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DU MÊME AUTEUR. Chez le même éditeur : La Prairie dans la ville. Aux éditions Gallimard :

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L'ESCALE PROCHAINE

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DU MÊME AUTEUR

Chez le même éditeur : L a Prairie dans la ville

Aux éditions Gallimard : Le Bateau des îles

(Prix Valery Larbaud) L a Rade foraine

Le Chat perché Gris tourterelle

Aux éditions Marrimpouey (Pau) : A fleur de terre

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GUY/ROHOU

L'ESCALE PROCHAINE

roman

CALMANN-LÉVY

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ISBN 2-7021 -0373 -1

© CALMANN-LÉVY 1980 Imprimé en France

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Pour l'avocette

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« Quand les chevaux du Temps s'arrêtent à ma porte J'hésite un peu toujours à les regarder boire

Puisque c'est de mon sang qu'ils étanchent leur soif.»

Jules SUPERVIELLE, Les Amis inconnus.

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type="BWD"J la sonnerie du lycée, un appel grêle et obstiné qui déchire la nuit avant de sortir du lit les élèves couchés côte à côte au dortoir.

Images d'il y a trente ans. Éveillé déjà, j'essaie de localiser le bruit, de l'interpréter. Les vibra- tions de la machine, à peine perceptibles, me ramènent au navire et à ma fuite. Je ne le quitte plus et ce qu'il garde de mon sommeil lui appar- tient encore. Les bombardements alliés ont détruit le lycée. En restent des images, quelques pierres et le petit jardin devenu square public.

Ce bruit-ci dit une autre chanson. J'étends la main vers le téléphone, sur la table de nuit, et la sonnerie s'interrompt. Quelques fragments de seconde ne viendront pas à bout du grand massif de ma mémoire. Je continue de m'y pro- mener pendant que la voix au bout du fil se fait

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connaître, essaie de justifier son intrusion dans le repos incertain de ma nuit. Le second à l'ap- pareil. Excusez-moi de vous appeler à cette heure. Je vous réveille sans doute mais je tenais à vous dire que la côte est en vue. Avant midi nous pourrons toucher terre et je suis sûr... — Merci. Je ne pense pas descendre. Excusez-moi.

Il a raccroché en même temps que moi. De son côté, l'étonnement. Du mien, l'agacement, et presque la colère. Après l'armateur et le com- mandant, il faudra donc que j'informe chacun des membres de l'équipage que je suis monté à bord de ce navire pour y rester. Pas d'escale, pas de terre d'accueil. Il y a eu l'embarquement, la passerelle d'accès et la première houle apai- sant le désir forcené de n'avoir désormais plus de comptes à rendre qu'à un avenir étale en avant de moi. La mer ouverte et le lit creux de la mémoire. J'ai choisi de n'être pas le voyageur idéal correspondant au portrait tracé par les agences et leurs dépliants publicitaires. Je ne serai pas le passager embarqué à bord d'un paquebot et profitant également des plaisirs de la croisière et des charmes de la virée au port.

L'Amiral-Hermenault est essentiellement un

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porte-conteneurs qui dispose d'une cabine pour un passager éventuel. Je bénéficie de ce privilège et je le dois à l'amitié de l'armateur. A sa grati- tude, faudrait-il dire, et je ne saurai jamais lequel de nous deux est l'obligé dans cet échange de services où chacun pouvait feindre de voir davantage la part du hasard que de la volonté.

Des armateurs, j'en avais connu à La Rochelle où j'avais passé mon enfance, mon adolescence, où je revenais encore parfois pour retrouver ma sœur Aline qui vivait seule dans la maison du port.

Léon Audouy ne connaissait que les rivages de la Méditerranée parce que ce pied-noir fai- sait l'essentiel de son commerce avec Marseille,

— même si un de ses navires avait quelquefois remonté la Gironde jusqu'à Bordeaux. Avec des pinardiers et des vieux rafiots chargés d'agrumes jusqu'aux écoutilles, il avait gagné beaucoup d'argent. Les Algériens s'en souvinrent lorsque commencèrent, avec la guerre, les premiers règlements de comptes. Les Arabes parlaient d'actes de justice et les officiers français d'exac- tions. Les uns et les autres se réconciliaient dans le sang, par la grenade ou le couteau.

