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Cap sur le handicap : un dispositif pédagogique et didactique visant à modifier les représentations des élèves de classes ordinaires sur le handicap moteur

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Cap sur le handicap : un dispositif pédagogique et didactique visant à modifier les représentations des élèves de classes ordinaires sur le

handicap moteur

VEUILLET, Prisca

Abstract

Le chemin de la vie nous confronte parfois à des situations difficiles, mais souvent source d'enrichissement et de réflexion. Quand une connaissance proche se retrouve dans un fauteuil roulant, notre perception du handicap se voit totalement transformée. Durant quatre années d'études, nous avons, sur le terrain, été confrontés à l'hétérogénéité des classes primaires, tant dans les comportements, les rythmes d'apprentissage que dans les croyances ou manière de percevoir le monde qui nous entoure. L'intégration d'enfants à besoins éducatifs particuliers est un sujet clé des systèmes éducatifs actuels. L'attention des chercheurs est principalement centrée sur les bénéfices d'une intégration pour ces enfants.

Parents, enseignants, personnels soignants sont impliqués dans le dispositif d'intégration mais rarement, les élèves de la classe d'accueil. S'ils le sont, c'est pour évoquer un avantage qu'ils semblent pouvoir retirer d'une telle expérience : le développement de la tolérance.

Cependant, et c'est le noyau de la recherche qui va suivre, le développement de la tolérance n'est pas [...]

VEUILLET, Prisca. Cap sur le handicap : un dispositif pédagogique et didactique visant à modifier les représentations des élèves de classes ordinaires sur le handicap

moteur. Master : Univ. Genève, 2010

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:9689

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Cap sur le handicap : un dispositif pédagogique et didactique visant à modifier les représentations des élèves de classes ordinaires sur le

handicap moteur.

MEMOIRE REALISE EN VUE DE L’OBTENTION DU/DE LA LICENCE MENTION ENSEIGNEMENT

PAR Prisca Veuillet

DIRECTEUR DU MEMOIRE Sylvie Cèbe

JURY

Catherine Martinet Greta Pelgrims

GENEVE juin 2010

UNIVERSITE DE GENEVE

FACULTE DE PSYCHOLOGIE ET DES SCIENCES DE L'EDUCATION SECTION SCIENCES DE L'EDUCATION

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RESUME

Le chemin de la vie nous confronte parfois à des situations difficiles, mais souvent source d’enrichissement et de réflexion. Quand une connaissance proche se retrouve dans un fauteuil roulant, notre perception du handicap se voit totalement transformée.

Durant quatre années d’études, nous avons, sur le terrain, été confrontés à l’hétérogénéité des classes primaires, tant dans les comportements, les rythmes d’apprentissage que dans les croyances ou manière de percevoir le monde qui nous entoure.

L’intégration d’enfants à besoins éducatifs particuliers est un sujet clé des systèmes éducatifs actuels. L’attention des chercheurs est principalement centrée sur les bénéfices d’une intégration pour ces enfants. Parents, enseignants, personnels soignants sont impliqués dans le dispositif d’intégration mais rarement, les élèves de la classe d’accueil.

S’ils le sont, c’est pour évoquer un avantage qu’ils semblent pouvoir retirer d’une telle expérience : le développement de la tolérance.

Cependant, et c’est là le noyau de la recherche qui va suivre, le développement de la tolérance n’est pas inné. Il se travaille avec les élèves, in situ. Tolérer n’est qu’une petite marche vers le respect et la compréhension de l’autre. Ainsi que le défend Cohen (2007), « parler de tolérance nous semble insuffisant et parfois réducteur. Cela implique des limites à l’acceptation d’autrui. La tolérance suppose l’indulgence, la commisération, au mieux la compréhension mais pas nécessairement la reconnaissance de la personnalité du

handicapé et le respect qu’on lui doit. On supporte seulement ce que l’on tolère » (p.72). Les élèves de classes ordinaires peuvent donc tolérer un enfant présentant un handicap sans pour autant le respecter et le reconnaître comme une personne dans sa plénitude, pouvant lui apprendre des choses, vivant des situations similaires à tout enfant du même âge.

Aussi, avons-nous créé un dispositif pédagogique et didactique visant à modifier les représentations des élèves de classes ordinaires sur le handicap (moteur dans le cadre de ce mémoire). Le but de cet outil est d’enseigner des connaissances aux élèves sur le

handicap pour les amener à réfléchir sur leur rapport et leur compréhension de l’autre. Si les perceptions des enfants sur le handicap parviennent à être modifiées, nous pensons donc qu’une relation de réciprocité avec un enfant présentant un handicap puisse se développer.

« Notre vision du handicap est handicapée » (Fuster & Jeanne, 1996).

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Remerciements

Je tiens à remercier toutes les personnes sans lesquelles, un tel projet n’aurait pas pu voir le jour :

Ma directrice de mémoire, Madame Cèbe, pour sa foi en mon projet, son enthousiasme et son investissement.

Madame Martinet pour son aide et l’intérêt porté à mon projet.

Aux membres du jury (Madame Pelgrims et Madame Martinet)

Au directeur de l’école ayant accueilli ma recherche pour son soutien et sa compréhension.

Aux enseignants et à leurs élèves de l’école où a eu lieu cette recherche pour leur participation à l’exposition et le temps qu’ils y ont accordé.

A toutes les associations (transports handicaps, les Aigles de Meyrin) pour leur disponibilité.

A mes élèves, qui se sont investis avec sérieux, enthousiasme et ambition.

A ma mère, pour sa patience et sa foi en moi quand, de mon côté, je n’y croyais plus.

A ma famille et mes amis extraordinaires, un véritable cocktail d’espoir, de joie et de sincérité.

Et pour finir, un merci particulier à L. pour son investissement, son énergie et le partage de son vécu. Merci pour son amitié, sa confiance et son ouverture au monde. Il a été pour moi une inspiration dans la création de ce projet et m’a appris que s’il se dresse des embûches sur le chemin, il faut changer de direction, mais jamais de destination.

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Table des matières

1. Introduction ... 4

1.1. Intérêts personnels ... 4

1.2. Justifications de l’étude ... 5

1.3 Intérêts de l’étude ... 7

2. Cadre contextuel ... 8

2.1. Contexte de l’école et de la classe accueillant le dispositif ... 8

3. Cadre conceptuel ... 8

3.1. La notion de handicap ... 8

3.1.1. Les classifications de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) ... 10

3.1.1.1. La Classification Internationale Des Déficiences, Incapacités, Désavantages (CIDIH) : une classification du handicap centrée sur l’individu ... 11

3.1.1.2. Le handicap : résultat d’une interaction entre les personnes et les facteurs environnementaux ... 12

3.1.1.3. De la CIDIH à la CIF... 14

3.2. Le handicap moteur ... 16

3.3. L’intégration scolaire – l’inclusion ... 17

3.3.1. L’intégration : une définition générale ... 17

3.3.2. Les effets de l’intégration scolaire... 18

3.4. Les représentations sociales ... 21

4. Problématique et questions de recherche ... 26

4.1. La problématique de notre objet d’étude. ... 27

4.2. Questions de recherche ... 28

4.3. Hypothèses de recherche ... 29

5. Notre outil : Cap sur le handicap ... 30

5.1. Planification de Cap sur le handicap ... 30

5.2. Présentation de Cap sur le handicap ... 31

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5.3. Analyse de l’action et de Cap sur le handicap ... 85

