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Savoir-faire pastoraux et fromagers de Corse : patrimoine complexe à formaliser entre technique et culture

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Academic year: 2021

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Savoir-faire pastoraux et fromagers de Corse : patrimoine complexe à formaliser entre technique et

culture

Remy Bouche

To cite this version:

Remy Bouche. Savoir-faire pastoraux et fromagers de Corse : patrimoine complexe à formaliser entre

technique et culture. 3. Congreso internacional de la red SIAL, Oct 2006, Baeza, Espagne. �hal-

02753411�

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Savoir-faire pastoraux et fromagers de Corse: patrimoine complexe à formaliser entre technique et culture.

B. Rémi

(INRA SAD Corte, Corse)

Comunicación aceptada por el Comité Científico del III Congreso Internacional de la Red SIAL

“Alimentación y Territorios”

Copyright © 2006 de los autores. Todos los derechos reservados. Los lectores pueden hacer copias de este documento para fines no comerciales por cualquier método mecánico o digital

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Savoir-faire fromagers de Corse: patrimoine complexe à formaliser entre technique et culture pastorale

Auteurs : Bouche Rémi, Bordeaux Célia

Laboratoire de Recherches sur le Développement de l’Elevage – INRA SAD Quartier Grossetti 20250 Corte France bouche@corte.inra.fr

Résumé :

Parmi les enjeux de patrimonialisation dans les Systèmes Agroalimentaires Localisés (SYAL), la question des savoir-faire demeure centrale. En replaçant cette question au cœur des interactions entre des composantes techniques, relationnelles, culturelles et cognitives serties dans un espace insulaire, les auteurs analysent ici les savoir-faire associés à la production fromagère au sein d’un Syal «petits ruminants fromagers» en Corse.

En combinant de multiples approches portées par des disciplines telles que l’anthropotechnologie, l’ergonomie cognitive et la zootechnie, les auteurs s’interrogent sur l’existence de savoir-faire fromagers spécifiques susceptibles de devenir une ressource collective « patrimonialisable ».

Un premier regard sur cette activité de transformation permet d’identifier, à travers la posture des praticiens et la grande diversité qualitative des produits trouvés sur le marché, deux variables déterminantes dans la caractérisation de catégories d’acteurs susceptibles d’activer des compétences particulières dans leur contexte social et productif : la connaissance de l’environnement naturel et celle de la matière première. Par cette double entrée, trois catégories d’acteurs émergent : les laitiers et technologues fromagers ; les nouveaux fromagers ; et les « pasteurs ». Si ces acteurs se différencient par leur approche soit technique soit empirique du fromage, et par leur capacité à éliminer (nivellement) ou à anticiper les aléas liés à un environnement contraignant, nous identifions une nouvelle variable discriminante explicative de la diversités de ces postures:

leur objet de préoccupation principale. En effet, selon que l’attention de ces acteurs est prioritairement portée sur l’animal ou sur le lait, nous observons le développement d’aptitudes différentes, qu’elles soient compétences techniques, cognitives, communicationnelles. Tout ceci nous permet finalement de resituer les savoir-faire collectifs localisés (SFCL), au sein d’un processus systémique complexe.

Mots Clés : Savoir-faire collectif localisé, fromage, culture pastorale, système cognitif et

relationnel.

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INTRODUCTION

En Corse, le fromage possède une forte image culturelle. Apprécié des consommateurs insulaires et d’outre mer, il est l’objet « mystifié » de nombreux débats, notamment autour de ses caractéristiques et des savoir-faire qui y seraient associés. A l’heure actuelle, la demande s’avère être largement supérieure à une offre qui décroît au rythme alarmant du déclin du nombre des exploitations laitières depuis plus d’un siècle.

Alors que nous nous interrogeons sur l’avenir de systèmes robustes et d’une activité viable au niveau individuel, la question des savoir-faire demeure centrale. En effet, comment envisager la reproductibilité d’une activité si les savoir-faire qui y sont liés ne sont ni transmis de façon informelle (par voie orale), ni formalisés ? Mais, au-delà du mythe, la fabrication de fromage corse nécessite-t-elle réellement l’acquisition d’un savoir-faire particulier ?

Après avoir posé le contexte insulaire en lien avec la transformation fromagère, nous chercherons à identifier l’existence de savoir-faire spécifiques à cette transformation à partir de différentes clés d’entrées que sont la connaissance de la matière première et de l’environnement, et l’objet au centre des préoccupations du praticien. Une analyse qui nous permettra de resituer les savoir-faire, que nous qualifierons de savoir-faire collectifs localisés, au sein d’un processus systémique complexe.

I. Contexte de l’élevage des petits ruminants en Corse

I.1 L’agriculture insulaire du « passé »

L’agriculture corse a longtemps été une agriculture de subsistance. Les systèmes

traditionnels associaient fréquemment culture, élevage et arboriculture, et l’ensemble de la

main d’œuvre familiale était mobilisé pour les travaux quotidiens, que ce soit en champs

ou auprès des bêtes. Le gardiennage était alors systématique, assuré par les enfants ou les

personnes âgées lorsque le troupeau était proche du village, et par les hommes lorsqu’il

était conduit en montagne (en été) ou en plaine (en hiver) selon les cycles de la

traditionnelle double transhumance. Les zones d’élevage et de traite étaient donc

fréquemment éloignées des foyers d’habitation, et les fromages étaient produits selon trois

schémas dépendants de la distance entre zones d’élevage et zones de consommation :

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- Les éleveurs occupés au gardiennage des troupeaux avaient souvent pour habitude de livrer un fromage frais, environ 2 jours après la mise en moule, soit pour une consommation immédiate, soit en vue d’un affinage domestique (achat par les familles de quelques traites au berger) réalisé par les femmes au même titre que les autres activités ménagères (fabrications du pain, etc.). Cette dernière pratique, aujourd’hui disparue, mettait donc l’affinage au rang des actes quotidiens de cuisine.

- Une autre pratique consistait à transformer hâtivement et grossièrement le lait en « pâte blanche » salée et de livrer à des affineurs, sur des cycles d’environ 3 semaines, un produit dont le sel était avantageusement mobilisé dans de très longs processus de maturation (exemple du Calenzana).

- Enfin, lorsque les lieux de traite étaient très éloignés des zones d’habitation, notamment durant la transhumance estivale, l’objectif des éleveurs était de stabiliser les protéines du lait en terrain hostile. Le fromage était fortement salé et affiné dans des caisses jusqu’à la redescente des estives à dos de mulets. Il était alors destiné à une consommation en « plat cuisiné », omelettes et beignets à l’automne.

