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c) valoriser le mieux possible le travail, facteur rare de la production, et sans recours aux intrants

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LA CULTURE PIONNIERE DU MAÏS SURABATTIS-BRULIS (HATSAKY) DANS LE SUD-OUEST DE MADAGASCAR.

1.CONDUITE DES SYSTEMES DE CULTURE Pierre MILLEVILLE1et Chantal BLANC-PAMARD2

1.IRD, BP. 434 - 101 Antananarivo;

2.CNRS, CENEHESS, 54 Bd Raspail, 75006, Paris, France

Résumé:

Localement dénomméhatsaky,la culture du maïs sur abattis-brûlis, dans cette région à courte saison des pluies, obéit aux mêmes principes que le tavydes zones humides de Madagascar : a) tirer parti des éléments minéraux libérés par le brûlis de la biomasse forestière; b) profiter d'une quasi absence d'adventices en début de mise en culture, l'enherbement augmentant par la suite; c) valoriser le mieux possible le travail, facteur rare de la production, et sans recours aux intrants ; d) cultiver la même parcelle durant plusieurs années jusqu'à ce que l'enherbement, la dégradation des paramètres édaphiques et la baisse des rendements ne poussent l'agriculteuràl'abandonner au profit d'une nou- velle défriche. Mais lehatsakyne constitue pas un système de culture durable: un couvert forestier ne se reconstitue pas après abandon, tandis que les plantes herbacées se main- tiennent. La réduction des espaces forestiers disponibles rend nécessaire une adaptation des systèmes de culture, avec remise en culture des friches et allongement des phases culturales, qui implique des innovations techniques encore mal maîtrisées par les agri- culteurs.

Mots-clés: Madagascar - déforestation - abattis-brûlis - maïs - adventices

Abstract:

Locally calledhatsaky,the maize croping system on slash and bum in this region with a short rainy season, follows the same principles as thetavyin the humid and wet areas of Madagascar: a)CO make the best possible use of the minerai e1ements released from the buming of the forest biomass ; b)COtake advantage of the nearly total absence of weeds before putting the land under crop, thus increasing grass growth ; c) co give importance as best as possible COlabour, a rare factor of production and without any recourse co inputs; d) COcultivate the same plot for several years till grass growth, the depletion of edaphic parameters and the decrease of production force the farmer to give it up for the a newly cleared plot of land. But the hatsakydoes not constitute a sustainable cropping system: a forest cover can't be rescored after fal1ow, whereas herbaceous plants remain.

The reduction of available forest areas requires an adaptation of cropping systems with a repeated use for cultivation of the land left fallow, with an extension of the cultivation periods which implies technical innovations that are stilliIIknown and inappropriately mastered by the farmers.

Keywords : Madagascar - deforestation - slash-and-burn - maize - weed species

Sociétés paysannes, transitions agraires et dynamiques écologiques dons le sud-ouest de Madagascar S. Razanaka, M. Grouzis, P. Mill<vilk B. Moizo,C.Aubry, CNREIIRD, Antananarivo, 2001,pp243 - 254

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P. Millevilk, C Blanc-Pamard

INTRODUCTION

L'agriculture du sud-ouest de Madagascar recouvre des réalités très diverses. On en distinguera schématiquement quatre types principaux: (a) la riziculture irriguée, localisée en bordure de fleuves et de rivières, ou dans des plaines et des bas-fonds aménagés; (b) la polyculture semi-intensive des terres dites debaiboho, d'origine alluviale, lieu de culture privilégié du pois du Cap par le passé, et zone d'extension plus récente de la culture cotonnière; (c) la culture pluviale extensive des terres sableuses de savane; (d) la culture sur abattis-brûlis pratiquée aux dépens de la forêt sèche. Il semble bien que la mise en valeur agricole ait d'abord concerné prioritairement les deux premières zones, en raison de leurs apti- tudes culturales, pour s'étendre ensuite progressivement aux espaces périphériques (Rollin, 1996). Entre Manombo et Befandriana, àl'est de la forêt des Mikea, Dandoy constatait en 1972 que<d'agriculture n'occupe que des secteurs limités correspondant aux meilleurs sols et aux surfaces irrigables>'. Il est manifeste que ces terres à bonne valeur agricole sont à présent saturées, et que les surfaces cultivées ne peuvent dès lors s'étendre qu'en gagnant sur les terres de forêt sèche et de savane.

En conditions pionnières, le maïs constitue de loin la principale culture pluviale du sud- ouest de Madagascar (Réau, 1996). Le contexte économique actuel lui est particulièrement favorable, compte tenu des débouchés qui lui sont assurés dans l'océan indien(à la Réunion principalement) et de la demande nationale. Les agriculteurs savent qu'ils peuvent, s'ils le souhaitent, commercialiser sur place tout ou partie de leur production (Ampalahy et al., 1994 ; Escande, 1995 ; Fauroux, 1999). Le maïs, qui était par Je passé une culture essentiellement vivrière (Dandoy, en 1972, estimeà22% la part de la production de maïs vendue), est devenue l'une des principales cultures commerciales de la région, induisant des comportements de type spéculatif, l'émergence de gros producteurs et le recours très répandu au salariat agricole. L'extension considérable des défrichements qui en résulte affecte grave- ment plusieurs massifs forestiers. Ce phénomène de grande ampleur occupe aujourd'hui une place de premier plan dans les dynamiques agraires et environnementales de la région.

Les travaux de recherche entrepris par le programme GEREM sur les systèmes de culture sur abattis-brûlis(hatsaky) concernent deux sites caractéristiques de la dynamique de déforestation de la région du sud-ouest: la partie orientale de la forêt des Mikea d'une part, le plateau calcaire de Belomotra situé entre les vallées du Fieherenana et de l'Onilahy d'autre part. Dans ces deux zones, la culture du maïs s'étend d'une manière spectaculaire aux dépens des espaces forestiers. Dans la suite du texte, ces deux sites seront souvent désignés par les noms de deux villages: Analabo (forêt des Mikea) et Antsapana (plateau calcaire de Belo- motra).

DEUX SITUATIONS PEDO-CLIMATIQUES CONTRASTEES

Dans la région du sud-ouest de Madagascar, les précipitations se répartissent en une seule saison de courte durée (4 mois environ). Les premières pluies utiles surviennent générale- ment en novembre, et les dernières dans le courant du mois de mars. La période la plus arrosée se situe entre le 15 décembre et le 15 février, alors que les pluies de début et de fin de saison sont fortement erratiques.

Les sols ferrugineux tropicaux qualifiés de «sables roux» (Sourdat, 1977) occupent une place de choix dans le sud-ouest malgache, et prédominent largement dans la forêr des

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Systèmesdeculture sur abattis-brûlis dansleSud-ouest malgache

Mikea et sa bordure orientale. Ces sols de texture grossière, au profil indifférencié sur plusieurs mètres au-delà de t'horizon de surface, sont pauvres en matière organique et en azote. La pluviométrie moyenne, de l'ordre de 800 mm au niveau du village d'Ampasikibo, sur la RN9, décroît rapidement vers l'ouest, pour n'atteindre que 400 mm environ sur la côte, distante de 35 kilomètres. Le long de ce transect, plusieurs types de sols peuvent être distingués, correspondant à des remaniements éoliens successifs (de 5 000 à 40 000 ans B.P. et plus) d'un matériau ancien sablo-argileux (Leprun, 1998). La pédogénèse y est d'autant plus évoluée que la reprise éolienne est ancienne: à des sables blancs-beiges puis roux clairs localisés près de la côte et dans la partie ouest de la forêt de type bush, succèdent plus à l'est des sables roux (5 à 10% d'argile) puis roux-rouges (10 à 15%

d'argile), sur lesquels s'étendent les défrichements pratiqués aux dépens de la forêt sèche, enfin des sables rouges (plus de 15% d'argile), sur lesquels dominent des savanes boisées, affectées depuis longtemps au pastoralisme, mais qui font également l'objet de mises en culture depuis quelques années. Plus à l'est encore, la vaste étendue dépressionnaire aux sols d'origine alluviale, connue sous le nom de«couloir d'Antseva<l,constitue la zone la plus anciennement et intensivement cultivée. La culture cotonnière y a supplanté celle du pois du Cap, et s'y est spectaculairement étendue au cours des vingt dernières années.

