R EVUE DE STATISTIQUE APPLIQUÉE
A. V ESSEREAU
Contribution à l’étude des erreurs de mesure dans l’industrie papetière
Revue de statistique appliquée, tome 9, n
o1 (1961), p. 53-62
<
http://www.numdam.org/item?id=RSA_1961__9_1_53_0>
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CONTRIBUTION A L’ÉTUDE
DES ERREURS DE MESURE DANS L’INDUSTRIE PAPETIÈRE
par
A. VESSEREAU
Ingénieur
enChef des Manufactures
del’État
Cette
étude
a pourorigine
uneenquête effectuée
par le CentreTechnique
de l’Industrte despapters,
cartons etcelluloses, auprès
des usines
productrices
et desentreprtses
consommatrtces depapter.
Le Centre
Technique
a bten voulu nouscommuniquer
lesrésultats
de cetteenquête,
et nous autortserà
les utiliser dans une communtca- ttonqut fut présentée à
la32ème
session de l’InstitutInternational
de
Statistique (Tokio, juin 1960),
section des"Appltcattons
indus-trtelles" ;
il nous autortse matntenantà présenter
cette communtca-tion aux lecteurs de la Revue de
Statistique Appliquée.
Nous sommes donc doublement reconnatssants au Centre
Technique
de 1 ’Industrie des
papiers,
cartons etcelluloses,
et nous lut adres-sons nos sincères remerciements en
la personne
de son D i recteurGé- néral
Monsieur J. Fauveau.I - OBJET DE
L’ENQUETE -
Facteurs de variabilité et normalisation
Les facteurs de variabilité
qui peuvent
affecter le résultat d’une mesure sont nombreux - Ondistingue généralement :
a)
Laprécision,
liée à unappareil
et à un modeopératoire :
ellese détermine en
répétant
la mesure sur la mêmeéprouvette
ou sur deséprouvettes
aussiidentiques
quepossible.
b)
Les écartsqui apparaissent lorsqu’on change l’opérateur, l’appareil
ou les conditionsopératoires.
Lorsque
le résultat doitêtre
utilisé pour le contrôle d’unlot,
il fautajouter
c)
Les fluctuations dues àl’échantillonnage.
Le but de la normalisation est de fixer la
précision (a)
à une valeur aussiélevée que
possible (stabilisation
del’écart-type
à une valeur aussi faible quepossible)
et de réduire au maximum les écarts(b) - théoriquement
de lesannuler -.
La normalisation
comporte :
Revue de Statistique Appliquée. 1961 - Vol. IX - N 1
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- la définition de la
caractéristique
à mesurer;- la
description
détaillée del’appareil;
- la
description
des conditions d’exécution.La
plupart
descaractéristiques
mesurables dupapier
ont faitl’objet
de normes établies par
l’Association Française
de Normalisation(AFNOR).
Enquête
concernant lepapier
Le Centre
Technique
de l’Industrie despapiers,
cartons et celluloses s’estpréoccupé
récemment de savoirjusqu’à quel point
ces normes étaientappliquées,
deconnaître
la variabilité effective de mesuresnormalisées,
de comparer mesures normalisées et mesures nonnormalisées.
L’enquête
aporté
sur 29 Laboratoires dePapeteries
ou de Services decontrôle
d’industries consommatrices depapier.
Lescaractéristiques
étu-diées ont été les suivantes :
Caractéristiques
CElles ont été mesurées par la totalité ou une
partie
des 29 laboratoiressur 10
éprouvettes
de chacune des 5 sortes suivantes :Papier
Pchoisies de
façon
à couvrir une gamme étendue de valeurs moyennes descaractéristiques
étudiées.Toutefois,
pour une raison bienévidente,
la blan-cheur et le lissé n’ont pas été mesurés sur les
papiers
kraft.Toutes les
éprouvettes
ont étépréparées
par le CentreTechnique
de l’Industrie dupapier
defaçon
à réduire au maximum les différences d’échan-tillonnage
entre les sériesexpédiées
aux fins de mesure aux différents Labo- ratoires :découpage
dans un rouleau étroit pour que seule intervienne la va-riabilité sens
longueur,
et choix strictement au hasard des différentes séries dans l’ensemble deséprouvettes découpées.
