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Je planifie, tu enseignes, ils apprennent : mise à l'épreuve d'un dispositif d'enseignement d'une œuvre intégrale

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Academic year: 2022

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Master

Reference

Je planifie, tu enseignes, ils apprennent : mise à l'épreuve d'un dispositif d'enseignement d'une œuvre intégrale

GUYOT, Cynthia

Abstract

Ce mémoire est une étude de cas relative à l'enseignement de la compréhension en lecture dans une classe genevoise de sixième primaire. Nous avons élaboré un dispositif d'enseignement basé sur l'étude d'une oeuvre intégrale, à savoir un album de jeunesse. Cette séquence a en suite été mise en place dans une classe genevoise. Notre analyse se concentre principalement du point de vue de l'enseignante. Nous observons dans quelle mesure l'enseignante modifie son outil de travail, quelles transformations elle y apporte et quelles conséquences ces changements ont sur les objets d'enseignement. Nous questionnons notamment des concepts tels que la transposition didactique, la vision représentationaliste de la lecture ou encore le rapport entre le texte et l'image.

GUYOT, Cynthia. Je planifie, tu enseignes, ils apprennent : mise à l'épreuve d'un dispositif d'enseignement d'une œuvre intégrale. Master : Univ. Genève, 2016

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Je planifie, tu enseignes, ils apprennent : mise à l’épreuve d’un dispositif

d’enseignement d’une œuvre intégrale

Cynthia GUYOT

Mémoire de Maitrise en enseignement primaire Genève, Juin 2016

Directeur : Jury :

Christophe RONVEAUX Bernard Schneuwly

Elsa Reymond

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Résumé

Ce mémoire est une étude de cas relative à l’enseignement de la compréhension en lecture dans une classe genevoise de sixième primaire. Nous avons élaboré un dispositif d’enseignement basé sur l’étude d’une œuvre intégrale, à savoir un album de jeunesse. Cette séquence a en suite été mise en place dans une classe genevoise. Notre analyse se concentre principalement du point de vue de l’enseignante. Nous observons dans quelle mesure l’enseignante modifie son outil de travail, quelles transformations elle y apporte et quelles conséquences ces changements ont sur les objets d’enseignement. Nous questionnons notamment des concepts tels que la transposition didactique, la vision représentationaliste de la lecture ou encore le rapport entre le texte et l’image.

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Remerciements

En premier lieu, je tiens à remercier chaleureusement mon directeur de mémoire, Christophe Ronveaux. Sa disponibilité, son soutien et ses encouragements afin d’affiner ma réflexion et d’assumer pleinement mes convictions m’ont beaucoup aidée dans la réalisation de ce travail.

Je remercie également Bernard Schneuwly et Elsa Reymond d’avoir accepté de prendre part à ce projet en faisant partie du jury de ma soutenance.

Mes remerciements vont également à Aline et Kristel qui m’ont chaleureusement ouvert les portes de leur classe. Elles ont su accorder du temps à ce projet et lui permettre de prendre vie dans leur classe respective.

Je tiens à remercier mes proches et ma famille pour leur soutien sans faille tout au long de ce projet. Ma gratitude va en en particulier pour Nicolas pour sa bienveillance et ses encouragements, ainsi que pour Julie et son positivisme hors norme.

Un grand merci également à Laura pour sa précieuse relecture.

Enfin, une pensée reconnaissante pour Hélène Riff et son œuvre d’une formidable richesse dont je me surprends encore à découvrir certains détails !

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Table des matières

Résumé ...I!

Introduction ... 1!

Cadre3théorique ... 3!

1.! Transposition(s).didactique(s)… ... 3!

1.1.! De%la%transposition%didactique… ...3!

1.2.! …%à%la%traduction%didactique...4!

1.3.! Les%prescriptions%institutionnelles%à%Genève ...5!

1.4.! Les%dispositifs ...6!

2.! ....et.les.théories.de.la.compréhension.en.lecture… ... 7!

2.1.! Evolutions%d’un%sousAdomaine...7!

2.1.1.! La!compréhension!en!lecture!:!une!activité!globale ... 7!