A cette époque, la répartition des tâches entre les membres de la famille et tout au long de l’année permettait de garantir la sécurité alimentaire du foyer (Ravis-Giordani, 1983). La faible productivité du travail, le chevauchement temporel de certaines tâches ainsi que les problèmes liés à la conservation des produits favorisaient entraide, partage et transmission générationnelle des savoirs au sein des villages.

Au début du 20

ème

siècle, d’importants bouleversements furent amorcés. Le développement des échanges remis largement en cause la cohérence du fonctionnement agropastoral, favorisant la désorganisation du tissu social et une désertification de l’intérieur. Globalement, les productions se spécialisèrent et s’intensifièrent. Seul un

« pastoralisme oublié » se maintint dans les régions montagneuses abandonnées car considérées comme inexploitables pour d’autres productions (Hugot, 1996).

De ce déclin progressif, qui toucha de très nombreux secteurs agricoles, l’élevage ovin fut quelque peu épargné du fait de l’arrivée des entreprises de Roquefort à la fin du 19

ème

siècle ; un évènement qui amorça la différenciation entre les filières ovines et caprines.

I.2 Les industriels de Roquefort…et le divorce des espèces

En milieu méditerranéen, les petits ruminants ont la particularité de se dessaisonner

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de la brebis corse (supérieurs à ceux des Lacaunes au début du 20ème siècle), les laiteries de l’Aveyron s’implantèrent dans la région en 1893 pour fabriquer localement des formes affinées dans les caves de Roquefort.

Au départ, les éleveurs restèrent en systèmes de poly-élevage : alors que les brebis représentaient une valeur marchande (échanges fiduciaires), les chèvres servaient essentiellement au troc et aux paiements en nature (Bouche, 2000). Puis, peu à peu, les exploitations se spécialisèrent. Assurés d’un débouché, les éleveurs ovins se sédentarisèrent sur les meilleures terres des plaines du littoral. Déchargés du travail de la transformation fromagère, ils agrandirent leurs troupeaux et investirent dans des bâtiments et du matériel, aidé financièrement en cela par les industries laitières. Bénéficiant par ailleurs de l’appui des techniciens de l’entreprise (compétences exogènes), ils ont pu s’accoutumer progressivement au langage et à la démarche technique.

Toutefois, la collecte intégrale du lait de brebis sur une période de 70 ans provoqua une rupture dans la transmission des savoirs faire fromagers. La transformation fermière ovine se cantonna aux seuls mois d’été où les bergers, « isolés » dans la montagne, adoptèrent des stratégies visant à « stocker et stabiliser » la matière protéique. Aujourd’hui, les éleveurs ovins qui désirent renouer avec la tradition fromagère se retrouvent bien souvent démunis et tâtonnent dans une histoire percolée durant plus d’un siècle entre les pratiques de leurs ancêtres et celles importées par les industriels laitiers. Histoire dorénavant incisée par des « guides des bonnes pratiques fromagères » et leurs artefacts culturellement peu référencés (levains, inox, chambre froides, etc.).

Parallèlement, les chevriers se retrouvèrent relégués dans les zones les plus isolées de l’île. Devant s’adapter à cet isolement géographique et social, ainsi qu’à la lourdeur des tâches à accomplir souvent seul, ils développèrent la capacité de se suffire à eux même.

C’est ainsi qu’ils devinrent des « hommes filières », assumant seuls les activités de production, de gestion de l’espace, de transformation et de commercialisation de leurs produits. Si cette pratique intégrative rend les systèmes caprins robustes au niveau individuel, elle pose la question de la reproductibilité de ces systèmes dans un contexte où il n’y a plus de transmission orale de ces savoirs.

I.3 Les enjeux autour de la fabrication du fromage Corse

L’Histoire des espèces ovine et caprine et leurs trajectoires divergentes leur a donc

conféré une culture technique et des particularités propres (Bouche et al., 2004). Malgré

tout, elles sont confrontées à des enjeux communs autour d’une déprise alarmante des

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effectifs et d’une perte de savoir-faire, notamment au niveau de la transformation fromagère.

Dans les années 1920, alors que les fromages de la plupart des régions françaises étaient définis, les fromages corses, devenus quasiment marginaux, ne bénéficiaient d’aucune protection. A partir de la fin des « années 70 », lorsque les industriels de Roquefort ont amorcé un désengagement de la collecte de lait en Corse, de nouveaux transformateurs laitiers sont apparus. Suivant l’exemple de leurs prédécesseurs, ils développèrent leurs propres produits plus ou moins inspirés des fromages dits

« traditionnels ». Selon les termes utilisés par de Sainte Marie et Casabianca (1998), nous appellerons ces produits les fromages « dérivés », par opposition aux fromages « typés ».

Ainsi, différentes gammes de fromages coexistent actuellement sur l’île, qui utilisent la même image de « produit de terroir » et d’« ancrage territorial ».

Doté d’une très forte image culturelle, les fromages corses sont porteurs de multiples enjeux (économique, identitaire, etc.), et sont fragilisés par :

- Une sous-production qui engendre une dégradation tendancielle de la qualité gustative des fromages. En effet, lorsque les consommateurs achètent un produit mystifié, il est tentant pour les transformateurs de privilégier le rendement au détriment des caractéristiques organoleptiques. C’est ainsi que sous un même logo « fromages de Corse » peuvent cohabiter des fromages de grande qualité avec des « blocs de sel » immangeables.

- Un manque de lait qui s’accompagne d’un risque d’importation émanant de bassins excédentaires voisins (Aveyron, Sardaigne), risque d’autant plus important que le prix au producteur peut y être divisé par deux ou plus. Cette menace pousse certains producteurs à

« sur médiatiser » leurs produits au risque de fragiliser davantage des fromages non encore définis.

- Une production industrielle ciblée sur une consommation de masse.

- Une dilution des expertises et des connaissances.

Dans ce contexte, les chercheurs du Laboratoire de Recherche sur le

Développement de l’Elevage de Corte posent la problématique suivante : Existe-t-il des

savoir-faire fromagers spécifiques en Corse, susceptibles d’être identifiés et formalisés,

ceci afin de les protéger localement et de les transmettre aux générations futures?

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II. Une méthodologie appropriée

Dans le but d’identifier les savoir-faire fromagers en Corse, il s’agissait d’adopter une méthode de recueil permettant de prendre en compte le processus de transformation avec toutes ses composantes techniques, cognitives et relationnelles. Au préalable, il était nécessaire de définir le terme « savoir-faire », sujet de tant de controverses.

