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L IMPORTANCE DU SOL Don Lobb, agronome (honorifique)

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L’IMPORTANCE DU SOL

Don Lobb, agronome (honorifique)

Forum agricole — Calgary (Alberta)

5 décembre 2018 — Journée mondiale des sols

Je suis reconnaissant d’avoir l’occasion de participer au Forum agricole 2018, et je tiens à remercier Glacier FarmMedia d’avoir mis la question des sols à l’ordre du jour. Glacier FarmMedia démontre son engagement envers les sols de diverses façons.

L’agriculture est la seule chose qui me passionne depuis que j’ai 12 ans. Tout au long de ma carrière, j’ai fait tout mon possible pour bien faire les choses. Je vais vous présenter ce que j’ai appris et observé au fil des années. Le but n’est pas de vous faire la leçon, mais plutôt de vous lancer un défi : le défi de traiter le sol comme il se doit.

Pour la première fois de notre histoire, nous disposons de la technologie et des outils nécessaires pour produire des aliments de manière durable. Pourtant, trop d’agriculteurs et leurs influenceurs s’accrochent aux méthodes et aux valeurs du passé. La productivité des sols est en baisse malgré les améliorations de

l’agriculture. Ce qui a des conséquences pour tout un chacun, à court et à très long terme.

Nous devons donc examiner comment fonctionne notre système de production alimentaire. Nous

devons aussi apprendre des leçons du passé et tenir compte de l’influence de nos choix sur le cours de l’histoire.

Nos choix comptent... parce que « les sols comptent ».

La vie commence dès que nous semons une graine.

Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, plus de 98 % de notre alimentation est composée de PRODUITS AGROALIMENTAIRES. Ces PRODUITS ont des apparences multiples, mais prennent d’abord tous la forme de PLANTES. Le système de culture est complexe : toutes ses composantes s’influencent les unes les autres et, collectivement, elles interagissent avec le SOL.

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L’eau et le carbone sont les éléments essentiels d’un sol fertile.

La matière organique du sol (MO) est composée à environ 58 % de carbone. La composante biologique de la MO, le biote, contrôle la productivité des sols et séquestre le carbone produit par les plantes et les animaux. Toutes les composantes de l’agroécosystème doivent être en harmonie pour une production alimentaire optimale, fiable et durable.

Notre agroécosystème n’est pas durable, car il présente deux grandes faiblesses :

Première faiblesse :

La plupart des déchets du système alimentaire et des excréments humains ne sont pas redirigés vers les sols où nos aliments sont produits. On constate donc une insuffisance croissante de carbone et de nutriments. Il ne suffit pas d’enrichir les sols de nutriments provenant de sources externes. La responsabilité de pallier ces pertes est l’affaire de toute la société.

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La deuxième faiblesse concerne tout particulièrement l’agriculture :

Le travail du sol détruit les agrégats et perturbe les bioprocédés essentiels à la

récupération des nutriments, à la séquestration du carbone et à l’agrégation du sol. Il en résulte une perte d’eau, de nutriments, de carbone et de sédiments. Ces éléments sont essentiels à la fiabilité des cultures agricoles qui, elles-mêmes, sont indispensables à la stabilité de l’exploitation agricole. C’est au secteur agricole qu’il incombe de rectifier le tir.

Bien que le carbone et l’eau soient au cœur de notre système de production alimentaire, les agrégats stables à l’eau sont les indicateurs les plus sûrs de la santé et de la productivité des sols.

D’autres indicateurs de la santé des sols sont fréquemment cités. La densité des turricules de vers de terre à la surface du sol est un indicateur de l’activité biologique. La matière organique (MO) est un autre indicateur.

Cependant, pour avoir une valeur durable, la

MO doit être transformée pour produire du carbone stable, un composant essentiel des agrégats. C’est un processus très lent.

