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L'univers des étoiles massives

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Université d'Aix-Marseille

L'univers L'univers

des des

étoiles massives étoiles massives

Habilitation à Diriger des Recherches 12 Mars 2013

Présentée par

Delphine Russeil Jury composé de:

P. Amram V. Buat

G. Joncas (rapporteur) E. Le Coarer

Q. Parker (rapporteur) R. Stamm

A. zavagno

LAM/OAMP – Université d'Aix-Marseille

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Table des matières

Cadre Général ...3

I) Les étoiles massives comme traceurs de la structure de notre Galaxie...4

I. 1) Notre Galaxie: historique...4

I. 2) Notre Galaxie une Galaxie spirale...5

Caractéristiques des galaxies spirales...6

I. 3) Notre Galaxie: sa structure spirale...7

Généralités...7

Tracer les bras spiraux de notre Galaxie...8

La notion de complexe...9

Les écarts à la rotation circulaire...13

Le sondage Het la structure spirale de notre Galaxie...14

La structure à 4 bras de notre Galaxie: historique et vision récente...22

Deux ou quatre bras? Notre Galaxie vue en infrarouge...24

Perspectives...24

II) La formation des étoiles massives...26

La contribution d'Herschel...26

Perspectives...32

III) Les étoiles massives et leur région HII: Cinématique des régions HII ...33

RCW108 (Comeron et al. 2005)...33

RCW82 (Pomarès et al. 2009)...36

RCW107...38

Perspectives...40

IV) Etude statistique de la formation des étoiles massives dans notre Galaxie ...41

La contribution du sondage HiGAL...41

Perspectives...46

V) Etude statistique de la distance des étoiles OB et distance des régions HII...48

Etat de l'art...48

Etoiles OB dans la direction de NGC 6334 et NGC 6357...50

Perspectives...52

VI) Quel type de structure spirale pour notre Galaxie ?...53

Discussion...53

Perspectives...58

CONCLUSION...59

Remerciements...60

Références...61

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Cadre Général

Le but de ce document est de présenter une revue des travaux auxquels j'ai participé de façon significative depuis ma thèse et qui visent à quantifier l'impact des étoiles massives dans la structuration de notre galaxie et à terme des galaxies extérieures. Ce document se présente sous la forme d'une présentation synthétique de mes principaux résultats ainsi que de leur mise en perspective dans le cadre plus général des recherches nationales et internationales sur le sujet.

L'étude de la Voie Lactée en tant que galaxie a connu un fort essor dans les années 60-70 avec l'arrivée des premiers sondages du plan Galactique dans le domaine radio et optique (H). Dans ce cadre, le problème de la détermination de la distance des traceurs (régions HII plus particulièrement), de la structure des bras et de la courbe de rotation s'est vite posé notamment en ce qui concerne la résolution de l'ambiguïté des distances pour les sources à l'intérieur du cercle solaire. La combinaison des données radio et optique a permis de résoudre pour un grand nombre de régions HII cette ambiguïté. Un long et fastidieux travail de détermination des distances des régions HII a alors été mené : pour chaque région il a fallu identifier les étoiles excitatrices, déterminer la vitesse systémique, corriger des écarts à la rotation, résoudre l'incertitude des distances ..etc.

Ce travail mené par Y.M. Georgelin et résumé dans sa thèse a permis en 1976 le premier tracé cohérent de la structure spirale à 4 bras de notre Galaxie.

Cette étude qui a été menée en partie grâce à l'interféromètre de Pérot-Fabry à ordre fixe qui permettait d'accéder à la vitesse du gaz ionisé visible en H, a ouvert la voie a un nouveau sondage : la sondage H du plan galactique Sud avec un Pérot-Fabry à balayage. Les avancées technologiques en informatique ont permis le développement de cet instrument (l'instrument CIGALE) dans les années 80 par l'équipe interférométrie de l'observatoire de Marseille. Au début des années 90 avaient lieu les premières lumières du sondage, et c'est dans ce cadre qu'en 1995 j'ai débuté ma thèse portant sur l'analyse de ces données dans le but de préciser la structure spirale de notre Galaxie.

Avec Y.M. Georgelin nous avons analysé plus de 300 cubes, grâce aux programmes spécifiques développés par E. Lecoarer, complétés par des observations moléculaires au SEST (observations menées en collaboration avec A. Castets) et des données multi-longueur d'onde de la littérature.

L'effort commun des différents membres de l'équipe a permis de quasiment boucler la couverture des zones prévues. Nous avons alors en 2003 pu retracer la structure spirale de notre Galaxie grâce à l'établissement d'un catalogue de 481 complexes de formation stellaire. Nous avons ainsi précisé et rallongé le tracé des 4 bras spiraux de notre Galaxie et visualisé son gauchissement spatial.

En parallèle la thématique galactique commençait à revenir au centre des préoccupations de l'astronomie mondiale via l'apparition de sondages tel que le sondage photographique H du plan galactique sud à l'AAO. C'est dans ce cadre que j'ai effectué mon premier post-doc pour participer à ce sondage sous la direction de Q. Parker. Les superbes images à haute résolution spatiale et à très grand champ (28deg² sur le ciel par pointé) ont permis la détection de nombreuses nouvelles nébuleuses planétaires, doublant ainsi le nombre de tels objets connus jusqu'alors (projet MASH Parker et al. 2006). Pendant ce temps, le domaine de longueur d'onde infrarouge commençait à prendre son essor grâce au développement technique notamment lié au satellite ISO. C'est dans ce cadre que j'ai effectué un post-doc a Helsinki, sous la direction de K. Matilla, sur l'étude de L1642 un nuage translucent. L'étude reposait sur l'exploitation de données ISO et de données moléculaires obtenues au SEST. J'ai notamment utilisé la méthode de décomposition en composantes principales, initialement appliquée à nos données , pour analyser les données des raies moléculaires (Russeil et Castets, 2004).

L'arrivée du satellite Herschel a fini de replacer la thématique de l'étude de notre Galaxie au centre des préoccupations à travers en particulier l'étude de la formation stellaire massive. Je me suis ainsi impliquée dans les programmes galactiques d'Herschel tels que HOBYS et HiGAL. Ce satellite et ses instruments sont en train de révolutionner notre vision de la structuration de la poussière dans la

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Voie Lactée, de la formation des étoiles, de la structure des parties centrales de notre galaxie ...etc..

En parallèle l'ère des grands sondages (e.g. HiGAL, MSX, AKARI, SPITZER, 2MASS, NANTEN, GAIA, VISTA, ATLASGAL ... etc) révolutionne et révolutionnera encore dans les années à venir notre approche multi-longueur d'onde de la structure Galactique.

Je propose maintenant de détailler mes contributions à ces sujets.

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I) Les étoiles massives comme traceurs de la structure de notre Galaxie