II.1 Quel sens donner au « savoir-faire »

Quel sens donner à un concept mobilisé par plusieurs disciplines, qui semble aujourd’hui érodé et banalisé par le grand public comme par les acteurs de la filière, qu’il s’agisse des producteurs, des technologues, ou encore des commerciaux chargés de la promotion des produits ?

Si, de façon générale, de nombreux auteurs s’accordent sur l’existence de plusieurs

« types » de savoirs, les définitions de « savoir-faire » sont multiples et ne semblent pas complètement stabilisées selon les disciplines. Deforge (1991) définit le savoir-faire comme la capacité de réussir une activité par un engagement personnel. Le savoir-faire, propre à un homme, s’opposerait en outre au savoir formalisé en ce qu’il ne pourrait être vendu, copié ou transféré. Deforge distingue également les « pratiques » (qu’il définit comme des savoir-faire mis en acte) des « processus » (qui seraient le résultat de la mise en œuvre d’un savoir formalisé). Il opère, de ce fait, une nette distinction entre la notion de savoir-faire et celle de savoir. Chevallier et Chiva (1991) rejoignent Deforge en soutenant que le savoir-faire constitue la part informelle de l’acte technique. Ils s’accordent également pour distinguer savoir formel et savoir informel. Cependant, pour Chevallier, le savoir-faire se définit comme « l’ensemble des compétences acquises, incorporées, transmises, qui se manifestent dans l’acte technique et qui supposent la mobilisation de nombreuses connaissances et représentations ». Selon lui, les savoir-faire sont

« perceptibles dans les attitudes physiques des individus comme dans leur capacité à juger, à prévoir et à maîtriser un processus technique. Par là, ils ne peuvent être réduits ni à un savoir ni à une technique ». Le savoir-faire serait donc aussi « voir en même temps devant et derrière », c’est-à-dire pouvoir se référer à une expérience passée tout en anticipant une situation future.

Ce petit parcours bibliographique montre que les auteurs s’accordent au moins sur

le fait que tout acte technique comporte la mobilisation d’un savoir-faire, fussent il aussi

banals que de savoir se nourrir ou de se déplacer. À l’instar de ces auteurs, nous posons

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donc l’observation de la technique comme indispensable à l’identification et à la formalisation des savoir-faire.

II.2 Comment recueillir et formaliser les savoir-faire ?

Au-delà de la compréhension de l’acte purement technique, notre intérêt pour cet objet « Savoir-faire » réside :

- D’une part dans l’articulation des systèmes technique, relationnel et cognitif développée par des éleveurs pour se maintenir dans un milieu complexe (élevage extensif).

Ces dimensions dépassent dès lors l’observation de l’activité individuelle, et nous conduisent dans nos recueils à englober systématiquement l’activité technique dans une observation plus large des mécanismes mis en oeuvre par les individus au sein des collectifs sociotechniques auxquels ils appartiennent.

- D’autre part dans le caractère non délocalisable qu’il comporte et qui en fait une ressource porteuse d’un potentiel pour l’avenir dans le cadre du Développement Durable, notion aujourd’hui si courtisée. Il conviendra de préciser la nature de ces savoir-faire en ayant conscience du paradoxe qui existe entre la nécessité de les encoder pour les rendre transmissibles aux générations futures (caractère transgénérationnel), et le fait que cet encodage augmente parallèlement le risque de contrefaçon et de détournement.

En mobilisant différentes méthodes d’extraction issues de l’ethnologie et de l’ergonomie, nous avons identifié plusieurs techniques présentant un intérêt pour appréhender au mieux les différents registres qui influent sur les savoir-faire :

Dans la mesure où l’activité était encore pratiquée et qu’elle pouvait être observée, nous avons privilégié la méthode de l’auto confrontation empruntée à la théorie du cours d’action (Theureau, 1992). Elle permet, après enregistrement vidéo de l’acte technique, de revenir avec un opérateur sur son activité.

Lorsque l’activité n’était plus directement observable (éleveur retraité, verbalisation d’une activité décalée dans le temps où l’espace), nous avons utilisé la méthode de l’entretien d’explicitation proposée par Vermersch (2004).

Dans les deux méthodes ci-dessus énoncées, des enregistrements sonores et vidéo nous

ont permis de faire des confrontations croisées du contenu des entretiens avec des experts

(ex : technologues fromagers, conseillers agricoles, etc.) ou des tiers (par exemple,

confrontations faites entre la situation pastorale des éleveurs corses et celle des éleveurs

sardes, proches sur de nombreux points).

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Nous avons utilisé les méthodes présentées ci-dessus dans le cadre d’un dispositif global sur l’ensemble du territoire insulaire, et nous avons rencontré des éleveurs ovins, caprins ainsi que des artisans et des industriels laitiers (Kuthan, 2005). Nos observations portaient sur l’ensemble de la chaîne productive, de l’élevage à la commercialisation en passant par la transformation fromagère, émoustillées par la récursivité sous-jacente du savoir-transmettre ces savoir-faire.

Afin d’associer les approches utilisées en ergonomie à nos observations plus spécifiques de la cognition située et socialement partagée (espaces, coordinations volontaires ou diffuses), nous développons actuellement une plateforme informatique (Voir Figure 1 : SapeVista – un outil de recueil des Savoir-faire (Guéniot ,2006)-) permettant le décryptage, la formalisation et la synchronisation des observations de l’activité technique, communicationnelle et cognitive. Nous y incluons la possibilité de matérialiser les coordinations, les positions et les déplacements des acteurs.

Figure 1 : SapeVista – un outil de recueil des Savoir-faire (Guéniot ,2006)

III. Quels savoir-faire fromagers en Corse ?

III.1 Premier regard …

Jusqu’à aujourd’hui, les différents processus de transformation du fromage corse

ont été essentiellement étudiés d’un point de vue technologique. Maintes fois caractérisés

(Prost, 1996. Casalta, 2001) ces processus scindés en grandes étapes (emprésurage, cassage

du caillé, mise en moule, etc.) ne semblent pas contenir de savoir-faire spécifique qui ne

puisse faire l’objet d’une imitation aisée. Aux dires de nombreux praticiens, mise à part la

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fabrication du Brocciu

1

« plus délicate », le processus de transformation du fromage serait donc d’un abord facile peu propice au développement de compétences particulières.