2.1.2.! Un!lecteur!actif!et!engagé... 8!

2.2.! Modèle%contemporain%de%compréhension%en%lecture...9!

2.2.1.! La!variable!lecteur... 9!

2.2.2.! La!variable!texte...10!

2.2.3.! La!variable!contexte ...10!

2.3.! Enseignement%explicite%continué%de%la%lecture... 11!

2.3.1.! Enseignement!continué!de!la!lecture...11!

2.3.2.! Enseignement!explicite ...12!

3.! ….au.service.de.l’opérationnalisation.en.classe.des.objets.à.enseigner ...13!

3.1.! Le%choix%d’un%support ... 14!

3.1.1.! Textes!opaques ...14!

3.1.2.! Le!support!composite ...15!

3.1.3.! Le!cas!particulier!de!l’album!de!jeunesse...16!

3.2.! Enseignement%de%composantes%fondamentales ... 17!

3.2.1.! Gérer!le!rapport!texteKimage...17!

3.2.2.! Le!personnage...19!

Problématique ... 21!

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4.! Transcription.des.données ...30!

Méthodologie3d’analyse ... 31!

1.! Sélection.des.données...31!

2.! Analyse.globale ...31!

2.1.! Synopsis ... 32!

2.2.! Classement%des%tâches... 32!

3.! Le.rapport.texteOimage...33!

4.! Une.tâche.significative...33!

5.! Du.point.de.vue.des.élèves ...34!

Analyse ... 36!

1.! À.l’échelle.macro,.quelles.sont.les.transformations.apportées.à.la. séquence.planifiée.? ...36!

1.1.! Tâches%légèrement%modifiées... 36!

1.2.! Tâches%ajoutées%par%l’enseignante... 39!

1.2.1.! Fonction!organisationnelle...39!

1.2.2.! Synthétiser!l’intrigue!en!suite!logique!d’actions...40!

1.2.3.! Synthétiser!le!parcours!interprétatif ...41!

1.3.! Quelle%traduction%en%classe%de%l’enseignement%du%rapport%texte/image... 42!

2.! Zoom.sur.la.première.activité.de.la.séquence.:.«.les.carrés.de.couleurs.» ...45!

2.1.! Implémentation%de%la%tâche... 46!

2.1.1.! Fractionnement!de!la!tâche...46!

2.1.2.! La!mise!en!commun!ou!la!transformation!progressive!de!la!tâche!initiale...47!

2.1.3.! Premier!carré!de!couleur!(!Jour!1!–!26:30K29:10)...47!

2.1.4.! Second!carré!de!couleur!(!Jour!1!–!29:10K30:56)...48!

2.1.5.! Troisième!carré!de!couleur!(Jour!1!–!29:10K30:56) ...49!

2.1.6.! Quatrième!carré!de!couleur!(Jour!1!–!33:18K34:59!) ...50!

2.1.7.! Cinquième!carré!de!couleur!(Jour!1!–!34:59K37:48!) ...51!

2.2.! Du%point%de%vue%de%l’enseignante... 52!

2.3.! Conséquences%sur%les%objets%enseignés... 53!

3.! Zoom.sur.une.élève...54!

3.1.! Représentation%incohérente%du%chemin%interprétatif ... 54!

3.2.! Les%hypothèses%du%point%de%vue%de%cette%élève... 56!

3.3.! Du%point%de%vue%de%l’enseignante... 58!

Synthèse3des3résultats... 62!

1.! Transposition,.transformations.et.traductions,.ou.comment.le.savoir. prend.vie.dans.une.situation.d’enseignement ...62!

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2.! Le.rapport.texte/image,.entre.présence.constante.et.enseignement.partiel ...64!

3.! Une.vision.représentationaliste.dominante ...66!

Conclusion... 68!

1.! Limites.et.prolongement...68!

2.! Apports.personnels.et.professionnels ...68!

Bibliographie... 71!

Annexes ... 75!

1.! Séquence.d’enseignement ...75!

2.! Synopsis.des.séances...89!

