• Aucun résultat trouvé

Québec LA CHASSE A L'OURS NOIRAVEC CHIENS COURANTS

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Québec LA CHASSE A L'OURS NOIRAVEC CHIENS COURANTS"

Copied!
41
0
0

Texte intégral

(1)

S! ^

vX^ V ,>! « " V \

LA CHASSE A L'OURS NOIR AVEC CHIENS COURANTS

par

Hélène Jolicoeur

Novembre 1991

*?

Québec

(2)

Direction de la gestion des espèces et des habitats Service de la faune terrestre

LA CHASSE À L'OURS NOIR AVEC CHIENS COURANTS

par

Hélène Jolicoeur

Ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche Novembre 1991

(3)
(4)

HI

RÉSUMÉ

Cinq races de chiens courants sont habituellement utilisées pour chasser l'ours noir. Après avoir flairé une piste d'ours fraîche à partir d'un chemin, les chiens, au nombre de 3 à 6, s'élancent à la poursuite de l'animal jusqu'à ce que celui-ci grimpe dans un arbre ou s'immobilise contre un obstacle. Les chiens en aboyant et en se montrant menaçants doivent maintenir l'ours dans cette position jusqu'à l'arrivée des chasseurs. Pour exécuter ce travail de rabattage, les chiens doivent subir un long entraînement en forêt et un processus de sélection très rigoureux. À cause de la valeur des chiens, les éleveurs munissent leurs bêtes de colliers-émetteurs. Ces dispositifs électroniques permettent de suivre plus facilement la poursuite et de localiser rapidement les ours immobilisés dans les arbres. Les colliers- émetteurs facilitent aussi la récupération des chiens à la fin de la journée. Une chasse à l'ours dure en moyenne 2 à 4 heures et des distances allant de 1,5 à 23 km peuvent être parcourues par l'ours pourchassé. Ces grands déplacements forcent les chasseurs à coordonner leurs actions au moyen de communications-radios. Des chasses avec chiens menées à titre expérimental ont démontré que les ours rusaient pour distancer les chiens, qu'ils restaient la plupart du temps dans leur territoire familier et qu'ils pouvaient aussi courir plusieurs heures sans jamais grimper dans les arbres. Parfois, les ours cessent leur course pour attaquer et même tuer les chiens qui les poursuivent. En moyenne, 30 % des ours poursuivis se réfugient dans les arbres pour échapper aux chiens. Des meutes particulièrement efficaces, comme celles détenues par des chasseurs professionnels, peuvent faire grimper jusqu'à 80 % des ours qu'elles talonnent. Les conditions atmosphériques, la période de l'année, le sexe et l'âge de l'ours ainsi que l'habitat peuvent, dans certains cas, favoriser les chasseurs. On ignore pour le moment ce qu'il advient vraiment des oursons séparés de leur mère lors d'une poursuite et si le stress de la course peut nuire à la productivité future des femelles pourchassées. On s'interroge aussi sur le tort que peuvent causer les chiens aux très jeunes ours, moins aptes à se défendre que leurs aînés de plus grosse taille.

La chasse à l'ours avec chiens est fortement controversée aux États-Unis dans le public et auprès de ceux qui pratiquent d'autres formes de prélèvement. On reproche à cette chasse

(5)

IV

d'être cruelle, peu sportive, trop efficace et surtout dérangeante. On craint aussi qu'elle ne soit un prétexte pour braconner des cervidés et qu'elle ne nuise aux espèces non-visées. Le succès de cette chasse et les problèmes de cohabitation entre utilisateurs de la même ressource peuvent être réduits par des modifications à la réglementation. C'est ce que la refonte des règlements de chasse réalisée en 1989 a tenté de faire. Mais il y a des problèmes d'ordre éthique qui ne pourront être apaisés de cette façon et qui ne manqueront pas de faire surface. Il est à craindre, par conséquent, que l'intensification de la chasse à l'ours avec chiens au Québec n'éveille le sentiment anti-chasse dans le public.

(6)

V

REMERCIEMENTS

J'aimerais remercier monsieur Marc-Jacques Gosselin, du Service de l'aménagement et de l'exploitation de la faune de l'Estrie, qui fut le premier, il y a de ça plusieurs années, à m'initier à la problématique de la chasse à l'ours avec chiens. Je remercie également monsieur Gilles Lamontagne, du Service de la faune terrestre, pour ses précieux commentaires et ses nombreuses suggestions visant à améliorer la forme et le fond de ce rapport. Ma reconnaissance s'adresse aussi à monsieur Serge Bergeron, du Service de la réglementation et à monsieur Normand Traversy, de la Direction générale de la ressource faunique, pour les avis techniques et les repères historiques concernant le dossier de la chasse à l'ours avec chiens.

Je tiens à souligner finalement la collaboration empressée de messieurs Charles H. Willey, du Vermont Department of Fish and Wildlife, Ken Elowe du Maine Department of Inland Fisheries and Wildlife et Bill J. Cook du National Park Service qui m'ont fourni leur expertise ainsi que du matériel audio-visuel.

(7)
(8)

Vil

LISTE DES FIGURES

Page Figure 1 Races de chiens pour chasser l'ours. De gauche à droite: la

race Walker. Redbone. Coonhound noir et feu et Redbone 5 Figure 2 Chien pisteur de race Walker en opération à l'arrière d'une

camionnette 5

(9)
(10)

IX

LISTE DES ANNEXES

Annexe A Lettre de monsieur William J. Cook concernant l'utilisation des chiens pour chasser l'ours.

Annexe B Tableau synthèse de la réglementation relative à la chasse à l'ours avec chiens dans quelques provinces canadiennes et quelques états américains (Charles Willey, comm. pers.).

(11)
(12)

XI

TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ iii REMERCIEMENTS v USTE DES FIGURES vii USTE DES ANNEXES . ix TABLE DES MATIÈRES xi 1. INTRODUCTION 1 2. TERMINOLOGIE 3 3. LES CHIENS 4 4. LA CHASSE À L'OURS 8 4.1 Le pistage 8 4.2 La poursuite 9 4.2.1 Le déroulement 9 4.2.2 Le comportement des ours 10 4.2.3 Le taux de réussite 11 4.2.4 Le taux de succès 13 4.2.5 Les impacts négatifs possibles 14 4.3 L'abattage 15 4.4 L'entraînement 17 5. CONCLUSION 19 6. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 21

(13)
(14)

1. INTRODUCTION

La popularité grandissante de la chasse à l'ours noir (Ursus americanus) avec chiens a provoqué, au cours des dernières années aux États-Unis, une grande controverse qui a nourri le feu du mouvement anti-chasse et qui a dressé les groupes de chasseurs entre eux.

Parmi les points débattus lors de cette controverse, il y a l'opinion que la chasse avec chiens est cruelle de par son côté harcelant, qu'elle est peu sportive, trop efficace et dérangeante pour la faune en général ainsi qu'à l'égard des autres utilisateurs et des propriétaires terriens. C'est un débat hautement émotif où les opposants persistent à dresser, sur le terrain des opinions partisanes, des barricades si élevées qu'ils perdent finalement la juste vision des choses.

