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Pronostic au long terme après une insuffisance rénale aiguë nécessitant une dialyse

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Thesis

Reference

Pronostic au long terme après une insuffisance rénale aiguë nécessitant une dialyse

TRIVERIO, Pierre-Alain

Abstract

L'IRA aux soins intensifs est une pathologie courante, due majoritairement à une NTA dans le cadre d'une dysfonction multi-viscérale et associée à une forte mortalité. Si le patient survit, il est communément admis que les reins vont récupérer. De plus la littérature est équivoque sur la nécessité d'une thérapie de substitution au long cours. Nous avons montré dans un suivi de cohorte chez des patients ayant survécu 90 jours à un épisode d'IRA aux SI que l'IRC est fréquente et que cette insuffisance rénale chronique est associée à un excès de mortalité.

Nous avons également démontré que le recours à la dialyse est relativement fréquent surtout s'il existe une IRC, que ce soit avant l'évènement ou qui persiste après l'épisode d'IRA ayant nécessité une thérapie rénale de substitution. L'IRC est d'une part un facteur de risque indépendant de mortalité mais d'autre part facteur de progression vers l'IRT.

TRIVERIO, Pierre-Alain. Pronostic au long terme après une insuffisance rénale aiguë nécessitant une dialyse. Thèse de doctorat : Univ. Genève, 2013, no. Méd. 10711

URN : urn:nbn:ch:unige-295963

DOI : 10.13097/archive-ouverte/unige:29596

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:29596

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Pronostic au long terme après une insuffisance rénale  aiguë nécessitant une dialyse.

Pierre‐Alain Triverio, Pierre‐Yves Martin, Jacques Romand, Jerome Pugin, Thomas Perneger and Patrick  Saudan.  Long‐term prognosis after acute kidney injury requiring renal replacement therapy.  

Nephrol Dial Transplant 2009 ; 24 : 2186 ‐ 2189   

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3

Table des Matières

- Thèse

o Introduction

o Patients et méthode o Analyses statistiques o Résultats

o Discussion

o Tableaux et figures o Annexes 1 et 2 - Bibliographie

- Résumé de 150 mots - Rapport de thèse

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Introduction

L’insuffisance rénale aiguë (IRA) est un syndrome courant, responsable annuellement d’environ 2 millions de décès sur la planète et compliquant jusqu’à 30% des admissions en unité de soins intensifs (1). Elle est mal différenciée en raison de problèmes de méthodes et définitions. Dans les 10 dernières années, des progrès substantiels ont été réalisés dans le champ d’étude de l’IRA. En particulier un travail important a été effectué afin d’obtenir un consensus visant à unifier les définitions, se basant sur les données épidémiologiques, l’usage de biomarqueurs et tentant de définir la dose de thérapie de substitution idéale. L’étiologie principale de l’IRA est la nécrose tubulaire aigüe (NTA) pour plus de 90% des cas, le plus souvent dans le cadre d’une dysfonction multiple d’organes (DMO). Le pronostic au long cours de la NTA est peu clair. Il est communément admis que les reins vont récupérer si le patient survit à son épisode, du moins chez les patients à fonction rénale normale au préalable. Comme le conclut l’étude la plus récente et la plus complète qui a suivi 187 patients pendant 10 ans ayant survécu à une NTA (2) la fonction rénale est

