G ERGONNE
Variétés. Synonymie mathématique
Annales de Mathématiques pures et appliquées, tome 8 (1817-1818), p. 255-259
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SYNONYMIE MATHÉMATIQUE. 255
On peut
aussiemp!oyer
dans la même vue iagéométrie e.T,,pé- rimentale.
Le rayon donnépeut
servir de base à une suited’opé-
rations
graphiques , lesquelles
donneront naissance à une multitude de droites de touteslongueurs
que l’on pourra ou comparer Immé- diatement à lalongueur w
déterminée à l’avance avecbeaucoup
de
précision,
ou dont on pourra , à mesure , comparer les valeursnumériques
à celle de cettelongueur
w. Mais ce nepourrait guère
être là
qu’un
travail-de~énohite;
et c’est une excellente raison àajouter
à tant d’autres de mêmeforce,
en faveur du rétablissement des ordresmonastiques. Jusque-ià
nous ne pourronsguère
attendreque
du hasarddes
résultats de la nature de ceux que nous venonsde faire connaître.
VARIÉTÉS.
Synonymie Mathématique.
Par
unABONNE.
G
E R G O N N E~.
s I.,
G É 0 IV! È T RE, MATHEMATICIENS.
.~j~~_~~~~~~.~
est~~r~~~ ~~~e
~/2~~M ~ ~ ditFonîene!!e ;
etFonteneHe
a dit ~rah
Quoiqu’H parasse
hors dedoute,
parexern~~e ,
que°
c’est de FInde que
les
connaissances humaines se sontrépandues
en
Egypte ~
etqu’il
ne soit pas même certain que l’Inde ait été leurpremier berceau,
il D’en pas momsofficiellement
admis dans256
SYNONYMIE
notre
Europe
que les sciences exactes , enparticulier,
ont dû leurnaissance aux débordemens annuels du
Nil,
a 1 la suitedesquels
onétait
obligé
de rétablir les limites deshéritages ,
que la crue de~eaux avait fait
disparaître ;
et comme il fallait pour cela mesurer Ijs terres , il était toutsimple
que les hommeschargés
de ce soinprissent
ou reçussent le nom de Géomètres.Telle
fut,
suivantl’opinion
commune, la faibleorigine
de cessciences
devenues depuis
siImposantes
par leurétendue
y leur pro- fondeur et l’universalité de leursapplications ;
elles ne tardèrentpas de recevoir la dénomination de scieizces
ma~~~~rnati~~~es ,
c ’cst-à-dire ,
de sciences parexcellence ,
de sciencesqui
dulU~~~t Ï’~>ireenseignées ; mais ,
dès laplus
hauteantiqu’të ~
ceuxqui
se livrèrent à leur culture n’en furent pas moins md.Lt~:cteaientappelés
~~oa~~~t~~s etMathématiciens.
Ilparait
même que laprell)ière
de cesqualifications
avait la
préférence
surl’autre ;
au~si voyons-nous quePlaton , qui
avait’écrit à l’entrée de son école :
Que
nul n’~n~~~e i’ci’s’il n’est~~ona~~~e, appelait
le créateur et le conservateur de l’uniyersI’.~~ernel ~~~r~~~~e ;
et nous voyons aussi
qu’ ~’pollanias , qui
sansdoute
ne s’ctaitjamais occupé
à mesurer des terres ,était ,
de son vivantmême ,
surnommé le Grand Géomètre.A la renaissance des
lettres y
enOccident,
ceuxqui
se mirentles
premiers
àcultiver,
bien oumal, quelques
branches des sciencesexactes, ne
tardèrent
pas àacquérir
une sorte d’influence et deconsidération ,
par cela mêmequi
aurait du la leur fairerefuser ,
dans un état de civilisationplus perfectionne ; je
veux dire par leurapplication
à l’étude del’astrologie
et à la divination. Leur crédit fut d’autantplus grand
que cesprétendus géomètres
étaient alorsen assez
petit
nombre. Lesgrands
et lesprinces ,
souventplus
curieux de ce
qui
est rare que de cequi
estbon ,
voulurent doncavoir leurs
mai~Z~~naiï~iens ,
comme ils ont eu , à d’autresépoques 1 >
leurs
fous,
leursnains ,
leursperroquets ~
leurssinges,
etc. ; et’ dès-lors le mot
mat~é~na~~~ietz lie fut plus guère
que ladési3nation
d’un emploi à la
cour. -",.Aujourd’hui
MATHÉMATIQUE.
257Aujourd’hui
que les sciences exactes se sont, enquelque
sorte, 1popularisées ; aujourd’hui
que ceuxqui
les cultivent sont en assezgrand nombre ,
et ne se mêlentplus ,
en aucunesorte ,
deprédire
l’avenir,
lesprinces
ne se soucientguère
de les retenirprès d’eux,
et de les traîner à leur
suite;
enquoi
iln’y
apeut-être
pas untrès-grand malheur y
ni pour les uns ni pour les autres. Iln’y
adonc
plus
demathématiciens
du moins dans le sensqu’on
attachaità ce mot il y a deux
siècles ; mais, il y
atoujours
desgéomètres c’est-à-dire,
des hommesqui
cultivent librement les sciences exactes, pour leur propregloire
et l’utilitépublique.