Appelées à intervenir dans le débat, les agences gouvernementales américaines responsables de la gestion de la faune entreprirent une série d'études de terrain afin de connaître l'impact réel de l'utilisation des chiens pour chasser l'ours et afin d'appuyer leur réglementation en conséquence. L'enjeu est de taille car, aux États-Unis, cette forme de chasse est assez importante. À titre d'exemple, citons le cas du Wisconsin dont 40 % de la récolte d'ours est obtenue à l'aide de chiens (Massopust et Anderson 1984); au Michigan, cette proportion serait de 33 % (Harger 1978) alors que dans l'état de Washington, elle atteindrait 90 % (Parsons et Poelker 1975). Au Québec, les statistiques sur la pratique de cette activité sont plutôt rares. Ce type de chasse serait populaire surtout en Estrie et d'après l'enquête menée en 1987, le nombre d'adeptes de cette forme de prélèvement formaient 0,4 % des personnes interrogées (Sécoma 1988). Appliqué au nombre de permis de chasse à l'ours vendus en 1987 à des résidents du Québec (19 916 permis), ce pourcentage extrapolerait à 80 le nombre de chasseurs avec chiens courants. Par contre, on sait que beaucoup d'américains, frustrés par les resserrements réglementaires qui leur sont imposés dans leurs états respectifs, viennent pratiquer cette chasse au Québec.

Dernièrement, on a même découvert qu'un pourvoyeur américain offrait des forfaits de chasse à l'ours avec chiens au Lac Frontière, dans le comté de Montmagny.

(15)

2

Le gouvernement du Québec fut saisi des composantes de cette problématique vers la fin des années soixante-dix. Comme la pratique de la chasse avec chiens était jusqu'alors mal définie par la loi de la Conservation de la faune, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche forma, en 1980, un comité ad hoc chargé de revoir toute la législation concernant l'utilisation des chiens pour chasser. Après avoir consulté les principaux intervenants dans ce dossier (associations de chasseurs utilisant les chiens courants, rapporteurs et d'arrêt, agriculteurs, chasseurs conventionnels, trappeurs, propriétaires terriens, municipalités, juridictions américaines et canadiennes), le Comité formula toute une série de recommanda- tions dans le but de mieux encadrer le déroulement de la chasse avec chiens, l'entraînement des chiens en nature et la tenue de concours (Anonyme 1982). Pour l'ours noir, le Comité suggéra de maintenir deux saisons de chasse avec chiens mais de réduire la saison printanière à 15 jours soit du 1er au 15 mai. Le Comité proposa aussi de limiter le nombre de chiens courants par meute et par groupe de chasseurs à 5 chiens. Ces mesures visaient la protection de la faune en période de mise bas et d'élevage des jeunes, la limitation du succès de chasse des chasseurs avec chiens et le respect des autres groupes d'utilisateurs.

Ces dispositions furent adoptées à l'automne 1989 lors de la refonte des règlements sur la chasse. Cette mise en application fit, on s'en doute, des mécontents parmi les principaux intéressés qui proposèrent en retour de nouveaux aménagements réglementaires. Comme peu de gens ont eu l'occasion d'assister à une chasse à l'ours avec chiens et que l'informa- tion à ce sujet est plutôt rare, nous avons décidé de décrire en détails le déroulement de cette activité pour mieux saisir l'objet de la controverse qu'elle suscite. Par la même occasion, nous présentons l'opinion de certains habitués de cette question ainsi que les tentatives du monde scientifique pour trancher rationnellement ce débat.

(16)

2. TERMINOLOGIE

Les termes de «chasse à courre», de «vénerie», de «veneurs» et «d'équipage», propres à la pratique de la chasse avec chiens en Europe ont été volontairement omis dans ce rapport à cause de leur association avec une activité traditionnelle qui semblait très éloignée dans l'esprit, dans le déroulement et dans l'apparat de celle décrite plus loin. Des libertés ont été aussi prises au niveau de la traduction de certains termes anglais comme, par exemple, strike dog que nous avons traduit par chien pisteur. Pour plus de précisions, le terme anglais a été maintenu à côté de son équivalent français.

(17)

3. LES CHIENS1

Parmi les nombreuses races de chiens courants ou hound reconnues par les cercles du chenil canadien et américain, seulement 5 d'entrés elles montrent des aptitudes suffisantes pour traquer un gros carnivore comme l'ours noir. Ces races typiquement nord-américaines sont la Redbone. la Bluetick. la Plotthound. la Walker et la Coonhound noir et feu. Issues de croisements entre différentes races de chiens courants européens introduites aux États-Unis au 18e siècle, ces nouvelles souches combinent la robustesse à la témérité et à l'endurance, qualités essentielles pour chasser l'ours noir mais aussi le renard (Vulpes vulpes). le coyote (Canis latrans) et le loup (Canis lupus). Toutes ces races excellent en plus dans la chasse au raton laveur (Procyon lotor). La législation de certaines provinces canadiennes (le Québec entres autres) et de certains états américains n'obligent pas les chasseurs d'ours à posséder des chiens de race pure. Dans l'espoir de voir apparaître des sujets exceptionnels dans leur chenil, les éleveurs procèdent donc à divers croisements entre ces 5 races. Les plus audacieux vont même jusqu'à introduire du sang en provenance des races Airedale ou Pitbull pour accentuer certains caractères.

Idéalement, un chien spécialisé dans la chasse à l'ours doit peser entre 20 et 30 kilogram- mes. À ce poids, ils sont assez rapides pour talonner un ours de très près et suffisamment agiles pour s'écarter à temps advenant une attaque surprise de la part de l'ours. Ils doivent posséder un flair exceptionnel leur permettant de détecter une piste vieille de moins de 10 heures, de retracer l'ours à partir de cette piste, de faire grimper l'animal dans un arbre et de le maintenir dans cette position jusqu'à ce que les chasseurs les rejoignent même si cela doit prendre des heures. Les chiens doivent donc être en mesure d'aboyer fort et sans arrêt pour permettre aux chasseurs de localiser l'arbre où se tient l'ours. Le développement chez le chien courant de ce caractère hautement sélectif est d'une importance capitale dans le déroulement de ce sport et il n'est obtenu qu'au prix d'un très grand effort de dressage.

1. Inspiré de Smith (1985).

(18)

Figure 1: Races de chiens pour chasser l'ours. De gauche à droite: la race Walker.

Redbone. Coonhound noir et feu et Redbone. (Photo, Ken Elowe du Maine Department of Inland Fisheries and Wildlife).

Figure 2: Chien pisteur de race Walker en opération à l'arrière d'une camionnette (Photo, Ken Elowe du Maine Department of Inland Fisheries and Wildlife).