Les agrégats sont les sols friables que l’on trouve dans les zones non perturbées, dans les forêts et dans les prairies indigènes. Ils sont constitués de minéraux et de MO qui sont liés par des « colles », notamment la glomaline, un exsudat de champignons mycorhiziens. La glomaline peut fournir près de 30 % du carbone stable du sol. Le terme « agrégat » désigne généralement les macro-agrégats qui se forment lorsqu’un très grand nombre de micro-agrégats se lient dans des formes irrégulières beaucoup plus grandes, comme nous le voyons à l’arrière-plan de cette diapositive.

Les agrégats sont essentiels à des sols fertiles et sains. Ils permettent l’infiltration de l’eau, contribuent au stockage de l’eau et emmagasinent les éléments nutritifs pour les plantes. Ils résistent au compactage et offrent un environnement radiculaire sain et aéré. Combinés à des systèmes radiculaires non perturbés, les agrégats peuvent assurer un contrôle presque total de l’érosion par le vent et l’eau.

C’est donc dire que le contrôle de l’érosion passe d’abord par l’agrégation du sol.

L’agrégation est une fonction de la nature. Nous devons imiter la nature si nous voulons une production alimentaire durable. Le travail du sol n’est pas naturel. Il détruit les agrégats, la MO et le biote qui sont essentiels à la création des agrégats.

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Le travail du sol tue également les vers de terre qui régénèrent le sol et perturbe l’équilibre champignon-bactérie en faveur des bactéries qui respirent le CO2, ce qui entraîne une perte de carbone dans le sol et un déclin des agrégats. Le travail du sol est le talon d’Achille de l’agriculture traditionnelle et de l’agriculture biologique. Aucune n’est viable!

Notre avenir dépend des agrégats!

10 000 ANS D’HISTOIRE NOUS MONTRENT POURQUOI IL FAUT PRENDRE SOIN DES SOLS

C’est l’histoire de la Mésopotamie, de la Grèce, de Rome, de la Chine occidentale et de dizaines d’autres Cités-États.

Nous voyons ici la relation historique entre les populations et la productivité du sol.

L’être humain choisit toujours les sols les plus riches. Lorsque la population dépasse la capacité biotique naturelle du sol, les sols se dégradent. Pour compenser cette dégradation et poursuivre l’approvisionnement alimentaire, l’être humain :

• opte pour des plantes plus productives;

• utilise des processus d’irrigation et de drainage;

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• utilise du fumier, des cultures de couverture et du compost;

• mais surtout, il adopte le travail du sol qui, grâce à l’oxydation de la matière organique, libère les nutriments.

Le travail du sol, cependant, est un couteau à double tranchant. Il détruit les agrégats du sol, ce qui entraîne l’érosion. Et la destruction du biote prive les agrégats de leur capacité de régénération.

Avec la perte de matière organique disparaît également la capacité de rétention de l’eau et des nutriments. Les sols sont alors complètement épuisés. L’approvisionnement alimentaire s’effondre alors, l’instabilité politique s’installe et la population décline.

Cette triste histoire n’a cessé de se répéter à travers les âges. Pour citer Winston Churchill : « Ceux qui n’apprennent pas du passé sont condamnés à le répéter. »

Avons-nous appris du passé?

Aucune civilisation n’a survécu aux conséquences de la surexploitation agricole.

Pour survivre, l’humain a repoussé toutes les NOUVELLES FRONTIÈRES afin de trouver de nouveaux sols.

Aujourd’hui, nous exploitons déjà les sols les plus riches. NOUS AVONS ATTEINT LA DERNIÈRE FRONTIÈRE.

NOUS AVONS ATTEINT LA DERNIÈRE FRONTIÈRE d’un monde où la population augmente rapidement.

ALORS... OÙ EN SOMMES-NOUS DANS LA COURBE DÉMOGRAPHIQUE?