Certains avouent même « que tout est conçu dans cette tâche pour pouvoir se faire remplacer sans problème au cas où il faudrait partir derrière le troupeau ». S’il existe bien de grandes règles autour de la température au caillage, la quantité de sel ou la durée d’un égouttage à respecter, chacun possède sa propre « griffe » qui ne semble pas véritablement avoir d’impact sur le produit final. Le processus est souple, et les erreurs d’un novice semblent diluées et rattrapées par les phases suivantes de la transformation. Du point de vue de l’instrumentation, il n’existerait pas d’outils spécifiques à la fabrication de fromage corse autre que le Paghjolu

2

et les fattoghja

3

. Ceci serait une résultante de la traditionnelle double transhumance qui exigeait de « voyager léger » et de ne pas s’encombrer d’ustensiles.

Au premier abord, malgré une probable incidence du pâturage, de l’époque de fabrication, ou les locaux d’affinage (chambre froide, caisse en bois, hygrométrie naturelle ou artificielle, etc.) sur le produit fini, il semblait ne pas exister de savoir-faire spécifiques concernant l’acte de transformation de fromages corses. Cette dernière paraissait être reproductible par un novice en n’importe quel lieu sous réserve d’un court apprentissage. Mais dés lors, comment expliquer la grande variabilité gustative des fromages trouvés sur le marché, entre onctuosité et « carré de plâtre salé » ?

La diversité qualitative des fromages de corse, notamment fermiers, est telle que l’association locale de défense des producteurs fermiers fait de cette dernière un argument de vente majeur. Les consommateurs insulaires, pour la plupart, ont développé des stratégies d’approvisionnement directement chez les producteurs, sans doute autant liées à une proximité qu’à un attachement affectif ou identitaire dans un registre de convention domestique qui identifie plus le fabricant que son produit. Toutefois, la consommation de masse, réalisée essentiellement par le tourisme estival, s’approvisionne principalement sur les rayons de grande distribution où sont mêlés les produits fermiers et industriels de qualités variables. Cet acte de consommation unique et éphémère, où il est si simple d’être mécontent et de jaser sur une odeur étrange qualifiée de légendaire ou de maugréer sur un prix au demeurant élevé, ne semble pas être un feedback déterminant sur la qualité de la

1 Le brocciu est un fromage de lactosérum réalisé par chauffage du petit lait. Plus délicate à réussir que le fromage, cette pratique permet en autre de récupérer par floculation une grande quantité de matière protéique éliminée par « le cassage brusque » réservé au fromage. Nombreuses ont été les descriptions « d’un véritable savoir faire » nécessaire à cette fabrication. Celui-ci serait traditionnellement détenu par les hommes.

2 Paghjolu : chaudron en cuivre étamé

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production. Les artisans et industriels, soucieux d’approvisionner cette manne clientèle, s’efforcent de normaliser apparence et goût selon des critères de marketing type, typique et …. typé. Tous courtisent la référence au « terroir » et les images bucoliques où l’iconographie du berger barbu, fusil sur l’épaule, demeure un argument de vente prioritaire. Enfin, les foires rurales, supports supposés d’une « indéniable authenticité », étalent au bénéfice de sphères citoyennes parfois très éloignées de l’élevage une communication consensuelle qui risque de figer et de mystifier la ressource, et de la projeter dans une arène culturelle idéalisée, tel un musée identitaire, d’où seule la saillance iconographique demeure.

Finalement, il semblerait que les savoir-faire fromagers, s’ils existent, soient dissimulés et/ou altérés d’une part par leur sacralisation muséographique, et d’autre part par une caractérisation technologique et microbiologique qui ignore l’intention des praticiens. Deux écueils désanthropisants qui ne nous semblent pas moteurs dans une démarche de patrimonialisation.

Afin de revisiter les savoir-faire fromagers, nous proposons d’entrer par deux variables apparemment déterminantes dans la caractérisation de catégories d’acteurs susceptibles d’activer des compétences particulières dans un contexte social et productif spécifique : la connaissance de l’environnement naturel et celle de la matière première « lait ».

III.2 Catégorisation d’acteurs à partir des compétences « Matière » et

« Environnement »

Les entretiens nous ont permis d’identifier trois groupes d’acteurs que différencient leurs niveaux d’action sur la matière « lait » et de connaissance de l’environnement :

a) Des éleveurs « pasteurs » qui ont une bonne connaissance de la matière et de l’environnement naturel, mais qui ne présentent pas d’intentionnalité particulière dans leurs pratiques fromagères. Peu motivés par le défi technologique, ils sont focalisés sur leurs cheptels. Ils voient dans le lait, au-delà des variations quantitatives de production, un bon indicateur de l’état sanitaire et du stade physiologique du troupeau (« aujourd’hui le lait est trop gras, je vais devoir ajouter de l’eau, c’est qu’elles vont attaquer le tarissement… ») ou de la nature du pâturage (« ces tâches qui luisent comme de l’huile à la surface du bidon, c’est que les bêtes sont passées sous les oliviers »). La procédure

«corrective » mis en œuvre concerne la conduite des animaux et non le processus de

transformation. En effet, il ne fut jamais question de techniques de « rattrapage » des

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fromages « à olive » ou « à siroco

4

». En observant la matière et l’environnement complexe auquel ils s’adaptent, ces acteurs contournent les problèmes, par exemple en triant les produits selon différents débouchés.

b) Les laitiers et technologues ont une très bonne connaissance de la matière, sur laquelle ils seraient capables d’agir avec une intention sur le goût du produit final. Cependant, aux heures où seule la productivité compte au détriment du goût, ces acteurs formés en écoles de laiterie semblent motivés par un « défi technologique » sur lequel ils aiguisent un savoir-faire du rendement, associer des laits, etc. Cela s’accompagne parfois de « tours de main » reconnus au sein de la corporation. Cette catégorie d’acteurs connaît peu l’environnement naturel et préfèrent diminuer les effets du milieu via la pasteurisation, l’introduction de levains lactiques dans le processus, l’utilisation des saumures et de chambres froides, etc.

c) Enfin, la dernière catégorie observée est constituée d’éleveurs récemment impliqués dans la transformation fromagère ou d’associés spécialisés dans cette fonction (souvent les femmes d’éleveur). Ces nouveaux fromagers semblent n’avoir aucune connaissance approfondie ni de la matière, ni de l’environnement. La crainte des contrôleurs sanitaire et d’un environnement incertain les incite à la normalisation du processus via de nouveaux artefacts, proches de ceux rencontrés chez les laitiers mais à la mesure de leurs capacités d’investissement (chambres froides, etc.). La maîtrise de la matière et du processus technologique est généralement déléguée au conseiller technique qui bien souvent projette les produits dans un univers banalisé ou en décalage avec le contexte culturel. Ici, il est difficile d’identifier un savoir-faire insulaire particulier dans la mesure où les connaissances sont principalement puisées dans les ouvrages de conseil en laiterie. Enfin, fortement préoccupés par le produit et son image, les innovations relèvent d’une logique de mimétisme cognitif des processus industriels (impact visuel, différentiation sur l’étalage, gammes de produits, innovations technologiques, etc.).

