“, de la délinquance, de la montée des idéologies néonazies, des intolérances culturelles et des replis identitaires. » (p.9)

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12 Guillot montre que l’autorité touche toutes les sphères de la société, qui évolue, se modifie sans cesse et dans laquelle des changements se mettent en place. L’autorité est très touchée par l’évolution des mœurs et est sans cesse interrogée sur son utilité et ses fonctions, par différents professionnels, parents et chercheurs. Effectivement, certains scientifiques essayent de trouver de bonnes pratiques de discipline et d’expliquer quelle autorité adopter de façon à répondre à la crise et à l’augmentation de la violence. Il est donc nécessaire d’interroger l’autorité selon différents points de vue afin de trouver des solutions aux problèmes actuels pour arriver, par exemple, à trouver une réponse adéquate et adaptée à certaines crises identitaires de certains jeunes. Il est nécessaire comme le rajoute Guillot (2006) d’ « assumer son autorité d’adulte, d’enseignant ou de parent, [cela] est plus que jamais une exigence à laquelle nous ne devons pas nous dérober sans abandonner, de fait, les enfants et les adolescents. (p.12).

Je m’intéresse ensuite, plus particulièrement, à l’autorité des professeurs car en tant que future enseignante je trouve important de me questionner sur ce qu’est l’autorité professorale et d’apprendre à la connaître scientifiquement. Cette dernière est effectivement constamment remise en question et les professionnels de l’enseignement ont beaucoup de mal à asseoir leur autorité. Effectivement comme Guillot (2006) continue à l’expliquer, « beaucoup d’enseignants, débutants mais aussi expérimentés, plus largement des éducateurs, et aussi des parents, rencontrent des problèmes d’autorité avec les jeunes. Qu’il s’agisse de jeunes enfants ou d’adolescents, se faire écouter, respecter, obéir ne va plus de soi. » (p.9).

L’autorité des enseignants est très touchée par la crise, qui se caractérise par la montée des incivilités, du racisme, des actes de délinquance et de violence de la part d’enfants de plus en plus jeunes. L’école est un lieu dans lequel les actes de violence et de non respect d’autrui sont très fréquents. L’autorité des professeurs et la discipline qu’ils mettent en place sont donc primordiales pour apprendre aux élèves à respecter les règles et à se respecter entre eux. De plus, je trouve nécessaire qu’un enseignant s’interroge sur l’autorité afin d’en trouver une qui permet à l’élève de se construire et d’éviter, comme le dit Guillot (2006), de retomber ou de

« revenir à des méthodes qui ont fait la preuve de leur inefficacité et, pire encore, de leurs dangers. » (p.12).

J’ai de plus voulu associer cette question de l’autorité à celle du genre car le genre constitue un concept qui m’intéresse vivement et qui est très questionné actuellement. En effet, il est à mettre en lien avec les remises en question et changements actuels de la société concernant

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13 une équité de traitement entre les hommes et les femmes. De nombreuses inégalités sociales subsistent entre les deux sexes et cela à cause de nos représentations stéréotypées, de notre culture et de l’éducation reçue. C’est pourquoi de nombreux mouvements féministes revendiquent le droit des femmes et une équité pour les deux sexes. Je m’intéresse également au genre pour savoir si ce dernier à un impact sur l’autorité. En effet, actuellement, certaines politiques, certains parents ou professionnels se posent la question de savoir si les femmes font preuve de suffisamment d’autorité pour gérer une classe et des enfants à problèmes. Cela sous-entend qu’elles ne sont peut-être pas aussi capables que des hommes et n’ont pas les qualités pour faire face aux difficultés de discipline et faire face à la violence. Par différentes discussions lors de mes stages, j’ai également pu constater qu’enseignant et enseignante ne semblait pas être égaux du point de vue de leur autorité en classe. Cette question peut révolter certaines professionnelles qui sont, je pense, aussi expertes que les hommes, malgré les stéréotypes de sexe qui sont véhiculés.

Je m’interroge donc sur le lien qui peut exister entre l’autorité des enseignants et le genre à travers le discours d’adolescents, en écoutant leur vécu et leurs opinions. Je trouve effectivement important de leur donner la parole et de s’intéresser à leurs idées, points de vue et expériences vu qu’ils sont les premiers concernés par l’autorité professorale et s’y trouvent constamment confrontés, à l’école. Je vais essayer de ressentir et de comprendre leur vision de l’autorité et essayer de savoir s’ils font une différence entre l’autorité d’une femme et celle d’un homme, s’ils pensent que le sexe de l’enseignant a un effet sur son autorité et sur leurs attitudes en classe. Certains préjugés et stéréotypes vont certainement ressortir et me permettront d’analyser l’impact du genre sur l’autorité des enseignants.