Chaque
Laboratoire a été invité à faireconnaître
defaçon
détaillée lesconditions d’exécution des mesures - entre autres :
-
température
ethygrométrie
du Laboratoire(les
mesures de ré-sistance à la traction et à l’éclatement doivent s’effectuer en
atmosphère
conditionnée à200
et65% d’hygrométrie);
-
type d’appareil
et sescaractéristiques
essentielles(par exemple:
surface
d’épreuve
pour la résistance àl’éclatement);
- nature de la commande - manuelle ou
électrique.
Revue de Statistique Appliquée. 1961 - Vol. IX - N 1
55
Tous les
renseignements
ont été centralisés au CentreTechnique
del’Industrie du
papier qui
a effectué ledépouillement
des résultats et exécutéla
plupart
des calculsstatistiques.
Analyse
des résultatsOn s’est aperçu que
beaucoup
de Laboratoires n’avaient pasappliqué
latotalité des conditions
imposées
par les normes. On a doncséparé
les La-boratoires en deux groupes suivant que les essais avaient été effectués dans des conditions normalisées ou non
normalisées;
ces groupes necomprennent
pas les mêmes laboratoires suivant que l’on considère telle ou telle des ca-
ractéristiques
étudiées.Chacun des k laboratoires
L, (i = 1, 2,
...,k)
d’un même groupe Ga fourni n = 10 mesures
Xi
j(j
=1, 2,
...,10)
pour une même caracté-ristique
d’un mêmepapier (éventuellement
de la même face de cepapier) :
par
exemple
10 mesures de lissé sur la face référencée A dupapier
blancsurglacé.
On a
calculé,
pourchaque
laboratoireL, :
Laboratoire
L,
et pour l’ensemble des k laboratoires du groupe G :
Groupe
GLes
quantités
s, ainsi que laquantité a, peuvent
être considérées com- mecaractérisant
laprécision
des mesures(l’indice
1signifie "intérieur"
àun
laboratoire).
Les
questions
que l’on est amené à se poser sont(entre autres)
les suivantes :Questton 1
Lescaractéristiques (x, 03C3i, ai)
diffèrent-elle entre le groupe des laboratoires normalisés et le groupe des laboratoires non normalisés ?Questton 2 -
A l’intérieur d’un groupe, lesécarts-types
s, des différentslaboratoires constituent-ils un ensemble
statistiquement homogène ?
La ré-ponse sera
toujours négative,
cequi
enlève une certaine valeur à l’écart-type
moyen03C3l,
que l’on conserveracependant
faute de mieux.Questton
3 - A l’intérieur d’un groupe, y a-t-il des différencessignificatives
Revue de Statistique Appliquée. 1961 - Vol. IX - N 1
56
entre les moyennes
x,
i obtenues par les différents laboratoires(compte
tenude la valeur de
l’écart-type 03C3i ) ?
Laréponse
seratoujours positive.
Cette constatation conduit à introduire une
"variance
entrelaboratoires"
(d’un
mêmegroupe),
etl’écart-type correspondant. Celui-ci, désigné
par03C3E , (E,
initiale de"entre" laboratoires)
se calcule par :(Il
n’est pas besoin d’insister sur le fait que lesécarts-types
calculéssont des
estimations,
et que la relationprécédente
n’est exactequ’en espé-
rances
mathématiques).
En
réalité, l’écart-type QE dépend,
non seulement des écarts entre la-boratoires,
mais aussi des différencesqui peuvent
exister entre les échan- tillonsqui
leur ont été soumis. Cette remarque amène laquestion
suivante :Questton 4 -
Est-ilpossible
d’éliminer l’effet"échantillon"
dans les diffé-rences entre laboratoires ? Si l’on
peut,
mêmeapproximativement,
mesurerla différence effective ou
systématique
entre deuxlaboratoires,
celapermet-
tra de
corriger
leursrésultats,
oud’envisager
les mesures àprendre
pour obtenir une meilleure concordance.Le
plan qui
vient d’être tracé sera suivi dans leparagraphe
suivantpour l’étude de la résistance à
l’éclatement,
de la blancheur et du lissé.Les résultats concernant la résistance à la traction et
l’allongement
de rup- ture n’ont pas encore étécomplètement dépouillés;
d’ailleursl’objet
de cettenote est de tracer une méthode
d’analyse
et dedégager quelques
conclusionsgénérales, plutôt
que de donner de nombreuses valeursnumériques.