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Fermes incendiées, exécutions, interrogatoires, tortures. On usait aussi des armes mouchetées de la propagande et de l'intoxication, des tracts, des menaces, du chantage : la guerre psycholo- gique. Parmi tant d'autres, j'avais été rappelé en Algérie. A la tête d'une section en opération dans la Mitidja, j'avais dû me réfugier, la nuit approchant, dans une propriété appartenant à Léon Audouy. C'était une grande ferme, assez sommairement aménagée, à la différence du confort fastueux qui prévalait d'ordinaire dans les riches domaines des colons. Le garçon qui nous ouvrit la grille n'était mon cadet que de quelques années. Il vivait là en solitaire, prépa- rant un examen avant de retourner à Oran où habitaient ses parents. C'était le fils d'un arma- teur connu en Algérie et qui brassait assez d'af- faires pour que le Front de libération s'intéresse à lui et tente de lui faire rendre gorge, d'abord par la menace puis, très vite, par la violence.

Pendant que mes hommes défaisaient leur paquetage et sortaient leurs rations, Jacques Audouy me parlait de son travail, du calme qu'il trouvait là, de ses promenades dans le jar- din. Mon père commence à s'inquiéter de la

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situation, il veut vendre les trois bateaux qu'il possède et peut-être acheter autre chose en France. Il y a en ville de plus en plus d'attentats.

Ici, je crois qu'on est plus tranquille. L'incons- cience de cet étudiant rêveur m'aurait amusé si je n'avais pressenti qu'en nul autre endroit il ne pouvait être moins à l'abri. A Alger et à Oran, on se battait mais il y avait de la troupe et des groupes d'autodéfense. En campagne, les fermes étaient à la merci du moindre coup de main. Je savais que des bandes armées s'attaquaient aux grandes propriétés, qu'elles les incendiaient après avoir massacré leurs occupants. Léon Audouy ignorait-il l'étendue et la gravité de ces exactions? Pour éviter à son fils l'insécurité quotidienne, il l'avait jeté dans la gueule du loup. Tu as le téléphone, lui avait-il dit, si quoi que ce soit t'ennuie, tu nous appelles. T'ennuie, c'étaient là ses paroles, comme si Jacques, ayant dix ans de moins, était parti en promenade au jardin public, et que des galopins lui tiraient les cheveux en essayant de lui arracher son goûter.

Je crains que le téléphone ne vous soit plus de grand secours, je lui ai dit, pendant qu'il me ver- sait à boire. Il décrocha le récepteur, écouta un

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instant, me le tendit. Il n'y avait plus de tonalité.

Partout dans la campagne on arrachait les poteaux, les fils étaient déchiquetés à coups de mitraillette. D'un moment à l'autre, les fellagha pouvaient arriver, investir la ferme. Vous ne devez pas rester ici.

A ce garçon perdu, je dois ce matin — il fait à peine jour dans la cabine — de voir approcher la terre d'Afrique, ce continent même où la famille Audouy et quelques autres avaient pris pied au siècle dernier. Mes hommes étaient venus demander s'ils pouvaient cueillir des oranges dans le jardin. Irréalité de l'heure, du lieu paisible avec un grand volcan qui s'éveil- lait à côté. Je n'ai jamais su me préparer aux événements décisifs, aux choix sans retour aux- quels certains donnent avec tant d'aisance une si belle solennité. Mais, face à ce garçon incon- séquent, hésiter n'était plus possible. Il fallait affronter l'ennemi ou le fuir. Au milieu du grand dégoût de la guerre, hanté par la peur que j'éprouvais à chaque instant depuis que j'étais arrivé en Algérie, un vif bonheur s'empara de moi, même si je n'osais, dans les circonstances présentes, me le formuler à moi-même. Une

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occasion de fuir m'était donnée, mieux : elle s'im- posait à moi et rejoignait mes tendances les plus profondes. C'est ce qui me reste d'années d'errances, d'obstination mal appliquée, de faux enracinement. Sans doute, le Temps glissant presque à l'identique pour chacun, n'a-t-il tenu qu'à moi de retrouver constants êtres, lieux et choses auxquels je savais si mal m'attacher. La crainte de devoir perdre un jour ce qui s'était donné à moi m'incitait à prendre les devants.