I. 1) Notre Galaxie: historique

Cette entité a longtemps eu le statut Universel tenu aujourd'hui par l'Univers et a été l'Oméga de nombreux chercheurs depuis la renaissance, depuis l'époque où nous avons enfin réalisé que ni la Terre ni le Soleil n'avaient le statut de centre de l'Univers. Même de nos jours, une grande partie des bases de l'astrophysique tirent leur substance du terreau galactique et il est d'ailleurs cocasse de noter que dans une bonne partie des illustrations des manifestations cosmologiques continuent de figurer des paysages galactiques. Malgré ces siècles d'étude, le sujet n'est pas clos et d'importants progrès restent à faire, même dans des sujets aussi basiques que le nombre de bras dont est pourvu cet univers-île. De fait, et depuis longtemps, les astronomes se sont penchés sur l'étude de la structure de notre Galaxie. Ce n'est qu'en 1610 que Galilée, avec l'invention de la lunette, observa pour la première fois que la Voie Lactée était en fait, non pas fluide comme on le pensait alors à l'époque, mais était constituée d'un nombre incommensurable d'étoiles. En 1750, Thomas Wright imagina que les étoiles de la Voie Lactée formaient une structure aplatie dans laquelle se trouvait notre Soleil. Il faut malgré tout attendre la fin du XVIII siècle pour que William Herschel effectue la première étude scientifique de notre Galaxie et abandonne la vision héliocentrique du système galactique. Postulant que les étoiles étaient réparties de manière uniforme et étaient toutes identiques et observables, il effectua des comptages d'étoiles dans exactement 683 directions. En effet, le nombre d'étoiles dans une direction donnée étant proportionnel à l'extension de la Galaxie dans cette direction, il était alors possible d'accéder à la distribution des étoiles et donc à la forme et l'étendue de notre Galaxie. Il montra ainsi que la Galaxie était un disque aux contours irréguliers, et que le Soleil n'occupait donc pas le centre de ce système. Avec le développement des méthodes spectroscopiques et de la photographie, de nouvelles observations devenaient possibles. Ainsi vers 1901, Kapteyn ré-appliqua la méthode des comptages d'étoiles dans quelques 200 directions à partir de plaques photographiques collectées à travers le monde, en y ajoutant des mesures de brillance, de mouvements propres, de vitesses radiales et des estimations du type spectral. Mais, ne prenant pas en compte l'absorption due au milieu interstellaire (qui vient biaiser la détermination de la distance des étoiles), son modèle était similaire à celui de W. Herschel. Il y ajouta malgré tout une échelle de distance, en estimant que notre Galaxie était 5 fois plus longue dans la direction du plan galactique que perpendiculairement à celui-ci. Ce n'est qu'en 1917 que H. Shapley, par l'étude de la distribution des amas globulaires, donna une idée correcte des dimensions de la Galaxie en estimant à 10 kpc la distance du Soleil au centre galactique.

En parallèle, en 1914, V. Sliper montra que les galaxies sont en rotation et H. Hubble montra en 1923, en découvrant des céphéides dans la galaxie d'Andromède, que les galaxies sont en fait des objets extra-galactiques. Ces découvertes posent les bases de l'échelle des distances et suggèrent ainsi que la Galaxie n'est qu'une entité parmi les autres.

Les premiers modèles décrivant la rotation de notre Galaxie sont le travail de B. Lindblad en 1926.

Il propose que le Soleil et les étoiles de faible vitesse présentent une rotation circulaire autour du centre galactique. En particulier, J.H. Oort développe une théorie cinématique en accord avec les observations, dans laquelle la rotation est différentielle. Ainsi la représentation de notre Galaxie tend vers une structure spirale.

Parallèlement, dès 1920, il est communément accepté que la matière interstellaire absorbant la lumière des étoiles existe dans notre Galaxie, mais ce n'est qu'en 1930 que les travaux de R.J Trumpler, basés sur des mesures de couleurs, de brillances et de types spectraux d'amas galactiques montrent que le rayonnement est d'autant plus atténué que l'étoile est loin de nous. Les poussières, en absorbant la lumière dans le visible et l'ultra-violet, gênent la connaissance de notre Galaxie en rendant inaccessibles les régions lointaines. Heureusement, le voile put être levé grâce aux radio- télescopes et notamment la découverte en 1951 de la raie de l'hydrogène atomique à 21 cm. Les ondes radio, n'étant pas absorbées par le milieu interstellaire permettent de sonder à grande distance

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notre Galaxie. C'est à la longueur d'onde 21cm que la structure spirale de notre Galaxie est pour la première fois mise en évidence. Cela donne lieu à un premier modèle à 2 bras fortement enroulés dit modèle de Leiden-Sydney. Mais cette représentation des bras n'est pas précise car l'hydrogène atomique ne présente qu'un faible contraste bras-interbras.

I. 2) Notre Galaxie une Galaxie spirale

L'étude des galaxies extérieures permet d'en identifier les différentes composantes. Les étoiles du noyau sont principalement des géantes rouges tandis que les étoiles bleues lumineuses sont plutôt distribuées dans les bras spiraux. Dans notre Galaxie, les objets sont classés en deux catégories: les objets de population I, associées aux bras spiraux, regroupant entres autres les jeunes étoiles chaudes (étoiles O et B), les amas et les régions d'hydrogène ionisé (régions HII) et les objets de population II peuplant la composante sphéroïdale (noyau + bulbe + halo ) dont les amas globulaire sont les principaux exemples. Les objets de population I peuvent donc être choisis comme traceurs de la structure spirale.

Caractéristiques des galaxies spirales

L'observation des galaxies spirales en général nous montre qu'elles peuvent être caractérisées par quatre principaux aspects.

Une structure aplatie: les galaxies spirales sont des systèmes dit à disque. C'est à dire que les constituants (étoiles, gaz, poussière) de la galaxie (hors des parties centrales où se trouve le bulbe) se distribuent de manière privilégiée dans un disque dont l'épaisseur est très inférieure à son diamètre.

Une composition riche en gaz: contrairement aux galaxies elliptiques, les galaxies spirales sont riches en gaz, poussière et étoiles jeunes.

Des bras spiraux: les galaxies spirales présentent des zones de sur-densité du gaz où se forment en grande partie les étoiles de toutes masses (dont des étoiles massives et chaudes). Ces sur- densités tracent les bras spiraux.

Un système en rotation: les galaxies spirales sont en rotation. Tous les objets du disque sont en rotation autour du centre de la galaxie. Cette rotation suit une loi de vitesse (courbe vitesse en fonction de la distance au centre nommée courbe de rotation) de forme bien particulière correspondant à une rotation dite différentielle.

La vision actuelle de notre Galaxie identifie, comme pour les galaxies extérieures, une composante sphéroïdale et un disque. Chacun de ces deux éléments présente des constituants stellaires et non stellaires et des propriétés dynamiques et cinématiques qui leur sont propres. La composante sphérique, qui contient la plus grande partie de la masse galactique mais qui est peu lumineuse, est elle-même divisée en trois sous structures: le noyau ( diamètre ~3pc), le bulbe (~ 3kpc de rayon) et le halo (rayon >= 30 kpc). Le bulbe est peuplé d'étoiles âgées dont la rotation est faible mais présente une grande dispersion de vitesse. Le disque quant à lui est un système plat (environ 200 pc d'épaisseur) s'étendant selon le plan galactique jusqu'à un rayon de 20 kpc, où les étoiles vieilles peu lumineuses se répartissent plus ou moins uniformément et où les étoiles jeunes se localisent préférentiellement dans les bras spiraux. Ce disque, beaucoup moins massif que la composante sphérique est pourtant beaucoup plus lumineux, grâce justement à ces étoiles jeunes et massives, sources importantes de photons ionisants aptes à rendre lumineux leur environnement par l'intermédiaire des régions HII.

De plus la rotation des objets du disque est rapide et de faible dispersion de vitesse. On peut déterminer ainsi la courbe de rotation des galaxies qui a une forme typique avec une croissance linéaire du type rotation en corps solide dans la partie centrale et un plateau traduisant une rotation différentielle dans le reste du disque. Pour notre Galaxie, une telle courbe de rotation a été établie par différents moyens: vitesse tangente de la raie HI ou CO, distance stellaire de régions HII et

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nébuleuses par réflexion ...

Nous avons comparé les différentes courbes de rotation pour notre Galaxie (Russeil, 1998) et privilégié celle établie par Brand et Blitz (1993). L'avantage de cette courbe de rotation est qu'elle est établie à partir de données localisées dans les 4 quadrants galactiques et mélange les différentes sondes (HI, CO et régions HII) ce qui permet d'avoir une courbe de rotation plus représentative de la rotation générale de notre Galaxie. Quoiqu'il en soit la courbe de rotation de notre Galaxie (fig. I.1) a de toute évidence la forme typique d'une galaxie spirale.

Figure I.1: Courbe de rotation de notre Galaxie (Brand et Blitz, 1993).

