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Le Camp de Gôttingen

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Le Camp de Gôttingen

Les manuscrits non insérés ne sont pas rendus.

6. Juin 1915.

Gœthe

Wolfgang von Gœthe, le plus grand poète allemand des temps modernes, vécut de 1749 à 1832. Il naquit à Prancfort-s-le-Main, fît ses étu- des à Leipzig et à Strasbourg, s'établit comme juriste à Wetzlar; mais il travailla surtout à Weimar, où la bienveillance du grand-duc Char- les-Auguste le plaça dans une haute fonction

officielle et lui donna l'occasion de s'adonner, sans soucis, à ses penchants poétiques.

Gœthe est un esprit universel, riche et profond.

Il ne s'occupe pas seulement de poésie mais aussi des problèmes des sciences naturelles.

C'est généralement son „Faust" que l'Allema- gne considère comme son œuvre principale. Il se rattache à la légende allemande du Dr.

Faust, qui étudia à Wittenberg et qui vendit son âme au diable. Gœthe a traité ce sujet dans un drame, où il l'amplifie en un tableau du déve- loppement intellectuel, religieux et moral de l'homme moderne. Les contemporains, surtout la classe cultivée, se retrouvent dans Faust, et c'est pour cette raison que tant d'Allemands de notre époque, apprécient si vivement cette œuvre de Gœthe. Le poète y dépeint, si l'on peut s'ex- primer ainsi, la façon dont l'homme résout, aux âges différents, le plus grand problème de l'existence, la question de son bonheur, de la satisfaction de son âme, de l'essence de la vie et de son devoir suprême. Pendant sa jeunesse, l'homme croit trouver dans la jouissance, dans le vin, dans la femme, dans la gaîté, la plus haute satisfaction ; mais l'esprit qui a des aspirations plus élevées ne s'en contente pas. C'est pourquoi le véritable Allemand se tourne vers les recherches scientifi- ques; mais toute science mène finalement à la conclusion que notre connaissance se heurte à des limites infranchissables. De même, le mysti- cisme, la magie laissent l'âme inassouvie. Ainsi Gœthe en vient à conclure qu'une vie active, vouée au bien du prochain, une vie qui trouve son objet sur cette terre et ses limites dans ce qui est réalisable et connaissable, représente la source du bonheur, où la grâce et l'amour cé- lestes doivent guider l'homme qui aspire plus haut vers le séjour des bienheureux. Voilà ce que contient Faust. Il est impossible de saisir toute la beauté de cette tragédie dans de la prose.

Beaucoup de passages de Faust survivent dans

le langage de tout Allemand cultivé. Pour ceux qui n'ont pas pénétré dans les profondeurs de la religion chrétienne, ce Faust de Gœthe tient presque lieu de Bible.

Outre Faust, une série de poésies de Gœthe vivent dans la mémoire du peuple allemand, par exemple la chanson populaire „Un garçonnet vit une petite rose" (Sah ein Knab' ein Rôslein stehn) ou la chanson „I1 y avait dans la prairie une violette" (Ein Veilchen auf der Wiese stand).

Parmi ses tragédies les plus connues, on cite :

„Iphigénie", le „Tasse", „Gôtz von Berlichin- gen", „Egmont". La jeunesse des écoles supé- rieures aime à lire ses souvenirs de la vie, intitulés: „Dichtung und Wahrheit" (Poésie et Vérité);

Les BConversations d'Eckerman avec Goethe"

(Eckermans Gesprâche mit Gœthe) qui nous mon- trent le poète dans sa maturité et nous présentent une riche image de ses larges vues intellectuelles et autres, sont très répandues et considérées comme la source de la plus profonde science de la vie.

La maison de Gœthe, à Weimar, est visitée chaque année par une foule d'Allemands. Dans bien des maisons allemandes, les chambres sont parées d'images de l'idyllique pavillon habité par Gœthe, et du portrait du poète à l'âge mûr, peint par Stieler.

Entre le monde des anciens, de l'antiquité classique et l'esprit de Gœthe il y avait de pro- fondes affinités. C'est pourquoi il aimait tant à séjourner en Italie; c'est pourquoi il a réussi avec une telle maîtrise à imiter le style d'Homère dans son épopée bourgeoise „Hermann et Doro- thée" et à reproduire, dans „Iphigénie" et le

„Tasse" la beauté grecque, faite de mesure et de calme.