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II. Objet de recherche et problématique

Mon projet de recherche s’inscrit dans le domaine des relations intersubjectives avec une orientation sociologique, puisqu’il s’intéresse aux dimensions humaines, aux relations entre enseignants et élèves et plus spécifiquement concernant le point de vue de l’autorité et de la discipline. A travers mon objet de recherche, je questionne la compréhension de l’autorité par rapport au genre. Je me limite à un échantillon de huit adolescents avec qui j’approfondirai la question de l’autorité professorale. Je parlerai de leurs expériences et obtiendrai certaines de leurs opinions qui me permettront de voir si le sexe du professeur a des impacts sur son autorité en classe. J’étudierai le vécu de ces jeunes, leurs discours, leurs sentiments, avis et ressentis de manière à voir si les liens existent entre l’autorité et le genre. Le titre de mon mémoire est le suivant :

Genre et autorité : Quels liens ? Les enseignant-e-s vu-e-s par les adolescent-e-s.

2.1 Questions de recherche :

Mes questions de recherche sont les suivantes :

- Quels sont les points de vue des jeunes sur la question de l’autorité et en particulier concernant celle de leurs professeurs ?

- De quelles pratiques de discipline et d’attitudes pédagogiques les adolescents sont-ils conscients ?

- Quelles variables peuvent avoir une influence sur l’autorité des enseignants, selon les adolescents ?

- Quel lien existe-t-il entre l’autorité et le genre ?

- Quelles différences d’opinions entre une adolescente et un adolescent sur la question de l’autorité et du sexe de leurs professeurs?

- Qu’est-ce que les adolescents pensent de l’autorité d’un remplaçant ?

Je vais entendre un certain discours d’adolescents, certains points de vue qui seront subjectifs et dépendent de leur vécu et de leurs expériences. Je vais essayer de comprendre ce qu’ils disent, me représenter ce qu’ils pensent afin de creuser leurs propos dans l’analyse.

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2.2 Hypothèses de recherche :

Les hypothèses que je vais formuler sont liées à mon vécu personnel en tant qu’élève, stagiaire et étudiante. Elles surviennent suite à des questionnements partagés avec d’autres étudiants en LME, FAPSE ou psychologie, suite à des discussions entretenues avec les professeurs de l’université, avec les formateurs de terrain ou universitaires, ou avec différents professionnels de l’enseignement et de l’éducation.

Je pense qu’un enseignant arrive à faire respecter les règles et à se faire respecter par les jeunes, quand il sait utiliser et gérer l’autorité qui lui est conférée. Si l’enseignant arrive à garantir un cadre juste et cohérent, s’il montre qu’il est le garant de la discipline, et s’il fait preuve d’une bonne autorité, il arrivera à faire respecter les règles et à transmettre son savoir de la meilleure façon possible. Il doit mettre en place des règles dont les adolescents et jeunes sont conscients, et dès le moindre écart, il est nécessaire qu’il sanctionne, selon les dires de plusieurs enseignants. Quand les élèves obéissent aux règles, ils les respectent et respectent leur enseignant car c’est celui qui les a instauré et qui les fait respecter de manière juste, ferme et cohérente par la discipline et par son autorité. Je pense que faire figure d’autorité et instaurer des règles suffit pour tenir une classe, en début d’année en tout cas. Effectivement, il est nécessaire de faire preuve d’une certaine dureté et fermeté qui est indispensable au début mais qui ne suffit pas pour asseoir son autorité et instaurer une relation plus pédagogique et éducative. L’autorité et l’attitude de l’enseignant envers ses élèves évoluent et se modifient au cours de l’année. Effectivement, je pense que sur le long terme le respect des règles et l’écoute des jeunes sont dus à la relation que leurs enseignants entretiennent avec eux et vice- versa. Il est nécessaire qu’une relation de confiance et de respect mutuel s’établisse au cours de l’année, ce qui constitue un travail supplémentaire de la part de l’enseignant mais qui lui permet de créer une vraie relation pédagogique.

Je pense aussi que ce que les parents disent des professeurs à leurs enfants a un impact sur leur comportement et le respect qu’ils montrent à ces derniers. Si l’autorité de l’enseignant est remise en question dans la famille par ses parents et que ces derniers soutiennent leur enfant, le jeune va peut-être plus facilement remettre en cause son autorité et moins respecter les règles. Effectivement, une professeure du collège m’a dit que la conception de l’autorité dépendait de la culture familiale. Elle m’a donné l’exemple d’une famille serbe avec qui elle a certains problèmes par rapport à leur adolescent. C’est un jeune de 14 ans qui ne l’écoute pas et ne la respecte pas. Elle a donc essayé de parler avec lui et il a justifié son comportement en

