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Evolution en plein champ de la solubilité dans DTPA
des métaux lourds du sol introduits par des épandages
de boues urbaines chaulées
Jean-Louis Morel, Armand Guckert, Anne-Marie Claude, Alain Jeanbille
To cite this version:
Jean-Louis Morel, Armand Guckert, Anne-Marie Claude, Alain Jeanbille. Evolution en plein champ
de la solubilité dans DTPA des métaux lourds du sol introduits par des épandages de boues urbaines
chaulées. Agronomie, EDP Sciences, 1984, 4 (4), pp.377-386. �hal-00884648�
Evolution en plein champ de la solubilité dans DTPA des
métaux lourds du sol introduits par des épandages de
boues urbaines chaulées
Jean-Louis MOREL Armand GUCKERT
Anne-Marie CLAUDE Alain JEANBILLE
E.N.S.A.LA., Laboratoire de Phytotechnie, 38, rue Sainte-Catherine, F 54000 Nancy
RÉSUMÉ A l’aide d’un dispositif expérimental créé en 1974 en vue de déterminer la valeur agronomique de boues urbai-
nes floculées à la chaux et au chlorure ferrique, on a suivi, entre 1979 et 1981, l’évolution de l’extractibilité par D
TPA0,005 M (acide diéthylène triamine penta acétique) de 6 métaux lourds du sol (Zn, Cu, Cd, Pb, Ni et
Mn). Le plan d’expérience comprend 10 traitements allant de la dose 0 à la dose 340 t M.S. ha ! de boues. Des échantillons de sol ont été constitués pour chaque traitement tous les 6 mois depuis 1979. L’incidence des pre- miers épandages de boues sur les quantités de métaux extractibles est encore très marquée malgré une interrup-
tion des apports pendant 3 ans ; ces quantités sont proportionnelles aux doses de boues épandues. Des épanda-
ges récents montrent que les effets d’apports successifs de boues ne sont pas additifs. Au cours du temps, on assiste à la superposition de 2 types de phénomènes antagonistes. Le premier, certainement amplifié par le chaulage des boues, conduit à une réduction globale de l’extractibilité par DTPA ; diverses hypothèses peuvent être formulées pour l’expliquer : diminution des quantités de matières organiques solubles, humification, inso- lubilisation par précipitation ou adsorption sur les minéraux carbonatés. Le second processus intervenant essen-
tiellement au cours de la saison de végétation entraîne un accroissement de l’extractibilité des métaux lourds par D
TPA(biodégradation, acidification, action du système racinaire). Ces augmentations saisonnières s’atténuent cependant très fortement au fur et à mesure que l’on s’éloigne de la date de l’épandage, consécutivement à un
probable épuisement des matières organiques labiles et à une organisation des composés minéraux.
Mots clés additionnels : Zn, Cu, Cd, Ni, Pb, Mn.
SUMMARY
Dr p a-solubility of soil heavy
metals in thefield after spreading
limed urbansludge.
The mobility of heavy metals in soil after sewage sludge applications was followed in 1979 to 1981 on an experimental field set up in 1974 on a loamy clay soil to evaluate the effects of urban sludges on soil properties
and crop production. The various earlier spreadings of sludge resulted in 1979 in 10 experimental treatments (from 0 to 340 t dry matter ha- 1). For half the treatments, the last sludge application was made in 1975. Soil
samples were collected from the Ap horizon every 6 months. Heavy metal mobility was measured using the
D TP
n extractant. After 3 years without any application, the soil still showed a strong residual effect of the first
sludge spreadings. This was highly correlated with application rate. However, the effects of a new sludge appli-
cation were not additive. The DTPA-extractable heavy metals decreased with time probably due to the
reduction of soluble organic matter, to humification and to mineral insolubilisation, in relation to the limy
nature of the sludges. However, after the growing season, heavy metals were shown to be more extractable by
D TPA
. This was attributed to the action of both microflora and root system (acidification, release of com-
plexing substances). These fluctuations decreased with time.
Additional key words : Zn, Cu, Cd, Ni, Pb, Mn.