D’après cette description, nous observons que les rapports à la matière et à l’environnement sont très variables selon les catégories d’acteurs. Les uns – laitiers et nouveaux fromagers– se concentrent sur la matière avec une approche qu’ils veulent technique et technologique. Ils préfèrent gommer les incertitudes du milieu en créant un environnement d’autant plus artificialisé qu’ils ont une faible capacité à l’appréhender.

4 Le siroco est un vent de sud-est, très chaud, qui souffle sur la moitié orientale de la Corse où il amène la

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Les autres –les pasteurs– se concentrent davantage sur le troupeau qu’ils conduisent dans un environnement extensif en développant des capacités d’anticipation. La matière première « lait » n’est ici qu’une résultante sur laquelle ils se concentrent finalement peu.

Leurs pratiques fromagères peuvent être qualifiées de « brusques » par certains technologues qui critiquent un manque d’attention nuisible au rendement. Nous retrouvons ici les éléments d’une identité fondamentale de la théorie de la communication (Wagensberg, 1997) qui s’énonce de la manière suivante: « La complexité d’un système, moins sa capacité d’anticipation vis-à-vis de son milieu, est égale à l’incertitude du milieu moins sa sensibilité vis-à-vis du système ». Ainsi, si l’incertitude du milieu augmente, pour obéir à l’identité fondamentale et se maintenir, le système – cas des pasteurs – doit jouer sur une augmentation de sa complexité et de sa capacité d’anticipation, et sur une diminution de son effet sur le milieu. Au contraire, les systèmes plus intensifs – cas des laitiers et nouveaux fromagers – sécurisent et nivellent en augmentant les niveaux des intrants (alimentions apportée, température régulée …). Nous pouvons ainsi envisager que les savoirs spécifiques résident en fait dans la capacité des pasteurs à prévoir et à réagir par anticipation dans un environnement complexe.

L’acteur développe des compétences différentes selon qu’il se préoccupe du lait ou de l’animal. Il convient à présent, entre matière inerte et matière vivante, d’explorer les enjeux et les savoir-faire liés à ces objets.

III.3 Entre animal et lait : des objets de préoccupation aux enjeux différents Qu’il s’agisse de l’animal ou de la matière première, l’objet physique dont l’acteur est principalement préoccupé joue un rôle fondamental dans la construction de ses savoir- faire. Si dans tous les cas ces objets exigent des techniques adaptées, les capacités mobilisées et les compétences développées demeurent fondamentalement différentes.

III.3.1 L’objet et sa complexité

Alors que le lait, matière aussi évolutive soit-elle, semble pouvoir être maîtrisé par

des interventions technologiques (chauffage, levain, chambre froide), les systèmes

d’élevage pastoraux sont caractérisés en Corse par l’existence de liens étroits entre

l’homme, les animaux et le territoire, ce qui rend difficile toute intervention et toute

innovation technique.

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En effet, l’éleveur ovin ou caprin qui conduit son troupeau en système extensif doit faire face à des aléas de différentes natures (météorologie, prédation, etc.). A la différence d’une matière première relativement malléable, l’animal, regroupé dans une entité régulatrice -le troupeau- et conduit sur de grands espaces sans recours à des intrants, constitue un objet complexe. Ce dernier impose à l’éleveur de développer des capacités, notamment d’anticipation, mais encore des aptitudes et des pratiques lui permettant de gérer l’incertitude du milieu en misant sur la souplesse (Bordeaux, 2004).

III.3.2 Quand l’objet devient mémoire…

En tant qu’objet, la matière « lait », inerte dés lors qu’elle est neutralisée

5

, n’est pas porteuse du même sens que l’animal, matière vivante capable de mémoriser la pratique des hommes. En effet, par le biais de la sélection, la pratique s’inscrit dans les gênes qui se transmettent de génération en génération. Dés lors, l’animal n’est plus simplement support de production, mais il devient aussi support d’une mémoire collective. Selon Laborit (1987) : « Il n’y a pas de meilleure mémoire des époques révolues que la matière vivante, si plastique, qui modèle ses formes, ses mécanismes et son comportement, assure sa survie pour tout dire, en s’adaptant au milieu et à ses variations.... Le temps qui passe et qui transforme la matière inerte qui l’oublie, laisse sa trace dans la matière vivante qui se souvient. »

Génotype et phénotype sont autant le résultat du hasard méiotique que des aléas du milieu et de la gestion des hommes. A travers les couleurs de robe et les patrons qui permettent de différencier facilement un animal au sein du troupeau et de tracer les filiations, à travers les aptitudes développées par ces animaux rustiques au fil des siècles en lien avec le milieu auquel ils se sont adaptés (régularité et longévité des performances, grégarité, instinct maternel, etc.), il est possible de comprendre les qualités recherchées par les anciens dans un contextes où cela les faisait vivre. Mais parallèlement, c’est avec cet héritage que les bergers devaient sans cesse s’adapter et adapter leurs pratiques. Dans tout son paradoxe, la question de l’évolution surgit ici : qui de la chèvre ou du berger a façonné l’autre dans ce milieu contraint et contraignant ?

Tout ceci nous ramène à une expression de Laborit: « Lorsque l’ontogenèse

reproduit la phylogenèse… où se reproduit en quelques heures, jours ou semaines, la

longue histoire de la vie étalée sur des milliers d’années, grâce au stockage des

innombrables informations accumulées par la matière vivante au cours des âges de notre

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terre et fixées pour un temps dans l’arrangement spatial de l’énergie dans un acide désoxyribonucléique ».

III.3.3 Systèmes relationnels et cognitifs

Les différentes catégories d’acteurs sont marquées par des systèmes relationnels et cognitifs propres.

- Cognition et relations chez les laitiers et nouveaux fromagers

Chez les laitiers et conseillers fromagers, si quelques individus « marginaux » peuvent être connectés à l’univers pastoral, nous observons principalement l’existence de réseaux corporatistes entre les professeurs des écoles de laiterie et leurs anciens élèves. Au sein de ces réseaux, les acteurs ont des contacts fréquents avec certaines personnes ressources qu’ils reconnaissent pour une compétence précise.