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16 lui disant que dans sa famille c’est son père qui travaille, que les femmes, sa sœur et sa mère, sont à la maison et donc qu’une femme qui travaille, il ne la respecte pas. Dans sa culture, la femme n’a pas son mot à dire. Ce n’est donc pas normal, pour lui, que son enseignante travaille et lui donne des conseils ou des sanctions. Il se peut que le recours à la culture par certains adolescents soit un prétexte qui justifie leurs comportements. Ce n’est pas parce qu’ils constatent qu’ils ont une enseignante qu’ils sont indisciplinés mais ils sont indisciplinés et l’expliquent par le fait que ce soit une femme. Ils estiment ainsi que leur culture justifie leur conduite ou que cela pourrait servir à la justifier. La culture peut donc constituer un prétexte et est souvent prise comme une vérité. Nous pouvons cependant nous demander ce qu’il est possible de faire face à un tel comportement et une telle représentation de la femme et du non respect de la personne. L’enseignante a essayé de discuter avec lui, de lui faire comprendre que c’était ainsi dans sa famille mais que d’autres cultures et familles la vision n’est pas la même et qu’elles fonctionnent différemment. Mais l’adolescent ne réagit pas, ce qu’elle lui explique lui est complètement égal. Il sait qu’il reproduira le schéma familial : lui travaillera et sa femme restera à la maison. Des valeurs culturelles et familiales lui ont été inculquées et sont bien ancrées dans sa tête. Il utilise et se sert de ces valeurs pour ne pas respecter l’autorité de son enseignante et pour montrer un comportement insolent. L’enseignante ne peut se tourner vers les parents puisqu’ils soutiennent le comportement de leur enfant, qu’ils jugent normal étant donné leurs valeurs culturelles et familiales. L’enfant se sent soutenu et rien ne l’empêche d’agir autrement. Dans ce cas, le respect de l’autorité liée à la question du genre est donc lié à sa culture. Je peux donc faire l’hypothèse que le sexe du professeur a un impact quant à l’obéissance et au respect de certains élèves de cultures différentes, dans lesquelles l’homme a un statut supérieur et a donc de l’autorité alors que la femme n’en a pas.

Un adolescent peut également se montrer irrespectueux ou indiscipliné en fonction de sa manière de se représenter l’école et les professeurs. Certains se rendent compte des enjeux et vont écouter, suivre en cours pour réussir, alors que d’autres ne doivent pas encore en voir l’importance. Il y a donc la maturité de l’adolescent qui entre en ligne de compte et a un impact sur l’attitude de certains en classe et face à leurs enseignants. Je pense aussi que la représentation du jeune de l’école est liée à l’environnement social dans lequel il évolue. Je pense à cette même professeure du collège qui enseigne également au cycle et m’a raconté deux autres cas d’élèves. Ces deux élèves ne s’intéresse pas du tout à l’école, n’écoutent pas, ne font pas leurs devoirs, sont en échec scolaire. Elle a essayé de discuter avec eux pour comprendre leur attitude, les aider et essayer de modifier leur vision de l’école. Mais ces

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17 derniers n’en ont que faire et lui expliquent que leurs frères dealent et qu’ils n’ont donc pas besoin de l’école pour gagner leur vie car ils feront de même. L’enseignante se trouve dans une impasse et ne sait comment en sortir sachant que le système scolaire lui-même ne sait comment répondre à ces comportements. Elle rajoute que le directeur les renvoie, qu’ils dealent le temps du renvoi et qu’ils reviennent leur attitude inchangée. L’hypothèse que je peux donc formuler est, que la vision de l’autorité est différente selon le vécu du jeune, sa situation familiale et son environnement social, sa réussite scolaire et sa maturité, qui ont un impact sur la vision qu’il a de l’école.

Une autre expérience de vie qu’un enseignant a partagée avec moi montre bien aussi l’importance et l’impact du vécu des enfants sur leurs attitudes en classe et sur leur rapport à l’autorité d’un professeur selon son sexe. Cet enseignant travaillait dans une école de ville dans un quartier très multiethnique. Un jour, un adolescent de 12 ans est arrivé dans l’école, il n’avait jamais été scolarisé, travaillait et habitait dans une plantation et est arrivé comme requérant d’asile avec son père. Ce dernier a eu beaucoup de mal à comprendre les règles de l’école et de la classe ainsi qu’à obéir n’ayant pas l’habitude de ce milieu. Le troisième jour d’école, il s’enfuit dans le préau et courut se réfugier dans un arbre. Son enseignante essaya de le faire descendre, le gronda, cria mais rien à faire, il ne descendait pas. Alors elle demanda de l’aide à son collègue enseignant. Là l’élève mit quelque temps à descendre mais le fit. Il n’écoutait pas la femme mais l’homme. Pour lui, il n’était possible d’obéir qu’à des hommes étant ainsi dans sa culture. De plus, l’environnement dans lequel il a grandi ne lui a pas appris à écouter des femmes, qui étaient soumises à l’homme. Il changea donc de classe et fut accueillit dans celle de l’enseignant, son comportement avec l’autre enseignante n’étant pas supportable et gérable pour elle. Cet élève distingue et différencie clairement les rôles féminins et masculins en accordant à l’enseignante et à la femme en générale, aucune autorité.

Cette expérience montre donc l’impact du vécu, de l’éducation et de la culture de l’élève sur la vision qu’il a construite de l’homme et de la femme, ainsi que sur l’importance de la variable sexe concernant l’autorité d’un enseignant.