La vision multi-longueur d'onde des galaxies spirales nous permet de mettre en évidence les meilleurs traceurs des bras spiraux. Les bras spiraux se dessinent clairement dans les longueurs d'onde extrême UV (FUV: e.g. satellite GALEX), H, CO, et infrarouge lointain (FIR au delà de 60 m). Chaque longueur d'onde correspond à un traceur spécifique : le FUV est l'émission des étoiles OB, le H est l'émission du gaz ionisé par les étoiles OB, le CO trace les nuages moléculaires où naissent les étoiles et le FIR est l'émission des poussières froides et des poussières chauffées par les régions HII, lesquelles poussières sont étroitement mélangées avec les gaz dans les nuages moléculaires. Inversement l'émission dans le proche IR (par exemple les bandes J, H et K) est un moins bon traceur de la structure spirale. En effet les bras ne présentent qu'un faible contraste à ces longueurs d'onde à cause principalement du fait que l'émission NIR est dominée par l'émission des étoiles peu massives et largement distribuées dans l'ensemble du disque. Malgré tout le proche infrarouge (aux longueurs d'onde du satellite Spitzer: 3.5 et 4.5 m) trace les bras stellaires, source de la composante asymétrique du potentiel gravitationnel. On notera aussi qu'à 8 m, émission principale des PAHs («Polycyclic aromatic hydrocarbon»), de nombreuses structures plus ou moins filamentaires sont observées dans tout le disque. On ne peut donc pas utiliser cette longueur d'onde pourtant traceur de poussière, pour l'étude précise des bras. En parallèle, l'émission du gaz atomique HI n'est pas utilisable pour l'étude des structures spirales des bras à cause de son faible contraste bras-inter-bras. Par contre, le HI permet de visualiser les bras dans les parties externes des galaxies.

Nous pouvons donc conclure que l'étude des galaxies extérieures permet de sélectionner les bons traceurs des bras:

- les étoiles jeunes et massives (étoiles O,B) sous forme d'amas, d'associations ou individuelles - les régions HII excitées par ces étoiles OB qui émettent principalement la raie rouge de l'hydrogène Balmer- (n=3-2).

- Les nuages moléculaires parents où se sont formées les étoiles principalement observables dans le domaine radio (e.g. par les raies de CO)

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I. 3) Notre Galaxie: sa structure spirale Généralités

Il est très facile de se rendre compte que notre galaxie est une galaxie spirale. L'observation seule de la Voie Lactée permet déjà de voir que notre galaxie répond aux deux premiers critères caractérisant les galaxies spirales:

- La Voie Lactée est une bande lumineuse qui se détache sur le ciel. C'est en fait le disque de notre Galaxie vu depuis l'intérieur. Son épaisseur réduite par rapport à l'ensemble du ciel souligne bien « l'aspect disque » de notre Galaxie.

- L'observation visuelle de la Voie Lactée montre aussi qu'elle est parsemée de zones sombres plus ou moins étendues. Ces zones correspondent à de la poussière (qui absorbe la lumière des étoiles d'arrière plan). De plus on y observe des nébuleuses brillantes (e.g. nébuleuse d'Orion) qui sont du gaz ionisé par des étoiles jeunes et massives (étoiles O, B). Cela montre que notre Galaxie contient énormément de gaz et de poussière. En plus des étoiles excitatrices des nébuleuses brillantes (dites régions HII) on y observe aussi de nombreux amas ouverts. Ces étoiles sont des étoiles jeunes. La composition de notre Galaxie est donc caractéristique des galaxies spirales.

De même, la courbe de rotation de notre Galaxie a la forme typique des courbes de rotation des galaxies spirales. Il n'y a donc plus aucun doute sur le fait que notre Galaxie est une spirale. Le

« challenge » actuel réside maintenant dans la détermination de la structure des bras; de nombreux chercheurs s'y attèlent depuis environ 50 ans. Du fait de notre position à l'intérieur de la Voie Lactée, il est très difficile de reconstruire la structure spirale car toute l'information le long de la ligne de visée est superposée. En effet, par exemple 2 objets vus proches sur le plan du ciel ne sont, la plupart du temps, pas à la même distance. Tracer la structure des bras de notre Galaxie revient à essayer de tracer le plan d'une ville depuis une position fixe à l'intérieur.

Si les observations semblent montrer que notre Galaxie possède 4 bras, cela la rend particulière, (mais pas unique) dans le sens où la majorité des galaxies spirales de l'univers local sont des galaxies avec 2 bras.

Pour mieux comprendre cette problématique nous présentons ici la méthodologie utilisée pour établir la structure spirale de notre Galaxie qui se résume comme suit: (1) sélectionner les bons traceurs et (2) les replacer en distance afin d'accéder à leur distribution spatiale.

Tracer les bras spiraux de notre Galaxie

Pour déterminer la structure des bras de notre Galaxie il est nécessaire de reconstruire leur tracé point par point à la façon d'un géographe de l'ancien temps qui traçait les contours des côtes pour déterminer la morphologie des continents.

Choix du bon traceur:

L'étude des galaxies montre (voir ci-dessus) que les meilleurs traceurs des bras sont les objets jeunes: étoiles OB, régions HII (et nuages moléculaires associés) , amas ouverts. A l'inverse les nébuleuses planétaires et les amas globulaires (étant des objets âgés) ne sont pas de bons traceurs et ne peuvent donc pas être utilisés pour l'étude précise des bras spiraux de notre galaxie.

Méthode pour tracer les bras:

La méthode pour reconstruire le tracé des bras est assez simple, au moins dans le concept:

Répertorier l'ensemble des objets jeunes

Calculer leur distance héliocentrique

Porter les objets sur un graphique pour visualiser le résultat.

On voit donc que tout repose sur la détermination des distances de ces objets. Il existe deux grandes méthodes pour calculer la distance des objets qui permettent de déterminer soit la distance dite

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stellaire soit la distance dite cinématique. Notons qu'il existe une troisième méthode pour déterminer la distance d'objet en astronomie: c'est la distance basée sur la mesure de la parallaxe (telles les parallaxes mesurées par le satellite Hipparcos). Ces distances parallactiques ne sont, jusqu'à présent (voir plus loin les progrès potentiels du satellite GAIA) déterminables que pour des objets très proche (de l'ordre de quelques centaines de parsecs au maximum). Or nous voulons déterminer des distances à l'échelle de la Galaxie (~10 kpc).

La distance stellaire:

La distance stellaire nécessite l'observation du spectre de l'étoile et de ses magnitudes dans au moins 3 filtres différents (U, B, V). Le spectre permet de déterminer le type spectral de l'étoile (e.g. O5V) qui à partir de données tabulées permet d'accéder à sa magnitude absolue (MV). Les magnitudes apparentes mesurées permettent de déterminer le coefficient d'extinction (extinction du milieu interstellaire présent sur la ligne de vue de l'étoile) Av.

La distance d est alors déterminée par la relation: mV – MV = -5 + 5 log(d) + Av

Le problème de la distance stellaire est qu'il faut pouvoir identifier et mesurer les étoiles, or l'extinction interstellaire limite à 6 kpc en moyenne la portée de la détermination de distance stellaire.

La distance cinématique:

Quand on ne peut pas déterminer la distance stellaire la seule alternative est de déterminer la distance cinématique, c'est-à-dire la distance déterminée à partir de la mesure de la vitesse radiale systémique de l'objet. Cette méthode de calcul de la distance nécessite la connaissance de la courbe de rotation de notre Galaxie et de faire l'hypothèse que les objets sont en rotation circulaire uniforme autour du centre de la Galaxie. A partir de la vitesse radiale mesurée (Vmes) par effet Doppler, on calcul la vitesse angulaire (W) par la relation:

W = (Vmes / R0sinl ) + w0 (a)

ou R0 et W0 sont la distance au centre galactique du Soleil et la vitesse angulaire du Soleil qui sont des grandeurs connues et l est la longitude galactique. Notons ici que la vitesse radiale systémique peut être biaisée d'environ 10 km/s à cause des écarts à la rotation circulaire. Il convient donc au mieux d'identifier ces écarts et d'en corriger la vitesse radiale systémique avant de calculer la distance cinématique. En pratique, cela ne peut être fait que pour les régions les plus proches.

Par la courbe de rotation on détermine alors la distance galacto-centrique R puis la distance héliocentrique r en résolvant l'équation suivante:

r2 -2 R0 r cos(l) + (R02 - R2) = 0 (b)

Cette équation donne deux solutions possibles pour les objets situés à l'intérieur de l'orbite Solaire.