Les nouveaux fromagers semblent plus isolés. Certains sont intégrés dans des réseaux associatifs qui les fédèrent sur les thèmes de l’identité et de la protection de leurs produits plus que sur des échanges de compétences. Mais la plupart ont pour principal interlocuteur leur conseiller fromager, ce qui modifie radicalement système technique et système de croyance des éleveurs, et qui risque de banaliser la ressource en altérant l’originalité et la typicité du produit.

Ces deux catégories ne semblent pas devoir mobiliser ni développer un système cognitif particulier. Dans un cas comme dans l’autre, l’objectif est de maîtriser les effets du milieu en usant de nouvelles technologies telle que la pasteurisation, les levains, les chambres froides, et différents ustensiles aidant au contrôle du processus (thermomètre, ventilateur, Ph-mètre, etc.). Cela les dédouane des encombrements cognitifs provoqués par les aguets pastoraux permettant d’anticiper les variations de l’écosystème.

Finalement, il semble que ce soit dans le système pastoral que l’on identifie les

systèmes relationnels et cognitifs les plus spécifiques, nécessitant le développement

d’aptitudes particulières. En effet, l’élevage extensif a exigé la construction de pratiques

particulières telles que le déplacement des cheptels en fonction de la disponibilité

fourragère. Cela s’est accompagné de mécanismes de mémorisation, de pilotage et d’une

organisation individuelle et réticulaire spécifique difficile à appréhender. C’est au sein de

ce groupe, que sont présents les savoir-faire « collectifs » susceptibles de donner le plus

d’originalité et de typicité aux fromages, alors même que ces acteurs s’en préoccupent le

moins.

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- Une cognition particulière en système pastoral

La conduite des animaux, souvent réparties en plusieurs troupeaux (traites, improductives, mâles), sur de grands espaces a conduit les éleveurs à développer des mécanismes abductifs

6

et des connaissances tacites

7

favorisant le pilotage « à distance ».

Jumelles et véhicule tout terrain leur permettent des interventions ponctuelles à des moments clés de la journée. Ce pilotage nécessite d’une part que le troupeau possède des qualités intrinsèques (grégarité, existence de meneuses dociles, etc.) et qu’il soit repérable à distance par le berger (diversité des couleurs), qualités qui sont crées et maintenues par l’éleveur à travers une pratique spécifique de sélection. Cela nécessite d’autre part une grande connaissance du comportement des animaux, afin de pouvoir anticiper leurs réactions face à des aléas de différente nature et de réagir de manière opportune à ces situations (Bouche, 2000).

C’est ainsi que l’éleveur « pasteur », dans son environnement contraignant et extensif, a la particularité de très bien connaître son troupeau : chaque femelle a son nom, ses caractéristiques phénotypiques (robe, patron, forme des cornes, présence ou non de pampilles, longueur de poils, etc.), et peut se voir attribuer une fonction particulière (la meneuse, celle qui déclenche les chaleurs, mère à boucs, celle qui fait facilement des adoptions, etc.). Le travail de mémorisation et d’anticipation que doit faire l’éleveur est donc fondamental pour une bonne maîtrise du système dans sa globalité (gestion des lignées, maintien d’un troupeau entier et grégaire, élimination des chèvres perturbatrices et choix des cabris à élever). Il se fait souvent de façon automatique, que ce soit au moment des mises bas lorsque le chevrier doit mener un à un les cabris sous leur mère ; au moment de la traite qui, manuelle, favorise la création d’un lien fort entre l’éleveur et chacune de ses femelles; ou encore au moment du suivi des bêtes sur parcours lorsque l’éleveur en profite pour observer les familles et les comportements de chaque femelle (celles qui sont les plus isolées du troupeau, celles qui guident ou qui désolidarisent le groupe, etc.).

Cette connaissance approfondie, nécessaire pour maîtriser le troupeau tout en y maintenant une cohérence, doit sans cesse être renouvelée, ce qui peut contribuer à une spécialisation cognitive de l’éleveur peu propice aux innovations. Toutefois, c’est dans cette connaissance des animaux, dans les capacités à mémoriser, anticiper, piloter un

6 Mécanismes abductifs : capacité mise en œuvre par un individu à privilégier spontanément un scénario par rapport à la multitude des autres scénarios existants.

7 Les connaissances tacites sont étroitement liées à l’expérience de ceux qui les détiennent. « Il peut s’agir d’un art ou d’un talent particulier des individus mais aussi d’une intériorisation de connaissances explicites passées (savoir) qui sont devenues progressivement inconscientes au fur et à mesure de leur assimilation et

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troupeau à distance sur un vaste territoire, que semblent apparaître des compétences et un savoir-faire particuliers que nous nommerons le Savoir Elever.

- Systèmes d’informations pastoraux: Indissociable lien avec société et culture Si les éleveurs « pasteurs » sont les acteurs essentiels du pilotage de leurs troupeaux, nous constatons qu’ils peuvent être aidés par un ensemble d’acteurs mobilisés, de façon souvent inconsciente, dans la transmission d’informations informelles. Par le passé, l’élevage extensif s’appuyait sur un pilotage distribué, entraide presque

« instinctive » mais indispensable, que nous proposons de nommer écholocation

8

pastorale (Bouche et Hugot, 1999). A l’aide d’un codage spécifique (marques aux oreilles, couleur des animaux, etc.) et une connaissance approfondie de la toponymie du territoire, l’éleveur pouvait par le biais de relais d’information retrouver un animal égaré ou connaître l’état d’une pâture distante. Cet usage écholocatif du territoire existe encore aujourd’hui. Nous avons noté le fait que la technologie, notamment le téléphone portable, se substitue désormais au média écholocatif, c’est-à-dire à la présence d’agents sur l’espace pastoral

9

et susceptibles de véhiculer l’information.

L’écholocation repose donc sur l’existence d’un réseau conscient ou non permettant aux différents usagers de l’espace de s’y situer. Cela nécessite le développement d’un vocabulaire partagé très précis concernant les animaux et l’environnement: lexique permettant de décrire de façon précise des robes et des patrons, connaissance collective du segnu

10

, etc.

Piloter un troupeau en système extensif exige donc de savoir se connecter aux réseaux pastoraux et de capturer l’information utile, ce qui nécessite la mise en œuvre de mécanismes d’écoute particuliers (susceptibles parfois de provoquer une saturation cognitive). Cela exige en outre de savoir émettre en retour une information utile, indispensable à l’entretien et à l’équilibre du système.

Salembier et Pavard en 2004 analyse dans les situations de travail coopératif, l’importance du partage de l’information comme non seulement nécessaire à la réalisation de la tâche mais aussi à la construction et au maintien de la fiabilité des systèmes et dans lesquels la possibilité de suivi de l’activité de l’autre par le partage d’informations peut être

8 par analogie au système de pilotage des chauves souris.