Ensuite chez les adolescents, il se peut que certaines représentations stéréotypées de sexe émergent et se lient à celles de l’autorité. Peut-être que des adolescents vont répondre qu’il est plus facile pour un homme que pour une femme d’enseigner. Cela parce qu’ils ont peut-être un enseignant homme qui a la voix grave, une posture imposante, qui sait se faire respecter et une enseignante qui a une petite voix, qui est petite et qui n’arrive pas à se faire respecter. Ces deux enseignants vont renforcer les stéréotypes chez le jeune et montrer qu’un homme a plus

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18 d’autorité. Il se peut aussi que dans certaines familles des adolescents, le père soit le symbole de l’autorité et ils diront alors que les enseignants doivent être plus sévères, car les hommes sont en général plus sévères que les femmes et qu’il est donc plus facile d’être du sexe masculin pour enseigner. Pour eux, cette représentation qu’ils ont vient de l’image socialement construite des rapports de sexe et des différences sociales, ainsi que de l’image véhiculée dans leur famille, qui montre que l’homme est celui qui détient et représente l’autorité et la sévérité. L’autorité parentale est donc à mettre en lien avec les idées, avis et opinions des jeunes sur la question de l’autorité familiale.

Peut-être que les adolescents arriveront à se détacher de ces stéréotypes et montreront par leur vécu et leurs discours qu’être un homme ou une femme n’a pas d’influence quant à leur autorité. Le sexe et le genre n’auront donc pas d’impact sur l’autorité d’un professeur en classe. Certains penseront peut-être que l’autorité dépend de la personnalité propre de l’enseignant et de sa manière de fonctionner. Je me souviens avoir eu peur de mon enseignant homme de 5P, c’était sa dernière année d’enseignement, il était donc âgé et très impressionnant. Il était grand et possédait une grosse voix. Ce professeur confirmait les stéréotypes, il savait très bien se faire respecter, nous lui obéissions par peur des sanctions. Il était très sévère, mais juste et plutôt marrant. J’ai également eu des enseignantes au collège qui étaient aussi impressionnantes que lui au niveau de leur autorité, de la discipline et du respect que les élèves avaient envers elles. En constatant ceci, une de mes hypothèses est que l’autorité et le respect ne sont pas liés au sexe de l’enseignant pour les élèves, mais bien à sa façon de fonctionner, à la relation qu’il instaure avec eux.

Par contre, il se peut qu’en début d’année, le genre et le sexe de l’enseignant aient un impact sur l’attitude des élèves. Je pense que c’est au fur et à mesure de la prise en charge et de l’année que la vision change et la relation évolue. Les élèves apprennent à connaître leur enseignant et sa manière de fonctionner comme celui-ci apprend à connaître ses élèves. Mais si, par exemple, le premier jour, les adolescents aperçoivent un homme costaud, grand et barbu qui s’approche, certains vont peut être se dire « ah ! Et bien avec celui-là on risque de ne pas rigoler ! » A première vue, ce professeur peut paraître bourru, sévère, et les jeunes se feront peut-être petit et silencieux, mais dès qu’il va s’exprimer, en fonction de ses gestes, de ce qu’il dit et montre, les élèves sauront quel genre de professeur il est. Il en est de même avec une enseignante frêle et jeune par exemple. Ce qui découle comme hypothèse est que les représentations des élèves sur le genre et l’autorité ont plus d’impact en début d’année quand ils ne connaissent pas encore leurs professeurs qu’en cours d’année. Effectivement, plus les

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19 élèves avancent dans le temps plus une relation réelle se crée entre les élèves et leurs professeurs. Les représentations des élèves par rapport au sexe de la personne vont diminuer et leurs points de vue concernant l’autorité seront plus liés à la personnalité et au fonctionnement propre de leurs enseignants.

Une de mes hypothèses est aussi que les adolescentes et les adolescents ont peut-être des représentations de l’autorité et du genre différentes. Cela peut être dû je pense à leur sexe propre : garçon ou fille. Ces différences pourraient s’expliquer par leur éducation et leur socialisation mais également par le fait que la société, les familles, les enseignants, les employeurs, n’attendent pas les mêmes attitudes et comportements de la part d’une femme ou d’un homme. Leurs rôles sociaux sont différents et leur vision des choses également. Une femme, par exemple est vue comme plus douce, plus maternelle, plus patiente et un homme est vu comme plus flexible, plus autoritaire, plus ambitieux. Alors peut-être que ces attentes se reflètent dans la vision que se font les enfants ou les adolescents des enseignants, dans les rôles qu’ils leur attribuent et dans leurs attitudes, gestes et comportements, et cela en fonction de leur sexe propre. Les filles, par exemple, sont vues comme plus calmes et attentives en cours et les garçons comme plus perturbateurs. Peut-être qu’ils donneront des exemples de comportements différents selon leur sexe.