Cette dégénérescence de la distance héliocentrique doit ensuite être résolue par des considérations astrophysiques additionnelles.

La notion de complexe

En pratique, pour tracer la structure spirale de notre Galaxie, nous avons suivi la stratégie initiée par Bok, 1971 et Georgelin and Georgelin, 1976 qui consiste à considérer comme traceur non pas les objets jeunes individuellement mais de les regrouper en complexes de formation stellaire. Cette notion de complexe est très importante car cela permet de réduire la dispersion spatiale et la dispersion de vitesse des objets d'un même complexe, les uns par rapport aux autres, ce qui impliquerait l'étalement des traceurs et rendrait « flou » la structure spirale que l'on veut mettre en évidence.

Sachant que les étoiles se forment dans le nuage moléculaire, un complexe (fig. I.2) se définit

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comme le regroupement d'un nuage moléculaire parental, observé en radio principalement en CO, et des régions HII crées par les étoiles massives qui se sont formées dans ce nuage moléculaire. Le regroupement se fait sur la base de la vitesse du nuage moléculaire et des régions HII ainsi que sur la distance apparente sur le ciel. En effet les régions HII doivent avoir une vitesse similaire au nuage moléculaire (à plus ou moins 10 km/s) et se trouver spatialement dans la direction, ou sur le bord du nuage moléculaire.

La notion de complexe permet aussi d'avoir une information plus complète qui permet une meilleure détermination de la vitesse systémique du complexe et de sa distance. En effet on a, pour un même complexe, accès à la vitesse moléculaire, la vitesse du gaz ionisé des régions HII (soit par la raie H, soit par les raies dans le domaine radio (par exemple la raie H109), la distance des étoiles excitatrices (quand elles sont observables) et l'information des raies en absorption du milieu interstellaire présent sur la ligne de vue (qui permettent de choisir entre distance cinématique proche et lointaine).

Figure I.2 : Représentation schématique d'un complexe de formation stellaire.

Mais le lien physique entre régions HII et nuages moléculaires n'est pas toujours évident. En effet le gaz ionisé peut présenter des mouvements internes importants ou un champ de vitesse complexe.

Par exemple quand une région HII crève son nuage moléculaire parental par effet « champagne », la vitesse du gaz éjecté peut atteindre 10 km/s par rapport au nuage et aux parties stationnaires de la région ionisée (Tenorio-Tagle 1979).

Nous avons réalisé en 2004 que l'information moléculaire n'existait pas pour un grand nombre de régions HII. Les sondages moléculaires (CO) de l'époque du plan galactique sud étaient à trop basse résolution spatiale (e.g. 8.8 arcmin, Bronfman et al. 1989). Seules quelques régions avaient été observées en CO à haute résolution (e.g. Gillespie et al. 1977, Zinchenko et al. 1995) .

C'est donc dans ce cadre que nous avons mené des observations pointées (« position switching » et

« frequency switching ») en 12CO(1-0) et 13CO(1-0) avec le radiotélescope SEST dans la direction de 252 régions HII du plan galactique sud (Russeil et Castets, 2004).

La finesse intrinsèque des raies moléculaires par rapport aux raies H permet de lever la

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dégénérescence que l'on rencontre parfois lors de la décomposition des profils H (fig I.3).

Figure I.3: Profils H (en haut) et CO (en bas) de la région G301.814+1.077. La décomposition du profil H en 2 ou 3 composantes est équiprobable. Dans ce cas le profil CO permet de lever la dégénérescence en imposant une décomposition du profil Havec 3 composantes.

L'information moléculaire a été comparée à l'information H (e.g. Fig. I.3 et I.4). En particulier, nous avons établi qu'il y a association entre région HII et raie moléculaire si l'écart en vitesse |Vco- VHII| est inférieur ou égale a 10 km/s. Ainsi, nous avons pu associer plus de 81% des raies moléculaires à de l'émission H. Nous trouvons que les régions HII sont associées avec des raies moléculaires dont la largeur est supérieure à 2.5 km/s. Mais surtout nous trouvons que la différence (Vco-VHII) se situe à 0 km s−1, que les régions HII soient optiquement visibles ou non. Ceci suggère que le gaz ionisé est en expansion selon des directions aléatoires respectivement au gaz moléculaire.

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Figure I.4: Profils H et CO de la source G305.678+1.607. Ce cas illustre la bonne correspondance des raies lorsque la décomposition du profil H est unique.

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Les écarts à la rotation circulaire

Pour établir la courbe de rotation de notre Galaxie nous supposons que les objets sont en rotation circulaire à vitesse constante autour du centre de la Galaxie. Mais quand le gaz pénètre l'onde de densité qu'est un bras, il subit non seulement une compression mais aussi un changement léger de la direction et de la norme de sa vitesse : l'influence gravitationnelle du bras fait que les objets sont tirés vers les parties centrales du bras. Ajoutés à la force de Coriolis, le gaz et les étoiles vont

« couler » le long des bras (« streaming motion ») quand ils sont à l'intérieur pour s'éloigner des bras ensuite. Ce « streaming motion » se traduit par un écart à la rotation circulaire de l'ordre de 10 à 20 km/s du gaz (fig. I.5) mais cela peut atteindre jusqu'à 50 km/s et plus comme dans M51 (Shetty et al. 2007).

Figure I.5: Les écarts à la rotation circulaire. En haut à gauche: Russeil et al. 2003, en haut à droite Brand et Blitz 1993 et en bas: McClure-Griffiths et al. 2007.

Ces écarts à la rotation circulaire impliquent que la mesure de la vitesse systémique est biaisée et donc des distances cinématiques sur ou sous estimées. La figure I.6 illustre l'influence des écarts à la rotation circulaire sur la reconstruction de la structure spirale. Si la structure spirale est globalement retrouvée, il apparait des structures allongées qui sont des artéfacts et qui peuvent être confondus avec des sous structures comme des éperons ou des ponts. Il apparait donc important d'identifier ces écarts à la rotation circulaire pour les corriger avant de calculer la distance cinématique. En pratique l'identification des écarts se fait de proche en proche quand on peut connaitre la distance stellaire d'un certain nombre de régions. La correction des écarts à la rotation circulaire n'a pu être faite que pour des régions proches (plus proches typiquement que 6 kpc). Une question qui se pose alors est de comprendre et de quantifier avec l'étude de galaxies extérieures les points suivants : est ce que ces écarts sont identiques tout le long des bras ? Est ce qu'ils varient d'un

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bras à l'autre ? Varient-ils avec la distance au centre galactique ? Quelle est l'influence des supernovae en expansion et de la formation stellaire induite relativement à ces écarts ? ...

Nous avons vu dans la région à l=290° (Georgelin et al. 2000) que l'expansion d'une bulle peut engendrer des écarts à la rotation circulaire pour les régions formées sur son bord. Les réponses à toutes ces questions pourraient permettre de dire si oui ou non on peut extrapoler les écarts à la rotation circulaire mis en évidence localement à l'ensemble des régions de notre Galaxie.

Figure I.6: Effet des écarts à la rotation circulaire sur la distance cinématique et la reconstruction de la structure spirale (Baba et al. 2009). A gauche le modèle et à droite la reconstruction de la structure à partir de la distance cinématique en supposant le gaz en rotation circulaire.

Globalement la structure est retrouvée mais les sous structures fines sont perdues, les bras sont étirés et des structures erronées en forme d'éperons (pointant vers le Soleil) sont crées.

Le sondage H  et la structure spirale de notre Galaxie

C'est à partir de l'étude des régions HII et de leur étoiles excitatrices que la représentation de la structure spirale est la plus cohérente. Cette méthode utilisée avec succès par Bok et al. (1970), pour l'étude du bras de la Carène a été généralisée par Georgelin et Georgelin (1976) à la Galaxie toute entière. Pour ce faire, Georgelin et Georgelin ont effectué des observations de la vitesse radiale de la raie H de quelques 268 régions HII, avec un interféromètre à ordre fixe et déterminé la distance de quelques 360 étoiles excitatrices. Comme déjà expliqué, l'examen détaillé des données optiques et radio des nébuleuses une à une, a permis de lever l'ambiguïté des distances d'un grand nombre de régions HII situées à l'intérieur du cercle Solaire, mais surtout de délimiter les complexes de formation stellaire par le regroupement des différents objets jeunes les constituant.