1. INTRODUCTION
L’épandage agricole
constitue une des voies d’utili- sation et d’évacuation des boues des stationsd’épura-
tion. Cettepratique,
intéressant en France 180 000 tde matière sèche
(G ODIN , 1982),
trouve sajustifica-
tion dans la restitution au sol de
l’azote,
duphos-
phore
et de la matièreorganique, principaux
consti-tuants des boues. En
contrepartie,
les boues recèlent desquantités
notables de substances dont l’introduc- tion au sol n’est pas sansrisques
pour l’environne-ment et la santé humaine. Il
s’agit
depolluants
orga-niques
et d’éléments minérauxparmi lesquels
desmétaux lourds
(Zn, Cu, Pb, Ni, Hg, Cd, ...)
sontparticulièrement
abondants.La notion de
risque
pour les métaux lourds estliée,
d’une part, à leur toxicitéintrinsèque
et, d’autre part, à leur solubilité dans le milieu dontdépend
leurtransfert vers les
végétaux.
Diverses études despécia-
tion des métaux lourds(E MMERI C H
etal., 1982 ;
SPO-SITO
et
al., 1982)
ont montré que, dans lesboues,
les formeséchangeables
et adsorbées sont minoritaires.Selon
l’élément,
le métal est soit associé à la matièreorganique (Cu),
soit sous forme de carbonates(Zn,
Cd, Pb)
ou de sulfides(Ni),
soit encore sous uneforme
correspondant
à des états très stables chimi- quement. La distribution des métaux entre ces diver-ses formes se trouve aussi étroitement liée à la nature
de la boue
(SILVIERA
&SOMMERS, 1977)
et, enparti-
culier,
à la filière de traitementqu’elle
a suivie(L INE -
RES &
JUSTE, 1980).
Dans lesol,
de nombreux pro-cessus tels que la
biodégradation
de la matièreorgani-
que des
boues,
l’établissement de liaisons avec les dif- férents constituants et l’existence d’un environnementphysico-chimique
différent(pH, Eh)
contribuent à modifier l’état des métaux lourds introduits par la boue. Selon lesconditions,
ces modifications d’état interviennent de différentes manières : c’est ainsi que SILVIERA & SOMMERS(1977)
observent au cours d’incubations demélanges
sol +boues,
une augmen- tation de lad.isponibilité
des métaux au cours du temps alors que, de leurcôté,
FOLLET & LINDSAY(1971),
CHANG & BROADBENT(1982),
avec des métaux introduits sous forme desels,
assistent à la dimi- nution de leurspossibilités
d’extraction par DTPA. Aplus long
terme, il semblerait que lesmétaux,
consécuti- vement à leur introduction dans lesol,
évoluent vers desformes
chimiques plus
stables(EMMER I CH et al., 1982)
beaucoup
moins assimilables par lesvégétaux.
Cephé-
nomène, équivalent
de la « reversion » connue en ferti-lisation
oligominérale,
a pu être observé à l’occasion decultures,
enprésence
deboues, qui
montraient une dimi- nution duprélèvement
des métaux lourds par lesvégé-
taux à mesure clue l’on
s’éloignait
de la date del’épan-
dage (JUSTE
&SOLDA.
1979 ; GUCKERT etal., 1982).
En vue de
préciser
le devenir dans le sol de métaux lourdsapportés
par lesboues,
nous avons suivi pen- dant 3 années à l’aide d’un extractantchimique,
leDTPA
(acide diéthylène
triamine pentaacétique),
l’évolution de la fractionprésumée
assimilable deZn,
Cu, Cd, Pb,
Ni et Mn dans un sol enrichi de diffé- rentes doses de boues urbaines floculées à la chaux et au chlorurefe:rrique.
Ce type detraitement,
assezrépandu,
confère aux boues despropriétés agronomi-
ques
particulières :
évolution de leur matièreorgani-
que
(MO R EL
&GUCKER T , 1981), aptitude
à fournirl’azote
(CH AU SSO D , 1979)
et lephosphore (FARDEAU
et
al., 1977 ; MO REL , 1980), comportement
des métaux lourds(FARDEAU et al., 1977 ;
JUSTE etal., 1977).
II.