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Introduction

L’un des principaux défis de l’enseignement primaire réside dans la formation des élèves à l’activité de lecture. Non seulement la lecture est une compétence centrale pour vivre dans nos sociétés modernes, mais elle est également une activité complexe mobilisant de nombreuses ressources tant cognitives, culturelles qu’émotionnelles. Ainsi, l’importance de la lecture à l’échelle de l’école primaire m’a amenée à me questionner plus en profondeur sur ses tenants et aboutissants.

De plus, au cours de ma1 formation d’enseignante, j’ai eu l’occasion de m’intéresser aux résultats des études PISA 2012, études de grande ampleur menées auprès de jeunes de 15 ans de l’ensemble des pays de l’OCDE. La Suisse occupe le onzième rang concernant la compréhension de l’écrit (OCDE, 2014). Il semblerait alors que l’enseignement de la lecture puisse être plus performant pour permettre un meilleur niveau de compétence chez les élèves.

De fait, de nombreuses recherches scientifiques et autres ouvrages didactiques se consacrent à l’enseignement initial de la lecture. Si les questions relatives à la compréhension en lecture et à son enseignement sont désormais partie intégrante du champ de recherche de l’enseignement de la lecture, il reste encore beaucoup à faire pour voir leur transposition effective dans les manuels d’enseignement et les pratiques des enseignants. Cet ensemble d’éléments m’a conduite à m’intéresser davantage à l’enseignement de la lecture chez des élèves sachant déjà déchiffrer un texte.

En outre, mon expérience en stage ou en remplacement auprès d’élèves du second cycle du primaire m’a permis de constater à quel point, pour un grand nombre d’élèves, la lecture d’un ouvrage intégral représente une difficulté majeure. Le travail autour de l’album de jeunesse m’a semblé regrouper toutes les caractéristiques nécessaires pour pallier cet obstacle.

En effet, ce type d’ouvrage propose une articulation entre un texte plutôt court et des images.

De plus, la littérature jeunesse connait un renouveau dans ce domaine, proposant des ouvrages riches et complexes, largement adaptés à un public plus âgé que les seuls jeunes enfants encore non-lecteurs.

Enfin, au fil des mes expériences éducatives, j’ai pu constater que l’enseignement que l’on dispense s’avère très souvent bien éloigné de l’enseignement prévu et planifié en amont.

1 La première personne du singulier sera utilisée lorsque j’exprimerai un avis personnel. La majorité de cet écrit sera à la première personne du pluriel, plus appropriée au discours scientifique.

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L’enchainement d’imprévus et les interactions avec une classe nous amènent parfois loin de notre planification. Ce mécanisme de transformation des savoirs me semble symboliser une des richesses de la profession d’enseignant.

Afin de conjuguer l’ensemble de ces éléments, l’idée initiale a été d’utiliser l’enseignement de la compréhension en lecture comme support d’observation des mécanismes de transformation du savoir. Comment s’opère le phénomène de transposition didactique dans le cadre de l’élaboration d’un dispositif d’enseignement de la compréhension en lecture à partir d’un album pour des élèves de 6P2 ? Quelles transformations ont lieu dans la mise en place effective d’un dispositif ? Quelles différences peut-on observer entre l’objet d’enseignement et l’objet d’apprentissage ? Ce sont ces questions qui m’ont guidée dans l’élaboration de ce projet de recherche.

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Cadre théorique

Cette recherche s’ancre simultanément dans plusieurs champs de recherche scientifique.

Le premier champ dominant est celui de la didactique du français et de toutes les transpositions qu’elle suppose, en particulier entre les objets à enseigner et ceux véritablement enseignés. Notre recherche est aussi étroitement liée à la compréhension en lecture d’une manière générale, et plus spécifiquement à son enseignement au-delà de l’apprentissage initial de la lecture. Enfin, notre opérationnalisation des apprentissages en classe nous amènera à réfléchir à la notion de personnage tout en prenant appui le cas particulier de l’album de jeunesse. Ce support composite spécifique soulève des problématiques qui lui sont propres, notamment dans les rapports entretenus entre le texte et l’image.