La réponse se trouve dans l’état de nos sols. Il s’agit d’une situation qui me préoccupe beaucoup pour les raisons suivantes :

• La matière organique du sol diminue. Des rapports de laboratoire concernant des analyses de sols effectuées dans la région la plus fertile du sud de l’Ontario indiquent que depuis 1950, le taux de matière

organique est passé de 6 % à 3,5 %, le tiers de cette diminution s’étant produite dans les 15 dernières années. Cette perte coïncide avec l’intensification de la

production de soja. Les résidus de soja sont insuffisants pour maintenir les niveaux de

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MO. Nous sommes face à une crise! Que se passe-t-il ailleurs au Canada à mesure que les cultures et les pratiques culturales changent? Nous devons faire attention à la façon dont nous gérerons la prochaine récolte optimale. La crise du carbone la plus grave de notre époque est liée à notre utilisation des sols et non à l’exploitation du pétrole. Une perte d’un pour cent de la MO fait diminuer la capacité de rétention d’eau d’environ 27 000 gallon/acre. Elle exacerbe aussi la sensibilité du sol aux conditions météorologiques et rend les cultures agricoles moins fiables. Et tout cela a des conséquences pour les exploitations agricoles.

• La dégradation des sols par le travail du sol se poursuit. Le NRCS du USDA signale qu’en Iowa, la superficie de collines érodées a triplé dans les 30 dernières années. Cela rappelle la situation qu’on constate au Canada et indique un déplacement du sol vers le bas des pentes causé par le travail du sol (érosion liée au travail du sol). Ce type d’érosion est souvent beaucoup plus grave que l’érosion par le vent et l’eau combinés parce qu’il se produit à chaque travail du sol ou ensemencement. Aujourd’hui, les résidus

de culture recouvrent l’érosion que nous voyons sur cette image de l’Administration du rétablissement agricole des Prairies. Or sous ces résidus, l’érosion liée au travail du sol se poursuit beaucoup trop souvent.

L’ampleur de la perturbation que j’ai observée sous les résidus de culture de sols à « semis directs » est alarmante. Les semoirs équipés d’une houe et d’un soc à ailes ouvertes à grande vitesse déplacent la terre. BEAUCOUP DE TERRE. Récemment, de nouveaux outils sont arrivés sur le marché. Le travail rapide et peu profond de toute la surface du sol contribue

considérablement à l’érosion du sol, à la destruction des agrégats et au compactage. Nous devons mieux définir ce qu’est réellement l’agriculture de conservation. Le terme « travail de conservation du sol » est un oxymore.

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Don Reicosky, chercheur pédologue émérite (à la retraite), USDA

Ce graphique indique le volume relatif de sol déplacé par les diverses méthodes de travail du sol. Cependant, la vitesse modifie considérablement la distance sur laquelle la terre est déplacée. En effet, si la méthode est rapide, le semis direct et le travail vertical du sol sont hautement perturbateurs et peuvent être pires que la charrue à socs et versoirs. À l’inverse, l’agriculture sans labour lente et peu perturbatrice ne déplace pratiquement pas de terre.

L’Université du Manitoba possède les installations les plus modernes pour mesurer le mouvement de la terre par le travail du sol. Les travaux qu’on y effectue confirment mes observations.

• Le compactage, particulièrement le compactage en

profondeur, augmente rapidement à mesure que le travail du sol s’intensifie et que le poids de l’équipement

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augmente. Cela perturbe gravement la fonction de la vie du sol, contribue à l’écoulement de surface et limite la circulation de l’humidité et l’aération dans la rhizosphère. Des ingénieurs de l’Université d’État de l’Ohio ont constaté que le poids des plus gros tracteurs a augmenté de près de 900 livres par an depuis 1960. Les moissonneuses-batteuses, les épandeurs de fumier et d’autres machines ont suivi la même tendance. Si le travail du sol ou le gel pouvait faire contrepoids au compactage en profondeur, nous ne trouverions pas les chemins empruntés par les convois de chariots il y a près de 150 ans.