9 A l’ancien « tragulinu » commerçant ambulant de fermes en fermes s’est aujourd’hui substitué le conseiller agricole ou le vétérinaire.

10 Segnu : marque d’oreille distinctive et spécifique à chaque propriétaire, et dont tous les membres d’une

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considéré comme un mécanisme de « contrôle » ou de régulation de sa propre activité, permettant non seulement de déceler des erreurs et de les corriger a posteriori (régulations fonctionnelles par feedback négatif), mais aussi de les « anticiper » en maintenant le système viable (régulation structurelle par feedback positif).

Néanmoins, dans le système insulaire que nous observons ici, nous constatons que si l’information partagée est vitale pour la viabilité individuelle, et intrinsèquement nécessaire à l’existence du collectif, aucun principe coopératif n’est « clairement » établi par quiconque. La dimension culturelle semble s’immiscer ici au-delà d’une dimension sociotechnique ou corporatiste.

Les pratiques qui relèvent de la communication implicite et du rituel sont rarement formalisées et ne sont, dans tous les cas, pas enseignées aux personnels techniques chargés du conseil auprès des éleveurs. Dès lors la communication entre ces deux univers que sont l’univers pastoral et l’univers technique s’effectue sur des modes déviants qui neutralisent et condamnent à terme l’existence et l’efficacité de chacun d’entre eux. Il semble donc que l’extrême robustesse des systèmes pastoraux, ancrés dans la culture, demeure peu compatible avec les notions de « développement » et de « progrès » véhiculées par le corps technique (augmentation de la productivité).

Le monde pastoral intègre une conception particulière de l’espace et du temps qui combine des rythmes et des cycles relevant de champs différents de l’activité humaine.

C’est un monde d’harmonie lié aux rythmes propres à l’environnement. La régulation des activités dépend d’un extraordinaire ensemble de mécanismes cognitifs conscients et inconscients où temps profane et temps sacré s’ajustent subtilement au cours du déroulement des occupations quotidiennes, toujours répétitives car formatées par une matrice culturelle fortement imprégnés par le mythe. La pratique pastorale ne semble viable que dans une société qui, à défaut d’être pastorale (il n’en reste plus guère), en accepte la polychronie (Hall, 1992), la complexité et l’incertitude. La culture n’y comporte pas seulement une dimension cognitive: « c’est une machine cognitive dont la praxis est cognitive » (Morin ,1991).

Si le partage des tâches entre les sexes avec d’un côté les hommes orbitalisés par

l’élevage du bétail sur des espaces ouverts et de l’autres leurs compagnes cloisonnées et

urbanisées n’est plus une évidence, les systèmes culturels socialement construits sur cette

distinction semblent encore marquer de façon particulière le rapport aux savoir-faire et

notamment aux mécanismes d’échanges qui les véhiculent. Sans accointance particulière

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avec un déterminisme des genres, nous avons pu maintes fois remarquer que des femmes éleveurs « nantis du don avec les bêtes », avec une parfaite connaissance de leurs animaux et de leurs parcours, ne développaient pas malgré tout les mêmes stratégies que leurs compagnons pour s’informer. Inversement, dans des échanges masculins d’informations, nous avons remarqué qu’il demeurait souvent des réflexes de « pilotages pastoraux » chez des individus n’exerçant pas ce métier mais culturellement très proches, notamment dans des pratiques de chasse collective. Enfin, nous avons observé que les hommes peu connectés au système culturel se retrouvent souvent démunis dans leurs efforts de pilotages en extensifs, privilégiant alors un repli sur des systèmes sécurisés par la technique.

Ces observations prennent un sens particulier dès lors où nous devons imaginer un devenir pour ces savoir-faire spécifiques liés à la culture pastorale. Ont-ils un avenir qui ne passerait par le long et dur apprentissage de l’éleveur suivant son troupeau durant toute la journée ? Si nous n’avons pas les moyens d’un pronostique sur cette question, il nous semble malgré tout qu’une très forte immersion dans le système culturel puisse faciliter grandement l’accès à cette connaissance.

IV. Savoir-faire Collectifs Localisés, un tout supérieur à la somme de 4 parties

Au-delà de ses expressions purement techniques, le concept de savoir-faire est rattaché à des exigences d’anticipation, de communication et de coordination qui l’inscrivent dans la dimension de l’action collective. Même si cette dernière n’est pas ici le produit d’une démarche volontaire et bien qu’elle ne relève pas d’une démarche corporatiste, sa localisation comme son objet commun « fromage corse » lui en confère les propriétés. Dans un système agroalimentaire localisé, la présence de savoir-faire spécifiques constitue une ressource patrimonialisable (Linck, 2006) : les savoir-faire observés au niveau des individus constituent des construits collectifs associés à des exigences de transmission intra et inter générationnelles (coopération, apprentissage) au sein de systèmes sociotechniques. Dans cette perspective, il convient de parler de Savoir- faire Collectif Localisé (SFCL) pour sérier dans une même conceptualisation :

les compétences « phénotypiques » particulières et mises à l’épreuve incluses dans ces

savoir-faire (savoir anticiper, se mettre en relation, etc.).

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les attributs « génétiques » qui les rendent reproductibles localement d’une génération à l’autre, mais non généralisables dans des dimensions ubiquistes qui en banaliseraient l’usage au détriment d’une rente basée sur l’originalité.

Ici fortement construit par et sur le pastoralisme et l’insularité, il nous semble intéressant de concevoir et de représenter ce SFCL au coeur d’un processus de différentiation complexe multidimensionnel où interfèrent des phénomènes organisationnels (événements, éliminations, sélections, intégrations, migrations, mutations, échecs, succès, désastres, innovations, désorganisation / réorganisations), tel un processus néo darwinien de l’évolution à l’instar d’un processus d’hominisation (Morin, 1973) entre des dimensions individuelle-collective, naturelle-artificielle, et physique biotechnique cognitive.

Dans ce processus systémique, nous proposons d’analyser le SFCL comme un nœud computationnel entre 4 sous systèmes (Figure 2 : Le Savoir-faire Collectif Localisé au centre d’un processus complexe) dont la prégnance et la qualité des interactions seront déterminantes pour sa spécificité et son potentiel de patrimonialisation.