(19)

6

Même si exceptionnellement un chien peut faire à lui seul ce travail, la plupart du temps cela prend une équipe de chiens pour réussir cette manoeuvre. Habituellement, les meutes de chiens utilisées pour chasser l'ours sont constituées de 3 à 6 chiens. Dans un meute nombreuse, on mélange, pour bien faire, 3 chiens expérimentés avec 2 à 3 jeunes chiens en apprentissage. Au-delà de ce nombre, les chiens se nuisent et il peut résulter de la confusion aux moments stratégiques. Au Michigan et au Wisconsin, la taille des meutes est limitée à 6 chiens et il n'est pas permis de relayer les chiens fatigués. Le Vermont, de son côté, ne permet qu'un seul relais par ours poursuivi (Anonyme 1989). Au Québec, le règlement n'interdit pas le relais mais aux dires d'un chasseur, il est très difficile de le pratiquer. Une fois lancés sur la piste d'un ours, les chiens ne veulent plus lâcher prise et ne sont guère portés à l'obéissance. Le relais n'est possible que si le chasseur intercepte la meute à la hauteur d'un chemin.

Les chiens courants portent normalement de larges colliers de cuir avec des plaques de métal sur lesquelles apparaissent les coordonnées du propriétaire. Au Québec, ce type d'identification est obligatoire. Le collier peut servir aussi à protéger le cou du chien des morsures de l'ours. S'il est en plus de couleur voyante ou muni de réflecteurs, le collier aidera le chien à se faire bien voir et lui évitera la disgrâce de mourir sous la roue d'un véhicule ou le projectile d'un chasseur.

Anciennement, la poursuite était suivie à l'aide d'un dog-voice. sorte de réflecteur parabolique qui captait les aboiements des chiens au loin et qui permettait leur localisation.

De nos jours, les chiens sont presque tous équipés d'émetteurs-radios. Non seulement cet appareil aide-t-il la localisation de la meute lorsque cette dernière cerne un ours soit contre un obstacle ou dans un arbre mais en plus, il permet la récupération des chiens égarés ou morts. i

Les chiens courants utilisés pour la chasse à l'ours ont une grande valeur ne serait-ce que pour le temps que les chasseurs mettent à les sélectionner, à les entretenir et à les entraîner.

C'est pourquoi, les chasseurs évitent, autant que possible, de les perdre et de les exposer inutilement à des dangers. Malgré ces précautions, des chiens incomparables par leur flair

(20)

7

et leur courage sont, tôt ou tard, tués ou gravement blessés en essayant de cerner un ours.

Il arrive même que des chiens meurent d'épuisement lors d'une poursuite ou qu'ils soient écrasés par un ours qui tombe d'un arbre.

La récupération des chiens ne pose habituellement pas de problème lorsque la poursuite est fructueuse. Une fois l'ours localisé par les chasseurs, les chiens sont mis en laisse et attachés à un arbre jusqu'à la fin des opérations. Lorsqu'une poursuite est abandonnée en raison de l'heure tardive ou de l'inaccessibilité de l'endroit où se terre l'ours, les chiens doivent compter sur eux-mêmes pour retrouver leur chemin. En temps normal, ils regagnent la première route qu'ils rencontrent et ils attendent d'être récupérés par leurs maîtres. Certains chiens vont refaire le trajet à l'inverse pour sortir de la forêt au point de départ. D'autres vont décider de se reposer un ou deux jours avant de sortir sur une route.

Des individus vont même jusqu'à se rendre à la première habitation qu'ils vont rencontrer sur leur route. La récupération des chiens fait partie de l'enjeu de ce type de chasse; par conséquent, les chasseurs acceptent d'y mettre l'effort nécessaire. Malgré cela, des chiens ne sont pas retrouvés et sont abandonnés dans la forêt par leur maître.

(21)

8 4. LA CHASSE À L'OURS2

4.1 Le pistage

Pour débuter une chasse, il faut tout d'abord trouver une piste d'ours. Là où la densité d'ours est faible, on utilise un «nez froid» (cold-nosed hound) qui sentira des pistes vieilles de 12 à 18 heures. Si, par contre, la densité d'ours est forte et que les pistes sont nombreuses, on aura alors intérêt à faire travailler un «nez chaud» (hot-nosed hound) qui s'en tiendra aux pistes les plus récentes. Pour repérer les pistes, les chasseurs peuvent 1°

circuler sur les chemins avec leurs chiens en laisse, 2° laisser courir leur chien pisteur, c'est- à-dire le chien le plus doué pour sentir les pistes (strike dog), et suivre en voiture, 3°

attacher leur chien pisteur à l'arrière d'une camionnette et circuler lentement sur les routes ou 4° entretenir des appâts et les visiter régulièrement pour voir s'il y a eu des signes de fréquentation par des ours. Si les chasseurs veulent poursuivre essentiellement de gros ours, il est préférable pour eux de tenir leurs chiens attachés et de vérifier eux-mêmes, lorsque le chien pisteur aboie, la grosseur des pistes de l'ours. Si le trophée importe peu, le chien pisteur peut être laissé libre et l'initiative de la poursuite peut lui être accordée. Lorsque les ours ne fréquentent pas beaucoup les chemins, comme c'est le cas au mois de mai, il peut être difficile de trouver des pistes d'ours et d'amorcer des poursuites. L'utilisation des appâts est alors avantageuse. Au Québec, en Ontario et au Maine, le pistage se fait surtout à partir des appâts et plus tard, au mois de juin, en promenant le chien pisteur en camionnette (Figure 2).

Si le chien pisteur est tenu en laisse et qu'il flaire une piste fraîche d'ours, il aboie et les chasseurs vérifient la direction de celle-ci avant de lâcher toute la meute. Le degré d'excitation du chien permet aux chasseurs, qui connaissent bien leur chien pisteur, d'obtenir des informations sur la fraîcheur de la piste. Si le chien est laissé libre, celui-ci s'engage aussitôt sur la piste. Il arrive parfois que le chien pisteur parte dans la mauvaise direction mais habituellement, il réalise vite son erreur et revient sur ses pas. C'est alors que le reste

2. Inspiré de Smith (1985).

(22)

9

de la meute est lâchée. Les chiens s'élancent à toute vitesse derrière le chien pisteur dans un concert d'aboiements.

4.2 La poursuite

4.2.1 Le déroulement

Dès qu'une poursuite est amorcée, les chasseurs se divisent. Un groupe peut suivre les chiens à pied et un autre circule en véhicule dans le secteur pour tenter de localiser les chiens qui jappent continuellement lors de la poursuite. Selon la tonalité de l'aboiement, un chasseur peut savoir si les chiens poursuivent toujours l'ours ou, au contraire, ont réussi à le cerner. Les poursuites à pied sont très difficiles et demandent une parfaite condition physique car les ours se retranchent habituellement dans la partie la plus touffue de leur habitat dans l'espoir de distancer les chiens. Dans l'excitation de la poursuite, il est aussi facile de se perdre en forêt. C'est pourquoi les chasseurs qui poursuivent à pied sont équipés de talkie-walkie et sont en contact avec le groupe motorisé pourvu de Citizen Band (C.B.). Grâce à ce type de communication et à l'utilisation des véhicules à quatre roues motrices, tous les membres du groupe de chasseurs peuvent participer de près ou de loin à la poursuite.