• Lorsque la poussière emplit l’air ou que l’eau chargée de sédiments quitte nos terres cultivées, nous perdons des microbes, du carbone et des nutriments. Si l’érosion éolienne a

généralement peu d’effet sur le volume de sol, les travaux du NRCS montrent que son impact sur les communautés microbiennes peut être plus que considérable. L’érosion par le vent et l’eau ne sont que les symptômes de la perte des agrégats.

• Lors d’années pluvieuses, la croissance des récoltes est inégale et le rendement réduit en raison de la désagrégation et de l’encroûtement du sol. Autre conséquence de la perte des agrégats.

• Plus les terres sont utilisées par les affermataires, plus le sol en souffre et se dégrade. La productivité est épuisée lorsque le sol est traité comme une marchandise de location. C’est ce qui se produit sans cesse à travers l’histoire.

• L’industrie des engrais estime que les réserves mondiales connues d’engrais phosphatés seront épuisées d’ici environ 75 ans. Il est impossible de produire du phosphore synthétique. Les stocks de potasse sont plus importants, mais tout de même limités. C’est une autre crise qui nous menace. Quelle sera notre nouvelle source d’approvisionnement en nutriments? Quels en seront les coûts? Dans quelle mesure les sources naturelles de nutriments peuvent-elles

approvisionner les sols?

Il y a de quoi s’alarmer!

Nous assistons à cette situation alors que les améliorations en matière de cultures agricoles ont mené à une augmentation réelle du rendement des cultures. Or cette hausse masque

temporairement le déclin de la santé du sol. Pour constater l’effet de ce déclin, il suffit de marcher des plaines fertiles d’un champ à une butte érodée par le vent. À mesure que diminue la MO, on atteint un point critique où la disponibilité en eau et l’activité biologique, toutes deux en baisse, ne peuvent soutenir une récolte rentable. La perte de MO a le même effet sur les terrains plats. Notre gestion des sols déterminera où se situera ce point critique.

DANS LES FAITS... PEU DE CHOSES ONT CHANGÉ AU COURS DE L’HISTOIRE.

NOUS DEVONS FAIRE MIEUX!

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NOUS POUVONS FAIRE MIEUX!

En faisant des recherches pour son livre Dirt : The Erosion of Civilizations, David Montgomery a découvert que « ce n’est pas le fait de cultiver, mais plutôt notre façon de cultiver qui a détruit les sols ».

Nous ne sommes pas obligés de répéter le passé.

Nous avons l’occasion de passer de la « courbe » de la dégradation des sols à celle de la

restauration des sols, et il est de notre responsabilité de le faire. À la différence des populations nous ayant précédés, nous disposons des outils et de la technologie pour y parvenir. Ce n’est donc plus qu’une question de CHOIX. Choisirons-nous de modifier notre gestion des sols et de l’eau ainsi que notre mentalité et notre éthique?

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Voici les CHOIX qui s’offrent à nous pour la restauration des sols.

• Pour restaurer les agrégats, il faut enrichir le biote et la MO et mettre fin à toute forme de travail sur toute la surface du sol et d’ensemencement direct ou d’agriculture sans labour rapide et agressif. Nous avons les outils pour le faire. Comme la cigarette, le travail du sol est une mauvaise habitude mortelle. Si on n’y met pas fin immédiatement, la situation ne fera qu’empirer. L’histoire le confirme.

• Pour accroître l’activité du biote, il faut protéger le biote régénérateur de sol, notamment les vers de terre et les champignons mycorhiziens, contre le travail du sol — même le travail très en surface —, car la majorité de l’activité biologique se produit à la surface du sol ou près de la surface. De plus, nous devons bien nourrir ce biote grâce à une variété de cultures et à une couverture végétale stable. Un biote diversifié et productif est source de vie pour le sol qu’il habite.