MATÉRIEL
ETMÉTHODES
A. Sol
Le
sol,
de type brunlessivé, développé
sur une cou- verture de limonsquaternaires (30
à 40cm),
reposesur un substrat marneux au
voisinage duquel apparaît
un horizon de
pseudogley.
Le tableau 1 donne lescaractéristiques analytiques
de l’horizon de surface dece sol.
B. Boues
Elles
proviennent
de la stationd’épuration biologi-
que de la communauté urbaine de
Nancy qui produit
quotidiennement
environ 60 t de boues à 20 p. 100 de matière sèche. Avant d’êtreévacuées,
les boues sontdigérées
enanaérobiose, puis
floculées à la chaux(20
p. 100Ca(OH) 2
par rapport à la matièresèche)
etau chlorure
ferrique,
enfindéshydratées
sur filtrerotatif sous vide. Ce mode de conditionnement con-
fère à la boue un caractère d’amendement calcaire
susceptible
d’induire un comportementparticulier
desmétaux dans le sol. Une
analyse
moyenne des boues par rapport à la matière sèche estrapportée
tableau1,
les variations dans le temps de lacomposi-
tion pouvant être
importantes (MO REL
etal., 1978).
C.
Dispositif expérimental
Installé en 1974 sur le domaine
expérimental
de laBouzule
(Meurthe-et-Moselle)
pour suivre lesréper-
cussions
agronomiques
del’épandage
des boues deNancy,
ilprésentait
initialement 5 traitements à doses croissantes de boues(tabl. 1),
la moitié dudispositif
recevant un
complément d’engrais
minéral. Apartir
de mars
1979,
date du début de laprésente étude,
lesépandages
de boues ont été renouvelésuniquement
sur la moitié des
parcelles.
Il en est résulté undisposi-
tif comportant 10 traitements allant de la dose zéro à la dose 340 t M.S.
ha - en quantité
cumulée : 4 trai-tements
représentant
l’arrière effet des boues(pas
denouvel apport, mais
application
de 120kg. ha - 1 N,
P
2
0
5
, K 2 0),
4 traitementscorrespondant
auxépanda-
ges de
1979,
1 traitement témoin 0 boue et 1 traite-ment témoin + 120
kg.ha- 1 N, P 2 0 5 , K 2 0. Chaque
traitement
présente
4répétitions
sous forme de par- celles de 10 m2. L’étude de l’évolution des teneurs du sol en métaux lourds assimilables a étéenvisagée
après
le dernier apport de boues(1979),
soit 5 ansaprès
soninstallation, période qui garantit
aumélange
sol + boue un certain étatd’équilibre.
Durant les 3 années de cette
étude,
lesparcelles
ontété cultivées en maïs
ensilage (var.
« L.G. 11»).
A larécolte,
lesparties
aériennes(tige, feuilles, épis)
ontété
exportées,
seules ont été restituées la base de latige
et lesracines,
enfouies par un labour à 20 cm deprofondeur.
Les sols ont étéprélevés
2 fois par an dans l’horizon desurface,
avant etaprès
laculture,
soit en mars et en octobre.
Chaque
échantillon consti- tué àpartir
de 10prélèvements
à l’aide d’une sondecylindrique (QJ :
1cm)
a étéémietté, puis
séché à l’airlibre,
ensuitepulvérisé
dans un mortier en porce- laine et tamisé à 2 mm avant d’êtreanalysé.
D.
Analyses
1. Métaux totaux
Minéralisation à chaud de 2 g de sol dans 20 ml de solution
nitro-perchlorique. Dosage
deZn, Cu, Cd,
Pb, Ni,
Mn dans la solution parabsorption atomique
(Varian AA6).
2. Métaux assimilables
La fraction des métaux lourds
disponible
pour lesvégétaux
peut êtreappréciée
avecplus
ou moins desuccès à l’aide de nombreuses méthodes
chimiques.
Celles-ci diffèrent essentiellement par le
type d’agent
d’extraction, qui peut
être un acide(HCI, HN0 3 ,
CH
3
COOH),
un sel(NH 4 CH 3 COO, CaCl 2 )
ou un ché-late
(E D TA, D TPA , NTA).