Le long de la RN7, à l'est de Tuléar, les villages les plus anciens ont été établis sur des étendues de sables roux qui recouvrent localement le substrat calcaire éocène. Maïs et manioc y sont cultivés depuis près de 50 ans. Mais dans cette région, affectée d'une pluviométrie de 500 à 600 mm, c'est essentiellementSUtles sols squelettiques du plateau calcaire que les migrantstanalanaetmahafalypratiquent depuis une vingtaine d'années la culture du maïs, qui s'y étend de façon spectaculaire. La dalle calcaire affleure, fissurée et érodée. Une terre fine s'est accumulée dans les anfractuosités peu profondes de la roche, où se concentrent aussi l'eau de ruissellement et les cendres provenant du brûlis. Les agri- culteurs estiment que le maïs résiste mieux à la sécheresse sur de tels sols, qui apparaissent a prioriimpropres à toute forme d'agriculture, que sur les sols profonds des sables roux.

On notera que ces sols squelettiques sur substrat calcaire existent aussi, mais sur de faibles étendues, en bordure de la forêt des Mikea. Ils y sont également cultivés, depuis moins de dix ans.

L'ABATTIS-BRUUS, FONDEMENT DUHAT5AKY

Sur le site choisi en forêt pour l'ouverture d'un nouvel hatsaky(ce terme désignant à la fois la pratique de la culture sur abattis-brûlis et le champ ainsi cultivé), l'abattage des arbres(tetiky) est effectué à la hâcheifamaky) durant la saison sèche, d'avrilàseptembre.

Il commence tôt, car c'est un travail qui demande du temps. En outre, les arbres ont encore leurs feuilles en début de saison sèche, et après séchage la mise à feu (oro hatsaky) en sera facilitée. Enfin, une durée suffisante de séchage s'impose. Les agriculteurs estiment ainsi qu'un séchage de trois àquatre mois est nécessaire lorsque l'abattage a lieu en saison fraîche. Il peut être plus court ensuite. La parcelle défrichée se présente comme un amoncellement de branches coupées avec leurs feuilles, et entassées sur deux mètres d'épaisseur. Les arbres sont coupés à une hauteur d'un mètre environ (ce qui réduit la pénibilité du travail), et abattus vers l'ouest, face au vent dominant de fin de saison sèche.

La propagation du feu, allumé dans la partie ouest du champ, en est ainsi facilitée. Après le passage du feu, des bois plus ou moins calcinés jonchent le sol, alors que des quantités

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P. Milkvi/k, C. Blanc-Pamard

considérables de cendres se sont accumulées aux emplacements des plus gros troncs abattus et brûlés. Le vent se chargera d'en assurer une certaine redistribution.Laréussite du brûlis peut sensiblement varier d'un champàl'autre. C'est notamment le cas lorsqu'un feu, allumé intentionnellement dans un hatsaky, se propage de façon incomrôlée dans des parcelles voisines défrichées plus tardivement, et consume partiellement le bois qui aurait nécessité un temps de séchage plus long.

Le défrichement est toujours incomplet, et de nombreux arbres ébranchés et noircis restent en place. Trois raisons au moins motivent l'inachèvement du défrichement de première année: la première tient au souci de limiter le travail sur la surface défrichée, souvent importante, la secondeàla nécessité de ne pas accumuler une trop grande quantité de cendres qui pourrait nuire au développement des plantules de maïs, la troisièmeà l'intérêt que représente, pour les années suivantes, le stock de bois préservé, tant pour l'apport de cendres au bénéfice de la culture que pour la fabrication de charbon de bois (cas d'Antsapana). L'essartage et le brûlis peuvent donc s'étaler sur plusieurs années. A Analabo, les baobabs(Adansonia za)sont systématiquement préservés, et certains terroirs y prennent l'allure d'un spectaculaire parc arboré. En fait, le baobab n'y est pas préservé pour sa valeur d'usage, mais parce que sa présence ne cause pas de préjudice sensibleàla culture (faible ombrage), et que son élimination impliquerait une dépense en travail excessive.

Par la suite, avant le début de chaque nouvelle campagne, le champ est débarrassé de ses repousses arbustives, des pailles d'adventices et des résidus de culture, qui sont brûlés.

Cette opération de nettoyage(troboky)est réalisée en fin de saison sèche.

LE SEMIS: RAPIDITE ET PRECOCITE

Les agriculteurs cultivent plusieurs variétés, qui se distinguent par la couleur du grain, la durée du cycle et l'adaptationàcertaines conditions de milieu. Les maïs jaunes sont les plus répandus et les plus commercialisés. Les variétésàcycle long (120 jours envi- ron) sont appréciées pour leur productivité, cellesàcycle court (de l'ordre de 100 jours) pour leur meilleure faculté de parvenir àmaturité en cas d'interruption précoce de la saison des pluies ou de semis tardifs. Il conviendrait de préciser les caractéristiques agrono- miques de ces différentes variétés ou populations. On relèvera par ailleurs que l'usage du matériel végétal peut localement changer au cours du temps, en fonction des intro- ductions extérieures. Si chaque agriculteur prélève en principe ses semences par sélection massale sur sa récolte précédente, il arrive qu'il en acquière aussiàl'extérieur, tout parti- culièrement lors d'années déficitaires. C'est ainsi que sur le plateau de Belomotra, la récolte quasi nulle de 1998 contraignit la plupart des agriculteursàacquérir sur les marchés, tardi- vement et sans réelle information sur leur provenance et leurs caractéristiques, les semences nécessaires aux emblavements de la campagne suivante.

Le nettoyage de la parcelle est suivi dans tous les cas du semis direct. Plusieurs raisons expliquent l'absence de tout travail du sol préalable: la texture légère du sol, l'absence d'adventices àenfouir, l'étendue des surfaces cultivées et la nécessité de procéder au semis le plus précocement possible. Ce n'est qu'après plusieurs années d'exploitation de la même parcelle, et si l'agriculteur opte pour une autre culture que le maïs (manioc, arachide, cotonnier), qu'il pourra effectuer une préparation du sol. Celle-ci peut d'ailleurs n'être que localisée, comme on le constate pour la mise en place des boutures de manioc. Le travail du solàl'échelle de parcelles dans leur ensemble reste rare: il suppose la possession

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SystèmescUculture sur abattis-brûlis dansle Sud-ouest malgache

d'une charrue, et des disponibilités en main d'œuvre à une période cruciale, celle qui suit les premières pluies.