« adéquate pour la plupart des patients » après cet épisode. Plus récemment, de 2008 à 2012, des études observationnelles utilisant de larges bases de données ont démontré que les patients qui survivent à un épisode d’IRA ont un risque significatif de progression vers l’IRC (3,4). La NTA est un processus potentiellement réversible, mais les patients nécessitant une thérapie de remplacement rénal (RRT) meurent souvent avant récupération de la fonction rénale. Ces patients sont en outre de nos jours de plus en plus âgés et présentent des comorbidités sévères, expliquant la mortalité encore importante (5). C’est pourquoi malgré l’amélioration de la prise en charge, cette mortalité n’a que peu varié dans les 30 dernières années (6) demeurant proche de 50% (1). Liano rapporte un taux de mortalité de 60% pour les patients présentant une NTA (7). Il y a peu de données sur la survie à long terme, le paramètre habituellement examiné étant la survie intra-hospitalière. Récemment, Schiffl et coll. ont montré la très faible proportion de patients (<1%) nécessitant une RRT au long cours (8). Ils ont encore mis en évidence l’absence de facteur pronostic permettant de prédire la récupération de la fonction rénale. Avant les années 90, un faible taux (<10%) de NTA irréversible

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était jugé habituel (9). Des études plus récentes ont démontré a contrario un nombre plus important de patients requérant une dialyse chronique, en fonction de l’étiologie et jusqu’à près de 20% (10), ces chiffres semblant actuellement en augmentation. Ce changement de paradigme, à l’image de l’augmentation de mortalité due vraisemblablement à la population vieillissante et grevée de lourdes comorbidités dans le contexte de soins de plus en plus agressifs, nous a paru intéressant. Le

pronostic au long cours de la NTA ou l’IRA semblant donc incertain et source d’intérêt, notamment dans le suivi néphrologique qu’il faudrait potentiellement offrir aux patients ayant présenté une IRA ayant nécessité un traitement de substitution, nous a motivé à utiliser notre cohorte locale pour offrir une réponse à une question non dénuée de conséquences socio-économiques et éthiques. Cette cohorte, issue de l’étude prospective effectuée par Saudan et collaborateurs aux Hôpitaux

Universitaires de Genève (11) visant à déterminer l’effet de la dose d’épuration extra-rénale sur la survie des patients dialysés en milieu de soins intensifs en comparant hémofiltration et

hémodiafiltration, a permis une étude observationnelle que nous décrivons ici. Les données les plus actuelles de la littérature (12,13) ont montré les préoccupations de la communauté néphrologique et ont été relatées très récemment à l’occasion de la session des Actualités de la réunion de la Société de Néphrologie ayant siégé à Genève en octobre 2012. On y relevait que le risque d’IRC augmente quel que soit le score de propension utilisé en présence d’une IRA même si la récupération de fonction est complète. D’autre part et de façon préoccupante on relevait qu’une minorité de survivants était référée pour un suivi néphrologique après un épisode d’IRA. Il est actuellement difficile de déterminer quels sont les patients survivants à un épisode d’IRA qui sont à haut risque de développer des complications ou une progression de la maladie rénale chronique. La

connaissance de ces déterminants permettrait une intervention néphrologique précoce et ciblée, ce qui n’est pas le cas de nos jours (13). Elle permettrait une stratification du risque avec une attitude adaptée à cette catégorisation.

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Patients et Méthode

Entre octobre 2000 et décembre 2003, 206 patients ont été inclus dans une étude prospective

randomisée contrôlée évaluant hémofiltration versus hémodiafiltration, dans l’IRA en unité de soins intensifs mixtes, pour des pathologies médicales, chirurgicales ou post-traumatiques. Les détails de cette étude ont été publiés et nous ne la commenterons pas en détail (11). Des données sur la survie et le niveau de fonction rénale des patients ayant survécu 90 jours ont été obtenues à 3 ans. La fonction rénale normale avant l’épisode d’IRA était définie par une créatinine plasmatique < 106 μmo/l chez les hommes et < 88 μmol/l chez les femmes, corroboré par un taux de filtration

glomérulaire (TFG) selon l’équation de l’étude MDRD ≥ 60 ml/min (14). L’absence de retour à la valeur de départ étant définie comme une récupération partielle.

Les objectifs primaires de l’étude étaient la survie et la nécessité d’une dialyse chronique.

