• Aucun résultat trouvé

Avis 12-A-14 du 19 juin 2012

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Avis 12-A-14 du 19 juin 2012"

Copied!
20
0
0

Texte intégral

(1)

Avis n° 12-A-14 du 19 juin 2012

relatif aux effets du regroupement de vétérinaires intervenant dans la distribution de médicaments vétérinaires,

en matière de concurrence

L’Autorité de la concurrence (commission permanente), Vu la lettre, enregistrée le 20 octobre 20111

Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ;

sous le numéro 11/0080 A, par laquelle le Syndicat de l’industrie du médicament vétérinaire et réactif (SIMV) a saisi l’Autorité de la concurrence d’une demande d’avis concernant le secteur de la distribution du médicament vétérinaire en application de l’article L. 462-1 du code de commerce ;

Vu le livre IV du code de commerce relatif à la liberté des prix et de la concurrence ; Vu les autres pièces du dossier ;

Le rapporteur, la rapporteure générale adjointe, le commissaire du Gouvernement, les représentants du SIMV entendus lors de la séance du 22 mai 2012 ;

Les représentants du ministre de l’agriculture et du Syndicat National des vétérinaires libéraux (SNVEL) entendus sur le fondement de l’article L. 463-7 du code de commerce ; Est d’avis de répondre à la demande présentée dans le sens des observations qui suivent :

1 Cotes 2 et 3.

(2)

SOMMAIRE

I. LA DEMANDE DAVIS ET SON CONTEXTE... 3

A. Le secteur du médicament vétérinaire ... 4

B. Les marchés du médicament vétérinaire et leurs acteurs ... 6

1. Le marché de la fabrication (marché amont) ... 6

2. Le marché de la vente en gros (distributeurs agréés par l’ANMV, grossistes ou dépositaires) du médicament vétérinaire. ... 7

a) Les grossistes-répartiteurs ... 7

b) Les dépositaires (des fabricants) ... 8

3. Le marché de détail (Les trois catégories d’ayants droit - Le cas des GIE) ... 9

a) Les vétérinaires, ayants droit ... 9

b) Les pharmaciens, ayants droit ... 10

c) Les groupements de producteurs (élevages), ayants droit à titre « restreint » ... 10

d) Observations sur ces trois catégories d’ayants droit : ... 11

e) Les GIE ou regroupements de vétérinaires ... 11

C. Les pratiques tarifaires observées dans le secteur de la distribution du médicament vétérinaire ... 12

II. LES QUESTIONS POSÉES PAR LA SAISINE ... 13

III. ANALYSE ... 15

A. En ce qui concerne la première question ... 16

B. En ce qui concerne les autres questions relatives au principe de fonctionnement d’Isovet ... 16

1. Sur les pratiques susceptibles d’apparaître à la revente ... 16

2. Sur la potentialité d’échanges d’informations ... 17

3. Sur les différences de réglementation entre opérateurs ... 18

4. Sur une éventualité de discrimination anticoncurrentielle du fait des fabricants ... 18

5. Sur un risque d’abus de puissance d’achat du fait d’Isovet ... 18

IV. CONCLUSION ... 20

(3)

I. La demande d’avis et son contexte

1. Le Syndicat de l’Industrie du Médicament Vétérinaire et réactif (SIMV) a saisi l’Autorité de la concurrence d’une demande d’avis, aux fins de vérifier la situation de la concurrence sur le marché de la distribution des médicaments vétérinaires, et en particulier pour que soit examinée la situation nouvelle créée par la constitution de la société Isovet à l’initiative du Syndicat National des Vétérinaires d’Exercice Libéral (SNVEL) sur le marché de gros.

2. Le secteur du médicament vétérinaire est réglementé à la fois par le code rural, le code de la santé publique et le code de commerce – par exemple, en matière d’autorisation de mise sur le marché (AMM) pour les fabricants, d’obligations diverses pour les grossistes (stocks, disponibilités, délais de fourniture…), et pour les ayants droit (comptes-rendus divers, traçabilité, pharmacovigilance, tenue de registres…, voir ci-après § 7).

3. Les principaux organismes professionnels concernés par le secteur sont le SIMV (pour les fabricants)2, l’ANVASDM3 (pour les grossistes-répartiteurs), le SNVEL4

4. Il convient de mentionner l’existence de l’AIEMV

(pour les vétérinaires libéraux).

5

o les principaux laboratoires (fabricants),

, association regroupant :

o les principaux distributeurs (grossistes-répartiteurs), c’est-à-dire les deux premières catégories d’opérateurs déjà évoqués,

o et les principaux fabricants d’aliments pour animaux, à savoir les entreprises Hills, Masterfoods SCS, Ralston Purina et Royal Canin 6

2 Audition SIMV, cotes 1208 à 1216 du 31 Janvier 2012 (partie saisissante).

.

3 Audition ANVASDM, cotes 1310 à 1316 du 8 février 2012 (association de grossistes-répartiteurs du médicament vétérinaire).

4 Audition SNVEL, cotes 1244 à 1251 du 8 février 2012 et suivantes (syndicat de vétérinaires libéraux).

5 Audition AEIMV, cotes 1338 à 1364 du 15 février 2012 (association des principaux laboratoires et grossistes).

L’AIEMV a fourni copie de ses statuts et de son « manuel de l’adhérent AIEMV », qui établissent quels types de données sont renseignés par les grossistes (en volume et non en chiffre d’affaires, ces volumes étant ensuite valorisés en fonction des conditions générales de vente de chaque fabricant ou grossiste).

6 In audition SNVEL, précité.

(4)

5. Toutes choses égales par ailleurs, le SIMV semble le pendant, en médecine vétérinaire, du LEEM7 en médecine humaine, et le travail de collecte et de restitution de l’AIEMV à celui du GERS en médecine humaine8

6. Le secteur est enfin contrôlé par l’ANMV .

9 (Agence nationale du médicament vétérinaire) qui dépend de l’ANSES (Agence Nationale de Sécurité Sanitaire). C’est notamment l’ANMV qui procède à la délivrance des autorisations de mise sur le marché (AMM) et agrée les différents distributeurs ou dépositaires10

7. Le secteur du médicament vétérinaire comporte plusieurs niveaux d’opérateurs : d’une part, les fabricants des médicaments (laboratoires), et les distributeurs (grossistes- répartiteurs principalement, mais également dépositaires), inscrits et agréés auprès de l’ANMV, et, d’autre part, leurs ayants droit, que sont les vétérinaires, les pharmaciens, et les groupements de producteurs d’animaux, trois types d’opérateurs autorisés par le code de la santé publique à revendre ces médicaments sur le marché de détail.

.

8. Avant de décrire ces divers opérateurs (B), il convient de mentionner les caractéristiques du produit (A), pour évoquer les pratiques observées dans ce secteur (C).

A. LE SECTEUR DU MÉDICAMENT VÉTÉRINAIRE

9. L’article L. 5111-1 du code de la santé publique11

10. La loi range également le « pré mélange médicamenteux » ainsi que « l’aliment médicamenteux » dans ces médicaments, sans toutefois considérer comme un médicament vétérinaire l’aliment supplémenté (c’est-à-dire contenant en faible pourcentage, sans qu’il soit fait mention de ses propriétés curatives ou préventives, certaines substances visées au code de la santé publique, comme certains antibiotiques ou coccidiostatiques, considérés comme « additifs de haute technologie »).

prévoit qu’« on entend par médicament toute substance ou composition présentée comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l'égard des maladies humaines ou animales, ainsi que toute substance ou composition pouvant être utilisée chez l'homme ou chez l'animal ou pouvant leur être administrée, en vue d'établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier leurs fonctions physiologiques en exerçant une action pharmacologique, immunologique ou métabolique ».

12

7 LEEM : syndicat patronal des entreprises du médicament (humain), qui comme le SIMV, est fédéré à la FEFIS (représentation des industries de la santé auprès du MEDEF). Le président du LEEM est par ailleurs président de SANOFI-AVENTIS France.