II - ANALYSE DES RESULTATS OBTENUS
Résistance à l’éclatement
C’est la résistance limite d’une
éprouvette
depapier
soumisejusqu’à rupture
à unepression
uniformémentrépartie,
exercéeperpendiculairement
à sa surface. La
pression,
exercée par unliquide (glycérine)
est transmisepar une membrane de caoutchouc en contact avec le
papier
durant toute la durée de l’essai.Revue de Statistique Appliquée. 1961 - Vol. IX - N 1
57
1/
Pour aucun despapiers
on ne constate de différences nettes ou sys-tématiques
entre le groupe des laboratoires normalisés et le groupe non normalisé.2/
Dans le groupenormalisé,
sur 76écarts-types
s,, 12dépassent
leslimites de confiance à
95%,
calculées àpartir
desécarts-types
moyens or, ; dans le groupe nonnormalisé,
cedépassement
est constaté 4 fois sur 52.Sauf dans un cas, les
dépassements
sont peuimportants,
cequi permet
d’ac- corder une assez bonne confiance aux valeursmoyennes 03C3i .
3/
Lesdifférences
entre laboratoires d’un même groupe sonttoujours
hautement
significatives.
Si ces
différences
ont un caractèresystématique,
on doit constater une corrélationpositive
dans les moyennes obtenues pour lesdifférentes
sortes depapier. Cependant,
étant données les valeurs moyennes très différentes des 5 sortesétudiées,
il estindiqué
d’examiner d’unepart
lejournal 1,
lejournal
2 et blancsurglacé (résistances comprises
entre0,450
et0, 900) ,
d’autre
part
les deux kraft(résistances comprises
entre3, 7
et4, 2) ;
cesdeux séries sont d’ailleurs mesurées sur des manomètres
différents.
Dans le tableau ci-dessous on a
indiqué,
pourchaque
laboratoire nor-malisé l’écart
(multiplié
par103)
entre sa moyenneXI
et la moyennegénérale
x pour le
papier
considéré.Moyennes (x, - x)
La corrélation entre les séries de résultats
apparaît
nettement. Dans les dernières colonnes dutableau,
la moyenneXI peut
être considérée comme une estimation du facteur propre au laboratoireL, (pour
lespapiers
defaible résistance d’une
part,
de forte résistance d’autrepart).
En
supposant
que ces nombres aient été connus, on aurait pucorriger
les moyennes
X,,
les valeurscorrigées
étant5EI XI 03BBi .
Ces valeurs fi-gurent
dans le tableauci-après :
Revue de Statistique Appliquée. 1961 - Vol. IX - N 1
58
Moyennes corrigées x,’ - x = (x, - x) - 03BBi
Les
xl
sontbeaucoup
moinsdispersés
que lesx-1.
Leur écart -type
03C3x, e stindiqué ci-dessous,
etrapproché
del’écart-type o- ( dans
l’unitéinitiale).
Le tableau
ci-après
résumel’analyse
des résultats pour le groupe des laboratoires normalisés(avec 03C32L
=a2 - 03C32l n , valeur prise égale
à 0
lorsque
le calcul donne une valeur négative).
Quel
que soit le caractèreapproximatif,
et même discutable de cescalculs,
ilapparaît
bienqu’un étalonnage soigné
desappareils
devrait per- mettre deréduire,
defaçon importante,
les différences entre laboratoires .Revue de Statistique Appliquée. 1961 - Vol. IX - N 1
59 Blancheur
Le
degré
de blancheur est lerapport exprimé
enpourcentage
du facteur de réflexion diffuse dupapier
au facteur de réflexion diffuse del’oxyde
demagnésium
pur, tous deux mesurés dans laportion
violette et bleue duspectre,
pour une zone delongueur
d’onde aussi étroite quepossible,
cen-trée sur 457 mil i
2, 5
mu.1/
Le groupe des laboratoires non normalisés donne des résultats moyens trèslégèrement supérieurs
au groupenormalisé,
mais surtout ilaccuse une variabilité
(al
etCL.) systématiquement plus
élevée.x
2/
Dans le groupenormalisé,
sur 78écarts-types SI’
33dépassent
leslimites de confiance à
95%
calculées àpartir
desécarts-types
moyenso, ;
dans le groupe nonnormalisé,
cedépassement
est constaté 34 fois sur 50. - Lesécarts-types
SI des différents laboratoires sont donc loin de constituer des ensemblesstatistiquement homogènes.
3/
Les différences entre laboratoires d’un même groupe sonttoujours
hautement
significatives.