Ce moded’approche
est
critiquable
dans la mesure où l’on n’est pas assuréd’obtenir,
selon les conditions demilieu,
uneimage
représentative
dupool
des métaux assimilables. Par contre, latechnique
d’extractionchimique représente
un moyen
pratique
et intéressant pour comparer des niveaux de contamination différents entre eux et pour suivre leur évolution.Si,
enFrance,
il semble quel’on s’oriente vers l’utilisation de l’EDTA
(JUSTE,
1983),
un autre agentcomplexant,
leD TPA ,
massive-ment
employé
dans le cadre del’analyse
des éléments traces assimilables dans les sols(L IND SA Y
& NOR-VELL
,
1978)
et de l’étude de la contamination des sols par les métaux lourds(KELLING et al., 1977 ;
KOR-CAK&
F ANNING , 1978 ;
LATTEREL etal., 1978 ; H AQ
et
al., 1980 ;
LINERES &JUSTE, 1980),
autorise ce type de travailcomparatif.
Le DTPA permet d’accé- der aux ions métal libres et facilement désorbables du sol. Nous avonsemployé
la méthode de LINDSAY &N
ORVELL
(1978) : agitation, pendant
2h,
de 10 g de sol dans une solution de DTPA0,005 M, CaC1 2 0,1
Met de TEA
(triéthanolamine) 0,1
Mtamponnée
àpH
7,3 ; après filtration, analyse
de la solution parabsorption atomique
pourZn, Cu, Cd, Pb,
Ni et Mn.III.
RÉSULTATS
Avant de décrire l’évolution au cours du temps de la solubilité da.ns le DTPA des métaux lourds appor- tés par les
boues,
nous examinerons lesconséquences
de 8 années d’utilisation de boues urbaines sur la teneur totale du sol en métaux lourds.A. Concentrations du sol en métaux lourds totaux
après
8 annéesd’épandage
des boues urbaines Lafigure
1indique
les concentrations totales des élémentsétudiés,
à la fin 1981.L’application
desboues
s’accompagne
d’un accroissementsignificatif
de la teneur du sol en
Zn, Cu,
Cd et Pb totaux. Par contre, on n’observe aucune modification des teneurs en Mn et Ni totaux, euégard
au faible rapport : con- centration du métal dans la boue/concentration ini- tiale dans lesol, présenté
par ces 2 éléments. Il existeune étroite
proportionnalité
entre la concentration totale deZn, Cu,
Cd et Pb retrouvée dans le sol etla
quantité
totale de boueépandue depuis l’implanta-
tion dudispositif (coefficients
de corrélation :0,94
< r <0,99).
Laprévision
de la concentration du sol en métaltotal,
faite àpartir
de la concentra-tion de la boue et de la dose
appliquée,
aboutit à des valeurslargement plus
élevées que celles effectivement données parl’analyse
de sol(on
ne retrouve parl’analyse
que :>0 p. 100 environ de la concentrationestimée).
Une telledivergence
a étéégalement
obser-vée par RoBERTSON et al.
(1982)
etimputée,
en par-tie,
à des erreursd’échantillonnage
etd’analyse.
Sices causes d’erreurs sont
vraisemblables,
enparticu-
lier pour les boues dont la
composition
estsujette
àd’importantes
variations dans le temps(Mo REL et al.,
1978),
le moded’expression
des résultats est aussi conditionné par laprofondeur
de labour et la densité apparente du sol retenues.B. Evolution des teneurs du sol en métaux extracti- bles au DTPA
Après
avoir décrit pourchaque
métal l’état du dis-positif
5 ansaprès
sonimplantation (mars 1979),
nous opposerons les
parcelles
sansapport
de bouesdepuis
1975 et ayant atteint un certain étatd’équilibre
à celles enrichies en boues en mars 1979.
1. Zinc
(fig. 2)
En mars
1979,
laquantité
de Zn extractible auD
TPA
(Zn-DTPA)
est étroitement liée au Znapporté
par les
épandages
de boues antérieurs(r
=0,95).