8Le GERS est un groupement d'intérêt économique (GIE), créé par les entreprises de l'industrie pharmaceutique, qui ont décidé de mettre en commun leurs données de ventes « Ville » et « Hôpital », utiles pour la compréhension et le suivi de leurs marchés. Les principales missions du GERS sont de i) recueillir, traiter, contrôler et mettre à disposition les données dans les meilleurs délais, ii) concevoir et réaliser des études et outils à la pointe des technologies existantes. Le GERS recueille ses données auprès i) des grossistes-répartiteurs qui transmettent la totalité de leurs ventes, réalisées aux pharmacies d'officine et établissements de soins, ii) des adhérents eux-mêmes ou leurs dépositaires pour les ventes qu'ils réalisent en direct aux officines et aux hôpitaux, iii) d'un panel de plus de 5 000 pharmacies qui vient en complément des deux autres sources de données (voir : Toutefois, le GERS paraît ne regrouper que des laboratoires, alors que dans le présent dossier l’AIEMV regroupe à la fois laboratoires et grossistes.

9 Contacts avec l’ANMV, cotes 1418 et suivantes, procédures ANMV cotes 278 et suivantes, missions cotes 517 et suivantes.

10Entreprises agréées par l’ANMV dans son courriel du 5 mars 2012, cotes 1462 et suivantes.

11 Tel que modifié pa

12Rapport sur la distribution au détail du médicament vétérinaire, mars 2002 (data 2000), IGAS/COPERCI Ministère de l’emploi et de la solidarité, Agriculture et Pêche, Rapport 2002-014, cotes 1013 et suivantes.

(5)

11. La définition légale du médicament, qu’il soit vétérinaire ou à usage humain, est donc unique.

12. Le périmètre du présent dossier est celui des activités de recherche et développement, de production et de ventes de produits de santé à destination des animaux domestiques ou de rente. Six grandes catégories de médicaments vétérinaires peuvent ainsi être distinguées13

o les anti-infectieux (essentiellement les antibiotiques, mais également les antirétroviraux et les antifongiques, qui représentent plus de 16 % des ventes en 2010),

:

o les antiparasitaires (> 22 % des ventes en 2010), o les réactifs,

o les vaccins (> 19 % des ventes en 2010), o les produits biotechnologiques,

o les autres produits pharmaceutiques14

Ainsi, le terme de « médicament vétérinaire » dans le présent dossier s’entend-il d’une façon large (sans se limiter aux seuls produits faisant l’objet d’AMM, mais couvrant tous les produits vétérinaires fabriqués par les laboratoires).

, étant précisé que près de 42 % des ventes en 2010 regroupent essentiellement des produits ne nécessitant pas d’AMM, tels que produits dermatologiques, produits d'hygiène bucco-dentaire, produits topiques, produits anti-inflammatoires contenant notamment de la cortisone, et produits d’alimentation pour animaux.

13. Plusieurs éléments rendent complexe le chiffrage du secteur, puisque :

o au-delà de la pharmacie vétérinaire, une partie de l’alimentation animale entre dans le champ d'activité des entreprises du secteur, à hauteur d’au moins 10 % du chiffre d’affaires des grossistes-répartiteurs de médicaments vétérinaires ;

o le chiffre d’affaires du médicament vétérinaire des laboratoires peut résulter de l’activité d’une filiale dédiée à la santé animale appartenant à un groupe pharmaceutique donné (par exemple MERIAL, du groupe SANOFI), ou bien rester englobé dans les recettes totales du groupe avec celles du médicament à usage humain (par exemple BAYER, qui dispose d’une division « santé animale », mais sans comptes sociaux distincts). Les professionnels estiment généralement que le chiffre d’affaires du médicament vétérinaire représente entre 2,7 15 et 4 %, voire 5 %16

o par ailleurs, une partie des ventes de médicaments antiparasitaires (catégorie regroupant les antiparasitaires internes tels que les vermifuges, ainsi que les externes tels que les insecticides) à destination des animaux de compagnie sont faites par la distribution spécialisée (dans les jardineries notamment), et ne transitent donc pas nécessairement par les grossistes distributeurs – or, la part de cette catégorie de produits dans les ventes des laboratoires n’est pas insignifiante (22 %, voir ci-dessus) ;

, de celui du médicament à usage humain – l’estimation variant donc presque du simple au double ;

13 Nomenclature retenue dans le rapport XERFI sur le médicament vétérinaire septembre 2011, spéc. cote 93.

14 Rapport XERFI précité, cotes 80 à 162, spéc. cote 90.

15 Étude XERFI Septembre 2011 médicaments vétérinaires cotes 80 et suivantes.

16 Page 26 du rapport IGAS de Mars 2002 sur « la distribution au détail du médicament vétérinaire » cotes 1013 et suivantes, déjà cité.

(6)

o le chiffre d’affaires des fabricants français de médicaments vétérinaires, tel que publié dans leurs comptes, peut englober des recettes à l’export ; or, certains fabricants peuvent exporter plus de 40 % de leur fabrication et ces exportations sont à écarter pour l’examen du seul marché français ;

o enfin, les laboratoires peuvent vendre aux ayants droit en direct par l’intermédiaire de dépositaires, ces recettes correspondant donc à des ventes de détail et non à des ventes en gros.

14. Un chiffrage exact des marchés amont, de gros et de détail du médicament vétérinaire, supposerait une instruction plus approfondie qui n’est pas nécessaire pour répondre à la demande d’avis.

B. LES MARCHÉS DU MÉDICAMENT VÉTÉRINAIRE ET LEURS ACTEURS

1. LE MARCHÉ DE LA FABRICATION (MARCHÉ AMONT)

15. Sur une quarantaine de fabricants identifiés par l’instruction, quelques-uns d’entre eux détiennent une position forte : il s’agit des sociétés Pfizer (leader mondial), Merial (groupe Sanofi), MSD Santé Animale (groupe Merck), Bayer (Allemagne), Elanco (Lilly – USA), et Novartis, soit six opérateurs principaux qui totaliseraient ensemble 69 % de parts de marché17, cette configuration reflétant celle prévalant dans le secteur du médicament à usage humain. L’AIEMV18 pour sa part indique qu’à la fin de l’année 2009 les quatre premiers laboratoires représentaient 55,2 % du marché des produits de santé animale (alimentation animale comprise)19

16. Au niveau de la fabrication, le secteur paraît relativement concentré avec moins de dix principaux opérateurs. Le SIMV

.

20

17. Le chiffre d’affaires d’un laboratoire, comme évoqué plus haut, résulte essentiellement de ses ventes aux grossistes (voir ci-dessous) mais recouvre aussi des ventes de médicaments antiparasitaires pour animaux de compagnie distribués en magasin spécialisé, éventuellement de recettes à l’export, ainsi que des ventes en direct pour environ 10 % de la production, au travers de dépositaires (voir ci-dessous).

évalue quant à lui le chiffre d’affaires des fabricants (du seul médicament vétérinaire) entre 750 et 850 M€.

18. De façon générale, les fabricants de médicaments vétérinaires sont soumis aux dispositions du code de la santé publique et du code de commerce.

17Étude XERFI septembre 2011 médicaments vétérinaires cotes 80 à 162.

18AIEMV : Association interprofessionnelle d’étude du médicament vétérinaire, voir plus loin.

19Chiffres clé du marché 2009 France, présentation de l’AIEMV cotes 1682 et suivantes.

20 SIMV : saisissant (Syndicat de l’Industrie du Médicament Vétérinaire et réactif), audition du 31 janvier 2012, cotes 1208 à 1216. Ce syndicat regroupe la plupart des laboratoires vétérinaires.

(7)

2. LE MARCHÉ DE LA VENTE EN GROS (DISTRIBUTEURS AGRÉÉS PAR L’ANMV21

a) Les grossistes-répartiteurs

, GROSSISTES OU DÉPOSITAIRES) DU MÉDICAMENT VÉTÉRINAIRE.

19. Les grossistes-répartiteurs sont les principaux clients des fabricants ci-dessus mentionnés.

Ils représenteraient 90 % de la distribution en gros du médicament vétérinaire, les 10 % restants correspondant aux ventes directes des fabricants (notamment transitant par des dépositaires).