Le semis du maïs est réalisé en poquets. Lapremière opération consiste à creuser les trous de semis profonds de 5 à 6 cm, à l'aide del'antsoro (nom localement donné à la bêche), la seconde à déposer quelques grains dans chaque trou, puis à les recouvrir en tassant légèrement le sol avec le pied. Le semis est d'exécution rapide. Deux personnes au moins y coopèrent à Analabo, l'une se chargeant du creusement des trous, l'autre du placement des grains. Sur le plateau calcaire, où la localisation des poquets est plus erratique, les deux opérations sont successivement réalisées par le même individu, poquet après poquet. Les besoins en semences sont réduits, puisqueàraison de 5 000 à 7 000 poquets par hectare et de 4 à 5 grains par poquet, 8 à 10 kg de grains suffisent pour semer un hectare. Les densités moyennes de semis ne diffèrent pas significativement dans les deux sites d'étude.

En première année de culture, les agriculteurs attendent en principe qu'une ou plusieurs pluies soient tombées pour procéder au semis. Après le brûlis qui suit le défri- chement, la quantité de cendres accumulées à la surface du sol est considérable. La terre est jugée «chaude» (tany mafana),et les plantules de maïs semées avant les pluies risque- raient d'y «brûlen>. Il faut attendre que les pluies aient «refroidi» le sol, en amorçant la lixiviation des éléments minéraux et en diluant la solution du sol, pour créer des conditions favorables à la croissance des jeunes plantules de maïs. Ce semis en sol humide est appelé fontyàAnalabo, etjombaàAntsapana.

La règle est par contre d'effectuer un semis en sol sec(katray),à partir de la seconde année de culture. Les semences peuvent ainsi germer dès la première pluie de la saison, ce qui laisse les meilleures chances à la culture pour achever son cycle avant l'apparition d'un déficit hydrique qui pourrait résulter d'un arrêt précoce des précipitations en fin de saison. L'objectif d'un bon calage du cycle du maïs est d'autant plus recherché que tous les agriculteurs se plaignent d'une dégradation des conditions pluviométriques, tant en termes de hauteur des précipitations que de durée de la saison pluvieuse (qui débuterait beaucoup plus tardivement que par le passé). La précocité du semis est par ailleurs motivée par la nécessité de limiter la concurrence exercée par les adventices en début de cycle.

C'est en synchronisant la levée du maïs et des mauvaises herbes que l'on peut donner au premier les meilleures chances de prendre le dessus sur les secondes. Une troisième raison renforce l'utilité de la pratique du katray: la nécessité de protéger la culture des attaques de criquets. Il est manifeste que, dans la plupart des cas, les dégâts occasionnés par les criquets sont d'autant plus graves que les semis sont tardifs. Au cours de nos trois campagnes d'observation, le maïs semé enkatraya subi essentiellement des destructions foliaires, tandis que les dégâts concernaient également les épis des plantes semées plus tardivement. De nombreux agriculteurs étendent de ce fait à présent la pratique dukatray à la première année de culture.

Le katrayestréalisé en fin de saison sèche, dès le mois d'octobre, lorsque l'agriculteur dispose de grandes surfacesàemblaver, ou plus tard,àl'approche des premières pluies. Mais cette technique traduit une prise de risque élevée, puisque l'agriculteur ne peut préjuger de l'occurrence, ni de la hauteur, des premières pluies de la campagne. Une première pluie isolée peut provoquer la germination des grainset'la levée des plantules, qui se dessécheront ensuite rapidement (d'autant que la température diurne est élevée àcette période de l'année). En décembre 1996 à Antsapana, une première pluie de quelques mil-

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P. Mi/levi/le, C Blanc-Pamard

limètres a ainsi provoqué le pourrissement en terre de la totalité des semences. Le même phénomène s'y reproduisit l'année suivante, les agriculteurs procédant, après une très longue interruption des pluies, à des resemis tardifs, jusqu'au début du mois de février.

Si les semis précoces constituent le gage d'une espérance de rendement élevé, ils sont par contre affectés d'un risque d'échec important. De fait, il est rare qu'un katrayréussisse totalement, et un ou plusieurs resemis successifs, au moins partiels, s'imposent le plus souvent. Ce risque d'échec est pleinement assumé par les agriculteurs, compte tenu du faible investissement en travail et en semences que représente l'opération de semis (environ deux jours de travail et 10 kg de grains par hectare). On retrouve ici la même logique que celle qui préside, dans les conditions des agricultures de l'Mrique sahélo-soudanienne, à la mise en place des cultures céréalières (Milleville, 1998).

En toute rigueur, le terme dekatraydésigne un semis réalisé en sol sec. Généralement appliqué au semis réalisé avant les premières pluies utiles, lorsqu'en extrême fin de saison sèche apparaissent les signes annonciateurs de la période pluvieuse, il peut aussi concerner des semis réalisés plus tardivement, au cours de phases d'interruption prolongée des préci- pitations, lorsque l'horizon de surface s'est desséché, empêchant ainsi la germination des graines. Lekatrayn'est donc pas toujours synonyme de semis précoce, même s'il s'agit du cas le plus fréquent.

LE CONTROLE DES ADVENTICES: NUISANCE ET RESSOURCE

L'enherbement constitue la contrainte principale de l'agriculture pluviale, et ce sont en grande partie les problèmes liés à son contrôle qui justifient les dynamiques temporelle et spatiale de l'exploitation et de l'abandon des terres de culture.

Le défrichement forestier et le brûlis qui l'accompagne laissent, durant la première année de culture, un sol dépourvu de toute végétation herbacée. Au cours des deux premières années de culture, aucun désherbage n'est réalisé, même si certaines espèces herbacées apparaissent en cours de deuxième campagne. L'agriculteur se contente alors de couper, en début de saison des pluies, à l'aide du coupe-coupe(fibira) les rejets de souche les plus abondants. Le terme hatsabaodésigne cette phase des deux premières années à Analabo. Il arrive même que des parcelles, isolées et protégées des passages de troupeaux, y soient encore qualifiées d'hatsabao en troisième année de culture, si l'enherbement y reste très limité.A contrario, ce terme n'est appliqué qu'à la première année de culture à Antsapana, la seconde année y prenant le nom de silabao. Les observations confirment que l'apparition et la prolifération des adventices sont plus précoces sur les sols du substrat calcaire que sur les sables roux.

A partir de la troisième année, et surtout de la quatrième, le contrôle de l'enherbement s'impose.Laparcelle de culture rentre dans la phase appeléemondra(à Analabo),vantotse (troisième année) puis mondra(quatrième année et suivantes) à Antsapana. Ce contrôle peut emprunter des voies différentes. Il peut s'agir de la coupe des repousses arbustives et de l'arrachage des touffes plus ou moins éparses d'herbacées(bira),d'un sarclage propre- ment dit réalisé à l'aide del'antsoro,ou d'une combinaison de ces deux types d'interventions.

L'intérêt d'un entretien précoce réside évidemment dans la possibilité d'éliminer les plantes herbacées indésirables avant leur mise à graines. Mais, dans les faits, le sarclageàl'antsoro de la parcelle dans son ensemble se révèle très rare, en raison des besoins élevés en travail qu'il nécessiterait, compte tenu de l'importance des surfaces cultivées. Il est par ailleurs

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SY'tèmes de mùure sur abattis-brûlis damle Sud-ouest malgache

rotalement exclu de le pratiquer sur le plateau calcaire, en raison de l'abondance des blocs rocheux en surface. On notera de forts contrastes de la flore adventice de ces deux milieux (Grouzis, comm. pers.) : sur calcaire, les graminées pérennes (tels que Pennisetum polystachyon et Hyparrhenia nifa)prolifèrent et représentent l'essentiel de la phytomasse herbacée.

