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Philippe Choulet NATURE ET CULTURE. Quintette

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Philippe Choulet

NATURE CULTURE ET

Quintette

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Editions Quintette 5, rue d'Uzès 75002 Paris Tél. : (1) 42.36.26.62 Tous droits réservés Éditions Quintette Paris 1990

Dépôt légal : octobre 1990

ISBN : 2-86850-034-X

ISSN : 1147-2839

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Que ce petit être biologique survive, et au lieu de survi- vre enfant des bois devenu petit de loups ou d'ours (on en mon- trait dans les cours princières du XVIII siècle), survive enfant humain (ayant échappé à toutes les morts de l'enfance, dont combien sont des morts humaines, morts sanctionnant l'échec du devenir-humain), telle est l'épreuve que tous les hommes, adultes, ont surmontée : ils sont, à jamais amnésiques, les témoins, et bien souvent les victimes de cette victoire, portant au plus sourd, c'est-à-dire au plus criant d'eux-mêmes, les bles- sures, infirmités et courbatures de ce combat pour la vie ou la mort humaines. Certains, la plupart, en sont sortis à peu près indemnes, — ou du moins tiennent, à haute voix, à bien le faire savoir —; beaucoup de ces anciens combatants en restent mar- qués pour la vie ; certains mourront, un peu plus tard, de leur combat, les vieilles blessures soudain rouvertes dans l'explo- sion psychotique, dans la folie, l'ultime compulsion d'une

« réaction thérapeutique négative » ; d'autres, plus nombreux, le plus « normalement » du monde, sous le déguisement d'une défaillance « organique ». L'humanité n'inscrit que ses morts officiels sur les mémoriaux de ses guerres : ceux qui ont su mou- rir à temps, c'est-à-dire tard, hommes, dans des guerres humai- nes, où ne se déchirent et sacrifient que des loups et des dieux humains. La psychanalyse, en ses seuls survivants, s'occupe d'une autre lutte, de la seule guerre sans mémoires ni mémo- riaux, que l'humanité feint de n'avoir jamais livrée, celle qu'elle pense avoir toujours gagnée d'avance, tout simplement parce qu'elle n'est que de lui avoir survécu, de vivre et s'enfanter comme culture dans la culture humaine : guerre qui, à chaque instant, se livre en chacun de ses rejetons, qui ont, projetés, dejetés, rejetés, chacun pour soi, dans la solitude et contre la mort, à parcourir la longue marche forcée, qui de larves mam- mifères, fait des enfants humains, des sujets.

L. Althusser « Freud et Lacan » in Positions (p. 21-22), Editions Sociales, 1976.

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I N T R O D U C T I O N

N a t u r e et C u l t u r e , d e u x n é b u l e u s e s

Un homme mange. Observons-le, décrivons-le. Que dire de lui, de ce qu'il nous donne à voir ? C'est un corps, déjà, un orga- nisme vivant et un système nerveux, et on lui supposera des fonc- tions dites « naturelles » : au travail, ici, la nutrition (dévoration, déglutition, digestion, assimilation, etc.). Mais cet homme n'est pas qu'un corps « naturel » : peut-être mange-t-il simplement pour se nourrir, par besoin, et ce besoin s'appelle la faim. On peut cepen- dant manger pour d'autres raisons : gourmandise, habitude, res- pect de son hôte, ce qui se nomme politesse. L'acte de nutrition n'est pas un acte simple, réductible à l'image élémentaire et immé- diate que l'on se fait spontanément, et sans doute à tort en ce qui concerne l'humain, du besoin « naturel ». Lorsqu'il mange, le corps humain est déjà « plein de culture », c'est-à-dire plein d'esprit et de convention. Il a des manières (de table), des gestes (savoir se servir d'un couvert à poisson ou de baguettes), qui sont d'abord des signes bien avant que d'être des actes utiles (est-il distingué ? « mondain » ? a-t-il du chic, de l'élégance ? ou bien mange-t-il simplement ? est-il vulgaire, grossier, négligent ?)..., bref, des attitudes qui sont autant d'itinéraires acquis et intériorisés.

