• Aucun résultat trouvé

NÉCROSE DU CORTEX CÉRÉBRAL DES RUMINANTS, THIAMINE ET SOUFRE

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "NÉCROSE DU CORTEX CÉRÉBRAL DES RUMINANTS, THIAMINE ET SOUFRE"

Copied!
6
0
0

Texte intégral

(1)

COMMUNICATION

NÉCROSE DU CORTEX CÉRÉBRAL DES RUMINANTS, THIAMINE ET SOUFRE

POLIOENCEPHALOMALACIA IN RUMINANTS, THIAMINE AND SULPHUR

Par Claude JEAN-BLAIN(1) (Communication présentée le 1er avril 2010)

La polioencéphalomalacie (nécrose du cortex cérébral, NCC) est un syndrome qui touche tous les rumi- nants. Elle a d’abord été considérée comme une carence en thiamine induite par le développement de thiaminases dans le tube digestif, mais cette étiologie a été contestée ultérieurement. L’excès de soufre dans la ration est une autre étiologie établie plus récemment. Les micro-organismes du rumen réduisent ce soufre en sulfures, responsables des lésions cérébrales. Mais la NCC est également sus- ceptible de se déclarer dans des situations alimentaires apparemment sans apport excédentaire de soufre. Il est vraisemblable que d’autres étiologies, non clairement identifiées à ce jour, liées ou non à une carence en thiamine, existent. Dans cet article, ces différentes étiologies sont discutées, et le rôle de l’excès de soufre alimentaire sur la production de thiamine dans le rumen, ainsi que les per- turbations qu’il est susceptible d’exercer sur le métabolisme de cette vitamine sont envisagés. Une hypothèse est formulée sur le désaccord existant entre cette étiologie et, dans certains cas, le rôle thérapeutique de la thiamine à doses élevées.

Mots-clés: nécrose du cortex cérébral, polioencéphalomalacie, thiamine, sulfates, sulfures, bovins, mouton, chèvre.

R

ÉSUMÉ

(1) E-mail: claude.jeanblain@wanadoo.fr

Polioencephalomalacia (cerebrocortical necrosis or CCN) is a syndrome that affects all types of rumi- nants. It was at first attributed to a thiamine deficiency induced by the development of thiaminases in the digestive tract, but this etiology was later contested. Excess sulphur in the diet was established more recently as another etiology. The rumen microflora reduces these sulphur compounds into sul- phides, which cause brain lesions. However, CCN also occurs in nutritional situations with no appar- ent excess of sulphur. It is likely that other causes, as yet unidentified and related or not with a thi- amine deficiency, lie behind this syndrome. This paper discusses these various etiologies, the role of excess dietary sulphur on thiamine production in the rumen, and the disruptions it may cause on the metabolism of this vitamin. A hypothesis is suggested on the discrepancy between this etiology and, in some cases, the therapeutic effect of high doses of thiamine.

Key words : cerebrocortical necrosis, polioencephalomalacia, thiamine, sulphur (sulfur), sulphides, cattle, sheep, goat.

S

UMMARY

(2)

INTRODUCTION

La nécrose du cortex cérébral (NCC) ou polioencéphalomalacie est un syndrome nerveux des ruminants, caractérisé et décrit pour la première fois au Royaume Uni (Terlecki & Markson, 1961), puis en France (Tournutet al.1967). Elle est répandue dans le monde entier et affecte toutes les espèces de ruminants domestiques, bien qu’elle soit surtout fréquente chez les bovins et les ovins. On l’a décrite également chez certains ruminants sauvages. Elle affecte les animaux sevrés, sans distinction de sexe ou de race. En France, elle atteint presque exclusivement les jeunes ruminants de deux à sept mois pour les ovins, de trois à trente mois pour les bovins, élevés dans un contexte d’ali- mentation intensive. (Jean-Blain 1995). Elle a d’abord été consi- dérée exclusivement comme une carence conditionnée en thiamine. Puis ce syndrome a été mis en relation avec un excès de soufre alimentaire apporté soit par des eaux sulfatées, soit par des aliments très excédentaires en soufre par rapport aux besoins.