1. Transposition(s)3didactique(s)…3

1.1. De3la3transposition3didactique…3

La transposition didactique, lieu commun de la pratique enseignante, constitue « le passage du savoir vu comme un outil à mettre en usage au savoir vu comme quelque chose à enseigner et à apprendre » (Chevallard, 1991, p. 6). Ce concept est presque devenu « une ligne de pensée quasi officielle » (Chervel, 1992, cité par Schneuwly, 1995, p .48), suscitant également de vives critiques et remises en question. Paun (2006) ou avant lui Perrenoud (1998) et d’autres encore, envisagent le processus de transposition didactique d’une manière plus globale. Selon Paun (2006), le point de départ de ce phénomène est bien la connaissance scientifique, mais le point d’arrivée est la connaissance acquise par les élèves. Cette distanciation par rapport à la définition initiale de Chevallard permet d’identifier deux phénomènes distincts : la transposition didactique externe et la transposition didactique interne (Paun, 2006). Le phénomène externe rejoint la précédente définition de Chevallard. Il s’agit d’une décontextualisation du savoir afin d’en extraire les caractéristiques principales puis d’une série de transformations permettant sa recontextualisation dans le cadre pédagogique. Le processus de transposition didactique interne correspond à « l’ensemble des transformations successives et négociées subies par le curriculum formel dans le cadre du processus d’enseignement et d’apprentissage, tout au long du parcours professeur-élève » (Paun, 2006). Ces transformations internes s’opèrent donc dans le cadre du processus d’enseignement-apprentissage et dépendent des interactions qui prennent vie au sein du

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triangle didactique, soit entre l’enseignant, les élèves et les savoirs. Perrenoud (1998) lui aussi élargit le concept de transposition didactique à l’apprentissage des élèves, mais il complète également ce schéma en amont par l’identification des savoirs à enseigner. En effet, les savoirs étant identifiés comme à enseigner sont, selon lui, avant tout des pratiques sociales desquelles il faut extraire les compétences à mobiliser. Ainsi, l’analyse des ressources cognitives nécessaires à l’emploi de ces compétences et de leur genèse permet l’élaboration de dispositifs d’enseignement.

Dans le cadre de notre analyse, nous prendrons donc largement appui sur la conceptualisation de Paun. Il s’agira non seulement d’observer les transformations opérées sur le savoir au moment de la planification, mais de prendre également en compte les transformations opérées et négociées dans le processus d’enseignement.

1.2. 3…3à3la3traduction3didactique3

Au-delà de ces élargissements, la question de la transposition des savoirs enseignés suscite plusieurs critiques et a des effets plus ou moins négatifs. Comme le souligne Schneuwly (1995), « les savoirs n’existent pas en premier lieu pour être enseignés, mais pour être utilisés dans des situations diverses » (p. 48), regrettant ainsi une trop grande importance accordées aux savoirs savants au détriment des pratiques sociales s’y référant. De la même façon, l’analyse historique du concept proposée par Bronckart et Plazaola Giger (1998) montre que après la théorie proposée par Chevallard (1991), l’unicité du savoir savant a été remise en question, prenant désormais en compte les pratiques sociales de références.

Après ces vifs débats, Philippe (2004) propose une refonte du principe de transposition didactique en basant son analyse sur des observations de situations concrètes d’enseignement réalisées dans différentes institutions belges d’enseignement supérieur. Cette étude rassemble une large palette d’institutions allant de l’école professionnelle à l’université. Selon lui, il serait plus pertinent de parler de traduction didactique et d’accepter ainsi la distance qui s’opère entre les différents savoirs. En effet, pour reprendre ses propos, « le savoir est toujours pris dans un processus de traduction, et donc toujours aussi de trahison » (p. 34) en

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laquelle « les pratiques enseignantes sont un lieu de création de nouveaux savoirs » (Philippe, 2004, p. 34) et non pas de transposition d’un savoir savant. L’accent se porte donc davantage sur les enseignants et les élèves plutôt que sur le seul pôle des savoirs. Il s’agit moins de chercher à identifier quels sont les savoirs à enseigner et à les transformer en conséquence, mais plutôt de prendre conscience qu’en planifiant un enseignement et en enseignant à l’aune des contraintes de sa pratique, chacun agit sur le processus de transposition. Ce constat est également valable du côté des élèves qui, eux aussi, doivent effectuer une traduction, forcément inexacte, condition nécessaire à l’exploitation des savoirs enseignés. Cette thèse prolonge celle de Schneuwly (1995) pour qui « le processus de transposition didactique se passe dans le dos des acteurs sans qu’ils puissent le voir et le contrôler, ou si peu » (1995, p. 59).