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III. Dispositif de recherche et type d’analyse

3.1 Justification du choix méthodologique :

J’ai choisi, comme méthode de recherche, l’entretien car il permet d’échanger avec d’autres individus, d’obtenir des opinions et des idées. Je m’intéresse aux différentes conceptions et représentations des adolescents sur l’autorité en lien avec la question du genre. Il est donc important d’aller interviewer ces adolescents pour les rencontrer, les entendre et obtenir leurs opinions par rapport à ce qu’ils vivent et aux pratiques qu’ils peuvent observer chez leurs enseignants. Ils peuvent me décrire leurs expériences, leurs ressentis lors de l’entretien qui sera semi-directif. Comme le disent De Ketele et Roegiers (1996) : « [une interview est] dite semi-dirigée lorsque l’interviewer prévoit quelques questions à poser en guise de point de repère. » (p.19). J’ai donc essayé de construire un guide d’entretien de manière à pouvoir laisser la parole à l’interviewé, à le laisser parler librement sur le sujet. J’ai créé des questions qui n’induisent, le plus possible, pas les réponses pour lui permettre d’exprimer ses opinions et de partager son vécu. J’ai tout de même essayé de guider l’interviewé de sorte à ne pas trop partir à la "dérive" et de manière à obtenir tout de même des réponses assez précises.

J’ai pu effectuer quelques petites interviews ouvertes réalisées de manière informelles afin de construire mon guide. J’ai ensuite pu effectuer deux entretiens exploratoires pour vérifier si mes questions étaient pertinentes, pour finir avec mes huit entretiens semi-directifs. Cette méthode permet des allers-retours permanents entre les différents entretiens, grâce aux analyses progressives. J’ai donc pu modifier certaines questions, approfondir une thématique et m’adapter aux interviewés. Au début de l’entretien, il est nécessaire d’instaurer un climat de confiance et de montrer que nous sommes présents pour l’écouter, le rassurer en lui disant qu’il n’y a pas de paroles ou de pensées fausses. L’interviewer doit assurer un cadre de confidentialité pour que le sujet se sente à l’aise et puisse s’exprimer librement.

J’ai hésité quant au choix à faire concernant la méthode à utiliser. Le questionnaire me paraissait également une méthode envisageable car il me permettait d’interroger un plus grand nombre de personnes et d’avoir un échantillon plus conséquent. Or, en réfléchissant à ma

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21 problématique, je trouvais important de rencontrer la personne, d’échanger avec elle, d’obtenir des informations qualitatives concernant son vécu plutôt que des réponses plus quantitatives. Le questionnaire était donc, pour moi, une méthode trop fermée qui ne permettait pas l’interaction, l’approfondissement et la communication. L’entretien me correspondait finalement mieux car il permettait aux sujets de s’exprimer et à l’interviewer d’interroger, de réguler à chaud, de demander des explications supplémentaires au fur et à mesure du récit, afin d’obtenir des réponses complètes, qui répondent à ma problématique.

3.2 Choix des sujets interrogés :

La population interviewée est constituée d’adolescents de 15 à 18 ans. Au départ, je souhaitais interviewer de jeunes élèves du primaire, mais en approfondissant ma problématique du point de vue du genre, je me suis rendu compte que ces jeunes élèves risquaient de ne pas avoir la maturité nécessaire pour me répondre. Comme le disent Blanchet et Gotman (2007) : « il est nécessaire de sélectionner les catégories de personnes […] et déterminer les acteurs dont on estime qu’ils sont en position de produire des réponses aux questions que l’on se pose. » (p.

46). J’ai fait l’hypothèse que les adolescents prennent plus de recul que des élèves du primaire parce qu’ils ont plusieurs enseignants dans chaque matière et ils changent, en plus, souvent d’une année à l’autre. De plus, les jeunes de 15-18 ans sont des personnes qui construisent leur identité propre et remettent plus facilement en cause l’autorité familiale ainsi que professorale. Ils peuvent donc me dire ce qu’ils trouvent juste et cohérent chez un enseignant ou injuste et incohérent, en fonction de ce qu’ils vivent, éprouvent et ressentent. C’est pourquoi je m’intéresse aux avis et opinions de cette tranche d’âge.

Je pense effectivement le choix de cette tranche d’âge adéquat étant composée d’adolescents suffisamment matures. Je pense par exemple aux pratiques de disciplines : ils ont assez de recul et de vécu pour être conscients de ce qui se déroule en classe et de ce que leur différents enseignants mettent en place pour pouvoir donner leur cours et créer une bonne ambiance de classe. Ils vont donc pouvoir partager certaines règles spécifiques qu’ils doivent respecter et relever certaines attitudes que leurs professeurs utilisent pour se faire respecter et montrer qu’ils ont de l’autorité. Ils pourront également me dire ce qui ne fonctionne pas chez certains professionnels de l’enseignement qui n’arrivent pas à se faire entendre.

J’ai, de plus, effectué une sélection précise, pour ce qui concerne les sujets à interviewer, en fonction de leur scolarité actuelle et de leur lieu d’apprentissage. J’ai interrogé quatre

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22 apprenants du collège, dont un qui se trouve en France, une dans un collège privé et les deux autres dans deux collèges publics différents de Genève. J’ai également interviewé une adolescente de l’école de commerce, un du CEPTA, une du SCAI2 et un du lycée professionnel, en France, en espérant obtenir des points de vue différents selon leur vécu et leur lieu d’apprentissage et de développement.