Le but de cette communication est de faire le point sur ces dif- férentes hypothèses étiologiques et sur les travaux que nous avons poursuivis sur ce sujet de 1986 à 1997 dans le cadre de notre Unité Associée INRA « Physio-pathologie du rumen ».

L’HYPOTHÈSE « CARENCE EN THIAMINE »

On sait, depuis 1928, que les ruminants n’ont aucune dépen- dance alimentaire pour les vitamines du groupe B et en parti- culier pour la thiamine (vitamine B1), que la micro-population du rumen synthétise efficacement quel que soit le régime ali- mentaire. Ainsi, même avec un régime synthétique dépourvu de thiamine, les besoins sont couverts. La synthèse de thiamine dans le rumen est soumise à un effet de rétro-inhibition, si bien qu’elle est forte lorsque l’apport alimentaire est nul ou faible dans le cas contraire. Les premiers auteurs ayant étudié la NCC ont montré que chez les animaux atteints, l’administration paren- térale d’une quantité très élevée de thiamine avait, dans de nom- breux cas, un effet curatif et qu’il s’agissait vraisemblablement d’une carence en thiamine. On a d’abord expliqué cette carence par l’apparition de thiaminases dans le tube digestif, plus importante chez les animaux atteints de NCC que chez les ani- maux sains (Edwinet al.1971 a et b). Cette étiologie, pourtant au premier abord évidente, a été contestée par des travaux ulté- rieurs. En effet, la synthèse ruminale de thiamine est, comme nous avons pu le constater expérimentalement, extrêmement résistante à toutes les perturbations extérieures. Par ailleurs, on ne peut reproduire expérimentalement les symptômes de la NCC chez un ruminant sevré qu’en administrant des quanti- tés très élevées d’une antithiamine comme l’Amprolium (Espinasseet al.1971) ou des substances extrêmement riches en thiaminases comme la poudre de rhizome de fougère aigle.

Dans cette perspective, on a pu néanmoins attribuer l’appari-

tion de cas de NCC chez des agneaux au pâturage à des trai- tements antiparasitaires à base de levamizole et de thiabenda- zole (Linklater & Dyson, 1977)

Dans les anciennes publications, les méthodes expérimentales utilisées pour l’étude de l’activité thiaminolytique dans le rumen sont critiquables. L’incubation de jus de rumen montre souvent une forte activité thiaminolytique mesurée par la dis- parition de la thiamine libre mais, dans ces expérimentations, le dosage des esters phosphoriques actifs de la thiamine n’a pas, le plus souvent, été réalisé. Un autre biais expérimental impor- tant affectant ces résultats est lié à l’absence de synthèse de thia- mine dans les incubations de courte durée au cours desquelles une dégradation de la vitamine est seulement observée.

Des tentatives d’isolement de germes producteurs de thiaminases à partir de contenu de rumen et de fèces de mouton atteints de NCC ont été réalisées par divers auteurs. SeulMegasphera els- denii qui possède une faible activité thiaminolytique a été retrouvé. Les tentatives d’implantation dans le rumen de germes à forte activité thiaminolytique commeBacillus thiami- nolyticusouClostridium sporogenesisolés à partir d’animaux morts de NCC ne permet pas de reproduire la maladie. La mise en évi- dence d’une activité thiaminolytique dans les fèces n’a pas de valeur probante car la vitamine synthétisée dans le rumen est absorbée dans le jéjunum ; il est donca priorihautement impro- bable qu’une activité thiaminolytique développée très souvent dans le gros intestin même chez les animaux sains puisse être à l’origine d’un déficit en thiamine. Enfin, les étudesin vitrorap- portées dans la littérature montrent qu’une activité thiamino- lytique est retrouvée quasi systématiquement dans le rumen des animaux sains ou malades mais qu’elle est rarement due à la pré- sence de thiaminases chez les animaux sains. On retrouve éga- lement cette activité thiaminolytique non enzymatique dans cer- tains aliments comme les betteraves sucrières mais à des niveaux trop faibles pour déclencher une carence.