De3,4
ppm dans le soltémoin,
niveauqui
selon LIND-SAY & NORVELL
(1978) correspond
à un sol correcte-ment pourvu, cette
quantité
estpassée
à26,5
ppmavec le traitement 340 t M.S.
ha- 1 . Remarquons
qu’un
traitement 30 t M.S.ha - de
boues non chau-lées a le même effet sur la teneur du sol en Zn-DTPA
qu’un
traitement 70 t M.S. ha - de boues chaulées.Sans nouvel apport de
boues,
les niveaux de Zn- DTPA tendent à diminuer au cours du temps. En
mars
1980,
ils s’abaissentsystématiquement
à moinsde 10 ppm.
Toutefois,
enoctobre,
la concentration du sol en Zn-DTPA montre uneaugmentation
quenous
qualifierons
de saisonnière. Sur lesparcelles
enrichies en boues en1979,
onobserve, après
larécolte de
l’année,
un accroissement de la concentra- tion enZn-DTPA, exception
faite de la dosed’apport
laplus
faible(10
t M.S.ha-’).
Les valeursatteignent
40 ppm
avec unépandage
de 150 t M.S. ha-1.Compte
tenu desquantités
de bouesappliquées
en1979,
on aurait pu s’attendre à uneaugmentation
plus importante
des concentrations du sol en Zn extractible. En mars de l’annéesuivante,
les niveaux baissent de manière trèsspectaculaire
etatteignent
des valeurs toutes inférieures à 15 ppm. De même que
précédemment,
on assiste à des fluctuations entre mars et octobre.2. Cuivre
(fig. 3)
Comme pour
Zn,
les valeurs initiales de Cu-DTPA croissent linéairement avec les apports de cuivre parles boues. La corrélation est ici meilleure
(r
=0,99),
le traitement 30 t M.S.
ha - ne
faisant pasexception.
Avec 140 et 190 t M.S.
ha- 1,
lesquantités
de Cuextractible par DTPA diminuent
régulièrement
aucours du
temps
et montrent aussi unelégère
remontéeaprès chaque
récolte. Pour les autrestraitements,
lesvariations sont peu
marquées
d’une saison à l’autre.L’épandage
de 1979 aproduit
unelarge augmentation
de Cu-DTPA en octobre1979,
hormis pour le traite- ment 10 t M.S.ha- 1 . En
mars1980,
on assiste à une nette réduction deCu-DTPA, qui
atteint le niveau desparcelles
sans boues en 1979correspondantes.
Toutefois,
en octobre de l’annéesuivante,
il se pro- duit une remontéeimportante
créant à nouveau des différences entre ces 2 types de traitements.3. Cadmium
(fig. 4)
Le
comportement
du cadmium extractible auDTPA est similaire à celui du zinc. La
quantité
de Cd-DTP
,a est liée linéairement à la dose totale de Cd
appliquée (r
=0,96). Cependant, malgré
l’existence de variationssaisonnières,
la diminution au cours du temps estplus régulière
etplus
forte. On noteégale-
ment que la dose 190 t M.S. ha-1 offre des valeurs
systématiquement supérieures
à celles de la dose 200 tM.S.
ha-! ;
le faitqu’une
fraction del’épandage
190 t M.S.
ha - ait
intéressé des boues non floculées(60
t M.S.ha - 1 )
constitue un élémentd’explication.
Une fois de
plus,
lesquantités
extractibles détermi- néesaprès
les nouveaux apports de boues sont très inférieures auxprévisions. Enfin,
pour chacun destraitements,
la concentration du sol en Cd extractible par DTPAparaît
tendre vers une limite tout commepour Cu et Zn.
6.
Manganèse
Nous avons inclus cet élément dans notre étude en
raison de sa
grande
sensibilité àl’augmentation
dupH
du sol se traduisant par une réduction de sonassimilabilité par les
plantes.
Les résultats obtenus en 1981 montrent des valeurs de Mn-D’rPasignificative-
ment
plus faibles,
parrapport
aux solstémoins,
dansles sols
ayant
reçu des boues chaulées à une dose aumoins
égale
à 70 t M.S.ha- 1 .
Les concentrations observées restent toutefoiscompatibles
avec une ali- mentation correcte desvégétaux.
4. Plomb
(fig. 5)
L’évolution de Pb-DTPA est
comparable
à celle du cuivre. En mars1979,
la liaison entre Pb-D’rPA et Pbapporté
par les boues est très forte(r
=0,99).