5.3.1. De manière générale ... 85

5.3.2. Réussites et / ou limites de Cap sur le handicap ... 87

6. Démarche méthodologique d’analyse des données de la recherche .... 104

6.1. Construction des questionnaires ... 105

6.2. Choix des élèves pour la passation des questionnaires ... 105

6.3. Procédure de passation des questionnaires ... 106

6.3.1. Questionnaire rempli par les élèves « organisateurs » ... 106

6.3.2. Questionnaire rempli par les élèves « visiteurs » ... 106

6.4. Présentation de l’instrument de mesure de données ... 106

6.5. Analyse et comparaison des réponses des élèves « visiteurs » ... 107

6.6. Conclusion ... 122

6.7. Présentation du questionnaire conçu pour les élèves oranisateurs ... 122

6.7.1. Analyse des données recueillies auprès des élèves organisateurs ... 123

7. Comparaison des données et conclusion ... 149

Références bibliographiques ... 154

Annexes ... 158

Annexe 1 ... 158

Modèle du questionnaire proposé aux élèves « visiteurs » de l’exposition ... 158

Annexe 2 ... 159

a) Deux exemplaires du questionnaire rempli par un élève « visiteur » de l’exposition – Avant ... 159

b) Deux exemplaires du questionnaire rempli par un élève « visiteur » de l’exposition – Après ... 161

Annexe 3 ... 163

Modèle du questionnaire proposé aux élèves ayant bénéficié de «Cap sur le handicap » ... 163

Annexe 4 ... 169

a) Deux exemplaires du questionnaire rempli par un élève ayant bénéficié de « Cap sur le handicap » - Avant ... 169

b) Deux exemplaires du questionnaire rempli par un élève ayant bénéficié de « Cap sur le handicap » - Après ... 180

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« Si je diffère de toi, loin de te léser, je t’augmente » (Saint-Exupéry. Lettre à un otage.)

1. Introduction

1.1. Intérêts personnels

Nous nous sommes souvent interrogée sur le rôle que jouent les connaissances, les conceptions et les représentations qu’ont les gens sur les personnes présentant un handicap mental ou moteur dans l’intégration sociale de ces dernières. Il y a huit ans, un ami proche s’est retrouvé paraplégique à la suite d’un accident de voiture. Aujourd’hui, parlant avec énormément de recul et d’objectivité de son handicap, il se rend compte à quel point les gens sont ignorants sur les conditions de vie d’une personne présentant un handicap. « Ce qui est fâcheux, dit-il, c’est que cela contribue à instaurer de la distance entre les personnes valides et celles qui présentent un handicap plus qu’à renforcer des liens ». Si la plupart des gens disent

« faire preuve de tolérance » à l’égard des personnes différentes, il semble qu’en réalité ils ne mettent en pratique que des gestes réflexes ou conditionnés par la culture de notre société sans réfléchir au sens même de ces actes pour la personne visée. Par exemple, entrer dans un processus d’aide excessif envers une personne en fauteuil roulant (se pousser avec hâte et malaise pour faire de la place, faire pour elle des gestes qu’elle est totalement capable de faire seule comme se servir à boire) contribuent à souligner le handicap de la personne et à ne pas s’interroger a priori sur ses besoins et ses potentiels.

Aussi est-on en droit de se demander ce que signifient les termes « faire preuve de tolérance » ? Les accepter, certes, mais est-ce suffisant ? N’est-ce pas aussi connaître, s’intéresser, respecter, fréquenter, aider, participer à la réduction des situations de handicap ? Cet ami cite souvent les écrits de Goethe qui soutient que : « La qu’

En tant que futur enseignante, nous avons souvent été amenée à nous demander comment les enfants perçoivent la situation de handicap. C’est ainsi qu’est né notre projet de mémoire qui vise à mieux connaître la perception du handicap moteur ou mental que se font les élèves de l’école primaire. Que connaissent-ils sur le handicap ? Quelles représentations ou

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conceptions en ont-ils ? Ces interrogations s’inscrivent donc dans les travaux de recherche qui visent à mieux comprendre les conceptions des élèves pour mieux les modifier.

Ces interrogations sont d’autant plus importantes pour nous qu’elles sont étroitement liées à notre carrière d’enseignante au cours de laquelle nous serons appelée à vivre différentes situations d’intégration d’enfants à besoins éducatifs particuliers et à les faire vivre aux élèves que nous aurons en charge.

En effet, à Genève, l’école ordinaire intègre un certain nombre d’élèves à besoins éducatifs particuliers. Aussi les élèves ordinaires sont-ils des partenaires « obligés » de l’intégration. D’après nous, il est donc important que ces derniers prennent conscience de leurs connaissances et de leurs représentations touchant le handicap et ses conséquences si l’on veut qu’ils développent une conception et un regard objectifs et fondés. Néanmoins, il ne nous paraît pas suffisant de s’arrêter au recueil de leurs représentations et à leur mise en discussion. Si l’on veut pouvoir agir sur ces premières représentations, il est essentiel d’accroître et de consolider les connaissances des élèves. En effet, Freud (1919, cité par Bonaparte & Marty, 1987) défend l’idée que l’inquiétude et le malaise naissent d’une rupture dans la rationalité rassurante de la vie quotidienne. « Connaître » contribue alors à minimiser la sensation d’inconnu et donc à atténuer le sentiment d’inquiétude. La connaissance de l’autre atténuant la peur, nous pouvons faire l’hypothèse raisonnable que les élèves

« connaisseurs » deviendront des camarades très différents pour l’élève intégré. Aussi pensons-nous que l’École et ses enseignants doivent prendre une part active dans ce processus de transmission de connaissances.

Ce sont ces différentes réflexions et hypothèses qui nous ont amenée à nous centrer sur la manière dont les notions en lien avec le handicap pouvaient être prises en charge par l’enseignant dans sa classe. L’objectif visé est d’amener les élèves ordinaires à acquérir des connaissances capables de modifier leurs premières représentations afin de dépasser la simple tolérance et de développer des savoirs qui changent leur rapport à l’autre quand il présente des différences.

1.2. Justifications de l’étude

Notre projet est né d’une conviction que la littérature scientifique est venue confirmer par la suite : il ne suffit pas d’intégrer un enfant présentant un handicap dans un contexte scolaire ordinaire pour changer les représentations que se font les enfants ordinaires sur le handicap et les personnes qui en présentent un. En effet, au travers des différentes lectures ou recherches que nous avons effectuées sur le sujet, nous avons pu constater que quelques auteurs,

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notamment Detraux (s.d.) et Poulin (1997), considèrent que l’intégration peut être à la source d’un processus de modifications des stéréotypes construits par les élèves sur la notion de handicap. Ils posent que le partage de moments quotidiens en milieu scolaire leur permettrait de développer la tolérance, la solidarité, le respect. D’autres (notamment Bless, 2002) ont montré que le regard porté par les élèves ordinaires joue un rôle important dans la réussite du projet éducatif mis en place pour l’élève intégré. Cela nous amène à faire l’hypothèse que le niveau de connaissances acquises sur le handicap développé par les élèves ordinaires pourrait contribuer à la réussite ou à l’échec d’un processus d’intégration en milieu scolaire.

Il nous semble toutefois trop réducteur d’attribuer l’échec éventuel aux élèves et à leur manque de compétences ou de connaissances si on n’a rien mis en œuvre, en classe, pour leur enseigner lesdites connaissances et compétences.

C’est là que s’insère notre projet de recherche : nous postulons que le contact (ou la fréquentation), à lui seul, ne suffit pas à modifier le regard et la compréhension des enfants sur le handicap et donc à changer leur mode de relation avec l’élève à besoins éducatifs particuliers. À ce propos, de nombreux exemples puisés dans l’histoire apportent la preuve que le fait de vivre quotidiennement avec des personnes différentes de soi ne permet pas d’éradiquer le racisme et les processus d’exclusion. « La simple mise en présence de personnes handicapées et de personnes non handicapées ne suffit pas à réduire les jugements stéréotypés et les attitudes discriminatoires » (Desombre, 2009, p. 3).

