252 Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 29 janvier 2014 Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 29 janvier 2014 0 decins pour soulager les souffrances de
leurs patients : pour aider les parturientes en Egypte ou pour les maladies de toutes sortes dans les temples d’Asclépios en Grèce. Par la suite, elle a suscité engoue
ment, recherches et débats chez Puységur, Mesmer et Charcot, puis chez Freud jus
qu’à M. H. Erickson. Le mouvement de re
cherche du Mental Research Institute (MRI) de Palo Alto a beaucoup étudié la relation hypnotique pour parfaire ses théories sur la communication, ouvrant ainsi le chemin de nouveaux types de psychothérapie.
Actuellement, de nombreux protocoles de recherche fonctionnelle en IRM démontrent l’action des états modifiés de conscience sur le Gyrus cingularis et le cortex cérébral, et la capacité qu’ont les sujets en état de transe (autohypnose, méditation, etc.) de modifier le seuil de la douleur.
La première situation clinique se ren
contre communément dans nos consulta
tions. L’hypnose médicale est une indication de choix pour pallier la douleur aiguë, pour diminuer l’anxiété d’anticipation et donner
tous les outils nécessaires au patient afin qu’il puisse affronter plus sereinement des situations futures potentiellement stressan
tes au moyen de l’autohypnose. Les métho
des utilisées sont principalement celles de la dissociation ; certaines situations (par exem
ple, lorsque le patient présente une séquel
le d’anxiété posttraumatique) nécessitent un travail de «transe correctrice» utilisant la ré
gression en âge.
La seconde situation clinique démontre une complexité inhérente aux problémati
ques douloureuses chroniques : l’espace
temps est beaucoup plus large, l’histoire du patient est souvent semée de nombreux échecs, l’étiologie des douleurs est com
plexe, le contexte du patient (familial et pro
fessionnel) s’est souvent dégradé et la poly
médication peut aussi rendre la tâche plus ardue. Avant toute velléité d’intervention, l’hypnothérapeute doit apprendre tout d’abord à comprendre l’univers particulier du malade. Son abord en hypnose devra tenir compte à la fois de l’intellect du patient, de son état émotionnel, de ses perceptions corporelles et de ses capacités relation
nelles. Les approches hypnotiques varie
ront entre techniques stratégiques, analo
giques, dissociatives… ou associatives, ré
gressives, etc.
«La forêt des douleurs l’entourait de partout, tout comme le fossé entourait la forêt ; et nous, nous fîmes halte au bord de ce désert.»
Dante, la Divine Comédie. Tome I.
Ed Rencontre, p. 111.
Prise en charge de la douleur et hypnose
Quadrimed 2014
Figure 1. Hypnos et Thanatos emportant Sarpédon. Musée étrusque, Rome
S. Schlegel- Christen
Dr Simone Schlegel-Christen Médecine générale FMH Hypnose médicale SMSH
Médecine psychosomatique ASMPP Route de Mollie-Margot 1 1073 Savigny
cab.medical.schlegel@bluewin.ch
Rev Med Suisse 2014 ; 10 : 252-3
présentations cliniques Cas n° 1
Jeune fille de quinze ans, écolière, souf
frant d’allergie aux pollens ; les différen
tes investigations effectuées concluent que la patiente pourrait bénéficier d’une désensibilisation, à raison de deux injec
tions souscutanées par semaine mais celleci dit ne pas supporter la douleur des injections ni la vue des aiguilles et se montre très ambivalente.
Cas n° 2
Femme de 64 ans, connue pour une Po- lymyalgia rheumatica de longue date ; une multitude de traitements antalgiques n’ont donné que peu d’effets, la cortico
thérapie a induit une ostéoporose sé
vère. La patiente présente beaucoup d’effets secondaires au moindre nouvel essai thérapeutique. Les spécialistes ne savent plus que proposer.
L’hypnose médicale estelle utile et indi
quée dans ces deux situations différentes et, si oui, quelles formes de techniques pour
ront être utilisées ?
commentaires
Bien qu’elle soit de plus en plus connue de la communauté médicale et du public, l’hypnose suscite toujours des réactions variant entre méfiance et attente magique.
Il ne faut pas oublier qu’à l’origine, le dieu Hypnos, fils de Nyx, la Nuit, n’était autre que le frère jumeau de Thanatos, préposé avec lui au transport des humains au royaume des Morts (figure 1).
Malgré cela, de tout temps, l’hypnose a été un moyen largement utilisé par les mé
Implications pratiques
Chez les patients présentant un état anxieux lors de douleurs aiguës, l’hypnose médicale est une bonne indication : elle permet une analgésie, une diminution de l’anxiété, une diminution des doses d’antalgiques ou d’anesthésiants et, par conséquent, de leurs effets secondaires potentiels
Chez les patients présentant des douleurs chroniques, l’hypnose médicale demeure aussi une bonne indication. La situation complexe requiert cependant une très bonne expé- rience de la part du thérapeute et une approche multifocale tenant compte du contexte, des émotions, de la compréhension intellectuelle et du corps du patient
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Controverse
La controverse consiste surtout à parler des contreindications de l’hypnose. Pour certains auteurs, il n’y en a pas, d’autres soulèvent cependant la problématique de la favorisation possible d’un état de psychose suscité par la dissociation ou d’une prise de pouvoir du thé
rapeute sur le patient. Tout le monde s’accorde à dire que la qualité, l’expérience et l’éthique du thérapeute sont les premières indications… ou contreindications à cette forme de thérapie ! Et beaucoup de thérapeutes inadéquats prennent le pouvoir sur des patients affaiblis sans avoir jamais étudié les techniques d’hypnose…
Bibliographie
• Erickson MH. Collected Papers. Trad. fr. Bruxelles : Satas, 1999.
• Haley J. Un thérapeute hors du commun. Paris : Desclée de Brouwer, 1995.
• Rainville P. Rôle potentiel des facteurs psychologi- ques dans la plasticité cérébrale associée à la douleur chronique. Université de Montréal, 2012.
• Robles T, Abia J. Apprenons à cheminer avec l’auto- hypnose dans la vie. Bruxelles : Ed. Satas, 1997.
• Roustang F. La fin de la plainte. Paris : Ed. Odile Jacob, 2000.
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