Durant la saison sèche, l'incursion des troupeaux dans les terres de culture est jugée néfaste, car les animaux sont perçus comme des agents de dissémination (par leurs déjections) des graines d'adventices. Mais il s'avère, dans les faits, difficile d'empêcher le bétail de pénétrer dans les champs durant la saison sèche, d'autant que les pailles de maïs laissées sur pied constituent une ressource fourragère très appréciée. Les agriculteurs ne peuvent qu'essayer d'éviter que des troupeaux de grande taille ne s'attardent sur leurs terres de culture.

Le feu constitue un autre moyen de lutter contre les adventices. Cette pratique, généralisée sur sols calcaires en raison de l'impossibilité d'y manierl'antsoro,est également fréquente sur sables roux. Les herbes sont brûlées en extrême fin de saison sèche, avec les résidus de pailles dem~ïs.La surface du sol est ainsi nettoyée, et prête pour le prochain semis. Mais le feu per- mettrait surtout, d'après les agriculteurs, de détruire une fraction plus ou moins importante des semences d'adventices, et d'en limiter par conséquent la ré-infestation lors du rerour des pluies. Pour que cet effet soit sensible, le feu doit être intense, ce qui implique de disposer d'une biomasse herbacée importante. Cette technique, pratiquée surmondraà la suite d'une saison favorable à la croissance des adventices, permet de poursuivre la mise en culture de la parcelle et de limiter le travail d'entretien au cours de la campagne suivante. En 1999, après une campagne caractérisée par une pluviométrie exceptionnelle(l 500mm à Analabo) et un enherbement massif, des agriculteurs estimaient qu'il leur serait ainsi possible de poursuivre la culture sur des parcelles déjà exploitées depuis6ou7ans. Lorsque la biomasse d'herbes sèches est jugée insuffisante, l'agriculteur préfère abandonner temporairement la parcelle pendant un ou deux ans, puis mettre à feu la végétation de la jachère avant de procéder à un nouveau semis. Des périodes courtes de jachère trouveraient ainsi leur principale justification dans le contrôle de l'enherbement par le feu. Une telle pratique, justifiée par l'objectif de limiter le temps de travail, repose sur une éradication incomplète des adventices. L'herbe constitue bien pour l'agriculteurà la fois une nuisance et une ressource qui, grâce au feu, participe à son propre contrôle. On relèvera par ailleurs que le contrôle de l'enherbement par le feu constitue une technique particulièrement peu exigeante en travail. Ilest par contre manifeste que son efficacité reste souvent limitée, sans commune mesure avec celle d'un sarclage réalisé précoce- ment àl'antJoro.

Enfin on relèvera que le brûlis, en fin de saison sèche, des pailles d'adventices et de maïs, permet d'entretenir, sur des parcelles déjà anciennes et débarrassées de leur végétation ligneuse, un apport régulier de cendres qui, bien que quantitativement limité, joue sans doute un rôle bénéfique sur la croissance des plantules de maïs.

MOBILISATION ET VALORISATIONDUTRAVAIL

En agriculture manuelle, les différents travaux reposent largement sur la main d'œuvre familiale. C'est à l'homme qu'incombe l'essartage et le creusement des trous de semis, la récolte et le battage. Le sarclage est par contre plus souvent (mais non exclusivement) réalisé par la femme, qui participe par ailleurs activement au nettoyage des champs et au semis. Les enfants contribuent eux aussi fréquemment à ces deux dernières opérations. En fait, une étroite

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P. Milkvi/k, C Bidnc-Pamard

coopération s'exprill)e entre les membres de l'unité de production familiale, dont la taUle et la composition expliquent en grande panie l'étendue dœ superfiêies défrichées et cultivées annuellement.

La contribution d'une main d'oeuvre extérieure est néanmoins fréquente. Si certains agriculteurs pratiquent une entraide systématique, et si l'organisation de séances de travail collectif(rima)n'est pas rare, c'est essentiellement le recoursàla main d'œuvre salariée qui permet d'accroître la force de travail des unités de production. Généralisé chez les «gros producteurs» pour la totalité des opérations (préculturales, culturales et postculturales), l'emploi de salariés (qui sont le plus souvent eux-mêmes des petits paysans) est aussi le fait des autres catégories de producteurs, lorsque la force de travail de l'unité familiale ne suffit pasà mener à bien certaines tâches dans les délais souhaitables. Mais l'agriculteur doit alors disposer des liquidités suffisantes en temps voulu. Le travail salarié est toujours rémunéréàla tâche. Au cours de la période 1997-1999, les tarifs suivants étaient pratiqués àAnalabo :

110 à120 000 Fmg/ha 25à40 000 Fmg/ha 250 Fmgl kapoaka,soit 7 500 Fmg/ha

25à60 000 Fmg/ha 20 à 40 000 Fmg/ha

5000 Fmg/charrette épis (équivalent 125 kg grain) Défrichement forêt:

Nettoyage Semis Sarclage Récolte Battage

De fortes différences se manifestent dans ces tarifs, qui procèdent d'une appréciation des quantités de travail nécessaires, compte tenu de l'état de la parcelle (abondance des repousses arbustives, enherbement) et de sa productivité, paramètres soumisà de très grandes variations.

Tous travaux cumulés, on peut évaluer approximativement les coûts en main d'œuvre au cours des quatre premières campagnes, en considérant: i) qu'en première et deuxième années, l'entretien se limiteàla coupe des repousses arbustives, et qu'un travail de sarclage se justifie localementàpartir de la troisième année; ii) que les niveaux de rendement sont Tableau 1: Coût du travail salarié par opération (en Fmg par hectare)

Années de

Préparation Semis Entretien Récolte Battage Total culture

CI 120000 10 000 25000 40000 60000 255000

C2 40000 10 000 25000 40000 60000 175 000

C3 40000 10 000 40000 40000 60000 190000

C4 40000 10 000 40000 30000 40000 170000

1

Total 240000 40000 140000 150000 220000 790000

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Sysf)mes

.u

culture sur abattU-brûlis dans k Sud-ouest malgacht

identiques au cours des trois premières années, et chutentàpartir de la quatrième; iii) que tous les travaux sont réalisés par des salariés (ce qui est quasiment le cas chez les gros producteurs) .

Si l'on considère qu'en conditions pluviométriques satisfaisantes, il est possible d'obtenir un rendement de 1 500 kg/ha, durant les trois premières années, et de 1 000 kg/ha en quatrième année (cf seconde partie de cet article), le coût total en travail sur les quatre premières années de culture, rapporté à la production cumulée durant cette période, représenterait environ 140 Fmg par kilogramme de maïs produit, soit 35 à 40% du prix payé au producteur (350à400 Fmg/kg). En absence de toute charge en intrants, le produit net s'établirait ainsiàenviron 1 300 000 Fmg par hectare sur 4 ans, soit en moyenne à325 000 Fmg par hectare et par an (pour un produit brut de l'ordre de 515 000 Fmg).

Il s'agit bien entendu d'ordres de grandeur, sujetsàde multiples variations en fonction des conditions climatiques et des niveaux de rendement, des prix réels de transaction (les gros producteurs, qui peuvent différer la vente de leur maïs en fin de saison sèche, bénéficient alors de prix beaucoup plus rémunérateurs), eede la contribution de la main d'œuvre salariée (qui peut, dans les faits, varier de 0 à100% de la quantité totale de travail investi).