C'est ainsi que le premier modèle de la structure de notre Galaxie a été établie par Georgelin et Georgelin (1976): notre Galaxie possède 4 bras spiraux (fig. I.7) deux à deux symétriques vus tangentiellement aux longitudes 33°, 50°, 283°, 305° et 327°.

Mais le Pérot-Fabry à ordre fixe permettait seulement d'avoir une information spectrale sur quelques pour-cents du champ observé. De plus seules les régions les plus brillantes étaient accessibles et la contribution des raies du ciel nocturne ne pouvait être corrigée.

Bien que les régions HII les plus brillantes soient d'excellents traceurs des complexes de formation stellaire, il s'avère important d'accéder à des régions plus faibles, plus lointaines mais aussi au milieu diffus, pour affiner l'identification des complexes et la détermination de leur vitesse systémique.

(15)

Table I.1: configuration instrumentale de l'instrumentation du sondage H du plan Galactique Sud (Lecoarer et al. 1992).

km/skm/s km/s

(16)

C'est dans ce cadre qu'un nouvel instrument utilisant un interféromètre Pérot-Fabry à balayage a été élaboré à l'observatoire de Marseille pour faire un sondage H du plan galactique Sud de notre Galaxie.

Débuté dans les années 80, à l'aube de l'époque des grands sondages du plan de notre Galaxie (e.g.

UKST H survey, SGPS-21cm, MSX, Herschel-Hi-Gal ...) le sondage H du plan de notre Galaxie de l'hémisphère Sud par l'observatoire de Marseille est resté unique en son genre: il est basé sur un interféromètre de Pérot-Fabry à balayage monté sur un télescope de type Ritchey-Chrétien de 36cm de diamètre. Cette instrumentation permet d'accéder à l'information spectrale, en particulier la raie H sur l'ensemble du champ observé (9 arcmin x 9 arcmin), avec une haute résolution spectrale.

Ces caractéristiques permettent l'étude cinématique des différentes couches de gaz ionisé (régions HII et milieu diffus) présentes le long de la ligne de vue (fig. I.8). Le contexte de l'époque ne permettait pas une couverture continue du plan mais les régions principales (sélectionnées à partir de sondage radio préexistants) on pu être cartographiées.

E. Lecoarer (1992) décrit avec détails l'instrument et ses premières lumières. Les spécificités instrumentales d'origine sont rappelées table I.1. La configuration favorisée pour le sondage du plan galactique était celle du Pérot-Fabry 2604 qui permettait la meilleure résolution spectrale et donc la meilleure mesure de la vitesse. Mis à part la capacité informatique qui a été améliorée au cours du temps, l'instrumentation est restée identique pour l'ensemble des observations du plan galactique.

Les programmes de traitement des données ont, quant à eux, été élaborés et maintenus par E.

Lecoarer. Ces programmes qui fonctionnaient à l'origine sur des machines Unix ont été portés il y quelques années sous l'environnement Linux.

Le sondage H du plan galactique sud consiste en 12 zones couvrant chacune quelques 2° en longitude et de l'ordre de 1° en latitude. Seules les zones d'émission radio les plus intenses formant des complexes ont été observées. Un sondage plus complet aurait été nécessaire mais n'a pu être effectué. Notamment certaines zones n'ont pu être complétées. Les zones observées sont listées dans le tableau I.2. La plupart des zones ont donné lieu à des publications. Les régions à 351° et 353°, correspondant aux complexes de formation stellaire NGC 6357 et NGC 6334, sont en cours de publication. Il ne reste donc en pratique plus que la région à 280° à être publiée.

Figure I.7: Structure de notre galaxie suivant Russeil et al. (2007) (gauche) et Georgelin &

Georgelin (1976) (droite)

(17)

Publication Region

Russeil et al. 1998 234°

A faire 283°

Georgelin et al. 2000 290°

Russeil et al. 1998 301° à 324°

Le Coarer et al. 1992 303°

Georgelin et al. 1994 328°

Russeil et al. 2005 332°

Georgelin et al. 1996 338°

Russeil et al. En prépa. 351° et 353°

Table I.2: Statut des publications des zones du plan galactique observées dans le cadre du sondage H sud.

Quoiqu'il en soit l'ensemble des données ont été analysées et ont permis d'établir un catalogue de 481 complexes de formation stellaire pour lesquels la distance (stellaire et/ou cinématique) a été établie. Nous avons donc grâce à ce catalogue de complexes pu accéder à leur répartition spatiale et donc à la structure spirale de notre Galaxie (Russeil, 2003). Pour l'ajustement numérique des bras spiraux nous avons choisi comme pondération le paramètre d'excitation U (qui quantifie le flux de photons ionisants et donc l'importance des complexes) des complexes établi à partir de données radio (afin de ne pas être biaisé par l'extinction interstellaire). Afin de traiter notre Galaxie comme une galaxie d'un point de vue général, nous avons, avant de tracer la structure spirale, sélectionné les complexes avec U > 70 pc cm-2. En effet la structure des bras des autres galaxies est principalement tracé par les régions dont la luminosité correspond à cette limite.

Pour les directions à ±12° du centre et de l'anti-centre galactique, la détermination des distances cinématiques est impossible (forte dégénérescence). La seule alternative est donc de déterminer la distance stellaire. De nombreuses régions HII n'avaient pas de distance stellaire établie (ou trop incertaine). Nous avons donc mené une recherche et une étude systématique des étoiles excitatrices de régions HII (voir section V). Cette étude a été menée à l'OHP par des observations photométriques en U, B et V à l'OHP au télescope de T120 et des observations spectroscopiques (4000 – 5000 Å) au T193 (Carelec). Ces observations ont permis de déterminer/re-déterminer la distance stellaire de 32 régions HII et ainsi de retracer la structure spirale (Russeil et al. 2007; voir aussi Fig. I.7). Cette nouvelle version de la structure de notre Galaxie reste cohérente avec la version de 2003. Nous avons en plus poussé l'étude des écarts à la rotation circulaire (supposés dus aux streaming motions) avec comme sous-produit une estimation du rayon de co-rotation (~13 kpc) de notre Galaxie. En plus de la structure spirale à 4 bras, il apparait que le bras du Sagittaire-Carène (bras 1) domine de par sa richesse en régions HII lumineuses. Ainsi la longueur angulaire des bras, la présence d'une barre et de compagnons (les nuages de Magellan) et la forte proéminence du bras Sagittaire-Carène permettent de déduire que notre Galaxie est probablement une galaxie à bras multiples et non Flocculente.

La détermination de la distance des objets jeunes montre en plus de la structure spirale que notre galaxie est gauchie (disque tordu vers le haut dans la partie nord et vers le bas dans la partie sud). Le gauchissement de notre Galaxie (fig. I.9) est observé avec tous les traceurs: étoiles, régions HII HI, CO (e.g. Drimmel, 2000a, Nakanishi et Sofue, 2003, Levine et al., 2006, Paladini et al. 2004, Cersosimo, 2009, Smart et al. 1997, Vazquez et al. 2008). Le gauchissement des galaxies est relativement commun.

(18)

Les autres structures remarquables de notre Galaxie:

Figure I.8: Illustration de l'utilisation de la vitesse pour découpler les émissions H présentes sur la ligne de visée.

L'image (A) présente l'émission H

(UKST) du plan galactique autour de l=290° (Georgelin et al., 2000). Sur une simple image il n'est pas possible de savoir si les différentes régions HII sont à la même distance ou non . Grâce à l'information en vitesse donné par la décomposition de la raie H il est possible de construire des images de l'émission H à deux vitesses différentes (soit à deux distance différentes).