Je rompais, me tournais vers une autre troupe théâtrale, changeais de ville. Cela prenait par- fois des apparences naturelles, comme si le choix ne m'avait pas été laissé de continuer à mener la même vie. Le plus souvent, je brusquais les choses, et nul n'en pouvait douter. Mes amis s'étonnaient d'autant plus de mon attitude qu'ils en paraissaient les victimes, ceux que l'on aban- donne au nom d'illusions de chiffon. A moi qui ne voyais pas plus loin que le bout du quai, révénement donnait tort. Mais l'échec n'a peut- être pas le visage que d'ordinaire on lui prête. Il me suffisait que l'herbe eût ailleurs une autre cou- leur. Dès que j'y portais la dent, je cessais de lui trouver bon goût. On imagine le bonheur que

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rement! Si le commandant a le mal de mer et que le radio déraisonne, où va-t-on? Vous allez peut-être me dire que les conteneurs sont vides et que le bateau a une voie d'eau! Je vous demande simplement où est Laurent. « C'est bien simple, Monsieur, depuis six jours, ou sept, je ne sais même plus moi-même, Laurent Gaigneur a disparu. » En disant cela, il me regardait fixe- ment, je ne savais pas si je devais m'enfuir à mon tour ou le prendre à la gorge parce qu'il était peut-être responsable et, qu'à défaut des autres, invisibles, il pourrait rendre compte.

« Voulez-vous dire qu'il est tombé à la mer ou qu'il s'est caché quelque part dans la cale?

Expliquez-vous, enfin! »

Nassivet reprit, il continua, plutôt, comme s'il ne m'avait pas entendu. Laurent était malade.

Depuis une semaine, on lui portait ses repas dans sa cabine, il n'en sortait plus. Une fois seulement, il m'a rejoint un quart d'heure, pen- dant que j'assurais la veille et prenais des mes- sages. On allait toucher Pointe-Noire et le Vieux, au déjeuner, nous avait pris à part, le second et moi, pour nous dire : Est-ce qu'on le prévient de l'escale, une nouvelle fois ? Je prends le pari

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qu'il finira par descendre à terre avant qu'on revienne au Havre. Qu'en pensez-vous tous les deux? Un peu plus tard, Cariou est allé frapper à la porte de sa cabine. Laurent l'a fait entrer, ils ont commencé par boire une bière. Le second nous a raconté qu'il ne savait pas comment déballer son petit discours mais que l'autre lui a tendu la perche. — Je pense qu'on va bientôt toucher terre? Eh bien, oui, a répondu Cariou.

Le commandant a même pensé que vous accep- teriez de faire une petite virée avec nous. Il a détourné la conversation et on a tous eu l'im- pression que cette visite l'avait dérangé, qu'il avait une idée en tête et qu'on a fini de l'en convaincre en l'embêtant avec nos questions.

Tu vois, Jacques, en t'écrivant et pour mieux comprendre moi-même, j'essaie de mettre un peu d'ordre dans ce que le radio me rapportait des paroles prononcées et de la façon dont cha- cun, après coup, s'efforçait de les interpréter.

Le commandant, Cariou et lui dont Laurent avait presque fait son confident, tous se ren- daient compte que sa présence à bord n'avait pas été plus explicable que le serait sa dispari- tion. Oui, Jacques, c'est tout ce que je peux te

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dire maintenant, après ces huit jours passés sans que nous ayons reçu de ses nouvelles : Laurent Gaigneur a disparu, sans doute pen-

dant que l ' faisait relâche

à Pointe-Noire. Le matin de l'escale, il avait pris le petit déjeuner qu'on lui avait porté.

Ensuite, plus personne du bord ne l'a revu.

Tu t'imagines bien qu'on a regardé dans ses affaires. On cherchait une lettre, on espérait les signes d'un désordre possible, comme si un coup de folie avait pu le frapper, la chaleur, l'isolement, un accès de fièvre — même si per- sonne a jamais vraiment cru qu'il était malade.

Était-ce cela qu'il essayait de faire croire depuis quelques jours? La penderie était vide. Sur la couchette, une valise assez lourde, à la serrure fermée et que personne à bord n'a encore osé ouvrir. Nous le ferons peut-être un peu plus tard. Je souhaiterais que tu me donnes ton avis.

Je me suis assuré qu'on avait fait ce qu'on pouvait quand on s'est aperçu que sa cabine était vide, au moment de lever l'ancre à Pointe- Noire. Des recherches, une enquête auprès des autorités du port, le départ différé. Cornevin a

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tout noté sur le journal de bord. Je l'ai feuilleté avant qu'il ne le remette à la police. Le com- mandant a envoyé Cariou dans les commissa- riats, le Consulat de France. Les marins se sont partagé les restaurants, les hôtels, les boîtes.