En outre la littérature universelle l'a vivement intéressé. C'est ainsi que dans le „Westôstlicher Divan" il a imité la poésie arabe.

Gœthe, dont l'âme était si éprise de mysticisme, d'objectivité, de beauté, de raison, a connu toute sa vie une série de figures féminines.

Une amitié fidèle le lia étroitement à Schiller, mais aucun homme n'a exercé sur son génie créateur une influence égale à celle de ces fem- mes. Madame de Stein surtout, dont la figure se

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— 70 — retrouve dans son „Iphigénie", a eu sur lui une profonde influence.

On lui a reproché souvent d'avoir épousé en 1806, Christiane Vulpius, qui lui était très infé- rieure en intelligence. Cependant, ailleurs comme dans le mariage Gœthe, au milieu de douleurs sans nombre et de souffrances intérieures, a cher- ché indépendamment sa voie dans ses pensées et dans ses actes, et n'a jamais perdu de vue la franche sincérité et la transfiguration artistique.

Il était d'une nature tout à fait positive qui savait dans toute réalité trouver de quoi enrichir sa personnalité et ne pouvait être enchainée à aucune conception unilatérale des choses.

Il est remarquable que sa religiosité lui ait permis de témoigner une égale sympathie aux principes du culte de la nature et du panthéisme, à ceux du polythéisme grec, artistiquement trans- figuré, ou à la croyance à un Dieu personnel.

Il était également convaincu qu'une personnalité comme la sienne n'était possible que dans un milieu intellectuel protestant, dans une Allemagne protestante, et il a considéré que „la morale éle- vée qui brille et rayonne dans les Evangiles" est la plus haute qui puisse exister, aussi comme il le dit lui-même, ,,1'humanité, quels que puissent être les progrès de la science, en particulier dans le domaine de la nature, ne pourra-t-elle jamais dépasser ce que nous présentent les Evangiles".

A travers les communiqués officiels. — A l'Ouest des combats continuels et très achar- nés sont livrés sans qu'un changement notable en

résulte dans les positions.

Il en est de même pour les combats en Lithuanie.

En Galicie, les Russes ont remporté un suc- cès près de Sienawa et rejeté les troupes austro- allemandes sur la rive gauche du San. Les Alle- mands ont repris la forteresse de Przemysl ainsi que la ville de Stryi.

Les opérations dans la Haute-Italie se bornent provisoirement à des combats de frontière. Les Italiens ont envahi en plusieurs points le terri- toire autrichien. Des émeutes ont éclaté à Milan, au cours desquelles beaucoup de propriétés où séjournaient des Allemands ont été détruites.

La ville de Londres a été survolée par des Zeppelins allemands qui ont laissé tomber 90 bombes.

Il paraît que de nouveau un vaisseau de ligne anglais a coulé dans les Dardanelles; cependant on ne sait rien de précis sur le sort de ce navire.

Dans les tranchées

La journée de tranchée est longue, longue comme la nuit qui la précède et celle qui la sui- vra; dans la case de terre où le fantassin se cache, attend, c'est du matin au soir une demi obscurité. Un petit jour gris, morne, passe sur le créneau ménagé devant l'ennemi. Si on est en tranchée de deuxième ligne ou bien à une cer- taine distance de l'ennemi, on peut, pendant le jour, se remuer un peu, aller dans le bois qui est derrière ; mais si l'on est en terrain décou- vert ou en première ligne rapprochée, rien à faire ; il faut se terrer tout le jour. Le moindre képi aperçu est salué par une grêle de balles.

Pour aller à ces tranchées avancées, il y a ce qu'on appelle des boyaux de communication, ce sont de petits sentiers creusés dans la terre, à une profondeur d'un mètre cinquante, larges de soixante centimètres environ, dans lesquels on peut cheminer sans être aperçu. Pour y circuler il ne faut pas être bien gros et l'on y gagne pas mal de boue; mais cela vaut mieux que d'avancer à découvert, à plat ventre, car le boyau part d'un endroit ou l'on n'est pas en vue et, pendant deux ou trois cents mètres, il vous abrite jusqu'au bou(.

Certaines tranchées, creusées depuis peu, ne possèdent pas ces communications ; alors, on est tout le jour sans remuer ni recevoir de visites et les cuisiniers vous apportent à manger seulement une fois, à la nuit.