C’est pourquoi nous faisons l’hypothèse que si nous désirons modifier les représentations et les conceptions des enfants sur le handicap, il est essentiel de leur enseigner des connaissances qui leur permettent de mieux comprendre les origines et les effets du handicap pour qu’ils changent, en retour, leurs modes de relations et d’interactions avec les personnes différentes.

Or, dans le paysage éditorial, nous comptons très peu d’outils pédagogiques qui prennent ce domaine comme objet d’enseignement. C’est donc pour pallier ce manque que nous avons décidé de créer un dispositif d’intervention qui vise deux objectifs complémentaires :

1. enseigner des connaissances sur le handicap (ses causes et ses répercussions concrètes au quotidien) aux élèves.

2. aider les enseignants dans l’exercice de leur métier.

Ce dispositif peut être mis en œuvre en amont d’une possible intégration afin de préparer la classe à l’accueil d’un élève à besoins éducatifs particuliers ou dans le cadre d’un cours

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d’éducation à la citoyenneté dans une classe ordinaire, travaillant ainsi le rapport à la différence et préparant les élèves à une éventuelle intégration dans la suite de leur cursus. Il a pour particularité de ne pas se baser sur des discours ou des leçons de morale mais sur « le faire » (l’expérimentation) et la prise de conscience des connaissances enseignées. En effet, les élèves seront eux-mêmes acteurs du dispositif et donc de leurs apprentissages. Ils feront des recherches, prépareront des interviews, rencontreront des personnes connaissant ou vivant un handicap moteur, élaboreront une exposition pour leurs camarades de l’école. Les élèves et l’accroissement de leurs connaissances sur le handicap seront le noyau du dispositif.

C’est ce dispositif que nous avons conçu puis testé dans une classe ordinaire d’école primaire genevoise de division moyenne (5P). Il a été mis en place et évalué tout au long de son développement. Il est important de préciser que cet outil peut s’adapter à d’autres contextes notamment dans des classes où une intégration a déjà commencé.

1.3 Intérêts de l’étude

L’enjeu scientifique de ce mémoire relève de la création du dispositif lui-même en ce sens qu’il devrait permettre d’évaluer si l’instrument est utilisable en classe et permet bien de d’accroître les connaissances des élèves et ainsi de modifier les représentations, les stéréotypes et les idées reçues qu’ils ont développés à propos du handicap et de ses conséquences. Ce dispositif peut être mis au service de tout enseignant même s’il n’intègre pas d’enfant présentant un handicap. Il vise essentiellement à amener les élèves à travailler sur leurs conceptions sur le handicap moteur et à les préparer ainsi au mieux à une éventuelle rencontre dans la suite de leur cursus. Utilisé par un enseignant qui intègre dans sa classe un enfant présentant un handicap, le même dispositif permettrait de préparer la classe à l’accueil de cet enfant quand habituellement l’intégration débute sans que les élèves aient bénéficié d’un enseignement particulier.

En ce qui nous concerne, ce projet sera utile à notre future pratique professionnelle. Nous espérons grâce à lui mieux comprendre les processus d’apprentissages sociaux, scolaires et civiques et les pratiques d’enseignement capables d’aider au développement des connaissances dans le domaine du handicap.

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2. Cadre contextuel

2.1. Contexte de l’école et de la classe accueillant le dispositif

Le dispositif a été mis en œuvre dans une école de la campagne genevoise qui ne compte que des classes de division moyenne, cinq classes au total (de la 4P à la 6P). Le projet a pris naissance dans une classe de 5ème primaire composée de 18 élèves

Particularité de l’école en relation avec le projet

Cette école présente la particularité de n’avoir aucune classe intégrant un élève à besoins éducatifs particuliers et/ou présentant un handicap moteur. Aussi, le sujet du handicap n’a jamais été traité par les enseignants titulaires.

Particularité de la classe en relation avec mon projet

L’âge des élèves (10 ans en moyenne), et donc leur maturité, correspondent parfaitement au projet. Ils peuvent, en effet, faire preuve de recul et de réflexion sur la plupart des sujets abordés en classe. En second lieu, le fait qu’aucune intégration ne soit présente dans l’école, et donc dans la classe, rend notre étude particulièrement intéressante. Quelles représentations initiales ces élèves ont-ils sans avoir été confrontés, à l’école, au handicap moteur ? Le travail soutenu par le dispositif devrait nous permettre de faire le point sur leurs connaissances et leurs représentations, et de savoir si l’outil spécifiquement centré sur l’enseignement de connaissances dans le domaine du handicap est capable de les modifier.

En tant que remplaçante contractualisée (pour 6 mois à 100%) dans cette classe, nous avons pu mener à bien notre projet puisque le temps d’enseignement imparti pour la mise en place du dispositif ne dépendait que de notre seule organisation.

3. Cadre conceptuel

3.1. La notion de handicap

Définir le concept de handicap n’est pas chose facile tant sa perception, sa définition et le vocabulaire qui s’y rapporte se sont modifiés au cours de l’histoire. Soutenues par l’idée d’équilibre entre un étiquetage parfois réducteur et la prise en compte de tous les facteurs interagissant dans le quotidien d’une personne présentant un handicap, les définitions ont été régulièrement modifiées, transformations qui peuvent, en partie, expliquer les évolutions dans

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les pratiques éducatives et sociales. En effet, ces différentes conceptions ont marqué le débat scientifique et social de ces cinquante dernières années.

Au cours des cinquante dernières années, deux grands courants se sont succédé.

1. le courant « individuel » (aussi appelé médical) 2. le courant « socio-environnemental »

Ils nécessitent qu’on leur accorde, dans le cadre de ce mémoire, une attention particulière pour les distinguer d’une part, et pour mieux comprendre l’origine de l’évolution des conceptions sur le handicap.

Le courant individuel (médical) : la logique de cause à effet

Jusque dans les années septante, le handicap était considéré comme « une réalité intrinsèque à l’individu » (Rochat, 2008, p.3). Ce dernier était handicapé car il était atteint d’une déficience corporelle, physique ou mentale qui le limitait au niveau de sa participation sociale (ibid.).

Dans cette perspective, une maladie ou un état pathologique provoquerait nécessairement une déficience organique ou fonctionnelle ; en résulterait une incapacité qui se traduirait en désavantage social ou handicap. Selon les défenseurs de ce courant de pensée, « le handicap est donc clairement le résultat de la déficience de l’individu » (ibid. p.3). Les solutions proposées sont essentiellement curatives avec comme objectif premier, celui de la guérison.

Ceci explique que les personnes étant jugées inadaptées pour vivre dans un environnement social ordinaire, elles se retrouvaient souvent exclues et victimes d’un certain type de ségrégation (Kuzbari, 2008).

Le courant « socio-environnemental » : la logique de l’interaction avec l’environnement

Ce courant recouvre une conception opposée à celle soutenue par le courant médical. Il considère que « l’origine du handicap est donc externe à l’individu » (Rochat, 2008, p.4).