Ainsi ,
bien que le mot mathématicien réveille dansl’esprit
desidées
plus grandes
etplus
nobles que celles querappelle
le motgéomètre ;
s bien que lagéométrie
soitaujourd’hui
une bien moindrepartie
des sciences exactesqu’elle
ne l’étaitautrefois ;
ce derniermot a néanmoins de nouveau
prévalu
surl’autre,
comme autemps
de Platon.
Aujourd’hui,
ceuxqui
cultivent lessciences, exactes,
,fussent -
ils mèlI1e tout-à-faitétrangers
à lagéométrie,
cequi
sepourrait
en touterigueur ,
se traitentgénéralement
entre eux deg~~/r~ ;
et celuiqui
lesappelle
des mat~~rt~at~ci~r~ssemble,
en
quelque
sorte , annoncer par làqu’il
ne l’est paslui-même.
Il est
remarquable ,
ausurplus ,
que ymalgré cela ,
nos mesu-reurs de terres ont
persisté
à conserver le titre de~~cmé~r"es ~
maisil y a si loin de ces
géomètres
là aux autres que l’identité dequalification
ne sauraitjamais
devenir une sourced’équivoque.
Chezles uns ce mot est l’indice d’une masse de connaissances
acquises
et d’une
application
constante à les étendre encore : chez lesautres y
au
contraire,
c’est toutsimplement
le nom du métierqu’ils
exer-cent ; et ces sortes de
géomètres
sont, engénéral,
aussi mauvais mat~~~mat~’ciens que laplupart
des t~a~h~r~aticiens du XVI.’ siécle étaient mauvais~9~2~r~
Si
jamais
les sciences exactes cessent d’être aussiuniversellement
cultivéesqu’elles
le sontaujourd’lnzi ; si ,
dansquelques siècles y
ceux
qui
eii seront lesdépositaires
se mdent encore , comme autre-~772. ~77A 3~
258
SYNONYMIE
fois,
y de vouloirprédire l’avenir;
cequi ,
à larigueur ,
neserait
pas
impossible ;
il pourraprendre
de nouveau auxprinces
la fan-taisie d’avoir leurs
~~~/?2~/~/~ ; mais
on ne saurait être le~’~Ol’ll~~l’~
de personne.S. 1 1.
FORT HABILE.
’
Quel
est leplus ~’or~
deLagrange
ou deLaplace,
n1e demandaitil y a
quelques années ,
un homme delettres , purement
homme de lettres J’étais fort tenté de luidelI1ander,
a mon tour,qui
avait été le
plus
fort de Corneille ou deRacine,
de Charron oude
,~or~taÎ~r~e ,
deLarocj~efoueault
ou de,~abruyére,
de Massillonou de
Bourdaloue ,
del’,~ôpital
ou deI~a~uesscau ,
de Cochinou de
~’atrr~ ,
deB~y’ora
ou deYig-d’~zir ,
deMontesquieu
oude
~orasseau ;
il aurait sans doutepris
mariposte
pour une mau- vaiseplaisanterie;
etpourtant je
n’aurais eu là aucun tort dont ilne m’eût donné le
premier l’exemple.
On est
fort
dans un art où lesuccès
estbier plutôt
dû à unlong
exercice ou à unecertaine aptitude corporelle qu’aux qualités
de
l’esprit :
-. on est habile dans une science ou , aucontraire ,
lasupériorité
tientbeaucoup
moins à l’habitudequelle
n’est le fruitde la méditation et d’une
disposition spéciale
del’entendement.
On dit
très-bien ,
t àla vente y
d’un étudiantqu’il
estplus~?r~
qu’aucun
de cescondisciples ;
etcela - quel
que soitd’ailleurs
le genred’étude auquel
il selivre ;
maisceci ,
loin dedéroger
à larègle, semble
bienplutôt la çonfirmer.
On nes’exprime ainsi,
eneffet,
que parcequ’on
suppose que celuidont
onparle
a lejugement
trop
peum~r
encore pour être en état de penser de luimême ;
et que tout son travail a
dû simplement
seréduire ~
se rendrefamilières le~ choses qui lui
ontété enseignées ~ telles qu’on le~
MATHÉMATIQUE.
-259
wlui
aensci~nues ,
et sans aucunmélange
de ses propresidées.
A y regarder
deplus près,
ilsemble ,
au reste , que y pourune convenable
application
desépithètes
defort
etd’habile ,
ilsoit nécessaire d’avoir
quelque égard
auplus
ou au moinsd’impor..,
tance et d’utilité de la science ou de l’art
auxquels
on lesapplique.
Ainsi ,
parexemple ,
on dit d’un escamoteurqu’il
esttrès-fort
etd’un
chirurgien qu’il
esttrès-habile ,
bien que l’escamoteur et lechirurgien
neréussissent ,
l’un etl’autre,
que par l’adresse de lamain, jointe
àbeaucoup
depratique.
Ondit ,
àl’inverse,
unfort jouenr
d.echccs et un habilegénérai,
bienqu’il
faillequel- quefois plus
de force de tête pour se tirer avecbonneur
d’unepartie
d’échecs que pour s’assurer legain
d’unebataille.
Ce nepeut
donc être que parcequ’ils regardent
les sciences exactes comme unobjet futile ,
que les gens de lettres disent de çeuxqui s’y distinguent , qu’ils y sont forts.
Mais ,
ilparaît qu’à égalité d’Importance
etd’utilité 1
la dis-tinction établie en
premier
lieureprend
tous ses droits.Il arrive assez communément que les