On a interrogé les dockers, les gens qui traînent sur les quais. Certains avaient vu un Européen mais ils ne pouvaient pas dire s'il venait du bateau. D'autres décrivaient un homme des- cendu de l ' et juraient qu'il portait des lunettes et une barbe, ce qui ne cor- respond pas à la silhouette de Laurent. La fugue, l'accident, le suicide. Tout est possible, et même qu'on le retrouve ici, un jour, dans ce bureau du Havre où je t'écris. Je n'y crois pas, et je suis, au contraire, presque certain qu'il a voulu nous laisser dans l'incertitude, comme il avait com- mencé de le faire en se prêtant à ce simulacre de croisière sur le navire. Pour obtenir son billet de vagabondage, c'est à moi qu'il a forcé la main.

Il me disait qu'il en avait assez de son métier, qu'il souhaitait prendre du champ, que plus personne ne lui tenait à cœur.

Jacques, je n'ai jamais voulu t'avouer combien je m'étais senti coupable de son embarquement

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sur l ' comme si j'avais, tout seul, décidé de le couper du monde et de l'enfon- cer dans cette solitude dont l'exaltation devait le mener à la mort. J'ai consacré beaucoup de temps à rechercher ce qu'avait pu être sa vie pendant ces dernières années, les années qui ont séparé notre rencontre en Algérie de cet état de dérive dont je me sens à présent un peu plus responsable. Rien, sans doute, n'était aussi grave qu'il le pensait, il suffisait de lui tendre la perche, au lieu de le lancer vers le large. Te souviens-tu comme il aimait se dérober, s'effacer, presque, pour laisser à l'autre la parole. Réflexe du comé- dien, qui connaît trop bien le prix des mots, leur juste poids, pour ne pas se méfier du tout-venant des conversations, par exemple cette espèce d'exubérance que nos compatriotes d'Afrique manifestent à toute occasion et qui l'avait si sur- pris, pendant la guerre d'Algérie.

La veille de son embarquement, il m'avait parlé d'un Centre dramatique où il avait joué plusieurs rôles, dans l'Ouest. Ce n'est pas très loin du Havre, j'y suis allé passer vingt-quatre heures. A cette date, le porte-conteneurs était quelque part sur les côtes d'Afrique. Voilà une

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vingtaine d'années que le théâtre de Caen a été reconstruit. Beaucoup de directeurs, depuis ses débuts, et de nombreuses troupes qui ont monté des spectacles. C'est un milieu que je ne connais pas, que je n'ai jamais fréquenté. Si j'aimais Laurent Gaigneur, ce n'était pas en tant que comédien. Il semble qu'il n'ait pas été un très bon acteur. Si j'avais pu le convaincre qu'il existait autre chose que la tragédie ou la farce, si j'avais pu lui trouver une place dans notre petite société!

Un décorateur, qui l'avait vu répéter ses rôles et jouer, ne s'étonna pas de le savoir éloigné du théâtre. Même sur le plateau, disait cet homme, on aurait cru qu'il était toujours ailleurs. Pour- quoi pas au milieu de l'océan ? Il récitait son texte en paraissant l'adresser à un autre comédien, situé en coulisse, ou plus loin peut-être. Il fixait le metteur en scène, prévenait quelquefois ses indications puis, à l'instant de jouer, il se cabrait comme un cheval sur l'obstacle. Il avait ren- contré une étudiante à la cafeteria. Elle l'atten- dait après le spectacle, on les voyait souvent en ville. Devenu ami de Laurent, le décorateur était parfois invité à déjeuner par le couple.

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Cette insistance le gênait. Je ne comprenais pas, j'essayais de m'attarder sur le plateau, je lui disais qu'ils seraient plus libres sans moi. Laurent alors s'asseyait quelque part dans la salle. Irène aime bien ce que tu racontes. Elle pense que tu connais mieux le métier que moi, et elle a raison.

Il m'attendait et il fallait qu'on aille encore prendre le café tous les trois. Venait l'heure des répétitions. « Vous n'étiez pas sûr que cette femme était sa maîtresse? — Je ne me suis fina- lement jamais posé la question. Son attitude envers les femmes était aussi déconcertante que son jeu sur le plateau. » Déconcertant, il a répété. Un mélange d'attention exaspérée et de distraction. Il lui prenait la main en parlant avec tendresse. D'autres fois, le repas se terminait sans qu'il ait dit un mot, à part la commande au garçon. Moi aussi, Jacques, j'écoutais cet homme en silence. Il m'entretenait d'un Laurent Gaigneur différent qui avait commencé de s'ab- senter voici longtemps, et qui est mort, à moins qu'il ne soit descendu sur la côte d'Afrique avec une petite valise pour découvrir une autre vie, accepter là-bas ce qu'il avait toujours refusé ici.