Analyses statistiques

Des tests paramétriques et non paramétriques ont été utilisés pour évaluer les paramètres

confondants parmi les données démographiques et les caractéristiques de base chez les survivants et les patients décédés à 3 ans. Une valeur de significativité était établie à p < 0.05.

Un modèle de Cox a été utilisé pour évaluer les facteurs de risque de mortalité indépendants.

Une analyse de Kaplan-Meyer a été utilisée pour déterminer la survie à 3 ans chez les survivants avec une IRC connue ou développée de novo, ou sans IRC.

Les facteurs de risque de mortalité suivants ont été analysés : âge, sexe, diabète, étiologie de l’IRA (traumatique, médicale ou chirurgicale), le score Apache II à l’admission, la durée de l’épuration extra-rénale aux SI, la présence d’une IRC au préalable.

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Résultats

Sur les 206 patients qui ont pris part à l’étude, 95 patients étaient encore en vie 90 jours après avoir bénéficié d’une épuration extra-rénale. Les données sur la survie et le niveau de fonction rénale à 3 ans ont été obtenus chez 89 de ces 95 patients (94%), soit par enquête auprès des médecins

traitants, soit en utilisant les données de la base informatique des HUG et parfois même en téléphonant aux patients. Six patients ont été perdus de vue. La créatinine avant évènement a été obtenue chez 71 patients. Les caractéristiques cliniques et démographiques des patients survivants et décédés sont reprises dans le tableau (1). La survie globale a chuté de 46% à 90 jours à 30%

après 3 ans (figure 1). Parmi les survivants à 90 jours, la survie à 3 ans est de 67%. Parmi les patients décédés à 3 ans, 79% avaient une IRC soit avant, soit après l’épisode d’IRA, alors que chez les survivants à 3 ans, seul 55% d’entre eux présentaient une IRC. La survie à 3 ans était respectivement de 50 et 83% avec et sans IRC (figure 1).

La présence d’une IRC est un facteur de risque de mortalité indépendant (HR 2.9, 95% IC : 1.10- 7.19) (tableau 2). Parmi les 52 patients dont la fonction rénale était considérée normale avant l’épisode d’IRA, une insuffisance rénale chronique s’est développée chez 9 d’entre-eux, dont 1 est resté dépendant de la dialyse. Une insuffisance rénale terminale s’est développée chez 8 patients dont 7 étaient déjà connus pour une IRC.

De façon plus globale, la mortalité annuelle est de 6%/an pendant les 3 années qui suivent l’épisode d’IRA, soit 10 fois plus que la mortalité annuelle de la population générale correspondante de Genève selon les données de l’Office Cantonal de la Statistique.

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8

Discussion

Les études cliniques se sont intéressées jusqu’à présent surtout à la survie à court terme des patients ayant nécessité une épuration extra-rénale en milieu de soins intensifs, cherchant d’ailleurs plutôt à évaluer quelle est la méthode la plus adaptée ( hémodialyse intermittente vs hémofiltration ou hémodiafiltration) (11,15,16). Il y a peu de données à long terme du devenir des patients quant à leur survie d’une part, mais également quant à leur fonction rénale. L’incapacité à récupérer une fonction rénale normale a des implications importantes pour le patient, mais aussi pour la société avec in fine la possibilité de devoir recourir à une méthode de dialyse chronique. La survie globale, malgré l’amélioration de la prise charge, a de fait peu évolué récemment, même si la mortalité intra- hospitalière a diminué ces 20 dernières années (17), essentiellement en raison du changement de typologie du patient (18). Les patients sont de plus en plus âgés, présentent des comorbidités importantes voire invalidantes, ayant un impact important et d’autant plus marqué s’ils bénéficient d’un traitement de dialyse.