À l'occasion, le groupe motorisé croise sur un chemin l'ours poursuivi par les chiens. Les chasseurs postés en bordure de la route peuvent décider de tuer l'ours, s'il n'y a aucun danger de blesser les chiens du même groupe. Mais de façon générale, les chasseurs préfèrent laisser travailler leurs chiens jusqu'au bout, c'est-à-dire jusqu'à ce que l'ours soit immobilisé près d'un obstacle ou grimpé dans un arbre. Par contre, les chasseurs peuvent profiter de cette interception pour relayer la meute ou pour ajouter un ou deux chiens de plus. L'addition de ces nouveaux participants plein d'ardeur à la poursuite peut augmenter la pression sur l'ours suffisamment pour lui faire arrêter sa course plus tôt.

Lors d'une chasse expérimentale menée au Maine dans un secteur où bon nombre d'ours étaient suivis depuis plusieurs années à l'aide d'émetteurs-radios, Allen (1984) a pu

(23)

10

déterminer qu'une chasse à l'ours durait, de façon générale, entre 2 et 4 heures mais que certaines poursuites pouvaient s'arrêter après 10 minutes et d'autres après 12 heures. Pour échapper à leurs poursuivants, les ours maintenaient une vitesse de 4,4 km/heure. La distance parcourue par les ours pourchassés s'élevait en moyenne à 6,5 km avec des extrêmes allant de 1,5 km à 23 km.

4.2.2 Le comportement des ours

Pour échapper à leurs poursuivants, les ours peuvent se montrer rusés. Ils vont jusqu'à s'enfoncer dans des taillis épais connus d'eux seuls, traverser des plans d'eau ou marcher dans un ruisseau. Par moment, ils peuvent revenir sur leurs propres pistes pour désorienter les chiens ou tourner en rond. Dans 53 % des cas, les ours poursuivis au Maine sont restés à l'intérieur de leur domaine vital (Allen 1984). Parmi ceux qui s'étaient éloignés de leur territoire familier, la majorité (65 %) est revenue au cours de la même journée, après s'être écartée de moins de 2 km des frontières de leur domaine vital. Au lendemain de ces poursuites, les biologistes du Maine ont pu constater, grâce à la télémétrie, que les ours pourchassés la veille se tenaient dans la partie la moins accessible de leur domaine familier par crainte d'être repérés probablement (Allen 1984). Ces constatations ont aussi été faites par Elowe (1990) qui a travaillé dans plusieurs états de la Nouvelle-Angleterre et en Utah.

La réaction des ours est variable d'un individu à l'autre suivant son tempérament. Il est donc difficile d'établir des généralités. Au cours de ses recherches, Allen (1984) a observé que certains ours couraient devant les chiens durant des heures sans montrer des signes de fatigue; d'autres couraient un certain laps de temps, s'arrêtaient et se battaient avec les chiens. Ils s'enfuyaient à nouveau à l'approche des chasseurs et répétaient ce manège indéfiniment sans jamais monter dans un arbre. D'après Elowe (1990), les ours les plus enclins à attaquer sont généralement les gros mâles. Les ours âgés de 2 à 3 ans et pesant entre 40 et 50 kg sont, pour leur part, davantage portés à courir et à mener des poursuites longues et déroutantes pour les chiens. Smith (1985) ajoute, de son côté, que les femelles de cette catégorie de poids et d'âge sont loin d'être démunies et il rapporte que certaines d'entre elles ont mené la vie dure à plus d'un chien.

(24)

11

Les individus qui montrent le plus de constance dans leurs réactions semblent être les femelles accompagnées d'oursons. On a remarqué, au Maine, que ces dernières, lorsqu'elles se savent poursuivies, font monter en premier lieu leurs oursons dans les arbres, amorcent une poursuite pendant quelques minutes et reviennent au point de départ, certainement pour vérifier si leurs oursons sont toujours là. Ce type de comportement informe les chasseurs expérimentés qu'ils ont affaire à une femelle suitée (Allen 1984). Les oursons demeurent dans l'arbre jusqu'à ce que leur mère revienne les chercher. La mère ne monte jamais dans le même arbre que ses petits. Lorsque les oursons sont plus âgés, ils peuvent

courir avec leur mère mais ce n'est pas fréquent.

4.2.3 Le taux de réussite

Même si le but ultime est de faire grimper un ours dans un arbre, il arrive que certains ours refusent de grimper ou encore que certains chiens inexpérimentés ou manquant d'agressivité n'arrivent pas à induire ce comportement. Pour faire monter un ours dans un arbre, il faut que les chiens mettent beaucoup de pression soit en aboyant constamment après l'ours ou en se tenant très près de lui ou encore en cherchant à lui mordre les flancs. Malgré ce harcèlement, le succès n'est pas garanti. Lors de la chasse expérimentale menée au Maine (Allen 1984), les poursuivants ont réussi à faire grimper les ours dans une proportion de 33 % seulement (27/81 poursuites). Ce taux de réussite peut cependant atteindre 80 % avec une meute exceptionnelle aidée de chasseurs expérimentés et motivés (Elowe 1990).

La compétence des chasseurs et des chiens est probablement le facteur qui influence le plus le taux de réussite d'une chasse et plus le tandem chasseur-chien travaille ensemble plus ils ont des chances d'améliorer leur performance. Les professionnels de la chasse comme les guides et les pourvoyeurs, sont pour cette raison les plus efficaces dans ce type de chasse.

Depuis que le Vermont a interdit la chasse commerciale avec chiens sur son territoire, le nombre d'ours récoltés par l'ensemble des chasseurs de cet état est redescendu à un niveau satisfaisant après avoir connu une hausse inquiétante (Anonyme 1989).

La télémétrie, les communications-radios et l'usage de véhicules à quatre roues motrices ont aidé sensiblement les adeptes de la chasse avec chiens à améliorer leur performance.

(25)

12

L'utilité des émetteurs-radios a été évaluée par Elowe (1990) au cours des 86 poursuites qu'il a entreprises et qui se sont soldées par la capture de 60 ours. Dans 38 % des cas, la télémétrie fut jugée essentielle pour la capture des ours; sans elle, ces ours n'auraient pas été localisés au moment où ils s'étaient réfugiés dans un arbre. Dans 23 % des poursuites, la télémétrie fut considérée comme utile, c'est-à-dire qu'elle a accéléré la découverte des ours, alors que dans 38 % des cas, elle fut déclarée d'aucune utilité. Les communications- radios, de leur côté, assurent une meilleure coordination des chasseurs qui passeraient sinon plus de temps à se courir, eux et leurs chiens, qu'à courir les ours. Elles facilitent aussi, avec les quatres roues motrices, l'exploration de secteurs peu accessibles qui n'auraient jamais été chassés autrement.

Mais au delà de l'expérience des chasseurs et des chiens, de l'intérêt mercantile et des facilités technologiques, d'autres facteurs viennent jouer sur l'issue d'une poursuite. Les conditions climatiques arrivent probablement au premier rang de ces influences extérieures limitantes. Une température fraîche (2-14 °C) et humide accorde habituellement le maximum de chances aux poursuivants. Lorsque la température est trop élevée, les chiens se fatiguent vite et lorsqu'il pleut, les odeurs s'effacent rapidement. Durant les jours de grands vents, il est difficile d'entendre les chiens japper et de suivre la poursuite.