Que faire pour tuer le temps ? on guette de- vant soi, on sommeille, on tiraille, on tâche de tuer.

Parfois, un ronflement bien connu se fait en- tendre : c'est un aéroplane Français ou Allemand qui fait sa ronde ; s'il est ennemi, il faut se garer, car, s'il vous aperçoit on ne tarde pas à être arrosé d'obus.

La journée avance lentement.

Vers onze heures du matin, l'arrosage allemand commence ; généralement ils lancent sur les tran- chées qu'ils ont repérées, ou bien là où ils les supposent, des obus percutants et des shrapnells.

Les percutants sont des obus qui éclatent en touchant terre. Les shrapnells ont fait du progrès depuis leur inventeur, le colonel Henry Shrap- nell, mort en 1842, avec une rente viagère de 30.000 francs qu'il touchait, depuis trente ans, comme récompense de son ingéniosité meurtrière.

Henry Shrapnell eut le premier l'idée, à la fin du XVHIe siècle, d'incorporer des balles sphéri- ques dans les obus avec juste asser de poudr»

pour provoquer leur éparpillement.

Les shrapnells qui, aujourd'hui, contiennent un feu d artifice de trois cents balles dans chaque engin, noyées dans la poudre additionnée d'une substance qui empêche la rupture du corps de

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l'obus au moment du tir, les shrapnells sont des obus qui éclatent en l'air.

Quand cette danse aérienne commence, chacun se cache dans sa tranchée, se fait tout petit, met sor, sac sur la tête et prie le bon. Dieu que ces fleurs brutales ne tombent pas sur lui; mais beaucoup plus lourds et plus gros les petits obus

•ont 77 millimètres de diamètre : un demi-litre d'eau de Vichy en donne assez bien l'aspect; les marmites prennent des dimensions respectables, jusqu'à 220 millimètres, et ça devient alors un tonnelet de fer et de poudre, pas drôle à recevoir.

Une marmite bien tombée fait dans le sol, un trou tel qu'on pourrait facilement y cacher un cheval, le fiacre, le cocher et même le client en sachant les tasser et les ajuster. Une marmite c'est une automobile qui vous descend sur la tête, avec le moteur tournant ; il y a tant de place autour de soi que le danger devient mini- me, et même avec une balle de shrapnell pas trop mal placée, vous avez encore bien des chances de n'écoper que d'une blessure légère.

Un percutant c'est plus grave, à condition, bien entendu, qu'il tombe juste sur vous ; à trois pas, on a mille chances de ne pas être touché, sauf par des mottes de terre et d'autres poussières sans importance.

Les Allemands envoient quelquefois des mar- mites : ça c'est moins drôle, elle est capable de démolir une maison d'un coup. J'en ai vu choir dans les rangs de soldats pressés et en tuer qua- rante ou cinquante, sans compter cinq ou six qu'on ne retrouve pas, débris de chair disséminés.

(Lettre d'un officier français publiée dans le „Figaro".)

Les arrivistes de l'effort. — Emule du po- tier agenais, le tisserand lyonnais, Jean-Marie Jacquard, fut un prodige de force morale et de ténacité prolétarienne.

Il vint au monde en 1752, dans une besogneuse famille ouvrière et entra, à sept ans, en appren- tissage dans une fabrique de soierie où son tra- vail consistait à rattacher les fils brisés du tisse- rand; labeur épuisant, presque toujours mortel aux chétifs petits êtres qui l'accomplissaient.

Promptement miné par la consomption qui faillit l'emporter et le contraignit à abandonner un travail, trop pénible désormais pour sa santé précaire, Jacquard essaya vainement de plusieurs professions ouvrières, sans parvenir à sortir de l'étroite gêne où il se trouvait encore, lorsqu'en 1789 il songea à construire le métier à tisser qui devait libérer de leur besogne meurtrière les

petits rattacheurs de fils lyonnais.

Tout manquait à l'inventeur pour accomplir ses désirs généreusement insensés. Argent, connais-

sances techniques, forces physiques, outils même, puisqu'il n'en avait d'autres que les couteaux ébréchés de son indigent ménage, avec lesquels lui et sa courageuse femme raclaient, la nuit, de petits morceaux de bois difficilement achetés peu à peu sur l'insuffisant gain journalier... Mais qu'importe les obstacles à la Volonté ?...