20. L’ANSVADM22 précise que, parmi les grossistes-répartiteurs, Alcyon, Centravet, Ecoveto (ces trois opérateurs représentant 54,8 % du marché), Neftys Santé (> 14 %) et Hippocampe détiennent au moins 85 % sur le marché de gros23

21. Les recettes des grossistes-répartiteurs recouvrent non seulement les ventes de médicaments vétérinaires, mais également celles d’accessoires divers et d’aliments pour animaux. Le marché de gros est évalué par la profession entre 1,2 et 1,3 milliards d’euros, dont au moins 80 % assuré par ces grossistes-répartiteurs (y compris l’alimentation animale, pouvant elle-même représenter 12 % de leur chiffre d’affaires).

.

22. Les grossistes-répartiteurs de la médecine vétérinaire sont, en général, des opérateurs distincts de ceux de la médecine humaine. Certains répartiteurs « généralistes » peuvent distribuer des médicaments vétérinaires (pour leur clientèle de pharmaciens) mais davantage au titre d’un service « commercial » et ne constituent pas selon les personnes consultées des opérateurs significatifs. Le Conseil de la concurrence a eu l’occasion24

23. La distribution en gros du médicament vétérinaire s’avère quant à elle, à l’instar de celle du médicament à usage humain, également assez concentrée sur un marché stable. En revanche, son cadre réglementaire est relativement moins contraint (le médicament vétérinaire n’étant pas remboursable, et jusqu’à une loi de 1975

, dans une décision ayant donné lieu à des engagements, de rappeler les obligations de ces derniers : ils ont des obligations de service public (article R. 5515-13 CSP), peuvent exporter partie des médicaments (article 5106-2 CSP) et sont propriétaires du stock (à la différence des simples dépositaires, payés à la commission). Ils sont soumis à des règles particulières en matière de marge et de prix, dont il est envisagé de baisser le niveau courant 2012.

25

24. Les obligations des répartiteurs vétérinaires sont identiques à celles des répartiteurs du médicament humain, vis-à-vis de l’ANMV

, la fabrication, la détention et la vente des médicaments vétérinaires ayant été libres – à l’exception de certaines substances classées vénéneuses).

26

21 Étant rappelé que c’est l’ANMV ou Agence Nationale du médicament vétérinaire, basée à Fougères dans les locaux de l’ANSES (voir cotes 540 à 608, ou 517 à 522), qui délivre les AMM.

(délivrance d’AMM, obligations de stockage, d’approvisionnement dans des délais…).

22ANSVADM, (Association nationale des sociétés vétérinaires d'achat et de distribution de médicaments) cotes 1310 à 1316, audition du 8 février 2012.

23 Voir cotes 1623 et suivantes tableau récapitulatif des grossistes-répartiteurs de médicaments vétérinaires.

24 Décision du Conseil de la concurrence 07 D 22 du 5 Juillet 2007, engagements pris par les sociétés Sanofi Aventis France, Laboratoires Merck-Sharp & Dohme-Chibret, Lilly France et Boehringer Ingelheim France, cotes 776 à 806.

25Cette loi de 1975 a mis en place l’autorisation de mise sur le marché (AMM) du médicament vétérinaire, qui n’existait pas, et mis fin à la pratique du colportage qui prévalait jusque là.

26Email de l’ANMV cotes 1381 et suivantes, et 1412 et suivantes.

(8)

b) Les dépositaires (des fabricants)

25. Les dépositaires de médicaments vétérinaires agissent pour le compte des fabricants. Ils représenteraient 10 % de la distribution des médicaments vétérinaires aux ayants droit. La vente réelle est passée entre le fabricant et l’ayant droit, sans flux financier via le dépositaire qui n’est concerné que par le flux physique et se rémunère à la commission.

26. Ces dépositaires sont apparus il y a deux ou trois ans, le principal étant, selon l’ANSVADM,27 le groupe Neftys, avec sa holding Neftys Pharma dont le président est également le président de l’AIEMV. L’ANSVADM fait état du groupe Neftys comme d’un dépositaire, mais l’AEIMV le présente comme un grossiste-répartiteur. Neftys a ultérieurement précisé avoir à la fois les deux types d’activités28

27. Il peut également être mentionné que Neftys Pharma a reçu récemment l’autorisation de l’Autorité de la concurrence de prendre le contrôle de la société Logimpex

.

29

28. Les obligations réglementaires concernant les grossistes-répartiteurs ressortent de la lecture des articles R. 5141-104 et R. 5141-105 (obligations de déclarations et de signalements), R. 5141-108 (obligations de pharmacovigilance), R. 5142-51 (obligation de fournir, au besoin en moins de 24 heures) du code de la santé publique, et de l’arrêté du 21 mai 2005 (bonnes pratiques de distribution en gros des médicaments vétérinaires). Ces obligations ne concernent pas les dépositaires.

. Cette décision assimile les « produits vétérinaires » aux « médicaments vétérinaires » et distingue l’activité de grossiste-répartiteur et celle de dépositaire (§10).

30

29. L’ANSVADM considère que le recours aux dépositaires risque d’aboutir à évincer les

« petits » laboratoires : en effet, les dépositaires, non tenus comme les grossistes de s’approvisionner dans toutes les marques de médicaments, ne distribuent que celles de certains « gros » fabricants », au détriment éventuel de médicaments concurrents de plus

« petite » marque. L’ANSVADM observe enfin que les fabricants éliminent ou réduisent les remises jusque là consenties aux grossistes, préférant vendre le médicament en direct via ces dépositaires.

30. Si les acheteurs ayants droit livrés par les dépositaires sont les mêmes que ceux des grossistes-répartiteurs, les seuls vendeurs sont les laboratoires (et non leurs dépositaires, simples prestataires), par ailleurs fournisseurs des grossistes. Un fabricant peut donc se trouver le concurrent de son client grossiste.

31. Il peut être constaté enfin que nombre de dépositaires, agréés par l’ANMV, peuvent également y être inscrits comme grossistes-répartiteurs et manifestement pratiquer les deux activités en même temps (39 % des opérateurs, en chiffre d’affaires du marché 2010, se trouvant dans ce cas de cumul d’activités31

27 NEFTYS PHARMA : 444 653 794 R.C.S. LYON - SERVIPHAR : NEFTYS PHARMA a précisé qu’il s’agit aujourd’hui de la marque commerciale de sa holding, ELVETIS, marque abritant une activité de dépositaire. Voir mail du 16 février 2012 de NEFTYS, cote 1359.

).

28 Email du 16 février 2012 de NEFTYS, cotes 1359 et suivantes.

29 Décision 12-DCC-03 du 12 janvier 2012.

30 Réponse ANMV sur ce point au rapporteur, email du 20 février 2012, cotes 1461 et suivantes.

31 Tableau récapitulatif, cotes 1623 et suivantes.

(9)

3. LE MARCHÉ DE DÉTAIL (LES TROIS CATÉGORIES DAYANTS DROIT -LE CAS DES GIE)

a) Les vétérinaires, ayants droit

32. Dans la première catégorie d’ayants droit autorisés à acquérir des médicaments vétérinaires auprès des laboratoires et des grossistes, et conformément au code de la santé publique, se trouvent les vétérinaires.

33. Le métier de vétérinaire peut être très différent selon la filière (animaux de compagnie ou élevages d’animaux de rente, médecine de ville ou médecine rurale…) avec des logiques économiques distinctes. Si le marché de l’animal de compagnie est en forte croissance depuis plusieurs années, celui des animaux de rente est stable voire en régression. Selon le SNVEL, environ 4 % des vétérinaires - soit une cinquantaine de structures ou environ 300 vétérinaires, salariés ou libéraux, prescrivent 50 % des antibiotiques (en volume). Ces professionnels constituent des acheteurs importants.

34. Les vétérinaires exerçant à titre libéral (par différence avec les vétérinaires salariés) sont 9 000 à 10 000 en France (pour plus de 16 000 inscrits), avec des structures en général petites (en moyenne, 1,6 d’équivalent temps plein par cabinet), et des niveaux individuels d’achat modestes (moins de 100 K€/an d’achats de médicaments). La rentabilité nette d’un cabinet vétérinaire est la plus faible de toutes les activités libérales (20 % à 25 %)32

35. La distribution de médicaments vétérinaires représente, selon le SNVEL 40 à 60 % du chiffre d’affaires d’un vétérinaire. Ce pourcentage varie en fonction de la filière concernée : le vétérinaire « canin » réalise environ 40 % de son chiffre d’affaires avec la distribution de médicaments vétérinaires (en distribuant davantage d’alimentation), le vétérinaire rural plutôt 60 % (et beaucoup moins d’alimentation). Le SNVEL pense que le ratio moyen peut être de 50 %. Le XERFI quant à lui l’évalue à plus de 30 %.