Une autre voie d’approche pour la recherche d’une éventuelle carence en thiamine est constituée par la mesure des paramètres biochimiques de cette carence : modifications de la lactacidé- mie, de la pyruvicémie, de l’activité trancétolasique erythro- cytaire et de l’effet thiamine pyrophosphate, de la teneur en thia- mine des tissus qui sont d’excellents marqueurs de la carence (Brugère 2002). De nombreuses investigations ont été effectuées dans cette direction soit chez des animaux présentant des signes cliniques de NCC, soit chez des animaux soumis à des régimes considérés comme étant à risque. Malheureusement, les résultats, très dispersés, ne permettent pas d’établir une conclu- sion nette. Très souvent d’ailleurs, les paramètres sanguins sont modifiés dans le sens d’une carence chez les animaux soumis à des régimes « à risque » et paradoxalement peu modifiés chez des animaux malades, à l’exception de ceux ayant reçu expé- rimentalement de l’Amprolium. (revue dans Jean-Blain &

Alves de Oliveira, 1994).

(3)

RÔLE DES RÉGIMES CONCENTRÉS ET DE L’ACIDOSE CHRONIQUE DANS L’APPARITION D’UNE ÉVENTUELLE CARENCE EN THIAMINE

Les régimes concentrés favorisant les états d’acidose chro- nique ayant été considérés comme un facteur prédisposant, nous avons essayé de mettre en évidence l’effet d’un régime concen- tré pauvre en fibres sur le métabolisme de la thiamine et l’ap- parition d’un éventuel signe de carence (Cussacet al.1986).

Des chèvres ont été soumises pendant 90 jours à un régime à base de pulpes de betteraves, sans foin et avec, pour certaines, l’administration de bolus de lactose. Il n’a pas été possible de mettre en évidence une baisse de l’activité transcétolasique éry- throcytaire, excellent témoin biochimique d’un éventuel niveau de carence ; ce paramètre s’est maintenu à une valeur normale de 40 à 43 UI par litre de sang total. Il n’y a pas eu éga- lement de modification de la pyruvicémie ni de la lactacidémie qui normalement augmentent au cours de la carence. Ces résul- tats sont confirmés par certains auteurs et controversés par d’autres dans des situations alimentaires comparables. Ainsi Candau et Massengo (1982) ont montré qu’un régime à base d’ensilage de maïs chez des agneaux entraîne la diminution de la concentration du cerveau en thiamine et une diminution de l’activité transcétolasique erythrocytaire ; par contre, ils souli- gnent qu’aucun cas de NCC ne peut être imputé à ce type d’ali- mentation, même distribuée sur de longues périodes.

D’une façon plus générale, l’examen minutieux de la littérature montre que dans la plupart des études cliniques, ou bien les para- mètres biochimiques qui permettraient de conclure à une carence en thiamine n’ont pas été déterminés, ou bien ces para- mètres ne montrent pas de modifications suffisamment impor- tantes pour conclure à une carence.

Nous avons repris le problème de l’influence de l’acidose chro- nique sur le métabolisme de la thiamine dans le rumen en uti- lisant le rumen artificiel (RUSITEC) (Czerkawski &

Breckenbridge, 1977), qui permet d’avoir un métabolisme et une production de thiaminein vitrotout à fait analogue à ce qui est observéin vivo(Alves de Oliveiraet al.1997) Dans ce modèle expérimental, nous avons recréé des conditions d’acidose chro- nique les plus proches de celles qui sont observées in vivo.