Dans cette agriculture pionnière, la priorité est accordéeàla valorisation du travail, qui représente le facteur rare de la production. Ce souci, conjuguéàla nécessité d'assumer une prise de risque élevé, explique que la pratique du hatsakyrepose sur des itinéraires techniques très simples, peu exigeants en travail, privilégiant la rapidité d'implantation du peuplement et excluant tout recours aux intrants. Une telle logique extensive est caractéristique de situations où la terre ne constitue pas un facteur limitant et où le coût de son accès reste faible. Laprogression continue des défrichements et la raréfaction des espaces cultivables sont en passe de modifier profondément ce contexte.

UNE AGRICULTURE NON DURABLE

Avec la pression croissante de l'enherbement et la diminution de l'aptitudeàproduire de sa terre, l'agriculteur abandonne après quelques années le site de culture (Milleville et al.,2000). Cette décision, motivée par la baisse progressive des niveaux de rendement, intervient plus ou moins tôt, car elle dépend aussi de la situation particulière de chaque agriculteur. Pour différentes raisons, certains choisissent d'abandonner précocement leurs parcelles, alors que d'autres préfèrent en p~ursuivre plus longtemps l'exploitation, en s'accommodant d'une baisse prononcée de la productivité de leur travail. L'abandon (ou le non abandon) du site cultivé par l'agriculteur ne résulte donc pas simplement de l'appréciation objective d'un état de dégradation du milieu cultivé. Cette décision peut être en effet motivée par d'autres types de considérations: souci de ne pas s'éloigner du village de résidence, difficulté d'accès àde nouvelles terres de forêt, manque conjoncturel de liquidités pour embaucher des salariés ou acheter des semences, etc.

Les systèmes de culture sur abattis-brûlis ont fait l'objet de très nombreux travaux dans les zones tropicales humides, où ils constituent un archétype en matière d'exploita- tion des milieux forestiers. C'est ainsi qu'une littérature abondante a été consacrée au tavy, terme qui désigne ce type d'agriculture, répandue sur tout le versant oriental de Madagascar (cf. tout particulièrement les travauxréalis~par le projet Terre-Tany1BEMA

(10)

P.Milleville,C. Blanc-Pamard

depuis 1989). Lorsque certaines conditions sont remplies (très faible densité démogra- phique, surface cultivée par habitant limitée, contexte d'autosubsistance), comme c'est encore le cas dans une grande partie de cette région, de tels systèmes de culture se révèlent viables, en faisant alterner de longues périodes de jachère arborée (de 15 à 25 ans), durant lesquelles une formation forestière secondaire se reconstitue, à de courtes phases culturales (de un à trois ans dans la plupart des cas). La phase post-culturale a une double fonction: elle permet, d'une part de reconstituer une biomasse ligneuse importante, source d'éléments minéraux libérés massivement lors du brûlis ultérieur, et d'autre part de réduire, jusqu'à la faire totalement disparaître, la flore adventice herbacée qui s'était développée durant la phase culturale précédente. Ce type d'agriculture, essentiellement manuelle, parvient donc à se perpétuer, au prix de faibles performances en termes d'in- tensité culturale et de rendement, sans recours aux intrants et à l'aide de techniques peu exigeantes en travail.

Il n'en va pas de même dans le sud-ouest de Madagascar. Telle qu'elle y est pratiquée, l'agriculture sur abattis-brûlis ne peut être considérée comme durable, car incapable d'assurer sa reproduction. La comparaison avec les systèmes de culture analogues des zones tropicales humides fait apparaître deux différences notables:

- la phase culturale est d'une durée beaucoup plus longue (si les agriculteurs déclarent abandonner un site de culture au bout de 4 à 5 ans, il n'est pas rare de voir une même parcelle cultivée pendant 8 à 10 ans, voire plus) ; il est probable que les conditions climatiques (faiblesse des précipitations et alternance d'une longue saison sèche et d'une courte saison des pluies) tempèrent les dynamiques d'évolution du milieu cultivé, qu'il s'agisse de la lixiviation des éléments minéraux ou de la prolifération des adventices; ces dynamiques restent néanmoins de mêmes types qu'en zones tropicales humides;

- la phase post-culturale se caractérise par un processus de savanisation, et non de reforestation (Grouzis et al., 2001) ; si les conditions climatiques et la faible agressivité des espèces ligneuses pionnières jouent sans doute un rôle non négligeable, il est probable que les facteurs anthropiques soient déterminants ; après la phase culturale, les friches (monka) sont en effet plus ou moins activement parcourues par les animaux et par le feu; la conséquence majeure en est la persistance des herbacées, que ne parvient donc pas à éradiquer la phase d'abandon cultural, même de longue durée. Il s'agit bien de friches et non de jachères, puisque ces dernières qualifient l'état de parcelles entre deux périodes culturales (Sebillotte, 1985). Or lesmonka sont jusqu'à présent rarement remis en culture.

En raison de la persistance des herbacées, il devient en effet impossible de procéder à la remise en culture des friches par le seul procédé de l'abattis-brûlis suivi du semis direct, car l'enherbement demande à être impérativement contrôlé. L'allongement de la phase culturale et la reprise d'anciens sites de culture supposent donc un change- ment plus ou moins radical des systèmes de culture. Contrairement aux systèmes sur abattis-brûlis habituellement décrits, ceux du sud-ouest malgache doivent être considérés comme caractéristiques d'une phase pionnière, non stabilisée et non reproductible.

C'est bien la question de fond qui se pose actuellement à nombre d'agriculteurs, car les perspectives de poursuite des défrichements forestiers s'amenuisent, compte tenu de la disparition du couvert forestier ou de conditions pédo-climatiques de plus en plus

(11)

Sy"hnes de culture sur abattis-brûlis dansleSud-ouest malgache

défavorables, et des contraintes qui s'alourdissent avec l'éloignement croissant des points d'eau permanents (Blanc-Pamard, 2000). Si la courseàla terre s'exacerbe, c'est précisé- ment parce que chacun en perçoit la fin proche.

CONCLUSION

En réponse à cette crise de durabilité, certains agriculteurs tentent d'imaginer et d'expérimenter de nouvelles techniques de production. La substitution progressive du manioc au malS constitue une réponse purement adaptative à la baisse du niveau de fertilité des terres. Réputé rustique, le manioc permet en effet de s'accommoder de sols en voie d'épuisement, devenus impropres à la culture du maïs.Le manioc, d'abord associé au maïs, peut ainsi être cultivé sous forme de peuplement monospécifique sur des parcelles âgées. Une deuxième option réside dans le labour à la charrue, accompagné ou non de l'adoption d'autres plantes cultivées que le maïs (cotonnier et arachide en particulier) et de l'apport d'engrais minéraux. Ces innovations se heurtentà deux contraintes principales:

d'une part le temps de travail nécessaire à la préparation du sol, avec la limitation des superficies cultivées et les risques de retard au semis qui lui sont liés; d'autre part le coût prohibitif des engrais, qui en compromet fortement la rentabilité. A ce jour, il faut bien constater que ces tentatives restent timides et assez peu convaincantes.

Il convient donc de concevoir de nouveaux systèmes de culture propres à prolonger la durée de la phase culturale et à remettre en culture des terres en friche, avec l'objectif d'améliorer les propriétés de durabilité de ces systèmes, et sans pénaliser leur productivité.