Dans cette perspective, le handicap ne réside pas dans l’individu lui-même, mais est toujours le résultat d’une interaction entre l’individu (les facteurs personnels) et les facteurs environnementaux (les contextes dans lesquels il évolue, les conditions éducatives dont il profite, les pratiques d’enseignement dont il bénéficie, …) qui peuvent agir soit comme des obstacles (et provoquer la situation de handicap) soit comme des facilitateurs (et permettre la

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participation sociale). Ici, les interventions sont centrées sur l’idée qu’il est fondamental de

« favoriser le développement des capacités restantes de la personne dans le but de la rendre autonome dans sa vie quotidienne » (ibid. p. 4). L’idée constitutive de ce courant se trouve être l’adaptation de l’environnement et des services pour les personnes ayant des incapacités quelconques et ainsi, de supprimer les obstacles physiques et sociaux. Un tableau synthétique d’après Rioux (1997) et adapté de Ravaud (2001, cité par Rochat, 2008) permet de saisir aisément les différents regards sur le handicap de ces deux courants :

Les conceptions et modèles principaux concernant le handicap

Traitement Prévention Responsabilité sociale

Mole individuel

Approche biomédicale

Guérison par des

moyens médicaux ou technologiques

Intervention biologique ou génétique, dépistage prénatal

Eliminer ou guérir le handicap

Approche réadaptative Services de réadaptations fonctionnelles

Diagnostic précoce et traitement

Améliorer et procurer du confort

Modèle social Approche environnementale

Accessibilisation,

adaptation, contrôle individuel accru des services et des soutiens.

Elimination des barrières sociales, économiques et physiques

Elimination des obstacles à l’insertion

Approche sociopolitique

Reformulation des règles politiques, économiques et sociales

Reconnaissance de la situation de handicap comme inhérente à la société

Réduire les inégalités dans les droits, accès à une pleine citoyenneté

Tableau 1 : organisation et lignes directrices des modèles en termes de traitement, de prévention et de responsabilité sociale. Adapté de Ravaud (2001), lui-même d’après Rioux (1997), tiré de Rochat (2008).

3.1.1. Les classifications de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS)

Ainsi que susmentionnées, les tentatives de classification des déficiences et des handicaps ont été nombreuses. La première version, la CIDIH (Classification Internationale des

Déficiences, des Incapacités et des Handicaps) a été approuvée en 1975 et publiée en 1980.

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3.1.1.1. La Classification Internationale Des Déficiences, Incapacités, Désavantages (CIDIH) : une classification du handicap centrée sur l’individu

En 1980, l’Organisation Mondiale de la Santé a publié un modèle de Classification Internationale des Handicaps (CIH). Le but était de caractériser, définir et classer les handicaps pour permettre de développer un langage international et commun chez tous les professionnels de la santé, de l’éducation et du soin. Dans ce modèle, le handicap est considéré comme un problème intrinsèque à un individu. Le modèle en vigueur pour catégoriser les handicaps (CIH, OMS, 1980) tenait compte d’abord et avant tout des maladies ou pathologies individuelles. Celles-ci se trouvaient à l’origine d’incapacités qui provoquaient un certain nombre de désavantages limitant ou interdisant l’accomplissement d’un rôle social

« normal » par rapport aux attentes culturelles (Delcey, 2002). « (…) La CIH et les réflexions qui ont entouré sa conception ont accompagné une révolution conceptuelle du handicap : considérer le handicap comme la conséquence d’une maladie (ou d’un accident) au lieu de l’assimiler à sa cause. La CIH décrit ainsi le handicap, à travers l’atteinte du corps, bien sûr (« déficiences »), mais aussi les difficultés ou impossibilités à réaliser les activités de la vie courante qui découlent de ces déficiences (« incapacités ») et les problèmes sociaux qui en résultent (« désavantages »). » (Delcey. 2002). Le handicap est donc décomposé en trois niveaux distincts: « Le niveau lésionnel (les déficiences), le niveau fonctionnel (les incapacités) et le niveau situationnel (désavantage social) » (Rochat, 2008, p.9). Rochat (2008) en se référant à Hollenweger Haskell (2001) remarque le fait que cette classification témoignait d’un changement de paradigme. Elle « représente le passage d’un modèle curatif à un modèle réadaptatif » (Ravaud, 2001, cité par Rochat, 2008, p.9).

Si ce modèle présentait certes une avancée dans la définition du handicap, il a néanmoins été contesté par de nombreux auteurs (Fougeyrollas et al., 1998) qui soutenaient qu’il ne tenait pas suffisamment compte du rôle que jouait l’environnement dans la « production de la situation de handicap ». Une maladie provoque une déficience, qui se traduira pas une incapacité dans la réalisation de certaines activités. Ces incapacités vont alors entraver la relation de la personne avec les autres et, par conséquent, la désavantager socialement (Rochat, 2008). « L’OMS reste donc dans une conception médicale et individuelle du handicap : l’expérience sociale négative des personnes est toujours expliquée par leurs attributs personnels et l’intervention qui en découle reste centrée sur l’individu, la question du

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changement social n’est donc pas abordée » (Ravaud, 2001, cité par Rochat, 2008. p.9).

Aussi, des auteurs et des chercheurs, notamment Fougeyrollas et son équipe au Québec, vont proposer un nouveau modèle conceptuel afin de pallier aux limites de la CIDIH.

3.1.1.2. Le handicap : résultat d’une interaction entre les personnes et les facteurs environnementaux

À l’origine de la révision de la CIDIH se trouvent les travaux menés par l’équipe de Fougeyrollas portant sur le processus de production du handicap. En effet, dès 1988, cette équipe de chercheurs québécois travaillait à une procédure de révision de la CIDIH. En 1998, ils publient une proposition de classification adoptant une définition du handicap bien plus complète que la première visant à concilier les deux perspectives précédemment évoquées.

Fougeyrollas (1990, cité par Côté) définit et complète le modèle interactif comme suit :

« Le handicap est défini comme "une perturbation dans la réalisation des habitudes de vie d'une personne, selon son âge, son sexe et son identité socio-culturelle, résultant d'une part de ses déficiences et incapacités et d'autre part, d'obstacles causés par des facteurs environnementaux" (CIDIH 1989). Dans cette perspective, il devient impossible de faire référence à un "statut" de personne handicapée. Il est préférable de parler de "situations de handicap" spécifiques à l'interaction entre les caractéristiques fonctionnelles, comportementales ou esthétiques de la personne et les facteurs sociaux, c'est-à-dire l'accès aux services et programmes, les règles sociales, les valeurs et attitudes et les facteurs écologiques comme le climat, la géographie, l'architecture, l'organisme ou encore le développement technologique. Les caractéristiques individuelles comme les caractéristiques environnementales sont toutes susceptibles de varier afin de produire une diminution de situations de handicaps, autant pour une personne que pour une collectivité. »

Les auteurs défendent l’idée que les facteurs environnementaux agissent au même niveau que les facteurs personnels dans la production de la situation de handicap (Figure 1). « Le modèle se construit sur la base du constat que la personne effectue ses activités en interaction continue avec son environnement physique et social » (Boriolo & Laub, 2005, cités par Rochat, 2008, p.11).

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La figure 1 ci-dessous illustre le processus de production et de réduction du handicap.

Figure 1 : Modèle Processus de Production du Handicap PPH1

Ce modèle illustre clairement le fait que les divers éléments caractéristiques et inhérents à la vie d’une personne présentant un handicap n’agissent pas de manière isolée ; c’est de leur interaction que naît ou non une situation handicapante.

Le concept du PPH fait ainsi interagir quatre facteurs déterminants :

1) Un facteur de risque, élément appartenant à l’individu susceptible de provoquer une maladie par exemple.

2) Les facteurs personnels comme caractéristiques intrinsèques à l’individu (âge, sexe, aptitudes, etc.).