.

33

36. Si on exclut par hypothèse les zoos et fermes d’attraction, les dépenses vétérinaires, y compris la nourriture pour animaux quand elle est achetée chez les vétérinaires, auraient représenté en 2010 3 864 millions d’euros34

37. Dans ce chiffre, 30 %

, dont 1 668 millions d’euros pour la clientèle des éleveurs et 2 196 millions d’euros pour celle des particuliers. S’agissant de dépenses effectuées par des consommateurs finals (marché de détail), elles correspondent en principe au chiffre d’affaires global de la profession des vétérinaires, qu’il s’agisse d’animaux de rente ou de compagnie.

35 correspondraient aux ventes de médicaments (soit 1 160 millions d’euros), faites par les vétérinaires. Comme ceux-ci assurent 77,7 % de ces ventes (en concurrence dans cette distribution avec les pharmaciens et avec les groupements de producteurs (voir ci-dessous), cela signifierait que le marché total du médicament vétérinaire36serait d’environ 1,5 milliard d’euros. Toutefois, en retenant le ratio de 50 % suggéré par le SNVEL, le même calcul aboutirait à 2,5 milliards d’euros37

32 «

L’évaluation des clientèles, UNASSA Octobre 2009 (Union Nationale des associations agréées) – Évaluation et transmission des cabinets libéraux » cotes 354 à 396 spéc. en page 25, et également « Vétérinaire aujourd’hui et demain », B DUHAUTOIS, Juin 2010, Spécialiste en chirurgie vétérinaire DMV, Bull. Acad. Vet. France 2010 Tome 163, cotes 398 et suivantes.

.

33 Rapport XERFI précité, cote 182.

34Source INSEE et source XERFI étude sur les vétérinaires août 2011, cotes 169 à 229.

35Ratio de 30 % suggéré dans le rapport du XERFI, donc assez inférieur à l’autre évaluation du SNVEL de 40 à 60 % (ci-dessus).

36 Le prix de détail payé par le consommateur au vétérinaire, étant de l’ordre de 1 160 x (100/77,7) = 1 493 M€.

37Calcul identique, avec 50 % x 3 864 M€ = 1 932 M€ puis (100/77,7) x 1 932 M€ = 2 487 M€ soit 2,5 milliards €).

(10)

38. Une autre approche peut consister à multiplier le nombre de vétérinaires exerçant à titre libéral par le chiffre d’affaires moyen de la profession : le résultat net moyen d’un vétérinaire (qui constitue sa rémunération nette annuelle avant impôt) est de l’ordre de 54 K€, soit au maximum le tiers de son chiffre d’affaires selon le SNVEL38. Le chiffre d’affaires global de la profession serait alors de 1,8 milliard d’euros39

39. En conclusion et en l’état des informations disponibles, le chiffrage de ce marché de détail est de l’ordre de 2 milliards d’euros (plus ou moins 0,5).

.

b) Les pharmaciens, ayants droit

40. Les pharmaciens appartiennent à la deuxième catégorie d’ayants droit. Un litige historique les oppose aux vétérinaires, les pharmaciens reprochant à certains vétérinaires de « tenir officine ouverte », les vétérinaires reprochant aux pharmaciens de délivrer des médicaments vétérinaires sans exiger de prescription… Les pharmacies s’approvisionnent plutôt auprès de leurs grossistes-répartiteurs de médicaments à usage humain, agréés par l’ANMV en tant que grossistes « mixtes » (mais il s’agit davantage, ainsi qu’il l’a été évoqué ci-dessus, d’un service commercial consenti aux pharmaciens, ces opérateurs n’étant pas significatifs sur le marché)40

c) Les groupements de producteurs (élevages), ayants droit à titre « restreint » .

41. Les groupements de producteurs et d’éleveurs déjà évoqués appartiennent à la troisième catégorie d’ayants droit habilités à acheter en gros des médicaments vétérinaires.

L’article L. 5143-6 du code de santé publique dispose en effet que « les groupements reconnus de producteurs, les groupements professionnels agricoles dont l'action concourt à l'organisation de la production animale et qui justifient d'un encadrement technique et sanitaire suffisant et d'une activité économique réelle d'une part, les groupements de défense sanitaire d'autre part, peuvent, s'ils sont agréés à cet effet par l'autorité administrative, acheter aux établissements de préparation, de vente en gros ou de distribution en gros, détenir et délivrer à leurs membres, pour l'exercice exclusif de leur activité, les médicaments vétérinaires à l'exclusion de ceux contenant des substances ayant fait l'objet d'obligations particulières au titre de l'article L. 5144-1. Toutefois, ces groupements peuvent également acheter en gros et détenir ceux des médicaments contenant des substances prévues à l'article L. 5144-1 qui figurent sur une liste arrêtée conjointement par les ministres chargés de l'agriculture et de la santé et sur proposition de l'Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail et qui sont nécessaires à la mise en œuvre des programmes sanitaires d'élevage visés à l'article L. 5143-7. Ces produits sont délivrés aux adhérents du groupement sur présentation d'une ordonnance du vétérinaire du groupement, qui revêt la forme d'une prescription détaillée, adaptant aux caractéristiques propres de chaque élevage, le programme sanitaire agréé ».

38 SNVEL, audition, cotes 1244 à 1251 du 8 février 2012.

39En estimant le chiffre d’affaires unitaire moyen à 180 K€ (CA moyen) x 10 000 (nombre de vétérinaires exerçant à titre libéral). Cette dernière évaluation peut rester compatible avec le chiffre de 2 196 M€ donné par l’INSEE pouvant correspondre aux seuls vétérinaires exerçant à titre libéral.

40 Voir réponse ANMV dans son email du 15 février 2012, cotes 1381 et suivantes, liste des entreprises (et établissements) distributeurs agréés : une partie importante de cette liste concerne des distributeurs « mixtes », en réalité des répartiteurs pharmaceutiques à titre principal (médicament humain) souhaitant pouvoir proposer du médicament vétérinaire aux pharmacies ; pour l’ANSVADM ils seraient, malgré leur nombre, non significatifs sur le marché de gros.

(11)

42. Ces groupements sont donc des ayants droit à titre « restreint », leurs achats en gros ne pouvant en principe porter que sur les médicaments figurant dans la liste autorisée en fonction de leur programme d’élevage.

43. Ainsi, les antibiotiques sont-ils des médicaments exclus de la liste déterminant les médicaments pouvant être acquis par les groupements de producteurs, ces derniers devant donc normalement les acquérir par un grossiste-répartiteur. Ceci reste assez théorique, vu les propos de la directrice générale de l’alimentation au ministère de l’agriculture41, et la teneur du rapport sur la distribution au détail du médicament vétérinaire de mars 2002 de l’IGAS42

d) Observations sur ces trois catégories d’ayants droit :

, qui affirme que « les groupements porcins de l’Ouest ne limitent pas leur activité pharmaceutique aux médicaments de la liste positive (…) mais détiennent pour les adhérents et leur distribuent tous les médicaments qu’ils utilisent dans leur élevage » (page 22 du rapport). Ces pratiques supposent que les grossistes-répartiteurs fournissent le groupement sans vérifier que la commande ne concerne que des médicaments de la liste autorisée.

44. En pratique et selon le SNVEL, les vétérinaires distribueraient 60 % des médicaments vétérinaires, les pharmacies 10 % et les groupements de producteurs 30 %. Toutefois, ces proportions varient sensiblement en fonction des sources (un ratio respectivement de 73 %, 7 % et 20 % ayant été également accepté43

45. Par le passé, le Conseil de la concurrence avait déjà observé une certaine dérive de la distribution du médicament vétérinaire, en ce que « aucun des professionnels concernés n'échappe à un constat de non-application de la loi : les vétérinaires ne rédigent pas toujours d'ordonnances alors qu'ils en ont l'obligation, les pharmaciens délivrent sans ordonnance alors que la plupart des médicaments vétérinaires sont sur prescription, et les groupements se procurent des médicaments bien au-delà de ce que leur permet la liste positive »

).