Les changements de créatininémie, survenant tardivement et ne reflétant pas immédiatement les modifications du taux de filtration glomérulaire, manquent de précision dans la détermination d’une atteinte rénale aiguë. Des changements modérés dans le taux de filtration glomérulaire ont

rapidement un impact sur les issues cliniques notamment au niveau mortalité avec nécessité d’une nouvelle terminologie passant d’IRA (ARF acute renal failure) à AKI (acute kidney injury) que nous traduirons par lésion rénale aigüe et qui permet un affinement du diagnostic par une

stratification plus précise (19). Par contre, peu d’intérêt a été porté sur la récupération de la fonction rénale et ses conséquences en termes d’état de santé, qualité de vie ou coûts de santé (20). Les patients survivant à un épisode d’IRA sont généralement considérés de bon pronostic rénal sans nécessité de recours à une thérapie de substitution à plus de 3 mois (21). Même si parfois

l’investissement en soins peut paraître disproportionné, la qualité de vie après un tel épisode semble acceptable et la plupart des patients jugent leur traitement utile et recommenceraient les mêmes procédures si cela devait être nécessaire (22), écartant ainsi la notion de futilité que l’on peut parfois

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9

mettre en balance pour des thérapies aussi lourdes en milieu de soins intensifs (23). Car même si la mortalité initiale qui est élevée (41% à 28jours) peut passer de 57% à 1 an, à 70% à 5 ans (24), du point de vue du patient la fonction rénale a été récupérée chez 82% des survivants avec un coût acceptable pour ce type de thérapie agressive visant à sauver une vie et taxée de rentable,

« cost-effective » dans la littérature anglo-saxonne (25,26).

Nous avons donc tenté de savoir si, comme le montre Schiffl, la nécessité d’une thérapie de substitution au long cours est rare (<1%) (8) ou si au contraire comme l’a démontré Bandhari, l’IRT est plus fréquente que précédemment rapportée avec 16.2% des patients demeurant

dépendants de la dialyse (10). Nous avons également évalué la mortalité à 3 ans et les facteurs qui l’influencent.

En analysant les chiffres fournis par notre cohorte de patients on peut constater que la mortalité globale à 90 jours est de 54% et qu’elle grimpe à 74% à 3 ans, de façon relativement comparable aux chiffres élevés rapportés dans la littérature comme dans l’étude de Korkeila (25) qui rapporte une mortalité à 6 mois de 55% montant jusqu’à 65% à 5 ans ou dans celle d’Ahlstrom cité plus haut (24). Les patients décédés étaient plus âgés, présentaient plus souvent une IRC soit avant soit après l’épisode d’IRA, avaient un score Apache à l’entrée plus bas et ont démontré une dernière

créatininémie plus élevée avant leur décès. L’augmentation de mortalité dans la période qui suit l’épisode d’IRA a été précédemment rapportée par Lins (27) qui s’était déjà posé la question de la survie des patients les plus « fit » comme pourrait le montrer dans notre cohorte le score Apache d’entrée plus élevé chez les survivants à 3 ans, ceux-ci étant considérés comme des survivants au sens propre du terme, ayant réussi à traverser sans trop de dégats l’épreuve de l’IRA. Bagshaw l’avait déjà démontré avec des patients en IRT présentant une survie comparable aux patients sans dysfonction rénale (28). On sait d’autre part que l’IRC est considérée comme un facteur de risque cardio-vasculaire (FRCV) nécessitant du temps pour développer ses effets (29), faisant de cet élément un facteur de risque indépendant de mortalité et expliquant possiblement la différence de survie entre les patients présentant ou pas une IRC. Il serait intéressant d’observer à plus long terme

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encore l’expression de ce facteur de risque qui doit développer son action dans le temps pour avoir une portée clinique. La plus longue période de suivi dans une étude sur 10 ans a démontré 71% de mortalité mais avec seulement 2 patients sur 187 nécessitant une dialyse chronique (30).