L'image (B) correspond à l'émission H

de vitesse +20 km/s (d~8 kpc) tandis que l'image (C) correspond à l'émission H

de vitesse -25 km/s (d~2.7kpc) (B)

(A)

(C)

(19)

Figure I.9: (A) Gauchissement de notre galaxie suivant Russeil (1998). Les cercles représentent les complexes au dessus du plan et les signes + ceux en dessous du plan. Leur taille est proportionnelle à leur distance par rapport au plan galactique. (B) Gauchissement de notre galaxie en HI (Nakanishi et Sofue, 2003).

(B)

(A)

(20)

Pour notre Galaxie l'axe de son gauchissement est aligné avec la direction des galaxies Nuages de Magellan qui sont les deux plus proches galaxies de la notre. On pense donc que ce sont les effets de marée gravitationnelle dus aux Nuages de Magellan qui impliquent ce gauchissement.

Nous notons qu'un autre aspect de notre Galaxie, non développé ici et provenant d'observations en infrarouge de ses parties centrales (COBE/DIRBE) est qu'elle présente une barre centrale (e.g.

Binney et al., 1997). La figure I.7 (gauche) indique la position de cette barre (trait en pointillés et tirets central). Plus récemment, à partir de comptage d'étoiles une seconde barre plus longue et avec un angle de position plus grand a été mis en évidence (e.g. Lopez-Corredoira et al. 2007, Benjamin et al. 2005). Notre Galaxie est donc une galaxie spirale barrée (voir revue récente de Athanassoula, 2012) .

Figure I.10 : Structure spirale locale de notre Galaxie . Figure (A) : Distribution des associations (Mel’nik & Efremov 1995); Figure (B): distribution des régions HII et distances stellaires d'après Crampton & Georgelin 1975); Figure (C): distribution des amas d'après Dias et Lépine (2005).

Bras de Persée

Bras local ( bras d'Orion) Bras du Sagittaire-Carène

(A) (B)

(C)

(21)

Figure I.12: A gauche: Modèle de Hou et al. (2009). A droite: Connection entre la structure des bras HI externes (en Rose, Lévine et al. 2006) et la structure interne (distribution de couleur, Hou et al. 2009).

Figure I.11 : A gauche : Distribution des régions HII radio, Caswell et Haynes (1987). A droite : Distribution des nuages moléculaires nord (104 < M < 5 106 M⨀), Solomon et Rivolo (1989).

(22)

La structure à 4 bras de notre Galaxie: historique et vision récente

Dans les années 50 Morgan et al. (1952, 1953), et plus tard dans les années 70 à 90, par l'étude des associations, amas jeunes et étoiles lumineuses, cartographièrent les bras spiraux du voisinage solaire révélant 3 concentrations distinctes que sont le bras de Persée, le bras local et le bras du Sagittaire (voir Fig. I.10).

En parallèle, à partir de données radio, la structure spirale au delà du centre galactique se révèle.

L'information radio ne subissant pas l'extinction interstellaire, elle permet de détecter des régions HII qui ne sont pas visibles en H et localisées donc bien plus loin et de tracer les nuages moléculaires. Nous citerons en particulier les travaux de Cohen et al. (1985) et Solomon & Rivolo (1989) qui tracent la distribution de nuages moléculaires et de Caswell & Haynes (1987) qui tracent la distribution de régions HII (figure I.11).

En 1976, comme déjà cité, pour la première fois une structure à 4 bras est mise en évidence par Georgelin et Georgelin par le tracé des complexes. Plus récemment Hou et al. (2009) ont re-étudié la structure galactique (fig. I.12) en utilisant les régions HII et les nuages moléculaires indépendamment. Leur nouveau modèle repose sur des études récentes pour la résolution de l'ambiguïté de distance (e.g. Kolpak et al. 2003, Watson et al. 2003, Sewilo et al. 2004, Busfield et al. 2006, Anderson & Bania 2009) et sur des distances parallactiques de masers (e.g. Xu et al. 2009, Zhang et al. 2008).

Figure I.13 Diagramme distance-longitude de l'émission HI (Nakanishi & Sofue , 2003). Dans ce type de diagramme les bras apparaissent « déroulés » et rectilignes si ils ont une forme de spirale logarithmique.

Ils utilisent comme poids pour leur ajustement la masse des nuages moléculaires (en ne gardant que les plus massifs) et le paramètre d'excitation des régions HII. Ils trouvent également une structure à 4 segments. On notera l'effet de la dispersion en vitesse (et donc en distance des objets) qui se

Outer

Outer Perseus Perseus Sag. Carina Sag. Carina

(23)

traduit par des artefact de forme linéaire pointant vers le Soleil dans la structure (Fig. I.12).

En parallèle, l'utilisation des données HI apporte de nouvelles informations. Malgré le faible contraste bras-interbras du HI, son grand facteur de remplissage, et sa prédominance dans les parties externes des galaxies, l'émission HI nous informe sur la morphologie des bras. Les travaux de Nakanishi & Sofue (2003) suggèrent une forme de spirale logarithmique (figure I.13).

Parallèlement Levine et al. (2006) trace la structure spirale externe montrant que la structure spirale de notre Galaxie s'étend jusqu'à quelques 20 kpc du centre en bonne continuité avec les bras optiques (fig. I.12).

Figure I.14 : La figure (A) présente des comptages d'étoiles (densité) en fonction de la longitude dans les trois bandes de longueur d'onde J, H, K de 2MASS et 3.6 m de Spitzer (Benjamin et al.

2008). La figure (B) présente les profils d'intensité en K et à 240 m (Drimmel, 2000). Les directions tangentes aux bras selon les modèles sont superposés.

Bronfman 1992, CO Hou et al. 2009, 4 Poly. arms.

Hou et al. 2009, 4 log. arms.

Sagittarius Carina

Drimmel, 2000 (COBE/DIRBE data)

Norma

Orion spur

Scutum Crux (North)

Norma (North) Sagittarius

Carina (North)

Russeil 2003

Sagittarius Carina Scutum crux

Scutum -crux

Norma

Norma Scutum -crux

(A)

(B)

(24)

Deux ou quatre bras? Notre Galaxie vue en infrarouge

Une autre approche pour estimer le nombre de bras dans notre Galaxie est de chercher les pics d'émission dans les profils en intensité FIR ou dans les profils de comptage d'étoiles dans le NIR. Il est en effet attendu que dans les directions tangentes aux bras, la ligne de vue traverse le bras sur une plus grande épaisseur donnant lieu à un pic d'émission. Ainsi, sur la base de graphes intensité- longitude construits à partir des données dans la bande K et 240m de COBE/DIRBE (Fig. I.14) ou sur la base de graphes densité d'étoiles versus longitude, fait avec les données JHK de 2MASS et 4.5 de SPITZER-GLIMPSE (Fig. I.14), Drimmel (2000) et Benjamin et al. (2008) n'identifient que deux bras majeurs pour notre Galaxie: le Bras de Persée et le bras de l'Ecu-Croix.

Mais sur la figure I.14.A nous pouvons voir que le profil NIR est très bruité et que seuls 2 pics entre 20° et 40° apparaissent clairement. Ces deux pics sont attribués au bras de l'Ecu par Benjamin et al.

(2009) mais selon le modèle de Russeil (2003) ils pourraient être associés aux bras Ecu-croix et Norma. Inversement le bras du Sagittaire n'est pas identifié. Mais nous devons garder à l'esprit que le NIR trace principalement la population stellaire âgée et n'est donc pas représentatif de la structure spirale jeune.

Sur la figure I.14, le profil dans le FIR est plus explicite et l'on peut associer un pic à chacun des 4 bras. En effet le FIR trace la poussière froide qui est en général associée au lieu de formation des étoiles . C'est donc un meilleur traceur de la structure spirale.

Perspectives

Vu l'unicité des données fournies par le Pérot-Fabry à balayage, une continuité naturelle serait d'effectuer le sondage du plan galactique Nord. En effet de nombreuses régions HII du Nord n'ont pas ou peu d'information cinématique. L'idée de transporter l'ensemble de l'instrumentation depuis le Chili à l'OHP avait été envisagée mais n'a malheureusement pas pu être concrétisée.