44

46. Ces trois catégories sont donc légalement les seuls ayants droit habilités à acheter en gros des médicaments vétérinaires et à les distribuer. Toutefois, sont apparus sur le marché ces dernières années des GIE, dont l’intervention, s’agissant de certains d’entre eux, a soulevé des controverses juridiques. Ils sont décrits ci-après.

.

e) Les GIE ou regroupements de vétérinaires

47. Il s’agit à l’origine et le plus souvent de GIE de vétérinaires. Le SNVEL45

41Rencontres nationales vétérinaires, discours du 2 décembre 2011, cotes 1096 à.1105.

indique qu’il s’agit généralement de cliniques qui se regroupent pour l’achat de leurs médicaments. Ces GIE ne peuvent toutefois pas acheter le produit, n’étant pas légalement un ayant droit au sens du code de la santé publique, mais prennent des engagements en termes de volumes vis-à-vis des fabricants. Ils seraient environ 250 à 300 sur le territoire. Le SNVEL s’est déjà interrogé sur la régularité de tels montages. D’autres groupements peuvent être constitués de pharmaciens, ou sont des GIE purement financiers.

42Rapport IGAS cotes 1012 à 1093.

43 Page 12 du rapport IGAS 2002 sur la distribution au détail du médicament vétérinaire, déjà cité.

44 Avis n° 04-A-l0 du 15 juin 2004 portant sur un projet de décret relatif à l'importation des médicaments vétérinaires et modifiant le code de la santé publique, § 22, en cotes 759 et suivantes.

45Audition précitée du SNVEL du 8 février 2012, spéc. Cotes 1244 à 1251. Le SNVEL a communiqué copie des statuts de trois types de GIE ou SCM (vétérinaires, pharmaciens, groupements), en annexe à cette audition.

(12)

48. De son côté, l’ANSVADM (constituée des trois principaux grossistes) déclare46

49. Le rapport de l’IGAS de 2002

que l’apparition assez récente de ces GIE n’a pas eu de conséquence particulière sur le marché de gros.

47

50. Les pratiques commerciales de ces GIE sont évoquées ci-après.

déjà cité, évoque les pratiques de certains groupements d’éleveurs, qui achètent souvent en gros des médicaments non autorisés dans leur liste dérogatoire. Ces pratiques ne sont possibles qu’avec le concours de leurs vétérinaires, organisés ou non en GIE ; ceux-ci, d’une part commandent et détiennent les médicaments inscrits sur la liste et nécessaires à la mise en œuvre du plan sanitaire d’élevage spécifique au groupement, mais d’autre part peuvent aussi, comme tout vétérinaire dans le cadre d’un exercice libéral, acheter et prescrire à titre personnel tout médicament pour le groupement d’éleveurs.

Conclusions sur le secteur du médicament vétérinaire

51. En l’état des informations disponibles, le médicament vétérinaire représenterait donc un chiffre d’affaires de l’ordre de 0,75 à 0,85 milliard d’euros au stade de la fabrication (le ministère de l’agriculture retenant également une approximation de 0,8 milliard d’euros), 1 à 1,1 milliard d’euros au niveau de la vente en gros, et 1,5 à 2,5 milliards au niveau de la vente de détail. Les deux premiers niveaux sont concentrés (quelques laboratoires leaders, quelques distributeurs prépondérants) et le troisième très morcelé (plus de 10 000 vétérinaires et de 22 000 pharmaciens, plusieurs centaines de groupements d’éleveurs).

C. LES PRATIQUES TARIFAIRES OBSERVÉES DANS LE SECTEUR DE LA DISTRIBUTION DU MÉDICAMENT VÉTÉRINAIRE

52. Les grossistes-répartiteurs de l’ANSVADM ont évoqué un système de remises quantitatives de fin d’année mis en place par les fabricants : ce système consiste, pour les laboratoires, à faire visiter régulièrement les vétérinaires par des représentants médicaux, qui leur offrent contractuellement des remises de fin d’année en fonction d’un objectif annuel de commandes48

53. Aux dires de l’AIEMV, ces remises peuvent être extrêmement significatives.

. L’ANSVADM se déclare étrangère à ce système, qu’elle considère bipartite (entre laboratoires et vétérinaires).

49

54. Cette divergence de propos pourrait tenir à l’ambiguïté du statut de certains opérateurs qui sont à la fois grossistes et dépositaires : le dépositaire, simple prestataire du fabricant, peut en effet servir d’intermédiaire à son mandant pour reverser éventuellement des remises de fin d’année à certains ayants droit, puisqu’il est le mieux placé pour vérifier la réalité des flux physiques à cette date. Ainsi, les grossistes de l’ANSVADM peuvent-ils déclarer le schéma bipartite et y être étrangers, et une entreprise comme Neftys, qui se présente plutôt comme grossiste, mais perçue comme un dépositaire par les autres, et qui a de toute façon D’après elle, le système des remises de fin d’année est tripartite, celles-ci transitant par le grossiste qui les redistribue au vétérinaire.

46Audition ANVASDM, cotes 1310 à 1316.

47 Rapport IGAS sur la distribution au détail du médicament vétérinaire, déjà cité.

48 Audition de l’ANSVADM, cotes 1310 à 1316 du 8 février 2012.

49 Audition AIEMV, cotes 1338 à 1364 du 15 février 2012.

(13)

la double appartenance auprès de l’ANMV, peut-elle considérer que le schéma est tripartite et transite « par le grossiste ».

55. Cette pratique bénéficie à certains GIE de vétérinaires désireux de grouper leurs achats, ou aux vétérinaires des groupements d’éleveurs.

56. La pratique commerciale, dite des « remises de fin d’année », est connue des services du ministère de l’agriculture50

57. En l’état actuel, et vu les termes de l’article L. 441-7 du code de commerce, tel que modifié par la lo

.

de rabais ou de ristournes de fin d’année, en l’occurrence ici des remises quantitatives de fin d’année, n’est pas prohibée par le code de commerce en tant que telle.

58. Cette pratique concerne toutefois le produit particulier que constitue le médicament vétérinaire : la question de la compatibilité des dispositions du code de commerce avec celles prévues à l’article R. 5141-87 du code de la santé publique, qui dispose qu’il « est interdit aux entreprises mentionnées à l'article R. 5142-1 (ie : les laboratoires fabricants) de remettre directement ou indirectement aux utilisateurs et aux personnes habilitées à prescrire ou à délivrer des médicaments des primes, des objets ou produits quelconques ou de consentir des avantages matériels directs ou indirects autres que les conditions tarifaires en vigueur »), et avec celles du code rural, notamment son article R. 242-49 qui dispose que « la rémunération du vétérinaire ne peut dépendre de critères qui auraient pour conséquence de porter atteinte à son indépendance ou à la qualité de ses actes de médecine vétérinaire », est discutée par les professionnels.

59. Le ministère de l’agriculture envisagerait51

60. Les services du ministère de l’agriculture indiquent avoir le projet « de rendre les pratiques commerciales des vétérinaires plus transparentes, de répondre à certaines critiques pour permettre de préserver l’implantation des vétérinaires et leur maillage sur le territoire. Ce projet est finalisé et a été adressé pour consultation des diverses administrations concernées (Santé, Justice, DGCCRF), et sera adressé aux diverses instances professionnelles concernées (industrie du médicament, syndicats vétérinaires et ordres divers) dans le courant du mois de mars

de réglementer ces pratiques commerciales en matière de distribution de médicaments vétérinaires, pour clarifier la question.

52

II. Les questions posées par la saisine

». Les trois catégories d’ayants droit ne seraient plus autorisées à convenir contractuellement de remises de fin d’année avec les fabricants.

61. Les questions posées par le SIMV à l’Autorité sont les suivantes :

• « Un syndicat professionnel lié à la santé publique peut-il créer une centrale d’achat dont il est l’unique actionnaire et le principal dirigeant dans le but d’intervenir directement dans les négociations commerciales sans sortir de sa mission et de sa déontologie professionnelle ?

50 Audition des services du Ministre (DGAL) du 3 mars 2012, cotes 1414 à 1460 du 2 mars 2012.

51 Audition des services du Ministre (DGAL) du 3 mars 2012, cotes 1414 à 1460.

52 Audition de la DGAL précitée note n° 59.

(14)

La proximité capitalistique et l’identité des dirigeants entre le SNVEL et Isovet ne risquent-elles pas de fausser le jeu de la concurrence par des échanges d’information pouvant déboucher sur des pratiques commerciales coordonnées et restrictives de concurrence ?