• Le taux de MO peut être augmenté et doit être protégé.

o La MO peut être augmentée en gardant la végétation en croissance sur la terre, en utilisant de façon stratégique les types de cultures, la rotation, les cultures de couverture, les

résidus de cultures et le fumier et en limitant le travail du sol. De plus, le compost et d’autres matières organiques recyclées sont essentiels pour pallier le manque de carbone et de nutriments (première faiblesse).

o Une production fourragère durable est essentielle à la préservation de la MO et à l’amélioration de la productivité des terres fragiles et dégradées. Grâce à ce fourrage, duquel se nourrissent les ruminants, quantité de nutriments et de MO biologiquement riche peuvent alors retourner dans le sol des pâturages et des parcours naturels. Le

pâturage intensif est crucial à l’optimisation de la santé et de la fertilité des sols. Il n’existe aucun autre moyen de produire, de façon durable, de la nourriture sur des terres fragiles, et ces terres nous sont nécessaires pour répondre à nos besoins alimentaires croissants.

o Pour augmenter rapidement la MO, il est possible de déplacer la couche arable des aires de sédimentation vers les pentes supérieures érodées pour augmenter la productivité globale du champ. C’est une pratique qu’on appelle « restauration du paysage ». Si ce sol est stabilisé en éliminant le travail sur toute la surface du sol et la plantation agressive, cette pratique sera alors une contre-mesure efficace contre l’érosion liée au travail du sol. Si l’agriculture de précision était d’abord appliquée à la restauration des paysages, il serait possible de réduire la variabilité des champs et d’augmenter la production globale. Les

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travaux de l’Université du Manitoba confirment cette hypothèse et indiquent une courte période de récupération. Ce devrait être la première étape vers l’intensification des cultures agricoles. Pourquoi utiliser les technologies de l’agriculture de précision pour seulement s’adapter à la variabilité des champs? En Iowa, Clay Mitchell, l’un des

producteurs céréaliers les plus novateurs de la planète, le fait déjà. Il a dépassé la méthode

« d’application à taux variable » et « d’agriculture de précision ». Tout comme les frères De Jong en Ontario.

• On peut gérer et réduire le compactage. On peut réduire le compactage en profondeur en allégeant l’équipement ou en gérant les corridors de trafic et le trafic en soit. Il ne suffit pas d’accroître la zone couverte par l’équipement. Le petit équipement robotisé trouverait ici une réelle valeur. Pour remédier au compactage, il est essentiel d’adopter des pratiques qui contribuent à l’agrégation du sol : l’agriculture sans labour en continu, les cultures de couverture à enracinement profond et les séquences de cultures rentables. La solution ne réside pas dans notre équipement, mais dans l’application intensive des notions d’agronomie et dans notre gros bon sens.

« Être le plus gros » a toujours été un symbole de statut social dans le monde agricole. Nous devrions toutefois être prudents à cet égard. En 2013, le rapport Seeds for Success du Conference Board du Canada a révélé que les plus grands exploitants ne sont pas les plus rentables. « Travailler mieux » devrait toujours passer avant « être le plus gros »! Nous devons tenir compte de tous les coûts associés à un équipement toujours plus gros et plus lourd.

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• La disponibilité de l’eau peut être améliorée en augmentant l’agrégation du sol, la MO et la couverture de résidus de culture. La gestion de l’humidité de la rhizosphère peut être ajustée grâce à l’irrigation et au drainage souterrain. On doit trouver des moyens de garder l’eau là où elle tombe. Pour ce faire, on peut faire une gestion systématique des eaux de surface, y compris à l’aide de réservoirs de confinement, de barrages de correction et de la gestion des zones humides. Les inondations qui surviennent à Winnipeg indiquent qu’on a laissé passer des occasions de gérer l’eau sur terres cultivées en amont. Nous arriverons au point où la rentabilité de la production alimentaire se mesurera en calories produites par litre d’eau utilisé. L’eau est le premier facteur limitant de la productivité des sols.