L’activité thiaminasique est restée très basse, aussi bien dans les fermenteurs soumis aux conditions d’acidose que dans les fer- menteurs témoins. L’acidose n’a pas eu d’effet significatif sur la production nette de thiamine ni sur la répartition de la thia- mine entre les formes libres et les différents esters phosphoriques (tableau 1), alors que des modifications non négligeables du métabolisme ruminal (diminution de la production d’acides gras volatils) ont été observées, conformément aux données clas- siques de la littérature. La synthèse microbienne de thiamine est donc apparue comme très résistante aux variations anormales de pH.

Adjonction de thiamine

Conditions acidogènes

Niveau de soufre

Production totale de thiamine Nmole/j

TPP % TMP % thiamine

Libre %

Synthèse nette de thiamine

Nmole/j

Activité thiaminasique

en mU

- - bas 334 84.9 9.5 5.6 334 0.02

+ - bas 442 81.3 9.1 9.5 146§ 0.05

- + bas 319 88.9 7.7 3.4 319 0.03

+ + bas 496 73.6 9.6 16.7 200 § 0.01

- - haut 250 89.1 8.7 2.2 250 0.04

+ - haut 416 84.1 10.0 5.8 120§ 0.02

- + haut 282 90.2 5.5 4.2 282 0.01

+ + haut 396 88.3 6.7 4.9 100 § 0.01

Déviation standard 25 2.8. 1.1 2 6 25 0.01

§ : thiamine totale – 296 nmoles rajoutées

Signification statistique

Addition de thiamine *** * NS * * NS

Conditions acidogènes NS NS * NS NS NS

Haut niveau de soufre ** * NS * * NS

* P<0.05 ; ** P< 0.01 ; *** P< 0.001 ; NS non significatif

Tableau 1 :Effet de l’adjonction de thiamine, des conditions acidogènes et d’un niveau élevé de sulfate sur la production totale de thiamine, les proportions rela- tives des formes phosphorylées et libres, la synthèse nette de thiamine et l’activité thiaminasique en rumen artificiel (Alves de Oliveiraet al.1997). L'acidose n'a pas d'effet significatif sur la synthèse nette de thiamine totale ni sur sa répartition entre les formes libres et les différents esters phosphoriques avec les deux niveaux d'apport de soufre. Par contre un niveau de soufre élevé diminue la synthèse totale de thiamine et modifie la répartition entre la thiamine libre et les divers esters phosphoriques. (TMP=monophosphate de thiamine ; TPP= pyrophosphate ou diphosphate de thiamine).

(4)

NÉCROSE DU CORTEX ET EXCÈS DE SOUFRE DANS LA RATION

Des enquêtes épidémiologiques réalisées aux USA en 1982 (Raisbeck 1982) avaient permis de soupçonner le rôle d’un excès de soufre dans la genèse de la NCC. Ces études ont été reprises de façon extensive à partir de 1989 et jusqu’à nos jours, par des équipes canadiennes (Gooneratneet al.1989, Olkowski 1997).

L’étiologie de la NCC liée à un excès de soufre dans la ration a été confirmée à la fois par de nombreuses relations cliniques et par des reproductions expérimentales (Gooneratneet al.1989 ; Olkowki 1997). Cet excès de soufre sous forme de sulfates peut être apporté non seulement par les eaux de boisson mais éga- lement par certains sous-produits utilisés en alimentation intensive comme les pulpes de betteraves et les drèches de bras- serie (Kulet al.2006) ou par des plantes riches en composés sou- frés de type glucosinolates, retrouvées dans la famille botanique des Crucifères (McKenzieet al.2009). La pathogénie de l’in- toxication est maintenant bien comprise. Les sulfates et les autres composés après dégradation en sulfates dans le rumen sont réduits en sulfures et en hydrogène sulfuré. Si ces composés sont produits en faible quantité, ils sont utilisés par la micro-popu- lation du rumen pour synthétiser ses propres acides aminés sou- frés. Dans le cas inverse, ils passent dans le sang et provoquent les lésions cérébrales de nécrose du cortex (McAllisteret al.

1997).