La volonté affichée d’Isovet et du SNVEL d’intervenir directement sur le marché de la distribution des médicaments vétérinaires afin de mieux « partager » les remises ne porte-t-elle pas atteinte directement à la liberté des prix et de la concurrence ?

Enfin la création d’Isovet ne risque-t-elle pas d’entraîner une concurrence déloyale vis-à-vis des distributeurs en gros qui sont soumis, de par leur statut réglementaire, à des contraintes de santé publique qui alourdissent leurs charges et diminuent de facto leur pouvoir de négociation ? ».

62. Les interrogations du SIMV font référence à la création par le SNVEL dans le courant de l’année 2011 d’une société commerciale, Isovet, dont le SNVEL est l’unique actionnaire.

Selon les statuts de cette société53

63. Isovet n’est donc pas une centrale d’achat, et intervient comme mandataire des vétérinaires adhérents.

, et les déclarations du SNVEL, Isovet a essentiellement pour objet « d'intervenir en qualité de commissaire à l'achat auprès des fournisseurs, pour le compte de professionnels libéraux et en particulier des vétérinaires (…), de négocier les prix et les conditions d'approvisionnement des Commettants auprès des laboratoires et des fournisseurs de tous produits et services, - de mutualiser, administrer, par regroupement ou autres moyens, les conditions tarifaires d'achats de ces commettants à l'exclusion de toute intervention dans les circuits de distribution existants».

54

64. Isovet se propose de recueillir les mandats

Dans sa charte, Isovet indique le principe d’une adhésion annuelle fixe payante, ainsi « que le prélèvement d’une quote-part directement proportionnelle aux chiffres d’achats », la « contrepartie » du vétérinaire adhérent vis-à-vis du fabricant devant également être proportionnelle au montant de la remise obtenue. Le texte précise également : « Isovet ne souhaite en aucune façon intervenir dans les relations existantes entre les adhérents et leurs Centrales de distribution vétérinaires : en particulier la prise de commande, la livraison, et la facturation des achats professionnels des adhérents ».

Isovet n’intervient donc pas dans la relation directe habituelle entre le vétérinaire et son fournisseur (qu’il soit un grossiste, ou un fabricant via un dépositaire).

55 des vétérinaires intéressés, devenus adhérents, aux fins de négocier en leur nom auprès des fabricants. Son principe de fonctionnement est donc celui d’une centrale de négociation, commissionnaire aux achats, (puisque l’achat proprement dit demeure passé entre le vétérinaire adhérent d’Isovet et son grossiste- répartiteur habituel, ou le cas échéant le laboratoire directement). Le site internet d’Isovet précise que « Isovet n'indiquera ni prix d'achat, ni prix de vente, mais accompagnera les adhérents dans la fixation éclairée et individualisée des prix de vente56

65. Le SNVEL a exposé que la création d’Isovet correspondait à un objectif de retour à la transparence, les lois successives (Loi Galland, LME …) ayant conduit les fabricants à segmenter leur clientèle à l’extrême, en rendant leurs pratiques illisibles pour les acheteurs.

».

53 Statuts d’Isovet cotes 15 et suivantes (annexes de la saisine).

54 Copie de la charte Isovet, cotes 40 à 46 (annexes de la saisine). L’instruction n’a pas obtenu copie du contrat type entre Isovet et un fabricant de médicament (demandé au SNVEL le 8 février 2012 puis le 5 avril). Pour comparaison et pour mémoire, copie d’un contrat de remise de fin d’année entre un GIE de vétérinaires et un fabricant de médicaments cotes 1478 et suivantes (confié par le SIMV sur demande du rapporteur).

55 Cote 54 de la saisine.

56 Cote 71 de la saisine.

(15)

Isovet doit leur permettre d’accéder à des remises auxquelles ils ne pourraient pas prétendre en restant « seuls ». Toutefois, Isovet ne prend, face aux fabricants, aucun engagement en termes de volumes, tenant à préserver l’indépendance de prescription du vétérinaire. Cette indépendance consiste pour le vétérinaire à prescrire librement le médicament, hors toute considération mercantile. Isovet a collecté auprès de ses adhérents les statistiques d’achats (en volumes) de leurs principaux médicaments sur les deux dernières années. Muni de ces informations et de ses mandats, Isovet a rencontré les fabricants pour connaître les remises envisageables.

66. Entendu en qualité de témoin, le SNVEL a précisé en séance qu’Isovet comptait à ce jour 1 243 vétérinaires adhérents, pouvant représenter environ 10 % des achats des vétérinaires d’exercice libéral, et qu’il s’agissait de petites, voire très petites structures (une à deux personnes par cabinet vétérinaire avec moins de 200 K€ d’achats de médicaments par an).

67. En l’espèce, les fabricants et les vétérinaires sont en désaccord sur la notion de contrepartie économique : les fabricants la réclament pour pouvoir offrir un certain tarif (comme avec les GIE) en conformité selon eux avec le code de commerce, les vétérinaires l’écartant comme contraire à leur déontologie, conformément au code rural. Cette contrepartie devrait comporter, d’après les fabricants, des engagements sur des volumes de commandes, ce à quoi se refuserait Isovet.

68. Le SNVEL estime que la création d’Isovet aboutira à ce que les GIE obtiennent moins de remises par les laboratoires, et ce au bénéfice des vétérinaires mandants d’Isovet. En effet, si les deux systèmes procèdent du même esprit, les intéressés ne sont pas les mêmes : Isovet devrait théoriquement confédérer des vétérinaires isolés payant actuellement leurs médicaments au prix unitaire, alors que les GIE peuvent concerner quelques vétérinaires opérant sur des élevages, procédant à des achats massifs et bénéficiant de remises significatives.

69. Par sa première question, le SIMV interroge en somme l’Autorité sur la licéité de la création d’Isovet au regard des statuts et de l’objet du SNVEL.

70. Par sa deuxième question, le SIMV s’interroge sur la proximité d’Isovet et du SNVEL, éventuellement porteuse d’un risque d’échanges d’informations et donc de pratiques anticoncurrentielles.

71. Par sa troisième question, le SIMV émet l’hypothèse qu’Isovet et le SNVEL portent atteinte à la libre concurrence avec l’objectif de l’obtention de « remises ».

72. La quatrième question porte sur le risque de concurrence déloyale sur le marché de gros né de la création d’Isovet.

III. Analyse

73. A la différence de sa fonction décisionnelle, qui amène l’Autorité de la concurrence à intervenir sur des affaires individuelles de concentration ou de pratiques anticoncurrentielles, sa mission consultative lui permet de s’exprimer sur toute question de concurrence et d’émettre, le cas échéant, des propositions aux fins d’améliorer le fonctionnement concurrentiel des marchés.

(16)

74. Sur le fondement de l’article L. 462-1 alinéa 2 du code de commerce, l’Autorité de la concurrence peut, à la demande des pouvoirs publics (gouvernement ou parlement), des collectivités territoriales, des juridictions, ou encore des organisations professionnelles, syndicales ou de consommateurs, être conduite à rendre des avis sur toute question de concurrence. C’est dans ce cadre que le SIMV a saisi l’Autorité.

75. Les questions posées par le SIMV sont de deux types : la première soulève des préoccupations de licéité en général. Les autres soulèvent en réalité des préoccupations de concurrence. Les autres portent sur les conséquences éventuelles s’agissant du fonctionnement de la concurrence sur le marché en cause, de l’arrivée d’un nouveau type d’opérateur que constitue Isovet.

A. EN CE QUI CONCERNE LA PREMIÈRE QUESTION

76. Le SIMV demande si un syndicat professionnel peut créer sa propre centrale d’achat et s’en instituer seul actionnaire et seul dirigeant, sans sortir de sa mission ni contrevenir à sa déontologie.

77. Le contrôle de la conformité des actes d’un syndicat professionnel avec ses statuts, ou avec les règles qui gouvernent la profession, n’entre pas dans la compétence de l’Autorité de la concurrence. Ce rôle incombe au juge de droit commun civil ou administratif, ou éventuellement au juge pénal, les questions déontologiques relevant en outre de l’autorité ordinale57

78. Il n’appartient donc pas à l’Autorité de formuler un avis sur cette question.

.

