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Le « Claude Simon » de Charles Camproux

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Cahiers Claude Simon

4 | 2008 Varia

Le « Claude Simon » de Charles Camproux

Alastair B. Duncan

Édition électronique

URL : http://journals.openedition.org/ccs/607 DOI : 10.4000/ccs.607

ISSN : 2558-782X Éditeur :

Presses universitaires de Rennes, Association des lecteurs de Claude Simon Édition imprimée

Date de publication : 30 novembre 2008 Pagination : 137-139

ISBN : 9782354120351 ISSN : 1774-9425

Référence électronique

Alastair B. Duncan, « Le « Claude Simon » de Charles Camproux », Cahiers Claude Simon [En ligne], 4 | 2008, mis en ligne le 21 septembre 2017, consulté le 19 avril 2019. URL : http://

journals.openedition.org/ccs/607 ; DOI : 10.4000/ccs.607

Cahiers Claude Simon

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Le « Claude Simon » de Charles Camproux

Professeur de grammaire et de philologie française à l'Université de Montpellier, grand défenseur de la langue et de la culture occitanes, Charles Camproux (1908-1994) tient, de 1956 à 1968, une rubrique occasionnelle dans les Lettres françaises : « La langue et le style des écrivains ». Bien que n'étant pas communiste, il trouve naturellement sa place dans la revue littéraire du Parti grâce à son passé de résistant et à la politique de l'hebdomadaire, favorable à la culture occitane. Pendant ces douze ans, Camproux écrit plus d'une quarantaine d'articles de fond. Il commente, entre autres, Les Mots de Sartre et La Force de l'âge de Simone de Beauvoir ; mais il traite surtout de romans, romans dans la tradition réaliste - de Maurois, de Kessel ou de Bazin - mais également des romans qui représentent les forces vives de l'époque : La Modification de Butor, La Mise en scène d'Ollier, Le Planétarium de Sarraute, Comment c'est de Beckett, Les Choses de Perec. Ses écrits lui attirent la reconnaissance, voire l'amitié d'un certain nombre d'écrivains : ses archives contiennent, par exemple, une correspondance fournie avec Blaise Cendrars1.

Il est difficile aujourd'hui de comprendre à quel point le style de Claude Simon provoque la méfiance et même la désapprobation auprès d'une certaine critique de l'époque. Emile Henriot, qui

1 Nous devons ces informations, ainsi que l'aimable autorisation de reproduire l'article de Charles Camproux, à Jean-Marie Petit, professeur émérite à l'Univer- sité Paul Valéry-Montpellier III, gendre et ayant-droit de l'auteur.

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138 CAHIERS CLAUDE SIMON N°4

n'arrive pas à lire jusqu'à la fin Le Vent, dit après sa lecture de L'Herbe que Claude Simon devra être primé « quand il sera délivré de son système et de ses phrases de cent soixante-quinze lignes ». Encore, lors de la publication d'Histoire en 1967, Pierre-Henri Simon trouve à regretter « qu'une œuvre riche et neuve comme celle de Claude Simon décourage le lecteur par des singularités de syntaxe et de typographie1 ». Même ceux qui, à la parution de L'Herbe, défendent le style de Simon, tels André Rousseaux dans Le Figaro littéraire ou Jean Misder dans L'Aurore2, se cantonnent dans des généralités ou

expriment en même temps leurs réticences.

Charles Camproux le premier a pris le style de Simon au sérieux et a tenté d'un faire une étude à la fois détaillée et globale. Ses analyses anticipent à bien des égards ce que l'on dira par la suite. Il a compris avant Fitch que le participe présent exclut tout mouvement temporel ; et l'imbrication des participes présents lui a fait saisir, avant Sykes, la composition spatiale des romans de Simon3. Ce qu'il dit des

« mots outils » et des « reprises correctives et [...] augmentatives » deviendra plus tard la monnaie courante de l'analyse stylistique de Simon. Mais peu, par la suite, se sont penchés sur l'utilisation du passé simple. En reliant le style de Simon aux thèmes de son œuvre, Camproux est marqué - comme nous le sommes tous - par son époque, en l'occurrence par la pensée existentialiste et par le chosisme de Robbe-Grillet. Le plus impressionnant et le plus sympathique de son analyse, c'est que, tout linguiste et grammairien qu'il soit, Camproux ne pratique nullement une critique de jugement. Il se met à l'écoute de Claude Simon. Et il allie à la finesse de l'analyse linguistique une grande sensibilité : en décrivant le style de Simon, il se sert lui aussi de la métaphore ; son scalpel devient alors une plume d'écrivain.

1 Pierre-Henri Simon, « Bilan de l'année littéraire », Le Monde des livres, 20 décem- bre 1967, p. I.

2 André Rousseaux, « L'Herbe de Claude Simon », Le Figaro littéraire, 15 novembre 1958 ; Jean Misder, « Encore "le roman nouveau" », L'Aurore, 28 novembre 1958.

3 Voir Brian T. Fitch, « Participe présent et procédés narratifs chez Claude Si- mon », La Revue des Lettres Modernes, n° 94-99 : Un nouveau roman ?, 1964, p. 199-216 ; Stuart Sykes, Les Romans de Claude Simon, Minuit, 1979, par exemple, p. 34-35.

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LE « CLAUDE SIMON » DE CHARLES CAMPROUX 139 Il n'est pas étonnant que, suite à la parution de cette chronique, Simon ait écrit à Camproux la lettre suivante1 :

Paris, 11/V/59 Cher Monsieur,

J'ai pris connaissance avec l'intérêt que vous devinez de votre remarquable article sur L'Herbe paru dans les « Lettres Françaises » de la semaine dernière.

C'est vraiment l'une des plus pénétrantes études que l'on ait faites sur ce livre. Je ne sais si je mérite tout le bien que vous en dites, mais en tout cas votre critique est de celles particulièrement précieuses pour un écrivain parce qu'elles lui apprennent à voir plus clair en lui et dans ce qu'il fait.

Merci de tout cœur, et croyez, je vous prie, cher Monsieur, à mes sentiments les meilleurs.

Claude Simon

Alastair B. DUNCAN

1 Nous remercions Réa Simon d'avoir autorisé la publication de cette lettre.

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