Avec une nette réduction de Pb-D’rPA au cours du temps, on relève
également d’importantes
variationssaisonnières pour tous les traitements y
compris
letémoin.
5. Nickel
Les données concernant cet élément montrent peu de variations en fonction des traitements et des sai-
sons. Ce fait
s’explique
enpartie
par le taux d’extrac- tion très faible obtenu pour le nickel avec le DTPA. La solutionprésente
ainsi des concentrations souvent à la limite despossibilités
dedosage.
IV. DISCUSSION
A. Evaluation de la méthode de
prévision
de l’assimi-labilité
L’étude de l’évolution de la
disponibilité
deZn,
Cu, Cd, Pb,
Ni et Mn pour lesvégétaux
a été simu-lée,
dans cetravail,
à l’aide d’un extractantchimique
complexant,
le DTPA. La validité d’une telle démar- che est déterminée par le niveau des corrélations entre le métal extractible par DTPA et sa concentration dans les tissusvégétaux.
Les corrélations sontgénéra-
lement meilleures
lorsque
l’onintroduit,
dans lesfonctions de
prévision
del’absorption
des métaux par lescultures,
d’autresparamètres
tels quepH,
taux dematière
organique, C EC ,
tauxd’argile (HAQ et al.,
1980),
mais on peut, dans un travail de type compa-ratif,
se contenter enpremière analyse
des résultats bruts « élements extractibles au DTPA ». L’utilisa- tion deséquations
deprévision publiées
parH AQ
etal.
(1980)
montre en effet que les variations depH
etde matière
organique
ne sont pas de nature à modi- fier notablement les différences entre lesquantités
de métal assimilables.D’après
les niveaux des corréla- tionssignalées
dans lalittérature,
on note que le DTPA rend des services très
inégaux
selon les élé- mentsenvisagés
et selon les conditions de milieu. Il est tout à fait satisfaisant pourZn,
Cu etMn,
élé-ments pour
lesquels
il a été initialementdéveloppé
dans le cadre des détections des carences en sols cal- caires. Son intérêt aégalement
été montré en milieu à forte teneur en métaux lourds pourZn, Cu,
Cd et Ni(KORCAK
&F A NN I NG, 1978 ; H AQ
etal., 1980).
En sol alcalincependant,
les corrélations obtenues avecNi sont médiocres
(KO R C A K
&F ANNIN G, 1978),
cet élément étant peuextractible,
dans cesconditions,
ainsi que nous l’avons constaté. D’autrepart,
lespré-
visions sont meilleures si les métaux ont été introduits dans le sol sous forme de sels quelorsqu’ils
sont associés à uneboue,
les boues affectant considérable- ment leprélèvement
des métaux lourds par lesvégé-
taux
(G O Ut EZ et al., 1982).
Dans nosconditions,
on peut donc admettre que lesquantités
deZn, Cu,
Cd et Mn extraites par DTPA constituent des indicateursacceptables
des variations de ladisponibilité
des élé-ments pour les
végétaux.
Pour leplomb,
les données manquent en raison des faiblesquantités
retrouvéesdans les organes
aériens,
cet élément restant essentiel-lement localisé dans les racines
(H EVESY , 1923).
B. Evolution dans le temps de la solubilité des métaux dans DTPA
L’action des boues sur les concentrations du sol en
métaux extractibles par DTPA est encore très mar-
quée
3 ansaprès
le dernierépandage (mars 1979). Zn,
Cu,
Pb et Cdprésentent
des valeurs étroitement cor-rélées à la
quantité
totale de métalapportée
par les boues(r
>0,9.5). L’amplitude
de l’effet résiduel est de toute évidence liée à la concentration du métal dans la boue(Zn >
Pb > Cu >Cd).