Au long de cette existence si éloignée de la nôtre,

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une grande constance, celle du refus. Chercher obstinément ailleurs, quelque part sur l'échelle du temps, ce que le lieu ni l'instant ne pouvaient lui donner. Apparemment résigné mais profon- dément révolté, même s'il fuyait l'affrontement.

En Algérie, et aussi sur le bateau, j'imagine, c'est à d'autres terres qu'il rêvait. Un inadapté. Mais nous-mêmes, avons-nous bien les pieds sur terre ? Il faut que j'en finisse avec cette lettre. Jamais je n'avais tant écrit et je vois bien, me relisant, que je n'ai pas réussi à saisir grand-chose de Laurent. Sa mort nous échappe. Je ne proposerai à personne la cabine libre de l '

nault. Demain, avec l'officier de port et quel- qu'un de la police, nous forcerons la valise fer- mée à clef. Mais il n'y a pas de malle, de cachette, de tiroir qui pourra nous apprendre ce que nous n'avons pas su lire sur le visage de cet homme- là.

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Extrait du Journal de bord de Louis Cornevin, commandant le porte-conteneurs Amiral-Her- menault, port d'attache Le Havre :

Une valise appartenant à Laurent Gaigneur, passager à bord de l'Amiral-Hermenault et disparu le sept octobre de la présente année à l'escale de Pointe-Noire, port du Congo- Brazzaville, a été ouverte aujourd'hui en pré- sence de quatre personnes, leurs signatures à tous figurant sur le procès-verbal annexé, en même temps que la liste des différents objets, livres, photos et pièces de vêtement qui en constituent l'essentiel. Aucun carnet, aucune lettre n'ont été trouvés et rien ne permet de décider si Laurent Gaigneur doit être consi- déré comme mort ou s'il est susceptible de se représenter un jour devant les autorités. Une

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chemise de bristol bleu sanglée d'un élastique contenait un seul feuillet manuscrit recouvert, au recto, d'un texte écrit en très petits carac- tères qui avaient été ensuite biffés et hachurés au point d'être devenus illisibles. Seule la pre- mière phrase était intacte. Je la recopie en entier, bien qu 'elle semble ne présenter aucun rapport avec le passager ou avec sa dispari- tion : «J'entends la sonnerie du lycée, un appel grêle et obstiné qui déchire la nuit avant de sortir du lit les élèves couchés côte à côte au dortoir. »

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A C H E V É D ' I M P R I M E R SUR LES P R E S S E S D E L ' I M P R I M E R I E F L O C H A M A Y E N N E LE 2 5 A O Û T 1 9 8 0

N° 1 8 2 8 0

C A L M A N N - L É V Y , 3, R U E A U B E R P A R I S 9e - 1 0 7 8 2 D é p ô t l é g a l : 3e t r i m e s t r e 1 9 8 0

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Guy Rohou est conservateur de bibliothèque.

L'Escale prochaine est son sixième roman.

Il a collaboré à La Nouvelle Revue Française de 1966 à 1976.

Bien éloigné des touristes attirés par les croisières exotiques et les ponts-promenades de paquebots fastueux, Laurent Gaigneur n'a embarqué au Havre. sur un cargo,

qu'avec l'intention de ne pas descendre à terre.

Parce qu'il a sauvé naguère la vie de son fils, l'armateur de « l'Amiral-Hermenault »

a mis à la disposition de Laurent une cabine de passager.

Le narrateur, hanté par la mer depuis son enfance, devient le compagnon attentif du radio,

du garçon de cabine, du commandant.

Entre le carré et la passerelle,

dans le domaine circonscrit presque magique où vit et travaille l'équipage,

il observe la route du navire au long des côtes de l'Afrique, l'approche des ports, le déchargement des conteneurs.

Mais, le plus souvent,

enfermé dans la solitude de sa cabine, c'est vers lui-même que revient Laurent.

Pour ce comédien désenchanté de l'amour, s'agit-il d'un voyage sans retour, ou d'un nouveau départ vers l'inconnu ?

Au lecteur de le découvrir, qui rêve d'une « Escale prochaine »

où la vraie vie nous attend.

Une écriture musicale donne à ce récit mystérieux, la résonance profonde d'une expérience intérieure.

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