Dans une étude expérimentale, nous avons administré pendant huit semaines à des moutons, dans leur ration, du soufre à un niveau triple (0,6 % en S) de celui correspondant au besoin minimal nécessaire pour la couverture de leurs besoins. Nous avons observé une production anormale de sulfures dans le rumen sans perturbation sensible des autres métabolismes

microbiens du rumen Les manifestations cliniques de NCC ne commencent à apparaître qu’après environ sept semaines. La vitesse de réduction des sulfates en sulfures augmente consi- dérablement entre une et huit semaines(figure 1a), conco- mitamment avec la vitesse de leur disparition(figure 1b). Nous montrons ainsi d’une part, que la microflore réductrice se modifie en devenant de plus en plus efficace et d’autre part, que la quantité de sulfures susceptible de déclencher la NCC n’est suffisante qu’après une application relativement longue du régime riche en sulfates. (Alves de Oliveira et al. 1996).

Aucune diminution significative de la teneur en thiamine du rumen n’a été par contre observée.

RELATIONS ENTRE SOUFRE ET THIAMINE

Tenant compte de l’effet curatif de la thiamine dans de nom- breux cas de NCC, son effet préventif chez le mouton soumis à un régime excédentaire en soufre (0,6 %) a été testé (Olkowski et al.1992).Effectivement, la supplémentation du régime en thiamine à très forte dose (243 mg/kg) empêche l’apparition du syndrome ; par contre, la supplémentation à faible dose (14 mg/kg) n’a pas d’effet. Ces résultats sont bien en faveur d’une relation entre soufre et thiamine. Les données de la littérature sont cependant diverses sur ce point essentiel. Dans certains cas, les paramètres témoins du métabolisme de la thiamine sont modifiés, dans d’autres, aucune modification significative n’est observée. Il en va de même pour l’effet curatif, voire préven- tif, de l’administration de thiamine à forte dose.

Nous avons recherché si,a contrario, le régime à 0,6 % de soufre augmentait l’activité thiaminasique dans le rumen. Dans l’étudein vivoprécédemment citée, aucune augmentation de

Concentration en sulfures en mmoles/L dans le rumen 2.0

1.5

1.0

0.5

0.00 2 4 6

Temps en heures

Fig. 1 a 20 Fig. 1 b

16

12

8

0 0 4

2 4 6

Concentration en sulfates en mmoles/L dans le rumen

Temps en heures

Figure 1 a et b :Cinétique de la concentration en sulfures (1a) et en sulfates (1b) dans le rumen après un repas forcé de sulfates, administré journellement pendant huit semaines (Alves de Oliveiraet al.1996)

Groupe témoin : 0,2 % S (moyenne des semaines 2, 4, 6, 8),

(5)

l’activité thiaminasique n’a pu être observée pendant les huit semaines d’application du régime. De même, dans une étude conduite en rumen artificiel, aucune modification de l’activité thiaminasique n’a été mise en évidence(tableau 1)Nous avons alors mesuré la synthèse de thiamine en rumen artificiel dans des conditions normales ou dans des conditions de surcharge en sulfates permettant une production élevée de sulfures (0,5- 0,8 mmol/l versus 0,1 mmol/l pour les témoins). L’excès de soufre a induit une diminution significative de la production nette de thiamine(tableau 1) mais cette diminution restait limitée.

(Alves de Oliveiraet al.1997).

L’apport de soufre en excès est donc bien à l’origine d’une dimi- nution de la synthèse de thiamine, qui n’est pas imputable au développement de thiaminases. Cette diminution paraît cepen- dant insuffisante pour provoquer une carence en thiamine comme le confirme d’ailleurs les données de la littérature.

CONCLUSION

La nécrose du cortex cérébral des ruminants est un syndrome d’origine nutritionnelle qui peut apparaître dans des situations alimentaires très variées (Brugère 2002).