Il est vraisemblable que ces différences ont leurorigine
dans les étalons de blancheur utilisés pour la mesure.4/ L’analyse
des résultats des laboratoires normalisés effectuée com- meau § "résistance
àl’éclatement"
conduit au tableau résumé suivant. Les facteurs de correctionÀI
utilisés pour le calcul des valeurscorrigées x)
ontété obtenus à
partir
des deux faces de chacun des troispapiers (moyenne
de6
écarts).
Dans le Journal
2,
l’effet de correctionapparaît
comme moinsimpor-
tant que pour les deux autres
papiers;
enfait,
l’examen détaillé des mesures montre que l’un des laboratoires a trèsprobablement
interverti les deux faces du Journal 2.Sous cette
réserve,
la conclusion est la même que pour la résistance à l’éclatement.Revue de Statistique Appliquée. 1961 - Vol. IX - N 1
60
LisséPour mesurer cette
caractéristique,
onappuie l’éprouvette
contre unesurface
parfaitement polie
etindéformable,
souspression déterminée,
et l’onfait circuler de l’air entre la surface de
l’éprouvette
et la surfacepolie .
La résistance
opposée
au passage de l’air entrel’éprouvette
et la surfacepolie
est d’autantplus grande
que lepapier
estplus "lissé".
On évalue cette résistance enmesurant,
ensecondes,
letemps
nécessaire pour l’écoulement d’un volume d’air déterminé sous une différence depression
déterminée.1/
Le groupe des laboratoires non normalisésdonne,
pour les valeurs élevées dulissé,
des résultats moyens nettement différents du groupe nor- malisé(écarts atteignant 20%).
La variabilité des résultats( cr,
eta-)
y estaussi
beaucoup plus
élevée.2/
Dans le groupe des laboratoires normalisés sur 42écarts-types
S, , 7dépassent
les limites de confiance à95%
calculées àpartir
des écarts-types
moyens03C3l,
lesdépassements
étant d’ailleurs peuimportants;
dans le groupe nonnormalisé,
ledépassement, parfois
trèsimportant,
est constaté13 fois sur 42.
3/
Les différences entre laboratoires d’un même groupe sonttoujours
hautement
significatives.
Revue de Statistique Appliquée. 1961 - Vol. IX - N 1
61
4/ L’analyse
des résultats des laboratoiresnormalisés,
effectuéecomme aux deux
paragraphes précédents,
conduit au tableau résumé suivant.On a
adopté
des facteurs de correction différents pour le Journal 1 et le Journal 2 d’unepart (03BBi
résultant de la moyenne de 4écarts)
et le blancsurglacé
d’autrepart ( X,
résultant de la moyenne de deuxécarts).
Les conclusions sont les mêmes que pour les deux
caractéristiques précédemment
étudiées.III - CONCLUSIONS GENERALES
Le tableau ci-dessous résume la variabilité des
résultats,
tellequ’elle
ressort de l’étude
précédente.
On
peut ajouter
les commentairesgénéraux
suivants :1/
La variabilité"intérieure
à unlaboratoire" est,
pour les laboratoires travaillant en conditionsnormalisées,
inférieure ouégale
à la variabilitécorrespondante
des laboratoires non normalisés.2/
Il en est de même(de façon
trèsimportante
pour lelissé),
en cequi
concerne la variabilité"entre laboratoires";
il y acependant quelques
constatations contraires pour la résistance à l’éclatement.
3/
La variabilité"entre laboratoires"
resteimportante
pour les labo- ratoires normalisés. Celle-ciprésente
un caractèresystématique,
l’écartentre deux laboratoires étant
généralement
du même sens pour les différentes sortes depapiers
étudiés.Revue de Statistique Appliquée. 1961 - Vol. IX - N 1
62
4/
Cette variabilitépourrait
être diminuée par uneapplication plus
stricte des
règles normalisées,
par une étudeplus
détaillée des conditionsopératoires
révélantl’origine
des écartsconstatés,
ou encore parl’appli-
cation de corrections propres à
chaque
laboratoire. Cetajustement
semble tout à faitindispensable
pour deux laboratoiresagissant,
l’un au titre duvendeur
l’autre au titre de l’acheteur.
D’une
façon générale,
on doit conclure que la normalisation contribue àrégulariser
laqualité
des mesures, maisqu’elle
doit êtrecomplétée
par des vérificationspériodiques
àl’initiative,
soit d’uneorganisme professionnel central,
soit des usagers eux-mêmes.Revue de Statistique Appliquée. 1961 - Vol. IX - N 1