Trois ans plus tard, le jury de l'Exposition Universelle de 1801 décernait au métier à tisser de Jacquard ,1a plus haute récompense de la section industrielle".

L'heure du triomphe ne devait pas sonner aussi tôt ; cependant, pour le génial artisan. Persuadés que l'adoption de ce nouveau métier leur ôterait leur gagne pain, les Canuts lyonnais se soulevè- rent contre les fabricants, les intimidèrent par leurs menaces, pillèrent la maison de Jacquard afin de le jeter à l'eau et de briser son chef- d'œuvre.

Pour échapper à la stupide fureur de ses en- nemis, le malheureux inventeur dut s'enfuir et se réfugier dans . un village des Cévennes, où il vécut dix-sept ans du peu qu'il gagnait à tresser des chapeaux de paille, se refusant courageuse- ment, quelque fut son extrême dénuement, à vendre son métier à l'étranger.

Ce ne fut qu'en 1809, que convaincue de la supériorité mécanique du métier à tisser de Jac- quard, l'industrie lyonnaise se décida unanime- ment à l'adopter. Elle lui doit, avec la vie de tant d'infortunés petits rattacheurs de fils, les progrès qui assurent sa fortune et son universelle renommée.

Jacquard est mort à Oublins en 1834 ; sa sta- tue se dresse aujourd'hui sur une des places de la grande cité manufacturière dont il est, à la fois, l'un des plus humbles et des plus illustres fils. — En 1890, Calais élevait aussi à Jacquard un pieux monument de gloire.

T. Le B.

En lisant... — Je ne connais pas de romans m'ayant laissé un tel apaisement de l'âme que la

„Croisée des Chemins" de M. Henry Bordeaux.

Il n'y a pas ici ce dénouement déchirant qu'on rencontre dans beaucoup d'autres romans contem- porains, dénouement, qui pour être fidèle à la réalité des luttes tragiques de la vie, n'en laisse pas moins chez le lecteur un trouble, un vide, recouvert comme d'un voile sombre au travers duquel on a peur de regarder en face cette vie méchante, pleine d'embûches et de ronces. Rien de tout cela, mais le calme et la sérénité d'un beau soir d'automne avec la légère mélancolie qui monte des choses qui disparaissent pour ne plus revenir.

De cette impression même se dégage la haute portée morale de ce magistral roman. Une ana-

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lyse plus philosophique, en écartant les contin- gences particulières qui déterminent un état d'âme plutôt qu'un autre nous fait apercevoir que l'im- pression dominante que nous éprouvons en fer- mant le livre est celle qu'éprouve Pascal Rouvray lui-même : la grande satisfaction du devoir accom- pli. Car c'est bien la thèse de ce livre qu'on commence et qu'on finit de lire presque sans interruption : une lutte entre la famille fondée sur l'honnêteté, l'honneur et les saines traditions du passé et l'esprit de liberté égoïste qui res- treint le cercle de l'existence à la seule personne de l'individu. Il fallait le talent délicat d'Henry Bordeaux pour faire sien et nous rendre attrayant ce principe sévère de l'attachement à la famille, qui s'il apporte avec lui des joies très douces exige souvent aussi des sacrifices bien durs qui font saigner les cœurs.

Avec quel art il le ramène toujours, sans que jamais il nous paraisse importun, obsédant; tan- tôt c'est le chêne majestueux qui arrête sur sa route le promeneur solitaire et songeur, d'autres fois la verte plante aquatique qui se dissimule modestement au fond d'une eau claire et limpide.

La trame du roman est simple et forte. Trois jeunes gens également désireux d'un avenir bril-

lant sont jetés dans cette fournaise de vie intense qu'est le Paris moderne. Ils sont de leur temps, ils en ont la fièvre, car tous trois sont aiguillon- nés par le même désir farouche d'arriver à la gloire, au succès, et chacun d'eux, dans la barque qui le porte est décidé à donner de grands coups de rame pour arriver plus vite au port qui le fascine. Pascal Rouvray, jeune et brillant univer- sitaire rêve de la célébrité d'un Pasteur dans la science médicale pure. La garantie d'un succès plus complet et plus facile, l'élan naturel de ses goûts et de toute sa personnalité et surtout l'ar- dente et troublante fiancée qu'il adore, toutes ces attirances réunies parviendront-elles à hypnotiser celui qu'un incompressible instinct pousse vers la maison familiale désemparée ? Non, et presque malgré lui, Pascal Rouvray se retournera en ar- rière pour écouter une voix qui l'appelle, une voix pressante et qu'il ne connaît pas, la voix des générations passées. Dans le silence profond qui suit la brisure de sa première vie, il en com- mence une autre plus humble mais plus noble- ment humaine, pendant que ses deux autres amis se lancent éperdument, toutes énergies déployées, dans le tourbillon des hommes et des choses vers l'inconnu des destinées.