Il semble à cet égard raisonnable de s'inspirer de l'expérience de zones agro-écologiques voisines quant aux conditions de milieu, telles que les régions soudaniennes d'Afrique de l'ouest. Le recours coordonné à des successions culturales incorporant ou non la jachère, à des associations de plantes, au travail du sol (n'imposant pas le labour sensu stricto) et au sarclageàl'aide d'outils attelés, mérite d'être évalué. On mentionnera par ailleurs les travaux entrepris depuis plusieurs années dans cette région, afin de tester et de promou- voir des systèmes de culture fondés sur le semis direct et les plantes de couverture (Rollin et Razafintsalama, 1998 et 2001). Si les résultats expérimentaux sont encourageants, la mise en pratique de tels systèmes pose encore de nombreuses questions, dont la moin- dre n'est pas celle du maintien, durant la saison sèche, d'une plante de couverture dans des espaces soumis au passage récurrent des feux et des troupeaux. Le problème posé ne pourra probablement être résolu que par des voies différenciées, adaptées aux situations particulières. Quoi qu'il en soit, il apparaît urgent de permettre aux agriculteurs d'opter, s'ils en perçoivent l'intérêt, pour d'autres perspectives que celle d'une perpétuelle fuite en avant.

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lA CULTURE PIONNIERE DU

MAïs

SURABATTIS-BRULIS(HATSAKY) DANS LE SUD-OUEST DE MADAGASCAR.

2. EVOUITION ET VARIABILITE DES RENDEMENTS Pierre MILLEVILLEI, Michel GROUZIS', SamuelRAZANAKN,

Michel BERTRAND3

1.IRD, B.P.434 - 101Antananarivo; 2. CNRE, B.P. 1739 - 101Antananarivo;

3. INRA-IRD, B.P.434 - 101Antananarivo Résumé:

Dans les sysrèmes de culture sur abanis-brûlis du sud-ouesr malgache, le rendement du maïs esr affecré d'une fone variabiliré spario-remporelle. Les enquêres agronomiques réalisées sur les parcelles des agriculreurs au cours de rrois campagnes successives, dans la forêr des Mikea er sur le plareau ca1caire de Belomorra, ont permis de caracrériser l'évolution des rendements en foncrion de l'ancienneré de la mise en culrure. Les rendements les plus élevés sonr obrenus en première er seconde année, er peuvent alors dépasser 20 q/ha. Ils décroissenr ensuire régulièrement, pour se situer à des niveaux inférieurs à 5 q/ha après cinq ans de culture. Cene décroissance résulre de la baisse concomiranre de plusieurs composantes: nombre d'épis par plante, nombre de grains par épi, poids moyen du grain. Les rendements dépendent par ailleurs forrement des condirions parriculières de chaque campagne: pluviosiré, dare de semis, anaques de criquers. Labaisse des rendements au cours du remps peur êrre reliée à la pression croissante de l'enherbemenr, ainsi qu'à la dégradarion des paramèrres physico-chimiques de la ferriliré dessols. Un essai conduir en 1998-99 sur des parcelles culrivées depuis 2, 3, 5 er 7 ans sur sables roux, montre qu'un apporr modéré d'engrais NPK permer de relever crès significarivement les niveaux de rendement du maïs, quel que soir l'âge de la parcelle. L'influence respecrive de ces deux carégories de facreurs resre à préciser.

Mors clés: abanis-brûlis, maïs, rendemenr, adventices, ferriliré, nurririon minérale

Abstract .'

ln rhe Sourh Wesrern regions of Madagascar, making use of slash and bum culrivarion, maize crop yield is affecred by a high variabiliry in space and rime. Agronomic surveys carried our in farmers fields during rhree successive crop years in rhe Mikea foresr and on che ca1careous plareau of Belomorse have made ir possible ro characrerise rhe evolurion of crop yields in connecrion wirh how long rhe land has been culrivared. The highesr crop yields are obrained during rhe firsr rwo years and can chen even reach 20 q per ha or more. Crop yields decrease regularly from rhen on, and can reach rarher low levels (below 5 q per ha) afrer five years of cuirivarion. This is rhe resulr of rhe simulraneous decline of several yield components facrors : rhe number of cobs per plant, rhe number of grains per cob, che average weighr of a grain. Besides, rhese crop yields are highly depen- dent on rhe specific condirions of each crop year : rainfalls, dare of sowing, locusrs damages. The decline of yields wich rime has ra be linked ro che increasing weeds pressure, as weil as ra rhe dere- riorarion of physical and chemical paramerers of soil ferriliry. A field crial carried our in 1998-1999 on plors rhar had been cu!rivared for 2, 3, 5 and 7 years on red sands, shows rhar a moderare supply ofNPK ferriliser can very significandy increase rhe levels of maize yields, warhever rhe age of rhe ploL The respecrive influence of rhese rwo caregories of facrors is srill ra be derermined.

Key words : slash and burn, maize, crop yield, weeds, soil fenilill' minerai nutririon

Sociétés paysannes, transitions agrairesetdynamiques écologiques dons le sud-ouest de Madagascar

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P.Mi/&vi/&,M.Grouzis,S.Razanaka,M.Bertrand

INTRODUCTION

Tout système de culture sur abattis-brûlis repose sur la substitution d'un agrosystème à un écosystème forestier préexistant. Une fois passée la phase brutale du défrichement et du brûlis de la biomasse ligneuse, les techniques de culture apparaissent très peu perturbatrices.

Elles s'adaptent aux conditions de milieu tout en les transformant progressivement au cours de la phase culturale, mais sans être en mesure d'artificialiser le milieu cultivé pour en rendre durable l'exploitation. Cette phase se caractérise par des processus complexes de désorganisation/ réorganisation écologiques, qui affectent à la fois la végétation et le sol, et dans lesquels interfèrent des effets de mémoire et de recomposition, avec l'apparition et l'intervention de nouvelles composantes, telle la flore adventice. Le rendement de la culture résulte de ces dynamiques locales du milieu, en interférence avec les conditions climatiques de l'année et les techniques culturales.

Cette communication s'attache à rendre compte des niveaux de rendement de malS obtenus par les agriculteurs. Ils ont été évalués, au cours de trois années consécutives, dans les deux situations déjà présentées: forêt des Mikea (Analabo) et plateau calcaire de Belomotra (Antsapana). Il s'agissait d'apprécier, d'une part l'évolution des rendements au cours de la phase culturale, depuis la première mise en culture après défrichement jusqu'à l'abandon de la parcelle, et d'autre part leur variabilité, tant spatiale qu'interannuelle. En complément de cette évaluation globale, quelques résultats seront exposés concernant le rôle des principaux facteurs en cause. Cette recherche à but explicatif devra être poursuivie, au cours des prochaines années, à travers diverses procédures expérimentales.

METHODE ADOPTEE

Dans une zone donnée, un échantillon de parcelles a été constitué chez des agriculteurs, afin de disposer d'une gamme assez étendue d'ancienneté de mise en culture. Dans la plupart des cas, trois «stations» d'observation circulaires de 50 m2ont été implantées dans chaque parcelle retenue, en s'assurant d'une homogénéité satisfaisante de chacune d'entre elles.

L'objectif n'était pas de constituer un échantillon statistiquement représentatif de la popula- tion de parcelles présentes dans une zone donnée, mais de disposer, pour différentes durées de culture, de sous-échantillons de tailles suffisantes. Lors de la récolte, certaines stations ont dû être abandonnées, pour différentes raisons: dégâts massifs occasionnés par les criquets, semis trop tardifs ayant conduits à un rendement nul, récolte déjà réalisée par l'agriculteur.