Aujourd'hui, le sondage Hi-GAL du plan galactique par Herschel est un nouvel atout majeur pour l'étude de notre Galaxie. En effet une perspective intéressante serait de redéfinir les complexes dans l'infrarouge lointain et d'utiliser cette émission comme pondération dans nos ajustements numériques.

En parallèle le futur satellite GAIA devrait permettre la détermination précise (3 à 8% d'incertitude relative sur la distance) de la distance parallactique de quelques 200000 étoiles OB (et multiplier de fait par 10 le nombre d'étoiles OB pour lesquelles la distance est actuellement connue). Mais la distance limite accessible par GAIA pour ces étoiles OB est estimé à 5 kpc (pour un Av typique de 3 mag) ce qui permettra de tracer avec grande précision la structure des bras proches seulement. Si cela ne permettra pas de sonder la structure à grande échelle de notre Galaxie, cela devrait malgré tout permettre d'améliorer grandement les calibrations de magnitude absolue, de préciser les paramètres solaire (distance galacto-centrique du Soleil, composantes U, V et W du Soleil), d'établir la courbe de rotation de notre Galaxie avec une précision sans précédent et de préciser les écarts à la rotation circulaire.

Le domaine du proche infrarouge ouvre la voie à la caractérisation et à la détermination de la distance d'étoiles OB fortement obscurcies par la combinaison d'images et de spectres dans le proche infrarouge. Même si la classification spectrale est plutôt difficile dans ce domaine de longueur d'onde (1 – 2 m) à cause du peu de raie présentes, ce mode de détermination de distance, de recherche et de caractérisation des étoiles excitatrices de régions HII se développe (e.g. Hanson et al. 1996, 2005, Figer et al. 1997, Hanson 2003, Martins et al., 2010, Ramírez Alegría et al. 2011, Moisés et al. 2011 ).

Notons aussi que des méthodes nouvelles et plus précises de mesure de distance se sont développées

(25)

récemment. La mesure parallactique de masers est en développement. C'est une méthode très précise de détermination de la distance (Xu et al. 2009, Zhang et al. 2008, 2009) et devrait faire grandement progresser la détermination de la distance d'objets pour lesquels aucune étoile excitatrice n'est optiquement observable. On citera par exemple le projet VERA (Honma et al. 2000, 2005, 2007).

Enfin, de nouveaux sondages radio ont déjà permis la détection de nouvelles régions HII et de lever l'ambiguïté sur la distance (HI self-absorption ou HI émission/absorption méthodes, e.g. Anderson et al. 2009) pour un certain nombre d'entre elles. Il sera intéressant d'inclure ces nouvelles données pour retracer la structure spirale de notre Galaxie.

En parallèle se développent des simulations axées sur notre Galaxie. Il est difficile d'évaluer si les simulations peuvent répondre aux contraintes observationnelles concernant la structure spirale et les écarts à la rotation circulaire observés dans notre Galaxie. Les simulations utilisent des modèles d'évolution et des conditions initiales différentes. Par exemple, certaines simulations tiennent compte d'une barre alors que d'autres non, certaines simulations supposent la présence de deux bras stellaires alors que d'autres en supposent 4. Un certain nombre de simulations s'accordent toutefois pour dire qu'une structure avec 4 bras pourrait provenir de l'évolution du gaz dans un potentiel généré par deux bras stellaires (e.g. Fux 1999, Lépine et al. 2001, Bissantz et al. 2003).

Une grande question est maintenant de « peser » les bras pour identifier les bras stellaires à l'origine du potentiel gravitationnel et les « bras gazeux ». La question est en particulier de comprendre/quantifier la formation des étoiles dans ce contexte.

(26)

II) La formation des étoiles massives

La contribution d'Herschel

Les étoiles massives (étoiles O et B) jouent un rôle majeur dans le budget énergétique et l'enrichissement des galaxies. Malheureusement leur formation est encore mal connue. Les étoiles massives se forment certainement dans des coeurs moléculaires denses par une forte accrétion de gaz sur l'embryon proto-stellaire (e.g. Beuther & Schilke 2004). Mais l'origine physique de ce fort taux d'accrétion n'est pas encore établi, et différentes hypothèses sont avancées: fort degré de turbulence (McKee et Tan 2002), flots convergents (Heitsch et al. 2008), collisions de nuages (Bonnel et Bate 2002) et accrétion compétitive (Bonnel et al. 2006).

Du point de vue observationnel la séquence d'évolution menant des nuages aux étoiles n'est pas bien contrainte pour les étoiles massives alors qu'elle l'est pour les étoiles de faibles masses (e.g. André et al. 2000). Par exemple, l'existence et le temps de vie de l'analogue classe 0 des étoiles de faibles masses, pour les étoiles massive est encore débattu (Motte et al. 2007). De plus l'ordre et le temps caractéristique des différentes phases d'évolution (coeur pré-stellaire, coeur proto-étoile froid, coeur chaud, masers OH/H2O/CH3OH, sources chaudes, objets massifs de forte masse, régions HII hyper- compactes, région HII ultra-compactes) nécessite d'être clarifié. Il est donc crucial de construire un échantillon représentatif d'objet pré- et proto-stellaire massifs. C'est dans ce cadre que le projet HOBYS (PI: Motte F., Zavagno A., S. Bontemps) a vu le jour. Le but de ce projet est de sonder avec Herschel l'ensemble des complexes de formation stellaire massifs proches (distance < 3 kpc) afin d'établir un catalogue d'objet massifs pré- et proto-stellaires. Les observations consistent en l'imagerie de ces complexes dans les 5 bandes (70, 160, 250, 350 et 500 m) disponibles d'Herschel avec les instruments PACS et SPIRE.

Dans le cadre du projet HOBYS, nous avons en charge les régions NGC6334 et NGC6357 pour lesquelles des données à 1.2 mm (émission continue des poussières froides) ont été préalablement obtenues (figure II.1). A partir de l'image à 1.2mm, qui trace la poussière froide, 163 coeurs denses et compacts (~0.1 pc) ont été extraits grâce à un algorithme spécialement développé par F. Motte basé sur la combinaison entre une analyse multi-échelle (utilisant les transformations en ondelettes) et le programme Gauss-clumps. La masse et la densité (moyennée sur le volume) de ces 163 coeurs est ensuite déterminée en supposant que le milieu est optiquement mince et en adoptant une température de 20K. Pour les 42 coeurs (figure II.1) les plus massifs (m>100 M), qui sont ceux qui ont la plus grande probabilité de donner naissance à une étoile massive, nous avons mené des observations, avec l'instrument MOPRA, de raies moléculaires (SiO, N2H+, HCO+, HNC ...) permettant le diagnostic physique de ces coeurs. En particulier la présence d'un flot va se traduire par une raie SiO (formée dans le gaz choqué dans les flots) forte et dissymétrique. La masse du Viriel et le degré de turbulence sont calculés à partir de la largeur de la raie N2H+. Les mouvements internes («infall») sont étudiés grâce aux profils des raies optiquement épaisses que sont HCO+ et HNC.

En parallèle nous avons recherché les signes de formation stellaire déjà active que sont la présence de masers, de sources compactes intenses à 24 et 21 m (une source sera qualifiée de « IR quiet » si le flux à 24 m est inférieur a 15 Jy, sinon elle sera qualifiée «high-luminous »; voir figure II.2), de sources radio et d'objets stellaires jeunes détectés dans le proche infrarouge (classifié Classe 0 ou Classe I selon les diagrammes couleur- couleur dans les bandes Spitzer 3.5, 4.5, 5.8 et 8m).

Nous trouvons ainsi que tous les coeurs denses et massifs (sauf 1) sont gravitationnellement liés.

Nous comptons parmi les coeurs plus massifs que 200 M, 9 coeurs classifiés comme étant des proto-étoiles «high-luminous», 6 classifiés comme étant des proto-étoiles «IR-quiet» et 1 est un coeur pré-stellaire.

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Figure II.1: Image à 1.2 mm (émission continue) de NGC 6334 et NGC 6357 observée par Muñoz et al. 2007 avec SIMBA (SEST). Les croix blanches indiquent les 42 coeurs denses plus massifs que 100 M⊙.