3) Les facteurs environnementaux définis par Fougeyrollas (2001, p. 112, cité par Rochat, 2008) comme « les dimensions sociales ou physiques qui déterminent l’organisation et le contexte d’une société ». Ils peuvent être facilitateurs ou obstacles, termes que nous allons définir plus bas.

1 http ://www.ripph.qc.ca

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4) Une habitude de vie comme étant une activité courante, usuelle ou un rôle social.

L’interaction entre ces quatre facteurs prend une place déterminante et centrale dans le modèle qui permet de considérer que, outre les facteurs personnels , les facteurs environnementaux peuvent constituer des facilitateurs ou des obstacles en ce sens qu’ils permettent (ou empêchent) l’accomplissement d’activités, et, en conséquence, la participation sociale de l’individu et son implication dans les situations sociales. Selon Fougeyrollas et al (1998, p.124), « un facilitateur correspond à un facteur environnemental qui favorise la réalisation des habitudes de vie lorsqu’il entre en interaction avec les facteurs personnels (les déficiences, les incapacités et les autres caractéristiques de la personne) », par exemple un ascenseur ou une rampe pour une personne à mobilité réduite. Par opposition, « un obstacle est un facteur environnemental qui entrave la réalisation des habitudes de vie lorsqu’il entre en interaction avec les facteurs personnels » (ibid., p. 124), par exemple un passage trop étroit pour accéder à un lieu public en fauteuil roulant.

3.1.1.3. De la CIDIH à la CIF

Les travaux de Fougeyrollas et de son équipe ont rencontré l’adhésion des chercheurs et des professionnels exerçant dans le champ de la pédagogie spécialisée et du handicap. Durant plusieurs années, les différents points de vue ont été analysés avant d’aboutir en 2001 à l’adoption de la CIF (Classification Internationale du Fonctionnement, du Handicap et de la Santé publiée par l’OMS). « Le but ultime poursuivi avec la CIF est de proposer un langage uniformisé et normalisé ainsi qu'un cadre de travail pour la description des états de santé » (CIF, 2002).

Figure 2. Interaction entre les composantes de la CIF 1

1 http://www.univ-nancy2.fr/VIDEOSCOP/DL7/

(18)

15

Cinq niveaux peuvent être clairement distingués : les fonctions organiques, les structures anatomiques (toutes deux étant regroupées sous la dimension individuelle), les activités ou les participations, les facteurs environnementaux (inhérents à la dimension de « l’être social ») et le handicap (éléments alors négatifs de ces dimensions) (Delcey, 2002). On trouvera ci- dessous un tableau tiré de l’OMS (2000, p. 15) permettant de bien saisir l’interaction entre les composantes de la CIF.

Aperçu de la CIF

Partie 1 : Fonctionnement et handicap Partie 2 : Facteurs contextuels Fonctions

organiques et structures anatomiques

Activités et participation

Facteurs environnementaux

Facteurs personnels

Domaines

1. Fonctions organiques 2. Structures

anatomiques

Domaines de la vie (Tâches, actions)

Facteurs extérieurs affectant le fonctionnement et le

handicap

Facteurs internes affectant le fonctionnement et le

handicap

Schémas

Changement dans les fonctions organiques

(physiologie) Changement dans la structure anatomique

Capacité Réaliser des tâches

dans un environnement

standard

Performance Réaliser des tâches

dans l’environnement réel

Impact (facilitateur ou obstacle) de la réalité physique, de la réalité sociale ou

des attitudes

Impact des attributs de la personne

Aspect positif

Intégrité fonctionnelle et

structurale

Activité

Participation Facilitateurs Sans objet

Fonctionnement

Aspect négatif Déficience

Limitation de l’activité Restriction de la

participation

Barrières. Obstacles Sans objet

Handicap Tableau 2 : Aperçu de la CIF, OMS 2000, p.15

(19)

16

Ainsi que nous pouvons le lire sur le tableau présenté ci-dessus, la CIF comprend deux parties constituées elles-mêmes de deux composantes : le fonctionnement et le handicap et leurs composantes ; les facteurs contextuels et leurs composantes. Exprimée positivement ou négativement selon le contexte, ses composantes articulent les éléments qui jouent un rôle dans la production (ou non) de la situation de handicap. « L'état de santé d'une personne et les états qui y sont liés sont ainsi classés en attribuant un ou plusieurs codes appropriés pour la catégorie choisie, en ajoutant un ou plusieurs codes qualificatifs qui précisent l'étendue ou l'ampleur du fonctionnement ou du handicap dans cette catégorie, ou la mesure dans laquelle un facteur environnemental est un facilitateur ou un obstacle » (OMS, 2001).

Pour conclure sur ce point, nous dirons que « la CIF fournit une approche multidimensionnelle de la classification du fonctionnement et du handicap en tant que processus interactif et évolutif »1

3.2. Le handicap moteur

.

La présente recherche est centrée sur le handicap moteur. Aussi, allons-nous tenter de le définir précisément en le mettant systématiquement en lien avec les caractéristiques de l’environnement.

Le handicap moteur est la conséquence d’une difficulté ou d’une incapacité à faire certains mouvements. La déficience motrice (la lésion organique), et/ou l’incapacité motrice (limitations fonctionnelles) ainsi que les facteurs socio-environnementaux constituent parfois des obstacles face aux aptitudes et aux capacités motrices de l’individu et le placent en situation de handicap moteur. En effet, la plupart du temps, ce qui constitue davantage un handicap pour les personnes relève de leur confrontation avec un environnement inadapté et des regards inappropriés qui entravent alors leur insertion et leur participation sociale. Comme l’écrivent très justement Fuster et Jeanne (1996), « notre vision du handicap est handicapée » (p. 68).

1 http://www.univ-nancy2.fr/VIDEOSCOP/DL7/

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17

3.3. L’intégration scolaire – l’inclusion

« Le mot « intégration » est devenu slogan et gros titre à la fois. On peut le lire presque quotidiennement dans les journaux et les revues. On l’entend à la radio, à la télévision et on le retrouve dans la discussion publique. Dans le domaine de l’éducation, l’utilisation inflationniste de ce mot est également chose courante. Cela peut donner l’impression qu’un très grand nombre de professionnels de l’éducation pratique réellement l’intégration ou du moins y contribue d’une façon ou d’une autre, ce que nous mettons en doute » (Bless, 2004, p.13).

Force est de constater que les définitions sont nombreuses. C’est pourquoi, dans la partie qui suit, nous passerons en revue les différentes acceptions de la notion d’intégration scolaire.

3.3.1. L’intégration : une définition générale

De manière générale, le terme d’intégration est utilisé dans un but de démarcation de tout acte de ségrégation consistant à isoler une personne présentant un handicap ou une difficulté d’apprentissage ou d’adaptation (Doré, 2001). Selon Mercier (cité par Rose & Doumont, 2007, p. 4), l’intégration fait référence au « processus qui consiste à favoriser l’adaptation de la personne en situation de handicap, dans un milieu ordinaire : ses comportements doivent correspondre aux normes et aux valeurs sociales dominantes et la personne en situation de handicap doit développer des stratégies pour être reconnue comme les autres ». Cette définition illustre le principe de normalisation scolaire. Nous pouvons également faire référence à la notion de mainstreaming, apparue en 1970 et traduite plus tard par intégration, qui amène à soutenir que chaque individu doit être éduqué dans l’environnement le plus normal ou le moins restrictif possible (Doré, 2001).