Le tableau l indique la constitution des échantillons définitivement retenus pour ces trois années.

Tableau 1: Constitution des échantillons (nombre de stations) Ci= cultivé depuis i années

Année Site CI C2 C3 C4 C5 et+ Total

1997 Analabo sables 8 4 6 4 6 28

1998 Analabo sables 8 II 10 13 19 61

1998 Analabo calcaire 7 n 0 0 0 29

1999 Anrsapana calcaire II II II II 8 49

Les observations et mesures ont été réalisées sur ces stations, mises en place lors du semis ou de la levée, sauf en 19%-97 où elles n'ont pu l'être qu'au moment de la récolte. Dans la mesure du possible, plusieurs passages ont été réalisés en cours de cycle, afin d'apprécier

256

(15)

Evolutionnvariabilitide,rendements du maiS

les états du peuplement cultivé (croissance, stade de développement, état sanitaire) et du milieu (enherbement, parasitisme), ainsi que les éventuelles interventions techniques (resemis, sarclage) de l'agriculteur.

Lors de la récolte, effectuée à maturité, les mesures suivantes ont été réalisées : comptage du nombre de poquets, du nombre de plantes et d'épis par poquet; pesée de l'ensemble des épis et des pailles de la station; prélèvement d'échantillons de pailles et d'épis pour l'estimation des taux de matière sèche, d.u taux d'égrenage, et du poids moyen du grain.

En complément de ces enquêtes agronomiques, une expérimentation simple a été conduite en1998-99,sur les terres d'un agriculteur de la région d'Analabo, afin d'évaluer, pour des parcelles d'âges différents, l'effet d'un apport d'engrais sur le rendement dumiis (cf. § 7).

CARACTERISTIQUES CLIMATIQUES DES TROl? ANNEES D'ENQUETE Les pluviométries de ces trois campagnes(1996-97, 1997-98, 1998-99) ont été très contrastées, comme en témoignent les relevés effectuésà Arnpasikibo, en bordure de la forêt des Mikea (Figure 1) :

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novembre décembre janvier février mars avril

Figure 1 : Pluviométrie mensuelle des trois années de référenceàAmpasikibo

- 19%-97 :pluviométrie totale(790mm) conformeà la normale; première pluie utile le 4 décembre, dernière pluie utile le 9 mars; engagement tardif de la saison pluvieuse, interruption des pluies durant 15 jours entre le premier et le deuxième épisodes pluvieux, succession régulière des pluies ensuite; bonnes conditions de croissance du miis semé en sol sec (novembre), mais mauvais calage du cycle du maïs semé lors du deuxième épisode pluvieux de la troisième décade de décembre, en raison de l'interruption précoce des précipitations en fin de saison;

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P. MiUeviUe,M.Grouzis,S. Razanaka,M.Bertrand

- 1997-98 ; déficit pluviométrique marqué (630 mm) ; première pluie utile le 19 novembre, et interruption des pluies durant les deux premières décades de décembre ; dernier épisode pluvieux du 27 mars au 2 avril, après une sécheresse d'un mois ; conditions passables pour le maïs semé précocement, mais très mauvaises pour le maïs semé fin décembre;

- 1998-99 ; saison exceptionnellement pluvieuse (1500 mm) jpremière pluie utile le 18 novembre, et pluies fréquentes et abondantes jusqu'au 21 mars; conditions favorables à l'implantation précoce du peuplement, mais responsables d'un enherbement massif et précoce.

A Antsapana (plateau calcaire), nous ne disposons que de quelques relevés établis à partir de pluviomètres totalisateurs. Les tendances générales des trois campagnes restent les mêmes qu'à Ampasikibo, mais dans un contexte d'aridité plus prononcée (pluviométrie moyenne de l'ordre de 600 mm). On soulignera les conditions désastreuses de la campagne 1997-98, caractérisée d'abord par une interruption prolongée des pluies en début de saison, obligeant la plupart des agriculteurs à ressemer très tardi- vement (deuxième quinzaine de janvier, voire début février), puis par l'arrêt précoce des précipitations, qui empêcha ces maïs d'arriverà maturité. Les rendements y furent cette année-là quasiment nuls. La campagne 1998-99 fut quantà elle caractérisée par un excès d'eau considérable (plus de 1000 mm), responsable d'un enherbement spectaculaire sur les parcelles mises en culture depuis plus de deux ans.

EVOLUTION COMPAREE DES RENDEMENTS MOYENS

La figure 2 rassemble les résultats globaux obtenus dans les situations suivantes Anal~bo sur sables roux en 1997 et 1998, Analabo sur substrat calcaire en 1998, Antsapana (plateau calcaire) en 1999. Pour Antsapana, nous ne disposons que de don-

_____ Anlsapana calcaire 99 - - -ÂI. --Analabo calcaire 98 ________ Analabo sables 97

8 6 7

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durée de culture (années)

Figure 2 : Rendements moyens en grain et ancienneté de la mise en culture

(17)

Evolution(tvariahilititirsmuinnmts du mais

nées fragmentaires pour l'année1997,et ne ferons pas mention des résultats de1998,puis- que les rendements y ont été presque uniformément nuls cette année-là. Par ailleurs, nous n'avons pas reproduit le même rype d'enquête agronomique à Analabo en 1999,préférant y préciser certains points par voie expérimentale.

Les résultats apparaissent globalement homogènes. Les niveaux de rendement les plus élevés sont obtenus en première et en seconde année de culture. En conditions pluvio- métriques favorables (Analabo 1997),ces niveaux atteignent en moyenne20quintaux de grain sec par hectare, et peuvent localement dépasser 25 q/ha. Au vu des résultats acquis en1999à Antsapana (ce que confirment les essais conduits à Analabo), il ne semble pas qu'un excédent pluviométrique très important s'accompagne d'un accroissement sensible des rendements, au contraire. On peut faire l'hypothèse qu'en sol très perméable un excès d'eau accroît les pertes par lixiviation de certains éléments minéraux. Symétriquement, le niveau médiocre du rendement moyen de première année sur les sables d'Analabo en1998 (l0,7 q/ha) est probablement à imputer à un déséquilibre de l'alimentation minérale en conditions de déficit hydrique, l'accumulation de cendres pouvant alors induire des phénomènes de toxicité dus à de trop fortes concentrations d'éléments minéraux au contact des racines. Ce résultat validerait donc la perception paysanne de la «terre chaude» de première année, en justifiant l'utilité de ne procéder au semis sur une nouvelle défriche qu'une fois les premières pluies tombées et le sol «refroidi».

Les rendements moyens décroissent progressivement à partir de la troisième année de culture, pour se situer à des niveaux généralement inférieurs à 5 q/ha au-delà de la cinquième année. Cette chute est plus ou moins brutale et accusée suivant les années.

On notera tout particulièrement l'effondrement des rendements en 1999à Antsapana, lié de toute évidenceàla très forte compétition exercée sur le maïs par les adventices, effet d'autant plus marqué que les semis ont cette année-là été réalisés tardivement (la plupart courant décembre), c'est-à-dire en sol déjà enherbé. Les récoltes catastrophiques de1998avaient en effet incité la plupart des agriculteursàlimiter les risques d'échec en ne procédant au semis qu'une fois les premières pluies tombées.

De tels résultats corroborent ceux obtenus dans diverses situations. On observera néanmoins que dans les systèmes de culture sur abattis-brûlis des zones humides, la phase de culture est beaucoup plus courte, et que la baisse de rendement de la culture (qu'il s'agisse de maïs ou de riz pluvial) apparaît beaucoup plus tôt, généralement dès la seconde année de culture (Nye et Greenland,1964;De Rouw, 1991).