Les facteurs pronostics associés à une mise en route d’un traitement de substitution rénale

chronique ainsi que le taux d’insuffisance rénale terminale sont mal connus. L’étude de Schiffl (8) a montré un très faible taux d’IRT. Cependant le suivi d’un an y paraît bien court pour analyser la survenue d’une IRT, considérant le temps nécessaire à la progression de la maladie rénale chronique et si l’on se réfère à un suivi de 5 ans comme dans l’étude de Morgera (26), 10% des patients demeurent dépendants de la dialyse, chiffre plus proche de nos données. D’autres auteurs sont moins optimistes et rapportent 20% de dépendance à la dialyse chez les survivants (10, 31).

Dans une cohorte internationale récente regroupant 1218 patients (32), 14% étaient toujours dépendants de la dialyse à la sortie de l’hôpital. Mais d’autre part les patients qui n’ont pas besoin de dialyse à la sortie de l’hôpital à 90 jours préservent cet avantage à 1 an avec respectivement 1%

et 5% d’IRT à 1 et 5 ans dans une autre étude récente (33).

De nombreuses études n’ont pas permis de mettre en évidence les facteurs de risque de détérioration de la fonction rénale pouvant nécessiter dans un 2e temps la dialyse chronique après un épisode d’IRA. Nous avons démontré comme Uehlinger (34) que l’IRC était un facteur de progression vers l’IRT que ce soit, dans notre étude, avant ou après l’épisode d’IRA. Ceci a un impact direct sur le suivi que l’on devrait offrir aux patients ayant survécu à un épisode d’insuffisance rénale aux soins intensifs. Il est en effet clairement établi maintenant qu’une prise en charge précoce de l’IRC est non seulement nécessaire mais efficace, se focalisant sur le traitement de l’hypertension, la protéinurie, l’anémie, la maladie coronarienne ainsi que les troubles du métabolisme phospho- calcique. Elle réduit la progression de la néphropathie en diminuant le déclin annuel du taux de filtration glomérulaire.

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11

Notre étude est observationnelle et repose sur un nombre limité de patients. Elle n’a pas le pouvoir statistique de déterminer les facteurs prédictifs de survie ou de nécessité de recours à une thérapie de remplacement rénal. Elle ne tient pas compte non plus de facteurs confondants tels que la présence d’une maladie cardiovasculaire ou d’une néoplasie. Elle ajoute cependant un élément supplémentaire à la réflexion sur la prise en charge précoce et tout ce qui est qualifié actuellement de « pré-dialyse » en nous rendant une nouvelle fois attentifs au suivi longitudinal de patients ayant subi un épisode d’IRA, à risque de développer une IRC ou une IRT et par conséquent à risque de développer des problèmes cardio-vasculaires, première source de morbi-mortalité. La rareté du suivi après IRA a déjà été cité plus haut (13) et ne manque pas d’inquiéter et questionner sur le rôle du néphrologue.

L’IRA est donc une cause d’IRT et peut augmenter le risque de développer une IRC. De plus, la sévérité, la durée et la fréquence des épisodes d’IRA sont des facteurs prédictifs importants de mauvais pronostic. Les données du groupe de Chawla à Washington ont identifié l’âge avancé, la présence d’un diabète sucré et une fonction rénale de départ altérée comme étant des facteurs de risque de progression vers l’IRC avancée (35). Ils ont également démontré que l’albumine sérique basse est un facteur prédictif fort de mauvaise évolution rénale, mettant en lumière les relations complexes entre diète, nutrition et catabolisme associés à une inflammation chronique tels que rencontrés en IR avancée ou en dialyse. Ce syndrome est parfois repris sous l’acronyme de MIA pour malnutrition-inflammation-athérosclérose, dans la littérature néphrologique.

Bien qu’il semble relativement évident que la sévérité d’un épisode d’IRA soit liée à la progression vers l’IRC, ce lien n’a été démontré que récemment suggérant l’existence d’un seuil dans le cours d’un épisode aigu initiant un processus chronique (36,37).