Son étiologie liée à un excès de soufre paraît solidement éta- blie à ce jour, à la fois par les données épidémiologiques et par les données expérimentales, accumulées au cours des 20 der- nières années. Les travaux expérimentaux réalisés sur les rela-

tions éventuelles entre thiamine et soufre montrent que l’ex- cès de soufre peut être à l’origine d’une destruction partielle de la thiamine, mais que cette destruction, comme nous avons pu le mettre en évidence, est à la fois inconstante et insuffisante, quand elle se produit, pour déclencher une carence en thiamine.

Pourtant, une telle conclusion comporte une part de paradoxe si l’on retient l’effet curatif de la thiamine observé dans de nom- breux cas cliniques. Or il faut remarquer que la thiamine est une molécule très électrophile qui peut former des composés stables avec l’hydrogène sulfuré. Le pouvoir curatif de la thiamine ne serait ainsi pas lié à son action vitaminique, au moins dans le cas de la NCC par excès de soufre, mais à sa capacité à capter les sulfures et à les neutraliser, ce qui expliquerait d’ailleurs qu’elle n’est efficace qu’à des doses très élevées. Ce n’est là qu’une hypothèse qu’il serait intéressant d’explorer. On peut remarquer d’ailleurs que la thiamine, uniquement administrée à très fortes doses, a un effet thérapeutique remarquable dans l’in- toxication des bovins par le plomb qui se fixe sur le tissu ner- veux, sans qu’il y ait une quelconque relation avec une carence vitaminique.

Par ailleurs, la NCC peut se produire dans des situations ali- mentaires où il n’existe apparemment pas d’excès de soufre, tout particulièrement en France. L’hypothèse d’une carence directe en thiamine n’est donc pas à exclure mais son mécanisme d’ap- parition est encore très mal connu et nécessiterait des études ultérieures.

(6)

• Alves de Oliveira, L., Jean-Blain, C., Dal Corso, V., Bénard, V., Durix, A., Komisarczuck- Bony, S.1996. Effect of high sulfur diet on rumen microbial activity and rumen thiamine status in sheep receiving a semi-synthetic, thiamine-free diet. Reprod Nutr Dev. 36 : 31–42.

• Alves de Oliveira, L., Jean-Blain, C., Komisarczuck-Bony, S., Durix, A., Durier, C.

1997. Microbial thiamin metabolism in the rumen simulating fermenter (RUSITEC) : the effect of acidogenic conditions, a high sulfur level and added thiamin British J Nutr.78 : 599–613.

• Brugère, H.2002.Nécrose du cortex cérébral des ruminants, données physiopathologiques. Bull Soc Vét Prat de France 86 : 91–103.

• Candau, M. & Massengo, J.1982. Evidence of thiamine deficiency in sheep fed maize silage.

Ann Rech vét. 13 : 329–340.

• Czerkawki, J.W. & Breckenbridge, G. 1977.

Design and development of a long term sti- mulation technique (RUSITEC). British J Nutr. 38 : 371–384.

• Cussac, A., Grancher, D., Durix, A. Jean- Blain, C. 1986. Effet d’une alimentation défi- citaire en lest et appauvrie en thiamine sur l’ac- tivité transcétolasique erythrocytaire che la chèvre Ann Rech vét.17 : 43–49.

• Edwin, E.E., Lewis, G., Allcroft, R. 1968 a.

Cerebrocortical necrosis : a hypothesis for the possible role of thiaminases in its pathogene- sis. Vet Rec. 83 : 176–178.

• Edwin, E.E., Spence, J.B., Woods, A.J. 1968 b.

Thiaminase and cerebrocortical necrosis Vet Rec.83 : 417.

• Espinasse, J., Redon, P., Sinha, R.P.1971.

Reproduction expérimentale de la nécrose du cortex cérébral chez le mouton. Rev Med Vét.

122,529–545.

• Gooneratne, S.R., Olkowski, A.A., Klemmer, R.G., Kessler, G.A., Christensen, D.A. 1989 a.

High sulphur related thiamine deficiency in cattle ; a field study. Can Vet J. 30 : 139–146.