ROLES DES DIFFERENTES COMPOSANTES

Le rendement a été évalué à travers ses composantes: nombre de poquets à l'unité de surface, nombre de plantes par poquer, nombre d'épis par plante, nombre de grains par épi, poids moyen du grain. Les facteurs du milieu ainsi que les techniques culturales influent plus ou moins directement sur ces différentes composantes, fixées à des stades caractéristiques du développement de la plante cultivée. Il est

a

noter que le nombre de poquets semés par unité de surface, résultat d'un choix technique de l'agriculteur, n'est pas modulé en fonction de la durée de mise en culture.

Une relation linéaire très forte s'exprime entre le rendement et le nombre de grains à l'unité de surface (coefficient de corrélation compris entre0,91 et 0,99suivant les sites et les années). Elle traduit, sinon la stabilité du poids moyen du grain, du moins sa

(18)

P. Mi/levi/le,M.Grouzis, S. Razanaka,M.Bertrand

variabilité beaucoup plus faible. En fait, on constate bien une réduction sensible du poids moyen du grain sur les parcelles anciennes (Analabo sables 98, Antsapana 99), mais elle reste limitée.

Les composantes de peuplement (nombre de poquets par m2et nombre de plantes par poquets) apparaissent jouer un rôle plus limité que les composantes de fertilité (Tableau II) : le rendement est en corrélation plus forte avec le poids de grain par plante qu'avec le nombre de plantes par m2C'est plus particulièrement vrai sur les parcelles anciennes.

Parmi les composantes de fertilité, le nombre de grains par épi semble peser d'un poids plus lourd que le nombre d'épis par plante.

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Figure 3 : Composantes du rendement et ancienneté de la mise en culture

En fait, la plupart des composantes subissent une dégradation avec l'accroissement de la durée de mise en culture (Figure 3). Suivant les années er les sites, cette dégradation est plus ou moins accusée, et intervient plus ou moins tôt. On comprend dans ces conditions que le rendement global, produit de ces composantes, diminue fortement.

Aucun phénomène de compensation entre composantes ne se manifeste clairement, même pour les parcelles récentes. Ce résultat suggère que les niveaux de rendement atteints restent bien inférieurs au potentiel de production du matériel végétal local. Une amélioration des états du milieu cultivé devrait donc se traduire par un accroissement significatif des rendements. De même les faibles corrélations observées entre les nombres de plantes par unité de surface et la production individuelle des plantes (Tableau II) autorisentàs'interroger sur l'opportunité d'augmenter les densités de peuplement.

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Evolutionltvariabiliti rUs rmrUmmts du maiS Tableau" : Coefficients de corrélation entre composantes de rendement

Sites Ages parcelles Nombre R x Nb pl/m2 R x PdsGlpl Nbpl/m2x

(années) stations PdsGlpl

Analabo 97 1 à 3 18 0,31 0,76 -0,38

sables 4à7 10 0,57 0,86 0,15

ensemble 28 0,68 0,73 0,04

Analabo 98 1 à 5 44 0,42 0,54 -0,54

sables 6à9 17 0,58 0,76 0,01

ensemble 61 0,64 0,79 0,13

Analabo 98 1à3 29 0,43 0,89 0,01

sables

1à2 15 0,58 0,50 -0,38

Antsapana 99 3à7 17 0,69 0,86 0,27

ensemble 32 0,58 0,81 0,08

VARIABILITE DES RENDEMENTS

Par-delà l'évolution des rendements moyens en fonction de l'ancienneté de la mise en culture, s'exprime une forte variabilité entre stations (Figure 4), qui traduit l'inter- férence de nombreux facteurs relevant des conditions locales de milieu (volume de sol exploitable, paramètres physico-chimiques de la fertilité, enherbement, parasitisme) ainsi

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Figure 4 : Variabilité du rendemert

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P. Millroi/k, M. Grouzil, S.Rilzanaka,M.Bertrand

que des techniques mises en œuvre par l'agriculteur (nombre de poquetsàl'unité de sur- face, nombre de graines semées par poquet, datees) de semis, contrôle des adventices).

Lacombinaison de ces différents facteurs crée une diversité plus ou moins grande de

«situations culturales», entre parcelles et au sein d'une même parcelle. On ne traitera pas ici dans le détail de l'incidence de ces différents facteurs, ne disposant pas d'enregistrement systématique des données nécessaires pour le faire, station par station. On se bornera de ce fait à quelques constats.

La culture pratiquée sur une parcelle de première ou de seconde année ne constitue pas un gage d'obtention d'un rendement élevé. Des semis tardifs y entraînent de forres baisses de rendement et, à l'inverse, des semis précoces en sol sec peuvent échouer en première année. Il peut en résulter, en début de phase culturale, une variabilité considérable des rendements (cf. Analabo sables et calcaire 1998, et Antsapana 1999). Cette variabilité se traduit par des rendements moyens bien inférieurs aux potentiels observables.

La date de semis apparaît jouer un rôle décisif, mais qui recouvre plusieurs catégories de phénomènes: (a) le calage du cycle du ma'is dans la période humide: déficit hydrique d'autant plus marqué et précoce que le semis est tardif, pouvant conduireà l'obtention de rendements presque uniformément nuls lorsque la saison des pluies s'interrompt précocement (Antsapana 1998) ; (b) dans les parcelles de trois ans et plus, une inter- action avec l'enherbement, car des semis tardifs, en absence de travail du sol et de sarclage en cours de cycle, mettent les plantules de ma'is en position de concurrence plus forte vis-à-vis des adventices,lévées plus tôt; (c) une interaction avec les dégâts de criquets, qui au cours des trois campagnes suivies se sont révélées d'autant plus graves que le ma'is était semé tardivement (épis attaqués, alors que seul l'appareil foliaire l'était pour les semis précoces).

L'effet de l'enherbement est loin d'être homogène pour une ancienneté de culture donnée. L'abondance des adventices peut varier considérablement d'une parcelleàune autre, et même sur la même parcelle. Les pratiques agricoles (feux de fin de saison sèche, sarclages localisés) accroissent probablement cette hétérogénéité.

Les paramètres physico-chimiques de la fertilité des sols sont loin d'être homogènes.

C'est évigent sur les sols calcaires,çal'est aussi sur les sables roux, ne serait-ce qu'en raison de l'hétérogénéité des apportS de cendres résultant du brûlis initial.

Pour ces différentes raisons,lesvaleurs des rendements ponctuels (mesurésàl'échelle stationnelle) en fonction de ['ancienneté de la mise en culture se distribuent en deçà d'une «courbe enveloppe» qui exprime l'effet de cette variable lorsque les autres facteurs de variation exercent le plus faible niveau de contrainte dans les conditions de milieu et des pratiques des agriculteurs (Navarro, 1984; Fleury, 1991). Il ne s'agit, bien entendu, que de potentiels observables, donc contingents. Il importerait d'en rendre compte aussi dans des conditions innovantes, susceptibles de déplacer vers le haut la courbe enveloppe.

ELEMENTS D'INTERPRETATION DE L'EVOLUTION DES RENDEMENTS Nous avons reporté sur la figure 5 les variations des rendements moyens du ma'is et celles de la phytomasse et du recouvrement des adventices au cours du cycle 1997-1998 (pluviométrie déficitaire) sur les sables d'Analabo.

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