3.3 Variables possibles lors du déroulement des entretiens :

La relation que l’interviewer entretient avec les interviewés peut influencer le discours produit. Si la relation est amicale, par exemple, il est possible que l’interviewé se confie plus ou ose dire les choses plus facilement à l’interviewer. Mais il peut tout aussi bien ne pas oser dire les choses de peur de se dévoiler et d’exprimer des avis qu’il sait qu’ils peuvent déplaire à l’interviewer. Donc l’information reçue peut être biaisée. Si le chercheur et l’interviewé ne se connaissent pas, il est possible que ce dernier n’ose s’exprimer par timidité ou par gène.

C’est pourquoi il faut être conscient que le niveau de connaissance entre l’interviewé et l’interviewer a un impact sur le discours produit. L’interviewer se doit d’assurer explicitement un cadre scientifique d’anonymat et de confidentialité, ainsi que d’adopter une attitude la plus rassurante possible pour mettre à l’aise l’interviewé et instaurée un climat de confiance.

Effectivement comme le dit Kaufmann (2007), « l’informateur gère son degré d’implication dans l’entretien, et celui-ci dépend en grande partie de la confiance qu’il fait à l’enquêteur. » (p.45). Pour de ce qui est de mes entretiens, je connais tous les sujets interrogés.

Effectivement, ce sont des adolescents avec qui je suis partie en camp de vacances, au minimum dix jours. J’ai donc pu instaurer une relation d’amitié et de confiance avec eux en tant que monitrice. Je pense qu’ils seront plutôt à l’aise pour répondre bien que certains soient quelques peu timides et sûrement intimidés par le cadre et l’enregistreur et peut-être perturbés par certaines questions.

De plus, entre en ligne de compte le facteur questions. Comme le disent Blanchet & Gotman (2007) les questions posées par l’interviewer influencent le discours. L’interviewer doit pouvoir guider l’entretien mais sans trop le diriger. Il doit savoir écouter et accepter la position et les idées du sujet. Le chercheur doit savoir relancer le discours, c’est essentiel. Les relances permettent d’obtenir des informations supplémentaires, elles se basent sur le discours

2 Service des Classes d’Accueil et d’Insertion.

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23 de l’interviewé qui peut expliciter, par exemple, d’avantage son point de vue. Le sujet de mon mémoire et donc les questions, vont toucher les individus interviewées vu que le thème les concerne et que je leur demande de parler de leur vécu. Ils vont donc parler en « je » et de manière subjective. Certains peuvent se sentir mal à l’aise, gênés de parler de leur ressenti personnel. D’autres au contraire peuvent se sentir confiants de s’exprimer sur ce qu’ils connaissent et les touchent. L’interviewer doit prendre cette variable de subjectivité en compte et analyser, comme il le peut le comportement que l’interviewé adopte et les signes que ce dernier transmet lors de l’entretien.

3.4 Les questions du guide d’entretien :

 Qu’est-ce que l’autorité pour toi ? Peux-tu me donner une définition ou des mots- clefs ?

 Qu’est-ce pour toi un enseignant qui a de l’autorité ? A quoi l’autorité lui sert-elle ?

 Peux-tu me parler d’un de tes professeurs qui a de l’autorité et un qui n’en a pas ?

 Qu’est-ce que tes enseignants font et mettent en place pour instaurer leur autorité et pour faire la discipline ?

 Penses-tu qu’il est plus facile d’être un homme ou une femme pour enseigner aujourd’hui ? Pourquoi ?

 Penses-tu que le sexe du remplaçant a un impact sur son autorité et sur votre comportement ?

 (Que pensent tes parents de tes enseignants ? Quelle autorité avaient-ils ?)

La question se trouvant entre parenthèses est une interrogation que je n’ai posée qu’à certains adolescents. Ces quelques questions me servaient de guide, après selon le récit, les dires, le discours des adolescents, je leur en posai d’autres. J’ai demandé par exemple à l’un d’entre eux, Théo, s’il pensait que le nombre d’élèves avait un impact sur l’attitude et l’autorité de leurs professeurs et s’il était plus facile pour ces enseignants de les cadrer.

3.5 Traitement des données :

J’ai retranscrit mes huit entretiens, qui se trouvent en annexe, en observant une certaine rigueur. Par exemple, les propos de l’interviewer sont en italiques pour les distinguer de ceux

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24 de l’interviewé afin de faciliter la lecture. J’ai ensuite décidé de rétablir la ponctuation en rajoutant les points finaux, les points d’interrogation et les virgules pour pouvoir faire une

« lecture de l’oralité ». Je n’ai pas modifié les propos tenus pas les sujets, j’ai par exemple laissé les mots tels que « foutre » ou « bordel » bien qu’ils soient familiers mais ils font partie du discours de l’interviewé. Or, il est important d’écrire comme ils ont parlé, j’ai donc aussi transcrit les « Ah ! ».