Le sacrifice de Pascal Rouvray nous eût sem- blé un peu âcre, sans attrait, antipathique même si nous y avions vu l'aboutissement d'une froide

et calme résolution de conscience ; il lui fallait cette auréole de souffrance et de poésie que revêt une âme qui saigne, une âme à jamais meurtrie. En somme, ce livre admirable est la dramatique histoire d'un cœur de jeune homme tourmenté par le double idéal d'un amour pro- fond et du devoir vrai, tous deux harmonieuse- ment fondus en un tout unique que nous aimons, et mis en pleine lumière par le contraste de trois autres vies vouées à l'égoïsme.

Àh! le beau roman, transparent comme les lacs bleus des montagnes, écrit dans un style à la fois vigoureux et souple, qui nous fait aimer davantage cette belle langue française si féconde en chefs d'œuvre. Puisse Henry Bordeaux lui donner encore quelques pierres précieuses comme celle-là !

A. Bruggeman.

Beauté cachée

Toute chose a son heure unique de beauté.

Les vieux murs, les recoins sordides des cités, Les dunes où le vent tourmente une herbe aride, Les ports, les champs fauchés ou les glèbes

[humides, En un instant de l'aube, en un instant du soir, Ont le charme infini pour celui qui sait voir.

Heureux si tu t'en vas, guettant l'heure promise,.

Par les faubourgs ou par les sentes indécises Sans choisir ton chemin ni t'en lasser trop tôt.

Tu surprendras le soir aux pentes des coteaux^.

Tissant le doux linceul de ses vapeurx bleuâtres, Tu verras rougeoyer par les portes, les âtres Ou le soleil dorer les fumeuses maisons;

Et la joie, au détours multiples des saisons, . T'accueillera, fidèle, en chaque paysage...

Sois pareil à l'amant penché sur un visage Malgré les lourds soucis et les ans, toujours

[cher„

Qui voit sans s'attrister l'automne de la chair, Et regarde, pensif, comme une lente aurore Une beauté nouvelle au fond des yeux, éclore.

M. D.

Madrigal Princesse, à la beauté suprême, Qui régnez sur mon cœur épris, Dieu seul sait combien je vous aime, Combien m'est cher votre être exquis.

Puisqu'ainsi mon désir extrême Est un baiser sur vos yeux gris, Accordez-le moi, un seul, même, M'entr'ouvrira le Paradis.

Jean-Paul Hébert.

Verantwortlich: Prof. Dr. Cari Stange; Druck und Verlag: Louis Hofer („Gottinger Zeituiig"); beide in GOttingen

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Gëttingen — Revue

Le Salon du „Camp de Gëttingen"

Parmi les étonnements qui s'offrent aux inves- tigations du promeneur trop involontaire du camp de Gôttingen, un des moindres n'est pas de ren- contrer une Exposition permanente de travaux d'art graphique et appliqué.

La célèbre baraque 37 a joint à ses nombreuses attractions celle d'un petit foyer d'activité artisti- que : et cette réunion d'efforts de toutes sortes fait aux différents services pratiques, bienfaisants ou charitables de „la Maison" dont la clientèle ne chôme guère, un cadre déjà varié et souvent attrayant.

Passer en revue détaillée chacun de ces efforts serait trop long et quelque peu délicat: La criti- que est aisée si l'art est difficile..., d'autre part aussi, la louange trop abondante perd de son crédit et de sa valeur. Sans se lancer dans une étude minutieuse de chacun des objets proposés à notre intérêt, il convient de louer grandement à travers le premier promoteur de cette initiative, l'invention souvent heureuse de chacun et la bonne volonté de tous.

Dans la recherche de moyens de distraction, secours nécessaire contre la mélancolie des lon- gues journées d'exil, l'Art devait trouver sa place, apportant, de par le rayon divin qui est à son origine, un peu d'idéal et des sujets de rêverie bienfaisante aux pauvres prisonniers accablés de préoccupations trop cruellement pratiques.