Figure II.2: Séparation des coeurs denses « high-luminous » et « IR-quiet » sur la base de leur flux à 24 m flux (limite à 15 Jy). Les coeurs denses (triangles vides) peuvent être associés avec des masers (carrés vides), des sources classe I/II (carrés noirs), ou des sources radio (diamants noirs).

(28)

C'est ce dernier coeur qui est le plus important pour l'étude des toutes premières phases de la formation stellaire massive. De plus le fait de dénombrer un seul coeur pré-stellaire suggère que le temps caractéristique de concentration et d'effondrement des coeurs massifs pour former des étoiles est un processus très rapide.

Figure II.3: Carte de température (haut) et de densité (bas) de NGC 6334 (produites à partir des données Herschel par L. Anderson). On notera, sur la figure du bas, la structure générale très filamentaire. Un découpage en zone (pointillés) y est présenté: en particulier la partie centrale (nommée « center » )

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Figure II.4: Image Herschel composite de la partie sud de NGC6334: 70 m (rouge) , 250 m (vert) et 500 m (bleu). Les sources extraites par « getsources » sont superposées avec leur empreintes elliptiques (rose = 160 m, blanc = 350 m et vert 500 m).

Nous sommes en train de poursuivre l'étude de la formation stellaire massive dans NGC6334 et NGC6357 grâce aux données de Herschel et avec le concours de J. Tige (étudiant en thèse) et G.

Leuleu et les membres du groupe HOBYS. Nous présenterons ici uniquement les premiers résultats concernant NGC 6334.

Notre but premier est de répertorier les coeurs denses et massifs qui ne présentent pas de signe de formation stellaire. Ces sources en effet vont être nos cibles pour des observations futures avec ALMA. Dans ce cadre, nous avons utilisé « getsources » (Men'shchikov et al. 2012) pour extraire les coeurs compacts depuis les images Herschel complémentées par les images SIMBA à 1.2mm et ATLASGAL à 870GHz.

Getsources est un logiciel d'extraction des sources qui effectue la détection et la mesure des sources sur la base d'une analyse multi-échelle (décomposition des images originales en une centaine d'échelles spatiales) et multi-longueur d'onde des images.

Le catalogue de sources en sortie de « getsources » donne les informations suivantes: position, taille, flux intégré et flux au pic dans toutes bandes et avec les erreurs associées. La région NGC6334 étant trop grande pour être traitée d'un bloc par « getsources », nous l'avons divisée en trois sous-zones.

La figure II.4 présente la zone sud de NGC 6334 et les sources qui ont extraites par « getsources ».

Pour chaque source la SED (distribution spectrale d'énergie) est alors ajustée (fig. II.5) par une loi de corps gris (S de la forme A..B(,T) avec  fixé à 2) afin de déterminer les paramètres physiques que sont la masse, la densité, la température et la luminosité bolométrique. Lors de l'ajustement les corrections de couleurs et d'échelle (suivant le processus présenté par Nguyen- Luong et al. 2011) sont appliquées. Le flux à 70 m est exclu de l'ajustement car cette longueur d'onde est optiquement épaisse et est en générale contaminée par l'émission des poussières chaudes.

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La procédure d'ajustement (Mpfit sous IDL) requiert au moins 3 flux pour pouvoir effectuer l'ajustement ce qui réduit le nombre de sources pour lesquelles les paramètres physiques peuvent être déterminés. Enfin la valeur du  normalisé est aussi utilisée pour ne sélectionner que les meilleurs ajustements.

Figure II.5 : Exemple d'un fit de SED (coeur numéro 93 de la zone 3). A partir du fit (0.3) les paramètres physiques de ce coeur dense sont T=19.3 K, M=9 M, Lbol = 47.9 L, <FWHM160

m> = 0.12 pc, <n>= 1.6 105 cm-3 .

Les premiers résultats sont résumés par les figures II.6 et II.7.

En nous limitant à l'échantillon de 89 coeurs dans NGC 6334 détectés préalablement à 1.2mm, la figure II.6 présente le flux à 70 m en fonction de la masse issue de l'ajustement de la SED. Ce graphe permet de déterminer la masse caractéristique des coeurs denses et massifs qui sont potentiellement à même de former des étoiles massives. Les coeurs actifs, ceux qui présentent déjà de la formation stellaire massive identifiée soit par la présence de Maser, régions HII, et/ou l'association avec une source à 70 m de flux supérieur à 132 Jy, permettent de mettre en évidence une masse typique de 180 M. Les coeurs qui nous intéressent sont donc ceux de M > 180 M et de F(70 m) < 132 Jy. On note que ces coeurs, dits coeurs denses massifs «infrared-quiet » sont peu nombreux (quatre). Parmi, ces quatre coeurs nous savons déjà que deux d'entre eux présentent déjà des raies moléculaires qui trahissent des outflows ou des inflows (Russeil et al. 2010) soulignant leur statut de proto-étoile. Il reste donc deux coeurs qui sont dans une phase encore plus précoce de la formation stellaire massive. Ce sont ces deux coeurs qu'il nous faudra caractériser (fragmentation, état physico-chimique, cinématique/dynamique) avec ALMA.

La figure II.7, luminosité versus masse, permet de replacer les coeurs dans un schéma évolutif. Ce type de graphe est utilisé pour décrire la séquence d'évolution des objets stellaire jeunes (e.g.

Saraceno et al. 1996, Molinari et al. 2008). Dans cette figure les tracés évolutifs, issus de modèles sont adaptés de Molinari et al. (2008). La partie verticale des tracés représente la phase d'accrétion accélérée, au niveau du coude se trouve la phase de pré-séquence principale, et enfin la partie horizontale représente la phase finale de nettoyage (« clean-up ») de l'enveloppe.

(31)

Figure II.7: L_bol versus Masse pour les coeurs denses et massifs. Les courbes sont les trajets évolutifs (pour les masses d'enveloppe, de gauche à droite, respectivement de 80, 140, 350, 700 et 2000 M). Les symboles en étoiles sont les coeurs denses détectés à 1.2mm (les coeurs entourés d'un carré sont ceux qui présentent des signes d'activité: Maser, région HII et/ou F (70m) > 132 Jy). Les symboles plus sont les autres coeurs extraits par « getsources ». Le trait vertical en pointillés marque la masse de 180 M

Figure II.6: Flux 70 m versus masse. Les coeurs denses (triangles) associées à de la formation stellaire massive (Maser/région HII) sont entourés par un symbole carré. Le trait en pointillé vertical identifie la masse de 180 Msun et le trait horizontal marque le flux de 132 Jy.

(32)

Nous pouvons voir que la plupart des sources sont localisées dans la zone de la phase d'accrétion tandis que les sources actives se trouvent en fin d'accrétion (fin de la montée des trajets).

L'exploitation de ces données est en cours pour essayer de mettre en évidence des effets d'évolution le long du filament associé à NGC 6334. Les premiers résultats suggèrent que la partie centrale du filament est dans un état d'évolution plus avancé que le reste.

Perspectives

Les données Herschel sont très récentes, les résultats qui en découlent sont encore préliminaires. Ils soulignent le grand potentiel de ces données pour l'étude de la formation stellaire en général et massive en particulier. Cette analyse se fait de concert avec les responsables du projet HOBYS et au sein de l'équipe MIS, d'autres intervenants spécifiques Herschel du LAM et en particulier grâce à la présence de J. Tigé qui débute sa thèse sur cette thématique. Le déroulement de cette étude suit le programme suivant: analyse de NGC 6334 et NGC 6357 afin de trouver les coeurs denses massifs dans un état d'évolution pré-formation stellaire. Caractérisation physico-chimique de ces coeurs avec ALMA. Nous espérons mettre en évidence des critères forts de sélection de ces coeurs afin d'en faire une recherche plus systématique à l'échelle de notre Galaxie grâce au sondage Hi-GAL et d'établir une vue générale de la formation stellaire massive dans notre Galaxie dans le but de comparer/d'extrapoler aux autres galaxies et aux différents processus de formation stellaire (onde de densité, formation stellaire induite ...)

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