L’IRC est de façon très systématique un facteur de risque de développement d’une IRA, mais il apparaît que le risque soit bidirectionnel avec l’IRA augmentant de 4 à 40 fois le risque d’IRT selon la présence ou pas d’une atteinte préalable (38). Ces données suggèrent qu’IRA et IRC coexistent dans un cercle vicieux qui s’exprimera plus ou moins, en fonction de la réversibilité de l’atteinte rénale, et en fonction de processus de réparation également plus ou moins adaptés. Les mécanismes

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exacts permettant à l’IRA d’initier ou d’aggraver l’IRC sont partiellement connus chez l’être humain. L’un des concepts importants est que le processus peut se faire de façon indépendante du phénomène original ayant provoqué une pathologie rénale, aboutissant à la perte de néphrons fonctionnels. Cette perte est compensée par l’hypertrophie glomérulaire compensatrice et

l’hyperfiltration (39) mais avec un processus pouvant aboutir à la glomérulosclérose et la fibrose tubulointerstitielle. Nous ne détaillerons pas ici les mécanismes associés, en rappelant cependant qu’ils font appel de plus à une inflammation interstitielle avec infiltration cellulaire, perte de la réserve vasculaire, arrêt du cycle cellulaire avec diminution de la réparation des cellules tubulaires et activation des fibroblastes subissant une transformation en myofibroblastes pseudo-tumoraux par des changements épigénétiques bien décrits dans des modèles animaux (40).

Des modèles ont été développés pour identifier les patients survivant à un épisode d’IRA à risque élevé de développer une IRC et afin de stratifier ce risque. Ils font appel à des variables multiples et ont été validé sur de larges cohortes permettant aux cliniciens à l’avenir d’évaluer le risque de progression vers l’IRC, que ce soit pour des raisons thérapeutiques ou pour l’inclusion dans des études cliniques (3). Ils utilisent le stade RIFLE (annexe 1), le besoin de dialyse, le taux de filtration glomérulaire de départ et l’albumine sérique. Associé à ces variables, l’usage de nouveaux

biomarqueurs montre un certain intérêt dans la prédiction de récupération de fonction. Parmi ces nouveaux marqueurs biologiques, citons la NGAL (neutrophil gelatinase-associated lipocaline) qui a entre autres démontré une amélioration de la précision du risque chez les patients présentant une IRA sévère (41). Ceci nous permettra probablement à l’avenir de nous affranchir progressivement des classiques mesures d’ « urée-créatinine » en gagnant en précision diagnostique, thérapeutique et pronostique via l’usage de nouveaux marqueurs sériques ou urinaires. Nous avons dans notre étude observationnelle utilisé la définition d’IRA et les marqueurs usuels et classiques en usage à ce moment-là, en constatant cependant que ces usages sont en cours de changement, de même que la stratification des épisodes faisant appel en plus au débit urinaire tel que formulé dans les critères RIFLE et AKIN (annexe 1) que nous ne commenterons pas ici et qui font partie d’une thématique à part entière sur la stratification de l’atteinte rénale aiguë. De la même manière, nous n’avons pas au

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13

moment de l’étude utilisé la classification de l’atteinte rénale chronique (annexe 2) qui est maintenant d’usage courant et qui permet une meilleure stratification des dommages.

Nous introduisons ici, en conclusion et en guise de réflexion, un concept novateur et provocateur proposé récemment par Golestaneh en commentaire d’une étude de Lo et coll. (30) : la mémoire urémique. Nous parlons ici de dommages pathologiques permanents ayant une expression