Je n'en veux pour preuve que l'enthousiasme avec lequel se poursuit à travers les demandes de toutes sortes aux différents comptoirs de la Maison Paillet la fréquentation du petit Salon : et des discussions s'engagent volontiers sur la valeur de tel ou tel procédé, de telle ou telle réalisation.

Car il y a ici un peu de tout : dessins à la mine de plomb, au fusain, au crayon-conté ou à la plume ; aquarelles gouachées ou non ; croquis rapidement enlevés ou dessins très poussés ; il y a des reproductions et des compositions originales, des portraits directs et des agrandissements d'après des photographies. Il y a même des tra- vaux de broderie et des dessins documentaires très intéressants sur la vie des baraques. Telle de ces productions sont devenus l'objet de trans- actions amiables, et c'est là un des côtés inté- ressants de cette petite exposition permanente,

terrain tout indiqué de rencontres pour ceux dé- sireux d'orner quelque peu les murs ingrats de la baraque ou de voir grandis les traits de figures aimées, et ceux que leur talent ou leur ingénio- sité mettent à même d'augmenter si légitimement les ressources de l'exil.

Au dessus de ces considérations bien terre à terre se place avant tout, le souci d'occuper uti- lement les heures livrées au désœuvrement né- faste, d'éloigner momentanément, tout au moins, les souvenirs tragiques et les appréhensions dou- loureuses et de conserver à l'esprit l'activité né- cessaire dans la monotonie de la captivité. Enfin, et c'est là que sont à louer plus encore, promo- teurs et bons ouvriers de ces Expositions, l'ambi- tion généreuse de servir les autres en détournant le cours des idées moroses et en procurant par la même consolation et soutien aux camarades moins heureusement trempés. Il est bien à souhai- ter que ces exemples de la première heure ne soient pas perdus ; que tous se mettent au travail et progressent'. Et l'on verra avec plaisir et inté- rêt se renouveller souvent sur les panneaux de la Baraque 37 les dessins joyeux ou dramatiques des artistes du camp.

Hugues de Beaumont, Société Nationale des Beaux-Arts, Membre du Jury.

A UNE INCONNUE

Je ne vous connais pas. Pourtant je peux vous dire Que de vous je me suis fait un joli portrait ; Et je veux essayer d'en tracer quelques traits Afin de n'être point le seul qui vous admire Sur vos lèvres je vois le doux, si doux sourire, Que donne la bonté. Parmi d'autres attraits Vous consolez d'un mot et d'un geste discret Le coeur du prisonnier qui, loin des siens soupire.

J'ignore si vos yeux sont noirs, bruns ou pervenche;

Qu'importe leur couleur quand leur regard se penche Avec émotion sur quelque malheureux.

Mais puisque nos yeux sont le miroir de notre âme Les vôtres sont jolis, oui bien jolis, madame Car la bonté de l'âme est la beauté des youx.

J. d'H.

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LE CONCERT DU 6 JUIN

Matinée de gala. La vaillante pléiade

Des artistes chanteurs et surtout enchanteurs, Tous joyeux compagnons, dévoués camarades, Va dissiper l'ennui qui pèse sur DOS cœurs.

Applaudissons Ferny avec ses rigolades, La troupe comédienne, aussi son directeur, L'inimitable Jot nous donnant une aubade,

Mainy dans sa chanson : Les femmes et les fleurs.

Mais il ne me faut point oublier la musique, Merci o cig-alliés, orchestre symphonique, Car une fois de plus vous sûtes nous charmer.

Enfin ce que surtout ici je tiens à dire,

C'est que si Parquin par ses chansons nous fit rire, Montharoux pour finir nous fit presque pleurer.

J. d'H.

Au Fil des Jours

DIMANCHE 23 MAI. - Eeprésentation de Gala pour cette journée de Pentecôte.

Noté dans la salle, parmi le „Tout Gôt- tingen" des Premières : Prince J. Tallanoy de Caucault, MM. O. Pognon, le milliardaire bien connu, K. Lerdinvault, le grand fabricant de chaînes de montres en poil de grenouille, Othon Piédelat, Jissuy-Jiresse, Tatoux-Duballeau, T. Rienmoche, P. P. Le Raous, Jean Jouainnère et autres notabilités.

Mais, ne nous égarons pas...