Si nous sommes d’accord pour reconnaitre qu’une transformation incontournable s’opère pour passer des savoirs savants à ceux enseignés, nous retiendrons toutefois la conception de traduction didactique défendue par Philippe. Elle nous permet de mettre en avant la distance entre les différents savoirs, de prendre en considération les contraintes qui font partie de la pratique enseignante, la singularité des différentes pratiques tout en mettant l’accent sur l’implication active des élèves dans l’aboutissement de ce processus.

1.3. 3Les3prescriptions3institutionnelles3à3Genève3

Comme nous venons de l’exposer et pour reprendre les termes de Philippe (2004), la pratique enseignante est en prise à de nombreuses contraintes dans le cadre du processus de traduction didactique. Notre propos ici est de clarifier le cadre imposé par le Plan d’Etudes Romand (désormais PER) pour l’enseignement de la compréhension en lecture au fil de l’enseignement obligatoire et particulièrement au cycle 2.

Le PER est le produit d’un processus d’harmonisation des différents plans d’études des cantons romands pour l’école obligatoire. La progression globale est pensée de manière spiralaire (Ronveaux, 2012 ; Ronveaux, Aeby-Daghé, Jacquin & Léopoldoff, 2012), ce qui signifie que les apprentissages ne se font pas par accumulation ou par étapes, mais plutôt par approfondissement progressif au fil des cycles. En ce qui concerne la discipline français, elle est orientée selon trois axes majeurs : la communication orale et écrite en lien avec la compréhension et la production, la réflexion sur la langue et, enfin, la construction de références culturelles (Aeby, 2012 ; Ronveaux, et al., 2012). Ces axes reflètent la visée communicative assignée à la lecture puisque compréhension et production sont associées à

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tous les niveaux. De plus, cette visée communicative est confirmée par l’approche des textes selon les activités langagières qu’ils incarnent : raconter, relater, argumenter, transmettre des savoirs, régler des comportements et jouer avec la langue (Ronveaux, 2012). À cet égard, le texte, unité de la communication, devient également l’unité d’enseignement principale (Aeby, 2012). En accordant une place à la construction de références culturelles dès le cycle 1, le PER traduit ici une volonté d’enseigner explicitement la littérature dès les premières années de l’école primaire, sans attendre que les élèves soient lecteurs.

Notre étude se concentre sur une classe de 6P, soit le commencement du second cycle.

L’objectif à la fin de ce cycle est que chaque élève soit capable de « lire de manière autonome des textes variés et développer son efficacité en lecture » (Conférence Intercantonale pour l’Instruction Publique (CIIP), 2010). Le défi est de taille, mais le PER fournit quelques pistes pour aider les élèves à comprendre les textes. Il s’agit de les inciter à « mobiliser leurs connaissances propres, gérer la perte éventuelle de compréhension, faire des inférences » ou encore « utiliser des stratégies de lecture ». Ces pistes restent floues mais sont en accord avec les discours tenus par la communauté scientifique du domaine et sont une traduction effective des avancées de la recherche dans le domaine.

Enfin, dans le cadre de cette recherche nous nous intéresserons au seul cas particulier du

« texte qui raconte » (CIIP, 2010) et aux objectifs d’apprentissage qui s’y rapportent. L’accent est principalement mis sur le repérage du schéma narratif, la distinction des types de discours, l’identification de l’idée principale ainsi que des organisateurs propres au genre. En parallèle, nous pouvons constater qu’il n’est fait aucune mention ni de la notion de personnage ni du rapport que texte et images peuvent entretenir.