ENSEMBLE, CES MESURES NOUS AIDERONT À SUBVENIR AUX BESOINS D’UNE POPULATION CROISSANTE, ET CE, DE MANIÈRE DURABLE. NOUS POUVONS SORTIR DE LA COURBE DE DÉGRADATION DES SOLS, MAIS SEULEMENT SI NOUS ADOPTONS UNE GESTION DES SOLS INTENSIVE, RESPONSABLE ET RIGOUREUSE SUR LE PLAN SCIENTIFIQUE.

Pour beaucoup, cela signifie un réel changement dans la gestion des sols. Et le changement implique généralement des risques! La gestion des risques est un sujet distinct, mais tout aussi important. Voici comment s’est passée ma propre transition vers une meilleure gestion des sols.

Pour réduire les risques, j’ai opté pour l’agriculture sans labour la première année. J’ai essayé plusieurs méthodes, et je faisais des vérifications à petite échelle dans les champs. Le rendement de mes champs a varié grandement d’une méthode à l’autre.

D’année en année, j’ai continué à adopter celles qui me donnaient le meilleur rendement. Si je m’étais limité à une formule prescrite et avais seulement essayé l’agriculture sans labour, j’aurais fort probablement échoué, ce qui aurait confirmé le risque. Pourtant, c’est ce que nous voyons se produire en recherche, quand sont comparées les méthodes de travail du sol. Et, trop souvent, on le voit aussi dans les champs, où une nouvelle méthode est mise à l’essai, puis abandonnée aussitôt.

J’ai ensuite développé un outil d’analyse du

« SYSTÈME » de cultures agricoles pour m’aider à tenir compte de tous les mouvements et interactions de la gestion des récoltes et des sols qu’il m’était

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possible de gérer. Si je modifiais un élément, cela se répercutait sur une partie ou la totalité des autres éléments, occasionnant souvent une réaction en chaîne.

Ce n’est qu’en remontant cette chaîne que je pouvais déterminer la source d’un rendement faible ou élevé. J’ai obtenu les meilleurs résultats avec l’agriculture sans labour quand j’ai trouvé la meilleure combinaison de pratiques.

J’ai utilisé le même processus d’amélioration du système de culture pour l’agriculture conventionnelle et l’agriculture sans labour afin de pouvoir faire une comparaison équitable des deux systèmes. De plus, j’ai accordé à chaque parcelle les mêmes soins qu’à un champ de 100 acres, car je voulais obtenir des résultats honnêtes s’appliquant au « monde réel ». Avec le temps, j’ai observé que l’agriculture sans labour me donnait, trois fois sur quatre, un meilleur rendement que l’agriculture avec travail du sol lorsqu’elles étaient comparées côte à côte. Les chances étaient nettement du côté de l’agriculture sans labour, qui s’est

rapidement avérée tout aussi fiable que l’agriculture conventionnelle. De toute évidence, il faut mettre à l’essai ces

méthodes pendant plusieurs années avant de pouvoir prendre une décision éclairée et faire des comparaisons valables.

J’ai également fait une comparaison économique des systèmes de travail du sol avec les données du Centre de gestion de

l’énergie de l’Ontario. L’agriculture sans labour représentait une amélioration de 35 % de la conservation d’énergie par rapport à l’agriculture conventionnelle.

Pour moi, les pratiques les plus efficaces en matière de conservation étaient aussi les plus rentables.

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Je n’ai pas fait tout ce travail et recueilli toutes ces données pour l’intérêt public. Je l’ai fait pour pouvoir prendre de bonnes décisions fondées sur ma propre expérience.

Chaque exploitation étant différente, chacun doit élaborer son propre « système » de gestion des récoltes et des sols et apporter des changements qui s’appliquent à sa situation. La recherche et le développement doivent faire partie intégrante de la culture de chaque exploitation. Le changement comporte certes son lot de risques, mais présente aussi des possibilités. Et notre plus

grand risque viendra du fait de maintenir le statu quo, qui ne permet aucun progrès. Nous pouvons gérer les risques afin d’exploiter les occasions qui se présentent.