Eco-système Société-culture

Sys Génétique Sys cognitif

SFCL

Complexification

cognitive Niveaux d’organisation

Figure 2 : Le Savoir-faire Collectif Localisé au centre d’un processus complexe

En posant l’accroissement des niveaux d’organisation entre d’une part des phénomènes physiques ( - du codage génétique à l’écosystème) et d’autre part la dimension cognitive ( - du système cognitif individuel à l’organisation sociale), les SFCL sont ainsi dépendants et acteurs :

- des spécificités du milieu naturel dans le produit.

- de la prégnance d’un système génétique à la fois productif et mémoire.

(22)

- d’un système cognitif spécifiquement dédié à la compréhension, à la mémorisation, et à la communication envers les autres systèmes.

- de l’environnement social et culturel à la fois vecteur dans la distribution et la transmission mais aussi moteur des évolutions et des innovations. C’est dans cet environnement culturel que s’effectuerait « l’épidémiologie des représentations » (Sperber, 1996).

Ainsi, dans notre approche sur une « ressource » non délocalisable que peuvent représenter des savoir-faire spécifiques, les relations qui s’opèrent par l’intermédiaire d’un système technique humain deviennent primordiale. En reprenant, selon cette grille, nos catégories de praticiens :

• Les « nouveaux fromagers » en rupture avec l’écosystème naturel, que se soit vis à vis du troupeau ou de la matière première avec un recours systématique à des ressources et des savoirs formalisés exogènes (connaissances explicites), n’ont plus de liens avec un système physique ou cognitif particulier. L’ancrage local devient dès lors substituable même si l’avidité de ce groupe à être reconnu dans le dispositif socio-économique local peut conduire à intégrer les artifcilialisations comme la nouvelle norme en vigueur, via sa contribution à l’inscription dans les cahiers des charges sensés protéger le produit.

• Les pastoraux, complètement immergés dans la spécificité de leurs savoir-faire, sont particulièrement intéressant pour analyser les interdépendances entre les 4 sous systèmes proposés. Mais la question se pose alors en terme de reproductibilité tant les charges cognitives de tels systèmes, de même que leur acceptation sociale, semblent en compromettre l’avenir.

Les laitiers nous semblent contenir deux groupes différenciables :

• Le premier rassemble de nombreux artisans et industriels, notamment ceux qui emploient dans leurs fabrications des cadres, souvent non insulaires, formés et formatés par la même ubiquité technique qui de fait, malgré une grande connaissance de la matière première, les exclu d’un SFCL.

• Le second groupe semble se constituer d’artisans et d’industriels soucieux de la

dimension locale et identitaire, et tente de se démarquer des technologies trop

ubiquistes et normalisatrices. On trouve dans ce groupe, encore faiblement représenté,

des laiteries dont les gérants demeurent très impliqués dans une clique culturelle, que

ce soit via leur implication directe d’un point de vue familiale, via la fréquentation de

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leurs apporteurs, ou encore celle des battues de chasse. A ces praticiens, plus connectés culturellement (linguistiques, …) que directement intégrés dans la corporation technique des écoles de laiterie, s’ajoute quelques éleveurs à fort litrage (ou ex éleveurs qui abandonnent le cheptel au profit de la transformation). Tous n’ont pas (ou plus) directement en charge le suivi de troupeau sur le parcours mais sont imprégnés des dimensions culturelles et cognitives des pastoraux. Cette « reconnexion » à l’écosystème par le biais de spécificités culturelles ou cognitives laisse poindre de nouvelles stratégies visant à prendre en compte les particularités du lait dans les fabrications via la nature des espèces pâturées ou le stade physiologique des troupeaux.

Certains nous confient volontiers leurs pratiques expérimentales spécifiques dans l’élaboration de « cuves » et de gammes fromagères distinctives :

o cuves emprésurées à la caillette du cabri.

o émanant de traites d’animaux ayant pâturés une espèce particulièrement intéressante pour le goût du fromage.

o réensemencement par des levains élaborés à partir de ces laits particuliers.

«Aujourd’hui, je programme mes machines selon les variations des pâturages et les saisons comme ils me l’ont appris les vieux ».

Ces nouvelles fabrications « connectées », nécessairement à base de lait cru, posent un certains nombre de contraintes tant du point de vue sanitaire (risques concernant le lait cru et le traitement de gros volumes) que du point de vue logistique (tri de différentes cuves, etc.). Par ailleurs, dés lors où ces laitiers recherchent des laits aux caractéristiques particulières, se pose la question de la formalisation de leurs pratiques fromagères et de leurs attentes dans un contexte de négociation avec leurs apporteurs et de construction de cahiers des charges adaptés. C’est bien dans ce contexte d’échange que se pose une réelle question autour des SFCL.

Conclusion

Ce parcours sur les savoir-faire fromagers laisse perplexe quant à la réalité actuelle

de la présence de savoir-faire spécifiques pour la fabrication de fromages corses. En effet,

plus que dans l’acte de transformation, les compétences particulières seraient de toute

évidence développées autour d’un « savoir élever » en milieu extensif. La dilution

d’opérations nous permet de repérer deux orientations professionnelles distinctes : D’un

côté les artisans et petits industriels (transformateurs), et de l’autre les éleveurs

(24)

production, de la transformation et de la commercialisation du fromage à la ferme entraîne de nombreux fermiers à adopter pour sécuriser leur fabrication des techniques ubiquistes abandonnant par la même des savoir-faire locaux spécifiques à l’élevage pastoral et à la connaissance de l’environnement naturelle. Cette « dépastoralisation », inéluctable sans doute d’un point de vue de la charge de travail et d’un point de vue économique, risque à terme de compromettre gravement la typicité du produit tant sa banalisation et délocalisation deviennent possible. Si l’on peut d’ores et déjà regretter la faible utilisation de ces savoirs pastoraux dans la conception du fromage, une lueur d’espoir semble poindre au niveau des artisans fromagers qui disposent encore de certaines clés culturelles (origine des laits, arômes spécifiques, etc.) leur permettant de dépasser les niveleuses technologiques soucieuses de la santé et du marché mais peu respectueuses du patrimoine.

Si nous observons de potentiels enjeux autour des SFCL et de la production de cahiers des charges dans la relation apporteurs/transformateurs, comment intégrer dés lors, pour une conception harmonieuse et durable du SYAL, des systèmes enkystés dans un processus « homme filière » ou de mis en dépendance de technologies exogènes ?

Cette étude nous permet par ailleurs de nous confronter aux questions méthodologiques du recueil et de la formalisation des savoir-faire. Elle nous conduit à nous interroger sur la nature même d’un savoir-faire non délocalisable et à son imbrication au cœur des interactions entre 4 sous systèmes (génétique, écosystème, culturel et cognitif).

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Références

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