1.4. 3Les3dispositifs33

La transformation des savoirs savants en objets d’enseignement est un processus périlleux, mais qui fait tout de même partie intégrante de la pratique quotidienne des enseignants. Pour ce faire, ils prennent appui ou dans certains cas élaborent, des situations d’enseignement qui se traduisent au travers de dispositifs. Thévenaz-Christen, Léopoldoff

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d’enseignement est double. L’objet d’enseignement est tout d’abord un objet d’étude sur lequel porte l’activité des élèves mais, simultanément, cet objet est créé au travers d’artéfacts, donnant ainsi une forme concrète à l’objet d’enseignement. Ces artéfacts sont l’essence même des dispositifs. L’analyse de ces derniers nous place résolument du côté des enseignants puisque les dispositifs sont « tout ce que l’enseignant fait pour rendre présent, exercer et manipuler cet objet ou une de ses dimensions » (Ronveaux, 2012, p. 420).

Ce concept nous parait tout à fait pertinent dans le cadre de ce travail pour plusieurs raisons. Non seulement les dispositifs traduisent, au travers du découpage et de la façon d’aborder les objets d’enseignement, les choix opérés et les orientations choisies, mais de plus, l’analyse à priori d’un dispositif au regard de sa mise en place effective en classe nous permettra de comparer les objets à enseigner aux objets véritablement enseignés.

2. ...3et3les3théories3de3la3compréhension3en3lecture…3

2.1. 3Evolutions3d’un3sousUdomaine3

2.1.1. La&compréhension&en&lecture&:&une&activité&globale&

Giasson (1990/2011) consacre un ouvrage entier à la question de la compréhension en lecture et propose ainsi une synthèse des connaissances actuelles sur le domaine. À ce propos, elle met en avant une évolution majeure dans les théories de la compréhension en lecture en scindant celles de première génération des autres, qualifiées de seconde génération. Les modèles de première génération proposaient une représentation séquentielle de la compréhension en lecture, qui était divisée en plusieurs sous-habiletés à maitriser. La maitrise individuelle de ces sous-habiletés supposait la maitrise globale du processus de lecture. Ces modèles ont rapidement montré leurs limites, notamment parce qu’il n’y a pas de consensus sur la définition des habiletés. Comment enseigner des habiletés particulières si on ne parvient pas à les identifier clairement ? Si la compréhension en lecture se résumait à un sous ensemble d’habiletés, ne seraient-elles pas facilement identifiables ? De plus, l’application de ces modèles a mis en lumière un certain paradoxe. En effet, certains faibles lecteurs montraient de meilleures capacités dans l’exercice de certaines compétences spécifiques que des lecteurs qualifiés d’habiles. Ainsi, la maitrise isolée de compétences, même complexes, ne semble pas garantir la maitrise du processus dans son ensemble. Force est donc de constater que les habiletés nécessaires à la compréhension en lecture ne peuvent pas être envisagées isolément (Giasson, 1990/2011).

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Les modèles de compréhension en lecture qui dominent aujourd’hui se distancent des précédents sans pour autant s’y opposer frontalement. En effet, comme le souligne Giasson

« les habiletés en lecture enseignées auparavant ne sont pas nécessairement rejetées » (p. 5), mais il faut désormais prendre en compte les interactions qu’elles entretiennent entre elles.

L’activité de lecture est donc prise comme une activité globale où non seulement chacune des habiletés exerce un effet sur les autres, mais où chacune est également modifiée en retour.