La période de l'année joue aussi un rôle déterminant en alliant l'effet de la température à la condition physique des ours et à leur comportement saisonnier. La meilleure période pour chasser l'ours avec des chiens semble, au printemps, se situer entre la mi-mai et la mi- juin. Plus tôt, les ours sont peu mobiles et difficiles à trouver; plus tard, ils sont en bonne condition physique et la température chaude avantage les ours au détriment des chiens. À l'automne, la température fraîche et l'excès de poids des ours favorisent à nouveau les chiens (Elowe 1990). Une saison automnale hâtive, c'est-à-dire qui débute au mois de septembre, donne de très bonnes chances à ceux qui utilisent des chiens, surtout au cours des années de pénurie alimentaire durant lesquelles les ours se concentrent près des champs de céréales, de maïs ou près des vergers. Par contre durant cette saison, les chasseurs avec chiens doivent cohabiter avec d'autres utilisateurs de la ressource faunique tels les chasseurs

(26)

13

de gros et de petit gibier et les trappeurs. Pour éviter des conflits, les chasseurs avec chiens limitent naturellement leurs activités aux périodes de moindre affluence.

L'habitat exerce finalement un rôle non-négligeable sur le taux de réussite d'une chasse.

Lorsque le sous-bois est propre, comme dans une érablière, les poursuivants sont avantagés par l'absence d'obstacle. La présence de gros fûts incite de même les ours à grimper plus fréquemment aux arbres ce qui contribue à améliorer le succès de la poursuite. Allen (1984) a ainsi constaté que 63 % des poursuites qu'il avait effectuées dans ce type d'habitat avaient été couronnées de succès. Il a aussi noté que le diamètre des arbres recherchés par les ours était d'environ 60 cm et dans la majorité des cas, ils étaient les plus gros spécimens du peuplement. Ces gros arbres offrent peut-être un plus grand sentiment de sécurité aux ours car il est plus facile d'y monter très haut et d'y descendre rapidement.

4.2.4 Le taux de succès

Le terme «taux de succès» a un sens assez stricte en langage cynégétique. Il correspond au rapport entre les animaux prélevés par un moyen de capture et le nombre d'utilisateurs de ce moyen de capture. Au Québec, le taux de succès de la chasse à l'ours était de 11 % en 1990 (2 744 ours tués par la chasse/24 797 détenteurs de permis). À l'intérieur du groupe de chasseurs, il n'est pas possible, pour l'instant, de calculer le taux de succès des chasseurs à la carabine, des archers ou des chasseurs avec chiens. On ne peut pas non plus déterminer celui des trappeurs d'ours car on ne connaît pas leur nombre. Cette pénurie d'information entretient, ici comme aux États-Unis, la confusion au sujet de la chasse avec chiens.

Certains chercheurs considèrent que la chasse avec chiens est plus efficace que les autres méthodes de chasse alors que d'autres la jugent équivalente. Au Tennessee, Conley (1974) a trouvé que les chasseurs avec chiens, qui ne représentaient que 21,4 % des chasseurs, récoltaient à eux seuls 43,9 % de l'ensemble des ours tués. Cook (comm. pers.; annexe A) est lui aussi convaincu que l'usage des chiens donne un net avantage aux chasseurs en permettant à un petit nombre d'entre eux de récolter rapidement les ours disponibles dans

(27)

14

un secteur donné. D'ailleurs, ce n'est pas par hasard que les braconniers qui opéraient dans les parcs nationaux américains avaient opté pour cette forme de prélèvement. Le taux de réussite élevé, garanti par des meutes entraînées, de même que les profits réalisés sur la vente de la peau, des griffes, de la viande et surtout de la vésicule biliaire valaient probablement le risque d'opérer ainsi au grand jour avec un tel déploiement. Harger (1978) et Elowe (1990) sont cependant plus modérés dans leurs affirmations. Ils reconnaissent que la chasse avec chiens peut être plus efficace que les autres modes de prélèvement lorsque celle-ci se déroule dans des conditions idéales seulement.

4.2.5 Les impacts négatifs possibles

Un autre aspect obscur de la chasse avec chiens qui occasionne bien des discussions concerne le devenir des oursons séparés de leur mère. D'après sa propre expérience, Elowe (1990) conclut que les poursuites dirigées contre les femelles suitées ne mènent pas nécessairement à la dissociation des familles comme on a pu le croire antérieurement. Pour sa part, Cook (comm. pers.; annexe A), qui a contribué à démanteler des réseaux de braconnage d'ours dans les parcs nationaux américains, prétend que la chasse avec chiens perturbe réellement les liens familiaux. Au parc national Great Smoky Mountains, où il oeuvrait à titre de biologiste, Cook fut témoin de cas de séparations mères-oursons et d'attaques d'oursons par des chiens après le passage de braconniers opérant avec des meutes bien entraînées. En 1987, il récupéra 14 oursons abandonnés ou blessés qui étaient sur le point de mourir de faim et de soif (Annexe A). Encore selon lui, les oursons ne sont pas de taille à se défendre contre les chiens et beaucoup d'entre eux meurent des suites du zèle un peu trop excessif des chiens.

La productivité future des femelles poursuivies pourrait être aussi affectée par l'effort physique et le stress de la poursuite. À titre d'indice, nous avons relevé que le succès de reproduction des ourses poursuivies expérimentalement au Maine avait été très faible. En effet, seulement une femelle sur 7 a eu des petits au cours de l'hiver suivant (Allen 1984).

Comme l'âge de ces femelles n'est pas connu, il est difficile d'imputer directement ce faible

(28)

15

taux au stress subi lors de la poursuite. Il pourrait découler simplement du nombre élevé de femelles impubères dans l'échantillon.

Finalement, il faut reconnaître que la réaction de la grande et de la petite faune au passage des chiens est plutôt mal documentée. Smith (1985) affirme que les cerfs s'enfuient en entendant les aboiements et donnent souvent l'impression qu'ils sont courus, ce qui serait faux. Selon lui, un éleveur sérieux n'a que faire d'un chien qui s'intéresse d'un peu trop près à un autre animal qu'un ours. Smith (comm. pers.) a aussi observé un cerf de Virginie (Odocoileus virginianus) mâle à l'orée d'un bois où prenait place une poursuite. L'animal était immobile, aux aguets et prêt à bondir au moindre changement de direction de la meute. À l'instar de Smith (1985), Elowe (comm. pers.) ne croit pas que les chiens peuvent s'en prendre à d'autres espèces que l'ours lors d'une chasse. Cette opinion est, cependant, loin d'être partagée par Cook (comm. pers.; annexe A) qui affirme que les chiens à ours courent fréquemment des cerfs de Virginie, des sangliers et qu'ils s'en prennent même à des visiteurs de parcs nationaux en promenade hors sentiers. Quant au braconnage des cervidés sous le couvert d'une chasse à l'ours avec chiens, Elowe (comm. pers.) croit que c'est un phénomène peu probable.