Dans notre travail, nous utiliserons la notion d’intégration comme le fait Zafran (cité par Rose & Doumont, 2007, p. 4) c’est-à-dire « dans un sens générique désignant l’accueil d’élèves en situation de handicap dans une classe ordinaire dans le but de leur faire bénéficier, par le biais d’adaptations matérielles ou pédagogiques, d’une appartenance à un groupe hétérogène composé en grande majorité d’élèves ordinaires ». Toutefois, lorsque l’on parle de l’intégration d’une personne, il convient de différencier les différents niveaux d’intégration : l’intégration physique, sociale et fonctionnelle.

Söder (cité par Thorel, 1994) mais également Wolfensbergeer & Thomas (1988, cité par Doré, 2001) les définissent comme suit :

(21)

18 1. L’intégration physique : être parmi les autres

Les personnes vivent parmi les autres sans entraîner nécessairement d’interactions ou de simples contacts entre elles.

2. L’intégration fonctionnelle : faire avec les autres

L’individu réalise des activités avec ses pairs valides en utilisant du matériel commun par exemple. En ce sens, la mise en place de conditions de travail qui nécessite la coopération est primordiale en amont.

3. L’intégration sociale : « avoir sa place, être partenaire et vivre des échanges spontanés ».

Il s’agit du niveau le plus élevé en termes de qualité d’intégration. Il consiste en la participation de l’individu aux interactions et relations sociales lors d’activités communes. « L’individu se perçoit et est perçu comme partie inhérente du contexte social » (Kuzbari, 2008). Il est important de noter que pour ce faire, il est primordial qu’il y ait une adaptation réciproque par tous les membres du groupe (ibid, 2008).

L’intégration scolaire comprend ce niveau étant donné qu’elle implique que l’enfant soit à l’école, qu’il y joue un rôle d’élève, qu’il y réalise des activités scolaires, et qu’il puisse échanger avec ses camarades de classe et son enseignant.

3.3.2. Les effets de l’intégration scolaire

Les raisons qui motivent l’intégration scolaire sont multiples. Le principe de base, ainsi que le déclare l’INSIEME (2002), repose sur le fait que l’école est « un puissant moyen de socialisation et qu’elle représente un temps important dans la vie d’un membre de la société ».

Une intégration c’est l’implication, la participation mais aussi la motivation des partenaires, « elles-mêmes fortement influencées par les valeurs personnelles et par la connaissance des finalités de l’intégration, de ses avantages et conséquences pour la personne et pour les partenaires de l’intégration » (INSIEME, 2002).

L’élève intégré

Sur le plan éducatif, l’élève intégré jouit d’un climat social non superficiel, proche de celui qu’il va rencontrer dans la société durant sa vie, et peut alors développer sa connaissance des valeurs, des normes et des rôles attendus par un groupe. Cet apprentissage est stimulé par les

(22)

19

différentes activités proposées, les diverses situations sociales dans lesquelles il se retrouvera.

Bless (2001) expose également les bénéfices d’une intégration sur le développement des performances scolaires en soulignant néanmoins que l’intégration « ne permettra pas d’atteindre le niveau de performance habituel des écoles ordinaires » (p.62). En désaccord avec Bless, nous pensons que, peut - être vraie pour les élèves qui présentent un handicap mental, cette idée ne s’applique pas aux élèves qui ont un handicap moteur. Ce handicap n’empêche pas d’apprendre à lire, à compter, … dans les mêmes conditions qu’un élève valide.

Les élèves ordinaires

Globalement, ainsi que nous l’exposent Poulin, J.-R., Brunet, J.-P., Doré, R. & Wagner, S.(1997), les effets de l’intégration sur les élèves ordinaires peuvent être regroupés en trois catégories : les attitudes (réduction des préjugés, ouverture aux pairs, acceptation de l’autre), les interactions sociales (amélioration des contacts sociaux, coopération) et la connaissance de soi et des autres.

Néanmoins, les résultats des recherches reposent sur deux postulats opposés. Les uns, notamment Hansen (1984, cité par Poulin et al., 2007), soutiennent que la présence d’un élève présentant un handicap en classe ordinaire « favorise l’engagement social chez plusieurs élèves de cette classe ». A contrario, Chassin, Ferencz Stager et Young (1985, cités par Poulin et al, 2007), ne constatent pas une telle amélioration.

Nous comprenons bien que tous les acteurs du système scolaire sont impliqués dans le projet d’intégration d’un élève à besoins éducatifs particuliers, mais tous ne le sont pas de la même manière : l’élève intégré lui-même, ses parents, son enseignant et le personnel médical, semblent être, dans les études menées sur la question de l’intégration, les acteurs principaux.

Mais force est de constater que les élèves qui fréquentent la classe dans laquelle l’élève est intégré sont les grands absents du dispositif. Ils sont, le plus souvent, mis à l’écart du projet d’intégration et sont rarement considérés comme des partenaires importants. Notre analyse de la littérature scientifique ne nous a pas permis de trouver des études exposant les dires des élèves ordinaires concernant leur ressenti face à l’intégration d’un élève à besoins éducatifs particuliers dans leur classe.

En revanche, on compte de nombreux travaux exposant les profits que peuvent retirer les enseignants et l’élève intégré de leur expérience, quant aux effets de l’intégration sur les autres élèves, ils sont décrits de manière très générale et, le plus souvent, idéologique.

(23)

20

C’est pourquoi nous avons choisi d’axer notre recherche sur les élèves ordinaires.

L’intégration : une affaire de grandes personnes

Pour que l’intégration fonctionne, il semble essentiel de faire des élèves de la classe de véritables partenaires. Or, bien souvent, ces derniers sont les grands absents du projet. Les adultes, décideurs et acteurs du dispositif (parents, enseignants, directeurs, personnel médical, etc.) choisissent pour eux et leur imposent l’intégration sans penser a priori aux effets que celle-ci pourrait provoquer chez eux . Par exemple, un enfant qui présente des troubles envahissants du développement a parfois des comportements inquiétants pour de jeunes enfants ; une personne présentant un handicap moteur tel que la paraplégie soudainement pris de spasmes compulsifs : cela peut aussi les effrayer.

Si l’on pousse plus avant la réflexion, on peut faire l’hypothèse que les élèves ordinaires peuvent être totalement réfractaires au dispositif. Aucun résultat n’a été trouvé qui confirmerait cette hypothèse pourtant raisonnable quand on connaît le nombre d’enseignants qui refusent l’intégration. Cela confirme l’idée soutenue plus haut que les élèves ordinaires, parce qu’ils ne sont pas considérés comme des partenaires sérieux dans les dispositifs d’intégration, sont « oubliés » dans la mise en place des projets.

Les ouvrages ou les recherches recommandent rarement de former les élèves de la classe pour leur permettre de comprendre ce qu’est et implique le handicap de l’élève qu’ils vont accueillir. Si certains stipulent qu’il est nécessaire de les considérer, on ne trouve rien de concret qui permettrait aux enseignants de savoir comment s’y prendre. Le rapport de l’INSIEME (2002), ou encore les recherches de Baumberger, B., Doudin, P.-A., & Martin, D.

(2009) ainsi que celles de Noël (2009), évoquent bel et bien les effets et les bénéfices d’une intégration sur les élèves ordinaires : socialisation, diminution des préjugés, développement de la tolérance, renforcement du sentiment d’appartenance pour l’élève intégré, …. En ce sens, ces derniers sont bien présents dès lors qu’on s’intéresse aux répercussions sur la vie scolaire, sur le rôle qu’ils peuvent jouer dans le projet et ainsi leur permettre de prendre une part active dans sa réussite.

C’est donc cet ensemble de constats qui fonde notre travail de recherche qui repose sur la construction d’un dispositif pédagogique capable d’aider les enseignants (et leurs élèves) à accueillir, dans leur classe, un élève qui présente un handicap moteur. Pour cela, il nous a paru essentiel de recueillir les représentations, conceptions et croyances dont les élèves

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21

disposent dans ce domaine pour mieux les transformer. Or, tous les travaux menés en attestent, il n’est pas facile de modifier les représentations que se sont forgées les enfants.