2.1.2. Un&lecteur&actif&et&engagé&

Eco (1985) mettait déjà en avant une évolution majeure dans la conceptualisation de l’activité de lecture et, en particulier, de la compréhension. La lecture est ainsi envisagée comme une « activité coopérative » engageant activement le lecteur dans le processus de compréhension. En ce sens, l’interprétation du texte ne dépend pas uniquement de l’application d’un code mais aussi des interactions entre le lecteur, les intentions de l’auteur et le texte lui-même. Eco va même jusqu’à affirmer « qu’un texte postule son destinataire comme condition sine qua non de sa propre capacité communicative concrète mais aussi de sa propre potentialité significatrice » (p. 64). Giasson (1990/2011) va dans le même sens en présentant un lecteur qui « crée le sens du texte en se servant à la fois du texte, de ses propres connaissances et de son intention de lecture » (p. 5). Soulignons l’apport de Langlade et Fourtanier (2007) qui vont encore plus loin dans l’implication du lecteur dans le processus de compréhension en lecture. Pour eux aussi, l’implication du lecteur est une nécessité fonctionnelle de l’activité de lecture. Toutefois, ils mettent l’accent sur la subjectivité de chaque lecteur, liée notamment aux émotions que lui procure le texte. Ainsi, il n’y aura pas deux individus qui réagiront de manière identique à la lecture d’un même texte, de la même façon qu’un même texte n’aura jamais un écho identique d’un lecteur à l’autre. Il s’agirait donc de ne pas se concentrer uniquement sur les effets que produisent le texte et sa poétique, mais bien de les concilier aux affects qu’ils mobilisent chez chaque lecteur. La différence peut paraitre subtile, mais elle déplace pourtant fondamentalement l’activité de lecture du point de vue de l’expérience subjective propre à chacun. Ce déplacement a des implications

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2.2. Modèle3contemporain3de3compréhension3en3lecture3

Au terme de ces évolutions, Giasson (2011) se base sur le fait que comprendre un texte revient à « s’en faire une représentation mentale cohérente combinant les informations explicites et implicites qu’il contient à ses propres connaissances. Cette représentation est dynamique et cyclique » (p. 236). Afin de synthétiser les résultats des recherches actuelles, Giasson (1990/2011) propose un modèle de la compréhension en lecture qu’il est difficile de passer sous silence, basé sur les interactions entre trois pôles : le lecteur, le texte et le contexte.

Figure 1 : Modèle de la compréhension en lecture (Giasson, 1990/2011, p. 7) Il nous apparait pertinent d’observer un peu plus en détail les fondements de ce modèle et son fonctionnement en décrivant chacune des trois variables.

2.2.1. La&variable&lecteur&

Du point de vue du lecteur, les structures sont en lien avec ses attitudes et les connaissances qu’il possède. Giasson entend ici les connaissances tant sur le monde que sur la langue. Les processus, quant à eux, renvoient davantage à ce qu’il fait pour comprendre. Ces processus indispensables à l’activité de compréhension en lecture ont tout d’abord été mis en lumière par Irwin (1986) puis repris par Giasson (1990/2011). Cette taxonomie distingue quatre processus distincts : les microprocessus, les processus d’intégration, les macroprocessus et les processus d’élaboration. Le recours à ces différents processus permet au lecteur un traitement du texte tant local que global et lui assure l’interprétation des

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implicites et autres inférences présents dans le texte. Enfin, les processus métacognitifs complètent cette taxonomie. Sont regroupés ici tant les connaissances du lecteur sur le processus de lecture que le repérage et la régulation des pertes de compréhension. L’ensemble de ces processus, dont plusieurs sont mobilisés en simultané, doit faire l’objet d’un enseignement, comme nous aurons l’occasion de le développer par la suite.

2.2.2. La&variable&texte&

Du point de vue du texte, soulignons que « l’intention de l’auteur détermine en fait l’orientation des deux autres éléments » (p. 7), à savoir la forme et le contenu. Selon ce qu’il veut transmettre, l’auteur n’utilisera pas la même structure ou organisera différemment les contenus. De la même façon, ces contenus varieront immanquablement si l’auteur cherche à agir sur les émotions, le comportement ou les connaissances du lecteur. Néanmoins, la variable texte présente un défaut : il n’existe aujourd’hui aucune classification des textes faisant consensus. Nous pouvons toutefois retenir celle de Marshall (1984, cité par Giasson), qui a le mérite d’offrir la combinaison de plusieurs critères. Cette classification permet d’ordonner les textes non seulement en fonction des intentions de communication de l’auteur mais également selon qu’il présente une séquence temporelle ou prenne plutôt appui sur un thème. Utiliser une classification des textes reste un outil efficace pour s’assurer de la diversité des lectures proposés aux élèves.