4.3 L'abattage

Approcher un ours qui est acculé à un obstacle procure, d'après Smith (1985), une excitation sans pareil. L'ours est souvent caché dans des touffes d'arbustes et pour le voir, il faut s'avancer considérablement. Si le participant à la chasse prend bien soin de se déplacer lentement, dans le sens contraire du vent, il pourra apercevoir l'ours, les oreilles rabattues, le poil hérissé et le dos tourné contre un obstacle, faire face à ses attaquants et parfois même les attaquer. C'est le moment idéal pour le tuer. Si l'ours se rend compte de la présence du chasseur avant que celui-ci ne soit en position de tir, il détalera et la poursuite recommencera.

Lorsqu'un ours grimpe finalement dans un arbre et qu'il est maintenu dans cette position par les chiens, il est coutume chez les chasseurs d'attendre que tous les participants arrivent

(29)

16

avant d'entreprendre quelque action que ce soit. L'approche doit se faire, là aussi, le plus discrètement possible car l'ours peut décider de redescendre à terre et de poursuivre sa course. Si les participants décident de ne pas le tuer, parce qu'il s'agit d'une femelle, d'un ours trop petit ou parce qu'ils voudraient simplement continuer la poursuite, les chiens sont alors mis en laisse et attachés plus loin à un arbre. Un des chasseurs cogne la base de l'arbre avec un gourdin. Les vibrations ainsi créées insécurisent l'ours qui, la plupart du temps, choisit de descendre de l'arbre et de s'enfuir. Si, par contre, les chasseurs décident de le tuer, tout doit être fait alors pour que l'animal soit sacrifié de façon rapide et propre.

Un coup dans la tête est souhaitable sauf si l'animal est pourchassé à titre de trophée, ou qu'il est impossible de l'atteindre de cette façon. Des tireurs sont aussi postés en retrait au cas où l'ours ne serait que blessé en touchant le sol. Certains chasseurs considèrent que l'ours appartient au premier chasseur qui arrive à l'arbre où est grimpé l'ours; d'autres, adoptent une attitude plus conciliante permettant à celui qui n'a pas encore abattu d'ours dans la saison de le faire.

L'âge et le sexe des ours tués par les chasseurs avec chiens varient selon les études et aucune tendance ne semble se dessiner dans les statistiques. À titre d'exemple, Poelker et Hartwell (1973) dans l'état de Washington, ont constaté que les femelles étaient plus touchées par ce type de chasse. En Caroline du Nord, on précise que ce sont les femelles avec oursons qui sont le plus vulnérables (Hardy 1974) alors qu'au Vermont (Willey 1972) et au Michigan (Harger 1978), on note que les mâles adultes sont sélectionnés de façon préférentielle pour le trophée. Au Maine, le rapport des sexes des ours prélevés par les chasseurs avec chiens est, bon an mal an, autour de 50:50 (Elowe 1990).

Ces statistiques viennent démentir les allégations des chasseurs avec chiens qui prétendent épargner certains segments de la population d'ours comme les oursons ou les femelles suitées. La sélection des sujets à abattre, si elle se pratique, ne peut être le fait que d'une élite de chasseurs assez habiles pour faire grimper plusieurs ours en peu de temps. À cette difficulté s'ajoute celle de pouvoir différencier l'état reproducteur le sexe d'un individu assis sur une branche dans le haut d'un arbre.

(30)

17 4.4 L'entraînement

Les chiens entraînés à chasser l'ours ont souvent été formés sur des ratons laveurs. En effet, tout comme l'ours, le raton laveur grimpe dans un arbre quand il se sent harcelé et qu'il n'entrevoit plus aucune possibilité de fuite. La poursuite des ratons laveurs sert surtout à l'entraînement des jeunes chiots car les ratons se déplacent peu comparativement à un ours.

L'éleveur peut alors plus facilement suivre et guider son chien pour qu'il adopte le comportement désiré. Lors de l'entraînement, l'éleveur doit décourager le chien de poursuivre toute autre bête à part l'ours et le raton laveur. Des colliers qui assènent des chocs électriques à distance sont utilisés dans ce but précis. Une autre façon de dompter un chien est de l'exposer délibérément à une piste de cervidé, par exemple, et de lui interdire tout mouvement par un commandement sec.

Dans la plupart des juridictions américaines et canadiennes qui nous entourent, on permet aux éleveurs d'entraîner leurs chiens en forêt en dehors des saisons de chasse à l'ours (Annexe B). La période d'entraînement peut se situer avant ou après la saison légale. Les gestionnaires du Vermont sont d'avis que la saison d'entraînement ne devrait pas ouvrir avant le mois de juin (Anonyme 1989). Au mois d'avril et de mai, les sources de nourriture sont rares et les ours doivent ménager leurs forces pour survivre jusqu'à la saison de reproduction qui commence en juin (Anonyme 1989). Au Québec, la saison d'entraînement va du 1er juillet au 1er avril suivant.

Durant l'entraînement, les chiens sont encouragés à relever des pistes, à poursuivre les ours et à les faire grimper dans les arbres. L'entraînement se déroule comme une vraie chasse sauf que l'animal n'a pas le droit d'être abattu. Cette activité peut avoir cependant des impacts négatifs sur la population d'ours. Lorsque la densité d'ours est faible à un endroit et que celui-ci se prête bien à l'entraînement (ex.: érablière), le harcèlement dont sont victimes les ours qui y résident peut, à la longue, devenir stressant et nuisible. Le dérangement des ours blottis dans leurs tanières ou sur le point d'entrer en hibernation est un point tout aussi controversé et qui nous concerne particulièrement. De plus, il y a toujours des pertes à déplorer durant cette période. En effet, à l'occasion, des éleveurs

(31)

18

doivent abattre un ours pour se protéger eux ainsi que leurs chiens. Cook (comm. pers.), de son côté, va plus loin et prétend que les ours sont tués intentionnellement durant l'entraînement pour renforcer positivement le comportement des chiens. Les chiens ne courent pas par plaisir; ils le font pour obtenir une récompense et cette gratification, c'est l'ours. Il faut donc qu'ils obtiennent, de temps à autre, l'objet de leur convoitise pour garder leur ardeur au maximum. Elowe (1990) pense finalement que la saison d'entraînement a du bon puisqu'elle entraîne autant les ours que les chiens et que les individus poursuivis une fois apprennent mieux à se tirer d'affaire par la suite.

(32)

19 5. CONCLUSION

La controverse entourant l'utilisation des chiens courants pour chasser l'ours revêt, comme nous l'avons vu, de multiples facettes. Les efforts des chercheurs américains ont permis d'éclairer certains aspects cynégétiques de cette forme de prélèvement. Quelques affirmations peuvent maintenant être avancées avec plus de certitude; ainsi on peut dire que l'utilisation des chiens ne garantit pas le succès d'une poursuite contrairement à ce qu'on pouvait croire antérieurement. On sait maintenant que la télémétrie et les communications- radios augmentent sensiblement le taux de réussite des chasseurs en faisant gagner du temps de recherche et en permettant de retrouver les ours cachés dans les parties inaccessibles de leurs domaines vitaux. Le comportement des ours lors d'une poursuite est mieux compris.