C’est l’objet de la partie qui suit.

3.4. Les représentations sociales

Pour saisir l’enjeu de la modification des représentations sociales des élèves de classe ordinaire sur le handicap moteur, il est primordial de définir ce qu’est une représentation sociale, son contenu et la manière dont on peut agir pour la transformer.

Moscovici (1961) a mené une étude qui a ouvert un domaine nouveau et important de recherche, celui des représentations sociales. Moscovici (1963, cité par Deschamps &

Beauvois, 1996, p. 137) définit une représentation sociale comme étant « l’élaboration d’un objet social par une communauté avec l’objectif d’agir et de communiquer ».

Ainsi que l’expliquent Deschamps et Beauvois (1996), il s’agissait « d’étudier le fonctionnement d’une modalité spécifique de connaissances sociales : la connaissance de sens commun » (p. 137). Reprenant le travail de Durkheim sur la pensée collective (1895), Moscovici redéfinit la notion de représentation sociale en se distanciant ainsi des théories de Drukheim stipulant qu’elles étaient « des données collectives mentales qui s’imposeraient aux personnes » (ibid, p.140). Au contraire, selon Moscovici, « elles relèvent de l’activité cognitives des groupes et des individus dans des contextes particuliers » (ibid), p. 140).

En d’autres termes, une représentation c’est d’abord une vision du monde, d’un objet qui véhicule un ensemble d’idées (Mulkay, 2006). Selon le même auteur, cette vision du monde est emplie d’informations et de perceptions que l’homme doit traiter, organiser par l’intermédiaire de ses sens sous peine d’être totalement dépassé et incapable de se repérer et d’agir dans le monde qui l’entoure. La représentation est socialement construite étant donné que les significations du réel que l’homme construit sont influencées par ses contacts avec les autres individus et l’ensemble du contexte social dans lequel il évolue. De cette manière, les visions du monde se construisent dans l’interaction avec les autres. « Les représentations sociales jouent un rôle fondamental dans l’interaction sociale puisqu’elles définissent ce qu’est la réalité, en même temps qu’elles produisent un système d’anticipation et d’attentes qui déterminent la relation de l’individu avec son environnement » (Mulkay, 2006, p. 2).

L’utilité des représentations sociales

Les représentations sociales aident à comprendre et expliquer la réalité. Elles fournissent un système d’interprétation (pré-codage) qui régit les relations des individus à leur

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22

environnement physique et social. La représentation oriente l’action et les relations sociales et, en conséquence, peut diriger des comportements en définissant ce qui est tolérable ou non dans un contexte social donné (Mulkay, 2006). En ce sens, la représentation justifie les conduites et les comportements dans une situation ou à l’égard de partenaires.

Trois aspects caractéristiques et surtout interdépendants sont à prendre en considération avant d’appréhender la suite de ce chapitre : la communication, la reconstruction du réel et la maîtrise de l’environnement par le sujet (Jouet Le Pors, 2006).

1) La communication : les représentations servent à l’individu à appréhender et comprendre son monde et son histoire individuelle et collective. Le savoir véhiculé par la représentation est commun à un groupe, donc partagé.

2) La reconstruction du réel : « les représentations nous guident dans la façon de nommer et de définir ensemble les différents aspects de notre réalité de tous les jours ; dans la façon de les interpréter, de statuer sur eux (…) » (Jodelet, cité par Jouet Le Pors, 2006).

3) La maîtrise de l’environnement par le sujet : l’individu se situe dans son environnement grâce à ses connaissances pratiques et ses représentations du monde qui l’entoure. Les représentations orientent des conduites, justifient des attitudes et/ou définissent l’identité d’un groupe social (ibid)

La structure et le contenu des représentations sociales

Il est possible de s’intéresser à différents aspects des représentations sociales : les savoirs, attitudes ou croyances concernant un objet donné ; l’action ou le jugement des individus guidés par la manière dont ils perçoivent le monde ; la construction des représentations dans l’interaction. Nous allons ici expliciter les liens qu’entretiennent ces contenus afin de mieux en saisir la structuration.

Selon Abric (1984, 1989, cité par Deschamps & Beauvois, 1996), une représentation sociale se compose d’un noyau central et d’éléments périphériques. Le noyau central est composé d’éléments qui lient la représentation à l’objet. La représentation s’organise en fait autour de ce noyau. Ce dernier détermine à la fois « la signification (fonction génératrice) » et

« l’organisation (fonction organisatrice) », mais assure également « la cohérence et la stabilité de la représentation (fonction stabilisatrice) » (Mulkay, 1996). La représentation devra évoluer si un seul des éléments du noyau central est modifié. Aussi, pour modifier une représentation, faut-il atteindre le noyau central lui-même. Néanmoins, le noyau est « la partie

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23

la plus rigide et la plus cohérente de la représentation puisque fortement ancré sur la mémoire collective du groupe qui l’élabore » (Deschamps & Beauvois, 1996, p. 145).

Le noyau a également une « fonction consensuelle » puisqu’il « définit ce qu’il a d’homogène dans ce que partage le groupe, ce qui confère un caractère normatif aux significations qu’il comporte » (ibid).

À la différence du schéma figuratif - proposé par Moscivici et exposé plus haut - , qui fait référence à l’aspect iconique des contenus, le noyau fait lui référence à la structure que prennent les contenus des représentations.

Les éléments périphériques ont pour première fonction de « protéger la stabilité du noyau central » (ibid, p.145). Le contexte agit beaucoup plus facilement sur le système périphérique.

Ce sont des adjonctions individualisées qui permettent à l’individu d’apporter quelques modulations personnelles quant au noyau central. Le système périphérique « conduit à l’adaptation des groupes et des individus à des situations spécifiques tout en permettant l’intégration des expériences individuelles » (ibid, p. 146). Dans cette optique, ils peuvent être considérés comme une interface entre le noyau central et la situation réelle dans laquelle la représentation fonctionne. En résumé, ces éléments périphériques étant organisés par le noyau central « assurent un fonctionnement instantané des représentations comme systèmes d’interprétation des situations » (ibid, p. 146).

La transformation des représentations sociales

Dans la vie quotidienne, si les pratiques sont cohérentes avec la représentation sociale d’un groupe d’individus par rapport à un objet donné, aucun problème ne se manifeste. Néanmoins, si la pratique est nouvelle, deux cas se présentent : soit elle s’inscrit comme élément périphérique afin de protéger le noyau central, soit, selon l’importance qu’elle revêt, elle peut transformer le noyau central de la représentation. Si la nouvelle pratique est en contradiction totale avec le noyau central, une rupture brutale avec ce dernier s’opère et une transformation des représentations s’effectue (Jouet Le Pors, 2006 et Deschamps & Beauvois, 1996). Pour qu’une représentation sociale ait changé, il faut un changement au niveau du noyau central, sinon, on parle juste de petites évolutions (Guimelli, 1994). Aussi, ainsi qu’évoqué ci-dessus, il est nécessaire qu’il y ait un certain degré d’incompatibilité et de contradiction entre le noyau central et la réalité. Cette incompatibilité doit être suffisamment forte afin qu’elle ne soit pas absorbée par le système périphérique, par exemple, un fumeur apprenant qu’il a un cancer du poumon. Les représentations sociales sont donc susceptibles de transformations si et seulement si un élément du noyau central est remis en question.

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24

Représentations sociales et handicap : quelles relations ?