B. EN CE QUI CONCERNE LES AUTRES QUESTIONS RELATIVES AU PRINCIPE DE FONCTIONNEMENT D’ISOVET

79. Le SIMV demande d’abord si la proximité d’Isovet et du SNVEL est porteuse de risques d’échanges d’informations anticoncurrentiels, étant établi que ces deux structures ont les mêmes dirigeants, les mêmes membres, et la même adresse.

1. SUR LES PRATIQUES SUSCEPTIBLES DAPPARAÎTRE À LA REVENTE

80. Les vétérinaires, donnant mandat à Isovet pour négocier auprès des fabricants, ne sont pas nécessairement tous concurrents entre eux, pour des raisons évidentes à la fois de géographie ou de spécialisation. Par ailleurs, en l’état des informations disponibles, aucun d’entre eux ne paraît se situer en position dominante sur le marché de la distribution de détail du médicament vétérinaire, même si l’ensemble de cette profession de plus

57 Pour un exemple de compétence judiciaire : arrêt de la Cour de cassation, rendu en Chambre mixte, du 10 avril 1998, pris au visa des articles L. 411-1, L. 411-2, L. 481-1 du code du travail alors applicable, qui indique que « toute personne justifiant d'un intérêt à agir est recevable à contester la qualité de syndicat professionnel d'un groupement dont l' objet ne satisfait pas aux exigences des articles L. 411-1 et L. 411-2 du Code du travail, et à en demander la nullité, indépendamment du droit, pour le procureur de la République, d'en requérir la dissolution dans les conditions prévues par l'article L. 481-1 du même Code en cas d'infractions commises par ses dirigeants ou administrateurs. Par suite, est encourue la nullité d'un syndicat d'organisation de la profession d'ostéopathes diplômés d'État en kinésithérapie dont l' objet est illicite en ce qu'il regroupe des masseurs-kinésithérapeutes qui entendent pratiquer l'ostéopathie de manière indépendante, sans diagnostic médical préalable ».

(17)

de 10 000 personnes distribue plus de 60 % du médicament vétérinaire, en concurrence avec les pharmacies et les groupements d’éleveurs. On ne peut néanmoins pas exclure qu’un vétérinaire puisse se situer en position dominante sur un marché géographique local particulier.

81. Il est possible que des vétérinaires, adhérents d’Isovet, se retrouvent en concurrence entre eux sur tel ou tel marché local, ainsi d’ailleurs qu’avec d’autres pharmacies et autres groupements de producteurs. Le SNVEL, une fois connues les conditions tarifaires obtenues par Isovet, et étant rappelé que le SNVEL est l’unique actionnaire de la société Isovet, pourrait donner à ses membres des consignes de prix à la revente, alors que le prix du médicament vétérinaire est libre.

82. Or, conformément à une pratique décisionnelle constante « … s'il est loisible à un syndicat professionnel ou à un groupement professionnel de diffuser des informations destinées à aider ses membres dans l'exercice de leur activité, (cette aide) ne doit pas exercer d'influence directe ou indirecte sur le libre jeu de la concurrence à l'intérieur de la profession ; qu'en particulier, les indications données ne doivent pas pouvoir avoir pour effet de détourner les entreprises d'une appréhension directe de leurs coûts, qui leur permette de fixer individuellement leurs prix ou honoraires" »58. Il est également de jurisprudence constante «…que les mesures appliquées par une organisation professionnelle ne doivent pas excéder la défense des intérêts de la profession dont elle est investie. Dans le cas présent, le comportement de l’Ordre n’a pas consisté en de simples recommandations faites aux architectes sur la base de raisons objectives mais bien en de multiples mesures dissuasives mises en œuvre tant auprès des maîtres d’ouvrage que des architectes. »59

83. Il appartient donc à Isovet, compte tenu de la qualité de son actionnaire unique, de veiller à la conformité de ses pratiques au regard du droit de la concurrence.

. En application de cette pratique décisionnelle, d’éventuelles consignes de prix à la revente par Isovet à ses membres seraient susceptibles de revêtir la qualification d’entente prohibée par l’article L. 420-1 du code de commerce – ce risque d’ailleurs pouvant aussi bien concerner les membres d’un GIE.

2. SUR LA POTENTIALITÉ DÉCHANGES DINFORMATIONS

84. Selon la pratique décisionnelle de l’Autorité,60

85. Dans ces conditions, il convient qu’Isovet, émanation directe du SNVEL, à la fois au fait du niveau des remises de fin d’année obtenues et de la stratégie commerciale de la profession, évite tout échange d’informations susceptible de permettre aux vétérinaires d’aligner leurs prix entre eux.

les échanges d’informations confidentielles et stratégiques entre concurrents sont de nature à accroître artificiellement la transparence du marché et à réduire l’autonomie de chaque entreprise sur ce marché, et même s’ils ne portent pas sur les prix, peuvent être anticoncurrentiels.

86. Le SIMV demande ensuite si la création d’Isovet constitue une pratique anticoncurrentielle de la part des vétérinaires, soit qu’elle soit susceptible de remettre en cause le système des remises tel qu’il fonctionne actuellement, soit qu’elle constitue une forme de concurrence

58 Décision n° 97-D-45 du 10 juin 1997.

59 Décision n° 04-D-25 du 23 juin 2004 relative aux pratiques mises en œuvre dans le domaine des honoraires d’architecte dans les marchés de maîtrise d’œuvre en Aquitaine.

60 Décision n° 05-D-64 « palaces parisiens », confirmée par CA Paris, 26 septembre 2006, Le Bristol.

(18)

déloyale vis-à-vis des grossistes-distributeurs soumis à diverses contraintes réglementaires alourdissant leurs charges et de facto diminuant leur pouvoir de négociation.

87. La pratique des ventes directes par les fabricants d’une part, et celle du système des

« remises de fin d’année », d’autre part, ne sont pas nouvelles. L’apparition d’Isovet est indifférente à cet aspect de la distribution du médicament vétérinaire. Il peut être simplement observé que ces deux types de pratiques aboutissent à une forme d’éviction des grossistes, ce qui ne paraît pas en soi restrictif de concurrence si l’effet est seulement de modifier la répartition de la marge aux différents stades de la distribution.

3. SUR LES DIFFÉRENCES DE RÉGLEMENTATION ENTRE OPÉRATEURS

88. Le SIMV invoque la différence de réglementation s’imposant aux opérateurs intervenant dans la distribution des médicaments vétérinaires en fonction de leur statut. Cette question revient à demander si Isovet, non soumis aux mêmes obligations légales que les grossistes, ne leur ferait pas ainsi une concurrence déloyale. Il peut être relevé que la question peut se poser à l’identique concernant les GIE de vétérinaires, ou concernant les dépositaires, qui ne sont pas davantage soumis à ces obligations et qui permettent aux fabricants une éviction relative des grossistes. En toute hypothèse, il n’appartient pas à l’Autorité de se prononcer sur cette question, l’Autorité ne pouvant qu’observer que les grossistes- répartiteurs, qui sont des intermédiaires dans le circuit de distribution du médicament, se distinguent des acheteurs/prescripteurs que sont les vétérinaires.

4. SUR UNE ÉVENTUALITÉ DE DISCRIMINATION ANTICONCURRENTIELLE DU FAIT DES FABRICANTS

89. Dans un rapport au gouvernement du 12 février 2008, Mme Marie-Dominique Hagelsteen61

90. L’article L. 441-6 du code de commerce, dans sa rédaction actuelle, envisageant la transparence des pratiques commerciales, autorise les différenciations tarifaires.

avait constaté un effet pervers de la prohibition des discriminations tarifaires, ayant abouti à une réduction de l’intensité concurrentielle et à une certaine spirale inflationniste sur les prix des produits de grande consommation, en incitant au report des marges de « l’avant » à « l’arrière ».

91. La création d’Isovet n’est pas de nature à empêcher chaque laboratoire d’avoir une politique commerciale et tarifaire adaptée aux particularités d’Isovet, et donc à son profit, comme c’est déjà le cas vis-à-vis de certains GIE, conformément à la liberté de différenciation reconnue par l’article L. 441-6 précité. Il appartient en revanche aux fournisseurs de se garder de discriminations tarifaires qui seraient le fruit d’une entente, ou, le cas échéant, d’un abus de position dominante.