histologique particulière comme empreinte d’un épisode d’IRA, ayant fait appel à des médiateurs de l’inflammation, de la fibrose et de l’apoptose, par analogie à la mémoire hyperglycémique. Cette mémoire urémique met le patient à risque de développer une IRC et donc une augmentation de morbidité et mortalité. Cela nous amène une fois de plus à nous focaliser sur ce qui arrive avant l’épisode d’IRA et nous pousse à favoriser la stratification des risques possibles de lésions rénales et la prévention dans les situations où la composante iatrogène prend une part prépondérante. Cela nous encourage de même à nous préoccuper de ce qui se passe après l’épisode d’IRA en offrant un suivi au long cours propice à une meilleure prise en charge permettant une prévention de l’atteinte rénale terminale et une meilleure gestion de ses complications. Plus de 30 ans après le papier fondateur de Brenner sur l’importance de l’hyperfiltration dans les dommages glomérulaires (39), nous voyons peut-être poindre ici une nouvelle ère dans la prise en charge de l’insuffisance rénale chronique.

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14

Tableau 1

Caractéristiques cliniques et valeurs de laboratoire à l’entrée dans l’étude.

Survivants (n=60)

Non survivants (n=29)

Age (années) 58 16 68 11

Genre masculin (%) 50 66

Diabète (%) 18 21

Diagnostic d’IRA

(traumatique/chirurgical/médical)

6/9/45 1/12/16

Apache II score 23 8 18 6

††

Sepsis (%) 60 41.4

CRRT durée (jours) 3 (2-5) 4 (2-5)

IRC présente avant IRA (%) 32 62

††

IRC présente après IRA (%) 35 72

††

Créatinine à 3 ans ou dernière avant décès (μmol/L)

88 (68-154) 159 (102-279)

††

Données moyennes  SD ou médianes ± IQR † p < 0.05, †† p < 0.01

(16)

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Figure 1

Analyse selon Kaplan-Meyer de la survie à 3 ans en présence ou non d’IRC.

(17)

16

Tableau 2

Résultats selon le modèle de Cox pour la survie à 90 jours.

Variable HR non ajusté Valeur du p HR ajusté Valeur du p

Age 1.04 (1.01-1.07) 0.05 1.03 (0.99-1.07) 0.07

Genre 0.62 (0.29-1.34) 0.23 2.02 (0.71-5.76) 0.19

Diagnostic : Traumatique Chirurgical Médical

1.0

5.71 (0.74-44.02)

1.94 (0.26-14.59) 0.09 0.52

1.0

4.27 (0.43-41.96)

1.19 (0.14-10.44) 0.21 0.88

Apache II 0.93 (0.88-0.98) 0.007 0.91 (0.86-0.97) 0.004

Sepsis 1.78 (0.85-3.74) 0.13 0.69 (0.29-1.63) 0.40

CRRT durée 0.99 (0.94-1.04) 0.64 1.02 (0.97-1.08) 0.40

IRC 3.41 (1.51-7.71) 0.003 2.94 (1.10-7.20) 0.03

Les données sont exprimées avec un IC de 95%, ajusté pour le risque de décès à 90 jours

(18)

17

Annexe 1

Critères RIFLE d’IRA

Critères AKIN d’ IRA (AKI = Acute Kidney injury)

(19)

18

Annexe 2

Nouvelle classification de l’atteinte rénale chronique selon le taux de filtration glomérulaire

(20)

19

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Résumé 150 mots

L’IRA aux soins intensifs est une pathologie courante, due majoritairement à une NTA dans le cadre d’une dysfonction multi-viscérale et associée à une forte mortalité. Si le patient survit, il est communément admis que les reins vont récupérer. De plus la littérature est équivoque sur la nécessité d’une thérapie de substitution rénale au long cours. Nous avons montré dans un suivi de cohorte chez des patients ayant survécu 90 jours à un épisode d’IRA aux SI que l’IRC est fréquente et que cette insuffisance rénale chronique est associée à un excès de mortalité. Nous avons

également démontré que le recours à la dialyse est relativement fréquent surtout s’il existe une IRC, que ce soit avant l’évènement ou qui persiste après l’épisode d’IRA ayant nécessité une thérapie rénale de substitution. L’IRC est d’une part un facteur de risque indépendant de mortalité mais d’autre part un facteur de progression vers l’IRT.

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