Il a ainsi peut-être déjà des habitudes, et donc une « seconde nature » : manger à heure fixe, suivant un certain protocole (apé- ritif, hors-d'œuvre, plat de résistance...), ou sélectionner les ali- ments (pour des raisons religieuses, selon ses goûts, selon les ordres de son médecin...). Ainsi, d'un corps qui se nourrit — nous ne

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savons pas encore s'il a une âme —, que pouvons-nous dire ? De ce que nous voyons, qu'est-ce qui est de (la) nature et qu'est ce qui n'en est pas ? Si la fonction digestion est « naturelle », notre estomac ne l'est sans doute déjà plus : il a perdu son innocence, il a une « mémoire » nerveuse et sensitive, et c'est le résultat de l'éducation progressive par certains mets, saveurs, textures et matiè- res. Un homme raffiné n'a pas un « estomac d'autruche » ou de goinfre, il ne subit pas la loi de la gloutonnerie de son ventre;

il sera sensible à ces nourritures qui l'auront éduqué, qui lui ont

« fait le palais » et auxquelles demeure liée l'expérience de la satis- faction ou du plaisir; il sera, en revanche, rebelle ou réticent devant des aliments trop puissants, trop forts pour lui : tord-boyaux, piments, laits caillés... Ainsi, lorsqu'on dit : « tous les goûts sont dans la nature », on pèche par excès de précipitation ; on devrait dire : « tous les goûts sont dans la culture », parce qu'il n'y a peut- être de goût digne de ce nom que dans la culture. Quant à savoir si la culture est dans la nature, ce qui validerait quand même le premier énoncé, cela peut attendre. Posons ce premier constat : pour un palais et un estomac, rien n'est naturel, ni « de nature », ni allant de soi. La culture, c'est du corps.

Admirons, par contraste, la « patience » animale : les bovins

qui paissent dans les pâturages mangent de l'herbe, encore et sans

cesse de l'herbe. Du vert, du vert, toujours du vert, qui tourne

parfois en jaune. S'en lassent-ils ? Y a-t-il d'ailleurs un sens à parler

d'un possible ennui bovin à toujours manger la même chose, tou-

jours le même menu, dans une infinie et fort naturelle répétition ?

On sait pourtant que, parmi les herbes, celles-ci sont prisées, celles-

là sont délaissées, parce que amères ou nocives. Et, dans le cas

de la nocivité, comment l'animal le sait-il ? Bien sûr, on parlera

de convenance organique ou de penchant instinctuel : mais on sup-

pose alors ce qu'on veut démontrer, par le postulat d'une forme

d'harmonie préétablie, ce qui est d'ailleurs la première fonction

de toute invocation de la nature. Avouons cependant notre igno-

rance : nous ne savons pas encore grand-chose sur les « raisons »

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DU BAC AU DEUG

Conçue pour les lycéens, les étudiants préparant le DEUG ou les concours des grandes Ecoles, la collection

" Philosopher" s'organise autour des grandes notions du programme de philosophie des classes terminales.

" La fonction de penser ne se délègue point " disait Alain.

Si philosopher c'est s'interroger sur le sens des mots et des choses, cette collection est une invitation à l'effort de chacun pour penser par soi-même.

A la fois essai et cours rédigé, chaque titre est un auxi- liaire précieux pour l'exercice difficile de la dissertation.

Titres déjà parus : 1 - LA LIBERTÉ 2 - LE DROIT 3 - L'HISTOIRE 4 - THEORIE

ET EXPÉRIENCE 5 - LA VÉRITÉ 6 - L'ILLUSION

7 - LE LANGAGE 8 - LES PASSIONS 9 - LA CONSCIENCE 10 - LE SUJET 11 - AUTRUI 1 2 - L'ÉTAT 1 3 - LE TEMPS

14 - L'ART 15 - LOGIQUE

ET MATHÉMATIQUE 1 6 - LE TRAVAIL 1 7 - NATURE

ET CULTURE 1 8 - LA RELIGION

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