Pour ma part, je me suis intéressé aux détails et j’ai pris le temps de bien comprendre mon système. Cela m’a beaucoup rapporté! Mon sol est devenu plus fertile.

Ce processus fait toute la différence.

Revenons maintenant à l’importance du sol.

GENS

Les gens, les mentalités et l’éthique sont notre plus grand obstacle pour renverser la dégradation des sols. Cependant, le sol indique que nous avons dépassé le « statu quo ». La croissance démographique accentue l’urgence de la situation. Nous devons réagir et prendre des mesures considérables pour prendre soin du sol et le protéger.

AGRICULTEURS

Les agriculteurs sont en première ligne. Qu’importent la région et les circonstances, les meilleurs AGRICULTEURS utilisent déjà des

méthodes qui contribuent à la restauration des sols. Ils réduisent le travail du sol, font augmenter la matière organique et font une utilisation rationnelle de l’eau. Maintenant, quelles mesures faut-il prendre pour amener les agriculteurs conventionnels et biologiques ainsi que tout le milieu agricole vers la restauration des sols? Quelle doit être la rigueur de ces mesures incitatives? D’autres choses sont-elles requises?

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D’autres acteurs doivent contribuer à protéger le sol et à en prendre soin.

CHERCHEURS

Les chercheurs doivent recentrer leurs recherches et mettre en balance leurs constatations avec les effets nets. Chaque aspect de la recherche agronomique doit tenir compte de la relation entre l’agriculture et la santé et la productivité des sols, car le sol est le fondement de l’agriculture. Les percées cruciales en agriculture dépendent de l’utilisation optimale des communautés

biologiques, de la gestion du carbone, de la stabilisation de la couche arable et de la gestion minutieuse de l’eau. Tout le reste suivra.

GOUVERNEMENT

Les politiciens, les décideurs et les planificateurs ont une responsabilité à l’égard de tous les

enjeux concernant le sol, enjeux qui nécessitent la contribution de tout l’appareil gouvernemental, pas seulement du milieu agricole. Le gouvernement doit financer la recherche et les activités qui nous extirperont de la courbe de dégradation des sols. Pour cela, il faut une politique ferme et novatrice. Si le seul soutien offert à l’agriculture était axé sur le soin et la protection des sols, tant les agriculteurs que le public en bénéficieraient. N’est-il pas temps que le sol soit traité comme une ressource naturelle essentielle? Cette question est fondamentale, car l’abondance alimentaire contribue au bien-être social et à la stabilité politique et constitue une ressource stratégique. Et cela a toujours été le cas à travers l’histoire.

SOCIÉTÉ

La société doit encourager et promouvoir la prise de mesures incitatives rigoureuses et la protection de nos précieuses terres agricoles : l’action gouvernementale découle toujours de la pression exercée par la société. Elle doit aussi se tenir informée : les philosophies, les

perceptions et l’esprit de clocher n’ont pas leur place quand notre approvisionnement alimentaire est en jeu.

ET TOUT CECI EST ESSENTIEL À NOTRE SURVIE, À L’HEURE DE LA DERNIÈRE FRONTIÈRE.

En résumé :

« L’agroécosystème » exige des changements dans la gestion des sols.

Il nous incombe de passer de « l’utilisation des sols » à la « protection des sols ». Nous

pouvons le faire.

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Nous connaissons les risques de la complaisance.

Sommes-nous prêts à accepter la responsabilité de ne rien changer?

Le CHOIX nous revient!

Réfléchissons à ce qui risque d’arriver si nous n’assumons pas nos responsabilités :

Si j’avais l’occasion de discuter avec les arrière-petits-enfants de mes petits-enfants, comment pourrais-je leur expliquer mon indifférence à l’égard de la protection de leur sol, de leur approvisionnement alimentaire?

Comment pourriez-vous l’expliquer à vos descendants?

NOTRE SOL COMPTE!

NOUS AVONS DU TRAVAIL À FAIRE!

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