Aplus long
terme, 6 ans sans apports, l’influence des boues
s’amenuise,
mais la liaison concentration-dose restetrès forte. Un nouvel
épandage
de boues(1979)
entraîne une
augmentation
desquantités
deZn, Cu,
Pb et Cdextractibles,
l’accroissementcependant
est bien inférieur aux valeursprévisibles
en tenantcompte
des effets despremiers épandages
de boues.Cette
observation, signalée
par ailleurs à l’occasiond’apports répétitifs
de boues(T AYLOR
etal., 1982),
réfutel’hypothèse
d’une additivité des effets des boues. Il semblepréférable
d’admettrequ’il
existe-rait,
pour untype
de soldonné,
une limite de concen-tration en métal facilement
mobilisable, laquelle
pourrait dépendre
à la fois descaractéristiques
du solet de la boue
incorporée.
Dans notreétude,
lechaulage
des boues contribue
probablement
à réduire la teneurdu sol en métaux
assimilables, particulièrement
pour Cd et Zn dont la solubilité est étroitement liée aupH
du sol.
Le suivi de
l’évolution,
au cours du temps, des métaux extractibles par DTPAparaît
mettre en évi-dence,
pourZn, Cu,
Pb etCd,
2 processusantagonis-
tes :
- une évolution du métal vers des formes de moins en moins mobilisables
qui,
àl’image
du cad- mium(fig. 6),
semble suivre une loi detype
fonctionpuissance
dutemps
et tendre vers une limite dont le niveaudépend
de la dose de boue initialementappli-
quée ;
- l’existence de variations saisonnières se manifes-
tant ici sous la forme d’un accroissement de l’extrac- tibilité des métaux entre mars et octobre d’une même année.
Le
premier
processus,qui
tendrait à limiter la con-tamination des eaux et des
plantes
par les métauxlourds, correspond
à la fixation du métalobservée,
notamment à l’occasion de corrections de carences
(FOLLET
&L INDSAY , 1971), qui
se traduit par un abaissement de la mobilité du métal. Cephénomène
ne peut être
généralisé
à tous les types de boues euégard
au mode de conditionnementparticulier
de nosboues. Il serait la résultante de l’intervention de
plu-
sieurs facteurs du sol
(JUSTE
&SOLDA, 1979)
dont ilest
impossible
ici de cerner avecprécision
l’influence.La décroissance de la solubilité
pourrait être,
en pre- mierlieu,
attribuée à la diminution du stock de matièreorganique
dumélange
sol-boues(M OR EL
&GUCKERT, 1981).
En affectant lescomplexes
organo-métalliques solubles,
la minéralisationprovoquerait
le retrait des solutions du sol des métaux associésqui
précipiteraient,
s’adsorberaient ou s’incluraient dans lesphases
minérales du sol. Par référence aupouvoir
complexant
descomposés fulviques
extraits de sols enrichis en boues(S P OSiTO et al., 1981),
les éléments surtout concernés par ce mécanisme seraient :Pb,
Cuet, dans une moindre mesure, Zn.
Parallèlement,
l’humification de la matièreorganique peut
conduire à l’inclusion d’élémentsmétalliques
dans des compo- sés de masse moléculaireélevée, biologiquement
deplus
enplus
stables. La stabilité de cescomposés
estaccentuée par les liaisons
qu’ils
contractent avec lesargiles
et renforcée ici par l’effet dechaulage
desboues. Un troisième type de processus propre aux boues chaulées
peut
être avancé pourexpliquer
la réduction de mobilité deCd,
Pb et Zn. Ils’agit
de l’insolubilisationchimique
soit parsimple précipita-
tion à
pH élevé,
soit paradsorption
sur les surfacesdu carbonate de calcium
(Mac BRIDE, 1980). Enfin,
lelessivage, responsable
dans le cas del’épandage
de boues chaulées del’apparition
de Cu dans les eaux dedrainage (JUSTE et al., 1977),
peut constituer un fac- teurd’explication supplémentaire
de la diminution de l’extraction de cet élément.Les variations dites saisonnières
pourraient
résulter essentiellement de l’activitébiologique
dusystème
sol-plante.