« La théorie des représentations sociales montre que le noyau central de la représentation est fonction de l’objet lui-même, des relations que l’acteur social entretient avec l’objet, ainsi que des contenus idéologiques relatifs à l’objet. Si l’objet de la représentation est la personne handicapée, trop souvent, on nie le sujet et on le réduit à son handicap ou on nie le handicap que l’on gomme chez le sujet » (Bazier & Mercier, 2003).

Ainsi, nous pouvons tolérer une personne sans pour autant la reconnaître dans sa plénitude. Toujours selon Bazier & Mercier, il est nécessaire de confronter les présupposés idéologiques qui déterminent les représentations des différents acteurs. Ces confrontations devraient ouvrir les représentations et les pratiques de chacun de ces acteurs. Par la suite, il faudra travailler sur la modification des conceptions et viser à remodifier les représentations des personnes handicapées pour rétablir avec elles une relation de sujet à sujet où les ressemblances et les différences, les capacités et les incapacités, les rendements et les difficultés, les projets et les craintes, les freins et les motivations, sont acceptés.

« Le handicap se vit aussi dans la représentation et le regard de l’autre. Etre handicap. (…) Au regard de l’autre, la personne peut rester handicapée, même si elle a dépassé les incapacités grâce à son propre effort et grâce aux aides palliatives et des formations » (ibid).

Rohmer et Louvet (2004) démontrent, en citant Shérif et en rejoignant Desombre (2009), que « le simple fait de provoquer des rencontres entre individus appartenant à des groupes différents ne garantit par l’émergence des conduites sociales positives ». Ce constat prend tout son sens lorsque l’on s’interroge sur les affects provoqués par la rencontre avec une personne présentant un handicap moteur alors visible par des caractéristiques physiques (chaises, démarches, spasmes, etc.). Les conduites sociales et les réactions affectives à la perception de personnes présentant un handicap moteur sont induites par l’image que les individus ont de ce groupe « étranger » ainsi que de leur manque de connaissance le concernant1

« La catégorie des « handicapés » est une catégorie à la fois saillante et opératoire dans la perception sociale (Louvet & Rohmer, 2006). Cette catégorie est ainsi liée à des stéréotypes, c’est-à-dire « un ensemble de croyances partagées à propos des caractéristiques personnelles.

Généralement des traits de personnalité, mais aussi des comportements propres à un groupe de personnes » (Leyens et al, 1994, p. 129). Selon le même auteur, les personnes en situation de handicap sont généralement perçues comme peu sociables, moins intelligentes mais

.

1 A noter que je me concentre ici sur le handicap moteur et les perceptions qui en découlent, notions centrales de ma recherche.

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25

également comme sensibles et attentives aux autres. Desombre (2009) met en évidence le fait que ces perceptions sont de l’ordre du « faussement correct » puisqu’elles « représentent davantage le respect des règles en vigueur à l’égard de ce groupe qu’un regard positif » (p. 4).

Familiarité et réactions affectives à l’égard de personnes handicapées physiques

Lors d’un premier contact avec un groupe d’individus différents, les sens sont à l’affut : analyse, observation, interrogations, rejet, etc. Les premières impressions naissent de la perception physique que les personnes se font du groupe « étranger » : « les caractéristiques physiques de l’individu-cible restent néanmoins une information fondamentale » (Louvet &

Rohmer, 2000). Ces mêmes auteurs font d’ailleurs l’hypothèse que « notre jugement social des personnes vivant avec une déficience visible sera coloré par la nature de nos sentiments à leur égard » (Louvet & Rohmer, 2000). Abrahams et al (1990) cités par Desombre (2009, p.4) ont démontré que, notamment chez les enfants, « les stéréotypes et la stigmatisation sont néanmoins dépendants du type de handicap ainsi que de la visibilité de celui-ci ».

Il est vrai qu’outre « l’étiquette catégorielle » (ibid.) « handicapé » au sens général, les étiquettes concernant la vie, les relations, les caractéristiques physiques de certains handicaps sont telles « qu’il est impossible de faire abstraction de la déficience dans notre confrontation avec des personnes handicapées physiques » (ibid.). Ainsi, une personne en chaise roulante est pour la plupart du temps vue par sa chaise et donc son handicap avant d’être appréhendée en tant que personne. Ou encore, une personne présentant un handicap est immédiatement considérée comme peu chanceuse, triste et seule.

En somme, la personne présentant un handicap semble très souvent assimilée à sa déficience, allant parfois jusqu’à s’effacer derrière elle. Ainsi que nous le précise Rohmer (2001) en se référant aux travaux de Gardou (1999), Ville (1999) et Sticker (2000), « c’est comme si la déficience définissait totalement l’individu » (p. 2). La peur due au manque de connaissances de la déficience elle-même et de ce qu’elle représente pour l’individu en question en vient à définir le sujet en occultant sa plénitude. Cette crainte entrave le chemin à faire vers l’autre et, alors non confrontée ni remise en question par la distance instaurée, la vision de cet autre reste indemne, superficielle et déficiente.

Rohmer confirme ce point de vue quand elle pose que, dans notre société, l’intégrité et les performances du corps apparaissent comme une valeur avérée et établie. « Les gens éprouveraient donc des affects négatifs vis-à-vis des personnes handicapées aboutissant à une certaine réticence à interagir avec elles » (Rohmer, 2001, p. 3). Elle ajoute, (2001, 2004), que

« plus les percevants ont des contacts réguliers avec des personnes handicapées, moins leurs

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26

réactions émotionnelles négatives vis-à-vis de cette catégorie sociale sont importantes et plus leur jugement social est positif » (2001, p. 3).

En 1954, Allport analysait déjà les préjugés entre groupes et développait alors le concept qu’il intitule « Hypothèse du contact ». Cette approche suppose que « le simple fait que les groupes se côtoient davantage ne peut suffire, toutefois, à restaurer l’harmonie » (Yzerbyt &

Schadron, 1996, p.41). Selon Allport toujours, « le contact entre les groupes doit être prolongé, comporter des possibilités de rencontres nombreuses, de sorte que les participants puissent vraiment apprendre quelque chose les uns des autres » (ibid, p. 42). Il rejoint alors l’hypothèse de Rohmer évoquée précédemment.

Les études menées par Allport et par Rohmer permettent d’arriver au constat suivant : les réactions affectives évoluent en fonction de la relation entre le percevant et la personne handicapée (Rohmer, 2001 : Louvet, E., & Rohmer, O, 2000). Néanmoins, plus que la fréquence des contacts, la nature de la relation semble plus importante dans l’enjeu et le processus d’évolution des perceptions (Rohmer, 2001).

Dans le domaine qui nous intéresse, la classe, les enfants ont tous le même statut, celui d’élève. Il est nécessaire qu’ils soient tous engagés dans la poursuite d’un objectif commun afin de diminuer au maximum les perceptions et les affects négatifs (Rohmer, 2001).

Il en découle que les affects comme la pitié ou le dégoût s’estompent dès lors que le contact se fait régulier et prolongé. Néanmoins, la crainte, l’anxiété, le besoin de distance semblent rester présents chez les personnes en dépit d’un contact régulier. L

(Goethe). Un travail plus approfondi avec les sujets est

nécessaire afin que ces derniers se connaissent et se comprennent mieux et, d’ainsi, faciliter l’intégration pédagogique de chacun dans la classe et sa dynamique sociale, affective et cognitive.

4. Problématique et questions de recherche

La mise en relation des apports théoriques évoqués précédemment donne naissance à la problématique de l’objet d’étude que nous allons exposer à présent pour ensuite présenter nos questions et nos hypothèses de recherche.

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