Désormais, on sait que certains ours combattent les chiens qui les talonnent, qu'ils rusent pour les déjouer et qu'ils utilisent les recoins les plus touffus et inaccessibles de leur environnement familier pour distancer leurs poursuivants. On est aussi en mesure d'affirmer que le taux de succès des poursuites est proportionnel au degré d'entraînement du tandem chiens-chasseurs ce qui situent les professionnels de la chasse (guides, pourvoyeurs), en opération durant toute une saison, parmi les plus efficaces.

Les études de terrain et les analyses statistiques n'ont, par contre, amené que peu de précisions sur les questions touchant la vulnérabilité de certaines catégories de sexe ou d'âge, sur les effets du stress de la poursuite sur la productivité future des femelles et sur la dissociation des cellules familiales. Toute la question du dérangement de la faune non- visée n'a pas été élucidée et ne le sera probablement jamais vu la nature des études que cela commanderait. Le taux de succès de cette chasse n'a pu être, non plus, comparé avec d'autres formes de prélèvement comme la chasse à l'affût, la chasse sur appât ou le piégeage.

La chasse à l'ours avec chiens, est aux dires de ses adeptes, une activité très excitante et pleine d'anticipation. L'abattage de l'ours, même si c'est le but recherché, ne constitue pas le seul point fort de cette activité. La sélection des chiens, leur entraînement, la compétition amicale entre éleveurs sont des étapes toutes aussi passionnantes et même plus.

(33)

20

Le vrai sport, là où le chasseur montre vraiment son habileté, se situe en fait dans tout ce qui précède la chasse elle-même. Comparée à d'autres modes de prélèvement, la chasse à l'ours avec chiens fournit probablement le maximum de jours-récréation par ours prélevé.

Mais alors que la chasse à l'affût, sur appât ou le piégeage se pratiquent dans une relative discrétion, la chasse à l'ours avec chiens, de son côté, est bruyante et dérangeante. En effet, non seulement, elle revêt un côté irritant pour les propriétaires de terrains privés qui se voient envahis par les chasseurs captivés par leur poursuite mais elle amène aussi le public à se poser des questions d'ordre éthique. Est-ce que cette chasse donne une chance raisonnable à l'ours de s'en sortir? Est-ce qu'elle impose un trop grand degré de stress et de souffrance avant la mort? Est-ce que l'impact de cette chasse sur les cellules familiales, notamment la survie des oursons, est acceptable? Provoque-t-elle des impacts négatifs lors de sa préparation? Ces questions ne peuvent être résolues par des études scientifiques.

Elles relèvent pour la plupart du domaine des valeurs sociales que l'on sait être en perpétuelle évolution.

Plusieurs enquêtes menées au États-Unis indiquent que l'opinion anti-chasse du public s'accroît au même rythme que la population urbaine (Gilbert 1978). Cette tendance, qui est loin de se stabiliser est, aux dires de Gilbert (1978), le problème le plus difficile qu'auront à faire face les gestionnaires de la faune dans les prochaines années. Le public est intéressé aux questions touchant l'environnement et la faune en particulier retient son attention de façon privilégiée. La gestion de la faune ne pourra plus se faire en vase clos uniquement par des fonctionnaires mais devra s'ouvrir vers l'extérieur pour suivre les grands mouvements d'opinions.

La chasse à l'ours avec chiens n'a pas de racines profondes au Québec. C'est ce qui explique probablement que 70 % des chasseurs d'ours, des trappeurs d'ours et des chasseurs de cervidés consultés se soient prononcés pour son abolition (Sécoma 1,988). Les modifications réglementaires adoptées en 1989 sur la chasse avec chiens et sur l'encadre- ment obligatoire des chasseurs non-résidents ralentiront peut-être le développement de cette activité ou son taux de succès mais certainement pas les sentiments négatifs qu'elle inspire.

(34)

21 6. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

ANONYME. 1982. L'utilisation des chiens de chasse au Québec. Comité ad hoc de chasse avec chiens. Québec. Ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Direction générale de la faune. 67 p.

ANONYME. 1989. Draft bear management plan for the state of Vermont, 1990-1995.

Vermont Fish & Wildl. Depart. Non publié. 41 p.

ALLEN, B.R. 1984. Experimental pursuit of black bears with trained bear dogs. Proc.

East. Workshop Black Bear Manage. Res. 7: 54-58.

CONLEY, R.H. 1974. Methods of harvesting black bear in the southern Appalachian Mountains of Tennessee. Proc. East. Workshop Black Bear Manage. Res. 2: 195-206.

ELOWE, K.D. 1990. Bear hunting with hounds: techniques and effects on bears and the public. Proc. East. Workshop Black Bear Manage. Res. 10: —.

GILBERT, D.L. 1978. Sociological considerations in management, p. 409-416 in Schmidt, J.L. et D.L. Gilbert (eds). Big game of North America. Stackpole Books. Harrisburg.

Pennsylvania. 494 p.

HARDY, D.M. 1974. Habitat requirements of the black bear in Dane Country, North Carolina. M.S. Thesis. Virginia Polytechnic Inst. State Univ., Blackburg. 121 p.

HARGER, E.M. 1978. Hunting methods and their effect on the black bear population.

Proc. East. Workshop Black Bear Magage. Res. 2: 200-206.

MASSOPUST, J.L. et R.K. ANDERSON. 1984. The response of black bears to being chased by hunting dogs. Proc. East. Workshop Black Bear Manage. Res. 7: 59-65.

PARSONS, L.D. et R.J. POELKER. 1975. A comparison of the 1975 spring bear hunt in western Washington with 1970-1974 data. Washington State Game Dep., Olympia.

51 p.

POELKER, R.J. et H.D. HARTWELL. 1973. Black bear of Washington. Washington State Game. Dep., Olympia. 180 p.

SÉCOMA. 1988. Étude sur l'ours noir. Sondage auprès des clientèles actuelle et potentielle. Québec. Ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Service de l'analyse et de la recherche socio-économique. 45 p.

SMITH, R.P. 1985. The book of the black bear. Winchester Press. New Century Publishers Inc. Old New Brunswick. New Jersey. 249 p.

WILLEY, CH. 1972. Vulnerability of bears to hunting, p. 24-27 in R.L. Miller (éd.).

Proceeding of the 1972 black bear conference. New York State Dep. Environ. Conserv.

Delmar, N.Y.

(35)

22

ANNEXE A

Lettre de monsieur William J. Cook concernant l'utilisation des chiens

pour chasser l'ours

(36)

23

United States Department of the Interior

NATIONAL PARK SERVICE Federal Law Enforcement Training Center

Glynco, Georgia 31524

P 8 6 1 5 ( 2 8 6 )

December 7, 1990 ' M e m o r a n d u m ~

To: Ms. Helene Jolicoeur, Wildlife Biologist From: Bill Cook, Wildlife Protection Specialist Subject: Request for Assistance

I have enclosed a copy of the videotape that was made of several illegally guided black bear hunts that occurred in black bear sanctuaries (national parks) in the eastern United States.