La participation de Jean Mainy et l'exécution par l'orchestre de Samson et Dalila constituèrent les clous du programme. Mainy fut meilleur que jamais dans la mièvre et délicate chanson A dame jolie, dans Un ange, une femme inconnue de „La Favorite" et il chanta de magistrale façon l'air du 3ème acte de ,, Werther" Pourquoi me réveiller, ô souffle du Printemps.

Un extrait de „Samson et Dalila", Printemps qui commence, fut réclamé une seconde fois par un public que l'enthousiasme rendait exigeant mais qui ne ménagea pas ses applaudissements à l'Orchestre et tout particulièrement à M. Baudoin de Leye qui le dirigeait et à MM. Wetzels et Ceulemans, solistes violon et violoncelle. L'Or- chestre se fit encore apprécier dans Le Roi du Désert, Carmencita et La Baya.

La lettre chargée de Courteline fut un inter- mède agréable, joué avec talent par Pascal, ex- cellent dans le rôle de „La Brige" e* par Pas- quier qui fut un „Ratbouilli" „Ratcrevé" ou

„Ratcuit", comme vous, voudrez bien... à point.

Courteline aujourd'hui aurait dit „Ratcapout*...

Mais, ne nous égarons pas...

Remarqué, au cours de la séance : Vanhaelen qui récita avec beaucoup de sincérité et d'émo-

tion L'enfant du Faubourg et se révéla bon artiste — sa place semble tout indiquée dans la troupe théâtrale —, Boyer qui fut un Pauv' ouvèrerier très conscient, Caer qui amusa beaucoup l'audi- toire avec Mariez-vous donc et surtout Je t'atten-

drai,

v

Citons aussi les autres numéros du programme : Cœur de Marin et La Montmartroise interprêtés par Ferrier, Quand les Papillons par Puech, Martha par Rouquette, Les Mitrons par Castéras, Encore par Peyrol et La Robe par Magos.

En somme, bonne séance que celle de ce Dimanche ! Encore, faut-il considérer que quel- ques vedettes se reposaient.

DIMANCHE 30 MAL — Je ne veux pourtant pas obliger la rédaction à annoncer une troi- sième fois que :

Par suite de l'abondance des matières, nous nous trouvons dans l'obligation de reporter au prochain numéro le compte-rendu du Dimanche 30 Mai.

Il n'y aurait pas de raisons pour que cela finisse et pour qu'en 1925, les matières de „Gôt- tingen-Revue" restées en carafe s'étant notable- ment accumulées, les comptes-rendus des séances ne soient publiés avec une année ou deux de retard. Chacun ici désire des nouvelles fraîches et... la fraîcheur n'attend pas le nombre des années, c'est le poète qui l'a dit.

Aussi, soyons bref, et citons simplement, avec le regret de ne les pouvoir louer davantage : R.

Clymans, 1er prix de piano du . Conservatoire d'Anvers, dans les Fantaisies sur Mam'zelle Ni- touche, Miss Helyett, Carmen, Paillasse, Les Dra- gons de Villars, Tannhauser ; notre excellent Montharoux dans Les Ombres de la nuit, Une tournée de campagne, J'ai trouvé trois filles, Fémina, Regardez-vous ; l'hypnotiseur Buschsbaum dans une suite d'intéressantes expériences ; L.

Beaulen, un Montmartrois Belge, dans ses chan- sons d'actualité Ça revient et Les canards très amusantes et fort applaudies ; le comique Ch.

Parquin dans Radio-Gôttingen, Le Massacre de la St-Rartheaulémy, Chagrin d'enfant, Avec Bi- dasse ; Claude Désiré, un bon chanteur, dans Le Jouet et La Démence de Charles VI ; Spreux dans L'Ame des Violons, Je vous aime et j'en meurs ; Bemelmans dans La Saint-Hubert et L'aéroplane ; enfin notre dévouée troupe théâtrale avec Pascal, Pasquier et Colas, très bons dans Jean la Guigne, scène policière en un acte d'Oc- tave Mirbeau.

Dans la salle, par ces chaleurs, il „en faisait un plat", inutile donc que je vous en fasse un plus longtemps ici, ça vous ferait par trop suer...

„Jean Némard".

P. c. c. : Georges P. et Paul B.

Verantw ortlich : Prof. Dr. Cari Stange; Druck und Verlag: Louis Hofer (GiSttinger Zeitung); beid» in Gôttingen

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