J’ai mis trois petits points : … pour indiquer que le temps d’attente de la réponse était assez important, pour montrer le fait que les sujets réfléchissaient. J’ai également rajouté les rires, entre parenthèses, car ils peuvent être révélateur de stress, de complicité ou d’humour. Au début de chaque entretien, j’ai signifié le nom fictif de la personne, son âge, son établissement scolaire et son niveau.

Pour recueillir mes données et les analyser, je me sers d’un tableau à l’aide duquel je sépare les différents points traités par les adolescents. J’utilise un code de couleurs pour pouvoir m’y retrouver. Par exemple, pour traiter de la question une, qui concerne l’autorité en générale vue par les sujets, je prends la couleur jaune et surligne tout ce qui traite de cette question dans les entretiens, pour trouver les données adéquates et correspondantes. J’ai fait de même pour les autres questions, pour la deux, la couleur bleue et ainsi de suite. Il m’est nécessaire de lire plusieurs fois les entretiens afin de cibler mon attention sur des phrases ou des idées clefs du discours des jeunes et pour pouvoir les réutiliser et les citer dans mon analyse.

Cette recherche qui se base sur le discours, le vécu et les représentations des adolescents, qui constituent un échantillon réduit, amène une analyse qualitative des données. Effectivement comme le dit Mucchielli (1991),

« Les méthodes qualitatives sont des méthodes des sciences humaines qui recherchent, explicitent, analysent des phénomènes (visibles ou cachés). Ces phénomènes, par essence, ne sont pas mesurables (une croyance, une représentation, un style personnel de la relation à autrui, une stratégie face à un problème, une procédure de décision, etc.), ils ont les caractéristiques des “faits humains“. » (p.3)

En effet, ce que me dira un adolescent va dépendre de plusieurs variables qui sont sa situation familiale, son environnement social, son éducation, son lieu de vie, son école et la vision qu’il en a, son âge et sa maturité, sa culture et son sexe. Ces variables vont certainement être à l’origine des différentes visions de l’autorité et du genre, ainsi que de la discipline.

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25

IV. Cadre théorique

Les concepts théoriques que je vais développer dans cette partie sont : le genre et l’autorité.

Ces deux concepts sont centraux et constituent la base de ma recherche. Effectivement pour pouvoir répondre à mes questions de recherche et faire une analyse pertinente, il est nécessaire que j’acquière des connaissances scientifiques sur l’autorité et sur le genre. Ces deux concepts se découpent en plusieurs sous-concepts. Je vais commencer par faire la différence entre le sexe et le genre, puis traiter la question de la socialisation différenciée, de l’identité sexuée, des stéréotypes de sexe et des différences culturelles en lien avec le genre.

Le concept de l’autorité se partage en plusieurs autorités, que je vais expliquer, qui sont celle de statut, l’autoritarisme, la permissivité et l’autorité éducative. Je développerai ensuite les concepts de discipline scolaire, de loi et règles, de respect et d’autorité naturelle.

4.1 Sexe et genre :

Le mot genre vient de la traduction en anglais de gender. Ce terme est apparu et a été diffusé dans les années 1980. Choque (Ed.), (2008) dans le minidico des idées féministes définit le genre ainsi :

« Il veut mettre en évidence le fait que les rôles féminins et masculins ne sont pas définis par les sexes (caractères biologiques), mais évoluent différemment suivant les situations sociales, culturelles et économiques. Les rapports de genre ont une base culturelle, ils sont définis par la société qui en détermine les activités, les statuts, les caractéristiques psychologiques, etc.

Comme concept, le genre amène une pensée complexe basée sur la construction des rapports sociaux et la répartition des rôles féminins et masculins, leur évolution dans le temps et dans l’espace où des facteurs internes et externes les transforment en permanence. » (p.21)

Le mot sexe concerne donc le sexe génétique avec lequel chaque individu naît. Alors que le genre d’une personne se construit socialement, culturellement et économiquement et comme Isabelle Collet le décrit, il constitue un ensemble de normes de sexe différenciatrices et hiérarchisantes, attribué aux individus indépendamment de leur sexe d’état civil. Comme le dit Hurtig, Kail et Rouch (2002) le genre est appelé en sociologie le sexe social.