5. SUR UN RISQUE DABUS DE PUISSANCE DACHAT DU FAIT D’ISOVET

92. Les lignes directrices, sur l'applicabilité de l'article 101 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne aux accords de coopération horizontale, peuvent fournir un cadre d’analyse pour les types d’accords de coopération horizontale les plus courants, comme

61 M. D. Hagelsteen, rapport sur « La négociabilité des tarifs et des conditions générales de vente » cotes 835 à 878.

(19)

celui des achats groupés : « Ce type d'achat peut être réalisé par l'entremise d'une société contrôlée conjointement, d'une société dans laquelle de nombreuses autres entreprises détiennent des participations minoritaires, sur la base d'un accord contractuel, ou au travers d'une forme de coopération encore plus souple (collectivement dénommés ci-après

"accord d'achat groupé"). Les accords d'achat groupé visent généralement à créer une puissance d'achat susceptible de conduire à une baisse des prix ou à une amélioration de la qualité des produits ou des services pour les consommateurs. Toutefois, la puissance d'achat peut aussi, dans certains cas, poser des problèmes de concurrence62

93. Dans le présent dossier, dès lors qu’Isovet regroupe 1 243 vétérinaires, soit moins de 10 % des vétérinaires inscrits, cette société ne dispose pas à ce jour d’un pouvoir de marché considérable à l’achat.

. »

94. Les éventuels effets restrictifs d’un abus de puissance d’achat ne pourraient pas être, sur le marché d’achat, une augmentation de ces prix d’achat puisque les membres d’ISOVET, précédemment isolés, achetaient par définition au prix le plus élevé. Un effet possible pourrait être une diminution de la production de médicaments, une baisse de leur qualité ou une raréfaction de leur gamme, si les négociations d’ISOVET se cantonnaient à quelques médicaments principaux au détriment d’autres médicaments substituables, donc au préjudice de certains laboratoires. S’agissant du risque d’éviction d’autres acheteurs, il paraît peu vraisemblable, eu égard à la capacité des laboratoires de satisfaire la demande, étant rappelé qu’ISOVET ne représente que 10 % des vétérinaires inscrits, se situant ainsi et a priori en deçà du seuil d’exemption de 15 %.

95. Sur le marché de la revente au détail des médicaments, par les vétérinaires adhérents d’Isovet, le prix final aurait logiquement vocation à baisser. Ce facteur est de nature à animer la compétition par les prix entre les vétérinaires et d’autres opérateurs tels que les pharmaciens. Cette possibilité serait donc pro concurrentielle.

96. Des formes indirectes d’achats groupés sont déjà apparues avec les GIE de vétérinaires - même si la vente proprement dite reste en réalité effectuée entre le grossiste-répartiteur et le vétérinaire (et non le GIE), sans que ces GIE aient apparemment perturbé le marché de gros du médicament vétérinaire. Or, la démarche de ces GIE et d’Isovet semble procéder du même esprit.

Conclusions sur les trois dernières questions de la demande d’avis

97. Il convient de rappeler qu’« il n'appartient pas à l'Autorité, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'avis, de qualifier des pratiques au regard des articles L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce, une telle qualification relevant exclusivement de ses fonctions contentieuses et selon une procédure contradictoire »63

98. Le Conseil de la concurrence, dans son avis n° 06-A-18 du 5 octobre 2006 relatif à un projet d'indicateur d'occupation des hôtels de la région de Mulhouse a rappelé que « si l'article L. 462-1 du code de commerce ouvre la possibilité à une organisation professionnelle de saisir pour avis le Conseil de la concurrence de toute question de concurrence, il n'a pas pour objet de permettre un examen précontentieux d'une pratique.

Les réponses apportées à une demande d'avis ne sauraient en rien préjuger de l'appréciation que le Conseil de la concurrence pourrait porter sur des faits identiques ou comparables, dont il pourrait être ultérieurement saisi dans le cadre d'une affaire contentieuse. »

.

62Paragraphe 189 de ces lignes directrices.

63Avis n° 10-A-ll du 7 juin 2010 relatif au Conseil interprofessionnel de l'optique.

(20)

99. En conclusion, une forme d’achat groupé, quoiqu’il ne s’agisse pas en l’espèce d’achat stricto sensu s’agissant d’Isovet, qui est une centrale de négociation commissionnaire aux achats, ne paraît pas prohibée prima facie. Néanmoins, la qualification de telles pratiques au regard du droit de la concurrence ne saurait résulter que d’une instruction plus approfondie et contradictoire, dans un cadre contentieux.

100. Tout au plus, l’Autorité peut-elle observer que l’apparition, sur le marché de la distribution des médicaments vétérinaires, d’une entreprise offrant des services de courtage aux fins de négocier auprès de fabricants des remises sur certains médicaments, au bénéfice de ses mandants, et à supposer de telles remises déontologiquement licites au regard du code de la santé publique et du code rural, ne paraît pas à première vue de nature à fausser la concurrence, l’objectif consistant dans la création « d’une puissance d'achat susceptible de conduire à une baisse des prix » au sens des lignes directrices précitées. Elle paraît au contraire pro-concurrentielle si elle aboutit à animer la concurrence sur le marché de détail et à faire baisser globalement le prix pour le consommateur final. Ce principe étant posé, l’Autorité de la concurrence ne saurait se prononcer sur les modalités pratiques des remises ainsi obtenues dans le cadre d’un tel achat groupé, et notamment sur la licéité des

« remises de fin d’année » précédemment évoquées, au regard à la fois du code de commerce, du code rural et du code de la santé publique.

IV. Conclusion

101. Il n’appartient pas à l’Autorité de formuler un avis sur la question du contrôle de la conformité des actes d’un syndicat professionnel avec ses statuts.

102. S’agissant des autres questions relatives au fonctionnement de la concurrence née de l’apparition d’Isovet sur le marché de la distribution du médicament vétérinaire, l’Autorité ne peut pas, dans le cadre d’une demande d’avis formulée sur le fondement de l’article L. 462-1 du code de commerce, procéder en réalité à la qualification de pratiques anticoncurrentielles. Un tel examen ne peut être mené que dans l’exercice de sa compétence contentieuse, de façon contradictoire, en présence de faits avérés et non hypothétiques. L’Autorité renvoie aux développements qui précèdent, pour inviter les acteurs à évaluer, au regard de la pratique décisionnelle et de la jurisprudence citées dans le présent avis, les pratiques qu’ils ont soumises à son examen.

Délibéré sur rapport oral de Mme Monique Rouzaud, rapporteure, et de Mme Carole Champalaune, rapporteure générale adjointe, par Mme Françoise Aubert, vice-présidente, présidente de séance, et par Mme Elisabeth Flüry-Hérard et M. Patrick Spilliaert, vice-présidents.

La secrétaire de séance, Béatrice Déry-Rosot

La vice-présidente, Françoise Aubert

 Autorité de la concurrence

Références

Documents relatifs

Règlement grand-ducal portant modification du règlement grand-ducal modifié du7 janvier 1999 concernant le statut du personnel de la Caisse nationale des Prestations familiales.

de « cent quatre ») d’un alinéa d’un point d’un paragraphe d’un article précis, il cite d’abord, comme texte à modifier, l’ensemble (moins un alinéa) du point a) du

1/ est porté à la connaissance du public que le Ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures nous a transmis le dossier du projet de

Le paragraphe 1 er transpose l’article 4 de la directive et impose certaines obligations à tout employeur ayant engagé un ressortissant de pays tiers. L’employeur est tenu

7 e 1999 ayant pour objet de définir la procédure d'admission à une classe de de l'enseignement secondaire technique ou à la classe d'orientation de

En effet, ni l’article 24 de la loi modifiée du 4 septembre 1990 portant réforme de l'enseignement secondaire technique et de la formation professionnelle continue, ni l’article 26

« a) la direction d’un groupe terroriste; b) la participation aux activités d’un groupe terroriste, y compris en fournissant des informations ou des moyens matériels, ou par

e) une offre de valeurs mobilières dont le montant total dans l’ensemble des Etats membres est inférieur au montant fixé à l’article 3, paragraphe 2, lettre e) de la