Notre travail lève ainsil’apparente
contradic- tion entre les données de la littérature rapportant, selon les cas, une réduction ou un accroissement de l’extractibilité des métaux. Les processus debiodégra-
dation,
enprovoquant
une libération decomplexes
métalliques
solubles(Cu
etPb)
et uneacidification,
sont
susceptibles
d’assurer la dissolution des compo- sés carbonatés et la libération de cations initialementemprisonnés (Cd, Pb, Zn). L’ampleur
des remontées observées en octobre se réduit au cours dutemps
par suite d’unépuisement probable
des matièresorgani-
ques labiles et de la stabilisation des
composés
carbo-natés. Les variations saisonnières sont ainsi moins
marquées
2 ansaprès l’application
des boues. Nous pouvons admettreégalement
que lesystème
racinaire de la culture installée peutmodifier,
par l’émission de substancescomplexantes
et/ou acides dans la rhizo-sphère,
l’état de solubilité des cations(MOREL et al.,
1983).
L’abondance de racines observées sur les par- celles à forte dose de boues confère à ce processus un rôle nonnégligeable.
Il est évident que ces 2types
dephénomènes (biodégradation,
activité dusystème
raci-naire)
interviennent à desdegrés
divers selon lescations,
en relation avec leur mode de rétentionpré-
dominant dans le sol. C’est ainsi que Pb etCu,
trèscomplexables
par la matièreorganique,
offrent des variations saisonnières trèsmarquées,
à l’inverse deCd et Zn dont l’état dans le sol
dépend
étroitement dupH
et de laprésence
abondante deCaC0 3 . Enfin,
si la diminution de la mobilité est un
phénomène
per- manent, il estmasqué
au cours de la saison devégé-
tation par l’intervention de l’ensemble des processus
qui
conduisent à un accroissement de la mobilité des métaux.V. CONCLUSION
Ce travail confirme
l’augmentation
de la teneur dusol en métaux lourds
(Zn, Cu,
Cd etPb)
par suite del’emploi
de boues urbaines enagriculture.
La fractionprésumée
assimilable de ces métaux dans lesol,
déter-minée à l’aide de
D TPA ,
est apparue étroitement liée à laquantité
totale de bouesépandues.
Au cours dutemps,
l’extractibilité des métaux par le DTPA a ten- dance à diminuer. A l’occasion d’un nouvelépandage
de
boues,
on note que laquantité
de métaux extraitss’accroît à nouveau mais reste à un niveau inférieur à la
prévision, suggérant
la non-additivité des effetsd’apports
successifs de boues. Laperte
de mobilité des métaux lourds au cours dutemps pourrait
êtreliée à un ensemble de processus tels que l’évolution des matières
organiques
parbiodégradation (minérali-
sation ethumification)
et l’insolubilisation parpréci-
pitation
ouadsorption. Cependant,
selon lesproprié-
tés de
l’élément, particulièrement
selon son affinitépour les matières
organiques,
chacun de ces processusinterviendrait à un
degré
variable.Au cours de la saison de
végétation,
il semble que l’action de lamicroflore,
d’unepart,
et dusystème
racinaire,
d’autre part,augmentent
l’extractibilité par DT
PA des métaux lourds dans le
sol,
cequi
se tra- duit par des variations saisonnières. Laproduction
decomposés
acides et/oucomplexants s’oppose
ainsiprovisoirement
à la fixation des métaux sous des for-mes moins mobiles.
Toutefois,
ces variations ont ten-dance à s’atténuer
lorsqu’on s’éloigne
de la date du dernierépandage.
Cesphénomènes
de mise en solu-tion par intervention de l’activité
biologique, qui
res-tent à
préciser
au niveau descinétiques
notamment, revêtent sans doute uneimportance
considérable dans le cas de zones à forte teneur, à la fois en métaux lourds et en matièreorganique.
Il est
cependant
difficile de dissocier auchamp
lesdifférents processus
impliqués
dans les variations de mobilité des métaux pourquantifier
la part revenant à chacun.Aussi, paraît-il indispensable
dereprendre
une étude
plus
fine de cesphénomènes
à l’aide de modèlessimplifiés.
Desinvestigations
en cours con- cernent enparticulier
le rôle des exsudats racinairessur la mobilité des métaux lourds
apportés
au sol.Reçu le 31 mai 7983.
Accepté le 21 décembre 1983.
REMERCIEMENTS
Ce travail a fait l’objet d’une aide financière du Ministère de l’Environnement dans le cadre de la Convention n° 80180.