« Le mot genre est donc à distinguer du mot sexe a proprement parlé. Chaque être humain possède un sexe dit génétique, c’est-à-dire l’appareil génital qui nous est attribué à la

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26 naissance que l’on sépare du sexe social, le genre. Or, le sexe est traditionnellement considéré comme un donné biologique qui dichotomise le genre humain en deux catégories bien distinctes dont les attributs psychologiques et sociaux découlent naturellement de la différence biologique. Ces attributs se trouvent eux-mêmes dichotomisés dans le but de délimiter les sphères du masculin et du féminin. Le sexe biologique se voit conférer le statut d’un principe explicatif. » (p.11)

Effectivement en fonction du sexe biologique, les rapports sociaux et les rapports sociaux de sexe déterminent quels faires et quels savoirs sont assignés aux individus de classe, de sexe, d’origines différentes. Ce principe explicatif dit quels sont les rôles sociaux qui sont légitimes ou interdits en fonction du sexe de la personne. De plus, comme le dit Le Maner-Idrissi (1997), « cette dichotomie masculin-féminin qui apparaît ainsi dans l’ordre social est universelle. » (p.10). Cet auteur parle également de l’étude du fonctionnement de nombreuses sociétés réalisée par l’ethnologue Margaret Mead, qui constate « l’existence universelle de la répartition des rôles selon le sexe dans des sociétés bien différentes. Toute culture dispose d’un modèle de référence relatif à la distribution des rôles selon que les individus soient hommes ou femmes. » (Cité par Le Maner-Idrissi, p.10). Comme Hurtig, Kail et Rouch (2002) le rajoutent, les fondements économiques et idéologiques des sociétés occidentales reposent sur la bi-catégorisation sexuelle. Ils continuent leurs propos en disant qu’il est impossible de nier qu’il existe des différences entre les individus mais que cependant « ces différences sont difficilement réductibles à deux catégories distinctes. » (p.28).

Lors du cours : Genre et éducation, d’Isabelle Collet, nous avons pu voir que les données génétiques avaient un impact et des effets beaucoup moins importants que la dimension psychologique. Cela revient à dire que le genre a des effets et des impacts bien plus significatifs que le sexe biologique sur les individus, sur leur manière d’agir et de vivre.

Isabelle Collet nous a montré un reportage d’Agnès Bert, qui se nomme: « Tu seras un homme ma fille ». Dans ce documentaire nous sont présentées quatre femmes vivant en Albanie et qui se considèrent comme étant des hommes. Elles font des métiers qui, dans leur pays, ne sont pas tellement réservés aux femmes, comme chauffeur, paysan, mécanicien d’un barrage. Une d’entre elles a été élevée comme un garçon et un homme par ses parents. Elle était la seule fille restée vivante et pour qu’elle puisse avoir l’héritage de la ferme étant l’aînée, son père l’a élevée comme un homme. Cette femme n’a su qu’elle était femme que vers l’âge de 19 ans quand ses règles ont commencées. Elle explique que dans son pays on ne discute pas de sexe, donc pour elle, dans sa tête, elle était un garçon jusqu’à ce qu’elle

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27 s’interroge et que ces parents lui expliquent la vérité. Mais cette femme est toujours restée homme dans sa tête, c’est-à-dire qu’elle continue à faire les ouvrages des hommes à la ferme.

Elle s’habille comme un homme, fume la pipe et a des gestes peu féminins. Les trois autres cas diffèrent légèrement mais ils montrent la part importante du psychique, de l’intégration des normes sociales sexuées et diminuent l’importance des facteurs génétiques. Ce documentaire montre que le rôle social que l’individu adopte n’est pas contraint par la biologie. Or l’autorité est un rôle social et n’est donc pas contraint par la biologie.

Ce terme genre désigne donc une construction sociale qui détermine notre identité sexuée en fonction de l’environnement extérieur, tel que la famille, l’école, les relations entre pairs.

Toutes nos interactions et notre éducation font partie de notre vécu, des expériences et ont un impact fort sur notre sexe social, sur l’intégration de nos rôles féminins ou masculins. Le genre est un système de normes qui est transmis aux individus par le monde extérieur, par la société, par les différentes relations. Comme le dit Simone de Beauvoir (1949), « on ne naît pas femme, on le devient » (cité par Roventa-Frumusani, 2009, p.32). Cette citation montre que devenir femme est une construction culturelle et un choix personnel, toute femme n’étant pas féminine. On devient femme par les comportements, les pratiques que l’on assimile, par les discours que l’on tient. Les normes féminines et masculines diffèrent donc et se basent sur des représentations sociales stéréotypées véhiculées tout au long de notre vie par la société, les institutions, les comportements. Les filles et les garçons ne sont pas élevés et éduqués de la même manière, c’est ce qui s’appelle la socialisation différenciée.

Dès leur plus jeune âge les bébés ou enfants apprennent à faire des distinctions entre les hommes et les femmes par l’observation des tâches et des rôles attribués au sexe. Ce phénomène se nomme la construction de l’identité sexuée. Je vais commencer par expliquer la socialisation différenciée pour ensuite enchaîner avec l’identité sexuée.

4.1.1 La socialisation différenciée

La socialisation différentielle entre les sexes est un système qui maintient une double socialisation, soucieuse de préserver la différence sexuelle, et qui transmet des représentations stéréotypées. La société, c’est-à-dire les parents, les enseignants, les pouvoirs publics, les patrons d’entreprise ont des attentes et des attitudes différentes selon les sexes. Prenons l’exemple de parents de nouveau-nés. L’enfant avant même d’être né a un sexe, c’est-à-dire

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