• Gooneratne, S.R., Olkowski, A.A., Christensen, D.A.1989 b. Sulfur-induced polioencephalomalacia in sheep : some bio- chemical changes. Can J Vet Res.53 : 462–467.

• Jean-Blain, C. & Alves de Oliveira, L. 1994.

Aspects physiopathologiques de la thiamine (vitamine B1) chez les ruminants. INRA Prod Anim.7 : 71–84.

• Jean-Blain, C. 1995 La nécrose du cortex céré- bral chez les ruminants. Point Vet.27 :777–780.

• Kul, O., Karahan, S., Basalan, M., Kabakci, N.2006. Polioencephalomalacia in cattle : a consequence of prolonged feeding barley malt sprouts. J Vet Med A Physiol Pathol Clin Med. 53 : 123–128.

• Linklater, K.A. & Dyson, D.A.1977. Faecal thiaminase in clinically normal sheep asso- ciated with outbreaks of polioencephalomala- cia. Res Vet Sci. 22 : 308–312.

• McAllister, M.M., Gould, D.H., Raisbeck, M.F., Cummings, B.A., Loneragan, D.H. 1997.

Evaluation of ruminal sulphide concentra- tions and seasonal outbreaks of polioence- phalomalacia in beef cattle on a feedlot. J Am Vet Med Assoc. 211 : 1275–1279.

• McKenzie, R.A., Carmichael, A.M., Schibrowski, M.L., Duigan, S.A., Gibson, J.A., Taylor, J.D. 2009. Sulfur-associated polioencephalomalacia in cattle grazing plants in the family Brassicaceae. Aust Vet J. 87 : 27–32.

• Olkowski, A.A., Gooneratne, S.R., Rousseaux, C.G., Christensen, D.A. 1992. Role of thia- mine status in sulphur induced polioencepha- lomalacia in sheep. Res Vet Sci. 52 : 78–85.

• Olkowski, A.A. 1997. Neurotoxicity and secondary metabolic problems associated with low to moderate levels of exposure to excess dietary sulphur in ruminants : a review. Vet Hum Toxicol. 39 : 355–360.

• Raisbeck, M.F.1982. Is polioencephalomalacia associated with high sulfates diets ? J Am Vet Med Assoc. 180 : 1303–1305.

• Terlecki, S.& Markson, I.M. 1961.

Cerebrocortical necrosis in cattle and sheep.

Vet Rec. 73 : 23–27.

• Tournut, J., Labie, Ch., Espinasse, J. 1967.

Identification en France de la « Nécrose du cortex cérébral » (NCC) chez plusieurs espèces de ruminants. Rev. Méd Vét.118 : 883–896.

BIBLIOGRAPHIE

Références

Documents relatifs

Il est limité en avant par la partie marginale du sillon cingu- laire (scm) et en arrière par la fissure pariéto-occipitale (fpo), qui le sépare du cuneus (O6) du lobe

L’insula antérieure, située en avant du sillon central de l’insula (sci), comprend le gyrus insulaire accessoire (ia), le gyrus insulaire transverse (it), et les gyrus

Comme indiqué dans le tableau 1, la majorité des projets actuels de séquençage de génome visent les bactéries de dégradation de la cellu- lose et des hémicelluloses, et on peut

régulation de la production bactérienne nette de thiamine dans le rumen soit liée à des mécanismes de rétroinhibition puissants sur la synthèse et à des mécanismes

3 DQG 3 WLPHV OHVV &amp;+ —PRO WKDQ UXPHQ FRQWHQWV 5XPHQ RU FDHFDO VWUDLQHG IOXLGV IURP DQLPDOV IHG ZKHDW GLHW SURGXFHG PRUH &amp;+ ZKHQ UHDGLO\ IHUPHQWDEOH VXEVWUDWH ZDV DGGHG

(3 + 5a) Utilise la mise en évidence pour factoriser les expressions suivantes.. Factorisation -

Les candidats possèdent des connaissances solides mais certaines questions de cours telles que les règles de construction d’une configuration électronique, de la

[r]