Several concerns were expressed at the recent bear meeting in Arkansas. Allow me to repeat those concerns:

1.

2.

3.

5.

6.

7.

It was quite common for lactating adult maternal bears to be separated from their cubs.

Cub deaths occurred when they were caught by uncontrolled hunting dogs.

Separation of maternal females from their offspring often resulted in abandoned cubs that were discovered to be dying from starvation and dehydration. In one year (1987)

fourteen cubs were rehabilitated at a local veterinary facility after they were found abandoned or injured due to dog hunting.

The use of hunting dogs was usually combined with other illegal activities such as illegally guided clients, fee payments for allowing inexperienced dogs to hunt with

experienced dogs, and the use of illegally trapped bears to guarantee a successful hunt.

When bears were treed, they were all shot if possible, regardless of their size or sex.

Dogs used to hunt bears frequently chased other species including white-tailed deer, wild hogs and backcountry visitors.

Once dog hunting is allowed, it is difficult to regulate or stop.

(37)

24

8. Bear hunting dog training periods are often allowed by some states prior to the official hunting seasons. Most bears that were treed, were shot as a positive reenforcement for the dogs.

9. Dog owners were usually abusive or threatened landowners who objected to the dogs running on their property.

10. Abandoned or lost hunting dogs, when faced with starvation, often killed domestic livestock.

11. Radiotelemetry equipment, specifically transmitters on

radiocollared dogs, often was in the same frequency range as the research collared wildlife species in the same area.

This resulted in erroneous determinations of home range and activity data for wildlife research projects.

12. Five bears that had previously been radiocollared by research biologists, were located by illegal hunters using similar radio telemetry equipment, and their dogs were turned loose on the bears in their densités or day beds.

13. The use of hunting dogs quickens and improves the success of the hunt, possibly resulting in the loss of more bears from the population in a relatively shorter period of time by a smaller number of hunters.

14. Bear hunting dog clubs often alienate bear hunters who do not use dogs.

15. The use of bait or scent attractants and hunting dogs can be particularly effective, and possibly detrimental to marginal populations during periods of mast failure or food

shortages.

16. The use of hunting dogs disturbed all other hunting activities (deer hunting, grouse hunting, etc.).

I enjoyed our visit and as usual, it was good to hear of the progress you are making. After my presentation, I received several letters that were favorable to the presentation, but disturbed by its content.

Have a happy holiday season and new year. If I can assist you with more information, please call or write.

Sincerely,

William Joseph Cook

(38)

25

ANNEXEB

Tableau synthèse de la réglementation relative à la chasse à l'ours avec chiens dans quelques provinces canadiennes et

quelques états américains (Charles Willey, comm. pers.)

(39)

SUMMARY OF STATES AND PROVINCES BEAR HUNTING WITH HOUNDS

STATE OR PROVINCE

VERMONT

NEW YORK

MASS.

MAINE

NH

QUEBEC

PERMIT REQUIRED?

LIMIT ON HOUNDSMAN?

RES. NON-RES.

YES - P NO LIMIT

NO - P NO LIMIT

NO - P NO LIMIT NO - P NO LIMIT

YES - P NO LIMIT

NO - P NO LIMIT

YES - P NO LIMIT

NO - P NO LIMIT

NO - P NO LIMIT NO - P NO LIMIT

YES - P NO LIMIT

NO - P NO LIMIT

PERMIT FEE RES.

NONE

NONE

NONE

NONE

5.00

NONE

APP.

NON-RES.

NONE

NONE

NONE

NONE

5.00

NONE

HNDSMAN TRNG SEASON

6/1 - START OF HUNTING SEASON 8/1 TO END OF BEAR SEASON

OPEN YEAR ROUND MONTH OF AUGUST RES. ONLY

7/1 - 4/30

7/1 - 4/1

SEASON TO HARVEST BEAR WITH AID OF HOUNDS

9/1 - 9TH DAYS OF DEER SEASON

9/21 - 10/12

THIRD WEEK OF SEPTEMBER 9/15 - 10/31

10/1 - DAY BEFORE REGULAR DEER SEASON

5/1 - 5/15

FALL SEASON DEP-

TOTAL BEAR HARVEST

1989

311

880

29

2,690

241

2.646

NO BEARS TAKEN WITH HOUNDS 1989

68

31

0

397

38

UNKNOWN

SPECIAL CONDITIONS

MAND.HOUDNSMAN KI&OkXlNG FORM DUE 12/1 MAND.TELEPHONE REGISTRATION BY HOUNDSMAN TO D.E.C.

NON-RES.HOUND- SMAN MAY HUNT IN KILLING SEASON IF ACC. BY REG.

MAINE GUIDE RECIPROCITY

LAW

ONTARIO

NEW BRUNSWICK

NO - P NO - P NONE NONE NO TRAINING NO LIMIT NO LIMIT SEASON

ALLOWED

ENDS ON ZONE 8/24 - 9/29 9/08 - 10/8 9/18 - 11/14 SEPT - MID OCT.

4/15 - 6/15 (VARYS BY UNIT)

6,300 (1988)

200 NON RES. REST- RICTED TO ONLY A PORTION OF SPRING SEASON NO HUNTING WITH HOUNDS ALLOWED (CLOSED SINCE LATE 70'S)

(40)

Gouvernement du Québec Ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche Direction de la gestion des espèces et des habitats

SP 1923-01-92

(41)

Document PDF numérisé à 300 DPI Reconnaissance optique de caractères Numériseur Kodak 1260/1280

Adobe Acrobat 6.0

Le 20 décembre 2004

Micromatt Canada Ltée

Références

Documents relatifs

Si vous demandez à votre chien d’exécuter un ordre qu’il connaît, mais qui n’est pas en relation avec le contexte habituel dans lequel il l’exécute, il peut ne pas y

 les éleveurs commerçants : au moins une visite par mois. L’éleveur occasionnel, qui produit moins de trois portées par année, n’a pas besoin de détenir un agrément. Ceux-ci

126v-127v, 22 juin 1 784, Ordonnance de police portant avis que tous les chiens de toute espe`ce qui vagueront dans les rues de la ville et des fauxbourgs le jour et la nuit, a`

Pour la partie itinérante en chiens de traîneau d’autres hébergements particuliers, le Camp Trappeur camp en bois rond et son sauna, le Camp Arka, encore plus au nord, également en

Euzeby (1961) « on peut envisager une infestation maladie à partir de 6 000 œufs par gramme de fécès », ce chiffre a été rarement rencontré dans cette meute mais

exemple, étant mortelle pour le chien, et d’autre part c’est leur faire assimiler du mordant qui risque de se retourner contre eux, je jour où ils auront à faire à un

Dans le débat philosophique et théologique, ces distinctions ont souvent été radicalisées jusqu’à les mettre en opposition entre elles : l’amour descendant, oblatif,

Pendant le même concours, aucun chien concourant pour le brevet de chasse ne peut figurer dans deux lots ou dans deux catégories différentes si deux épreuves