2.2.3. La&variable&contexte&

Enfin, le dernier pôle concerne le contexte. Pour Giasson (1990/2011), il rassemble tout ce qui ne fait pas « littéralement partie du texte » (p. 7), mais qui a pourtant une influence sur la compréhension du texte. Le contexte social nous concernera particulièrement, parce qu’il se compose de l’ensemble des interactions qui interviennent dans l’acte de lecture. Sont ici prises en compte tant les interactions avec l’enseignant que celles avec les pairs. Nous nous attarderons également sur le contexte physique à travers les supports et les dispositifs mis en place pour faciliter la compréhension. Enfin, Giasson traite également du contexte psychologique qui fait référence au lecteur lui-même, et notamment à ses intentions de

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manière en investissant, en complétant ou en détournant les espaces fictionnels qu’elle lui offre » (Langlade et Fourtanier, 2007, p. 105)

Ainsi, dans leur argumentaire pour un sujet lecteur, Langlade et Fourtanier mettent en avant l’idée que le contexte qui accompagne chaque lecture est bien plus large que celui qui est envisagé dans le modèle de Giasson. Cette conception permet non seulement de mettre en lumière les liens étroits qu’entretiennent le lecteur et le contexte mais également d’envisager cette dernière variable dans un sens plus élargi.

En conclusion, cette description fine de l’activité de compréhension en lecture que propose Giasson nous offre un cadre solide sur lequel bâtir notre analyse, même s’il présente quelques éléments obscurs. Ce balayage des différents processus montre combien le lecteur doit être engagé dans la tâche de lecture pour parvenir à une compréhension efficace d’un texte. De plus, le nombre et la diversité des processus, intervenant simultanément dans une seule et unique tâche mettent également en évidence la complexité de la compréhension en lecture, et plus particulièrement pour le lecteur en cours d’apprentissage. Enfin, cette conceptualisation de la compréhension nous montre que le texte a lui aussi un rôle prépondérant à jouer dans cette activité. Nous reviendrons par la suite plus en détail sur cette question.

2.3. Enseignement3explicite3continué3de3la3lecture3

2.3.1. Enseignement&continué&de&la&lecture&

La compréhension occupe une place centrale dans l’enseignement de la lecture, et encore plus particulièrement dès l’instant où les élèves maitrisent l’usage du code. S’ils parviennent à déchiffrer avec fluidité les textes lus et qu’ils ont donc suffisamment automatisé le processus de décodage, alors ils ont davantage de capacité en mémoire de travail pour se concentrer sur des processus de plus hauts niveaux tels que la compréhension (Goigoux &

Cèbe, 2013). « Après les premiers apprentissages, les compétences du lecteur continuent de se développer au travers d’activités de compréhension et de production de texte » (Soussi, Petrucci, Ducrey et Nidegger, 2008, p. 10), or le développement de ces compétences nécessite également un enseignement : l’enseignement continué de la lecture. Aeby (2004) considère d’ailleurs que la complexité de la lecture exigerait un enseignement « tout au long de la scolarité, voire au-delà » (p. 57). À la suite de son étude sur le programme d’enseignement de la lecture « Récréature », qui s’adresse à des jeunes de 13 à 14 ans, elle définit l’enseignement continué de la lecture comme un « jeu de variations ». En effet, pour arriver à ses fins, cet

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enseignement doit pouvoir faire varier tant les genres textuels abordés, les tâches proposées, les composantes travaillées que les niveaux de médiation apportés. Ces médiations portent à la fois sur des explicitations des stratégies à utiliser et sur des réflexions métalangagières permettant d’amener les élèves de la compréhension vers l’interprétation. L’ensemble de ces variations garde pour objectif de « soutenir l’investissement de l’élève » (p. 67) dans l’activité de lecture pour lui permettre de développer l’autonomie nécessaire d’un lecteur aguerri.

Il apparait ici qu’il y a une réelle nécessité de continuer à enseigner la lecture, même lorsque les élèves savent déchiffrer. Martel et Levesque (2010) ont réalisé une étude sur les pratiques effectives des enseignants de deuxième et troisième cycles du primaire au Québec.

Ils ont demandé à 413 enseignants leur fréquence d’utilisation de différentes pratiques pédagogiques. L’hypothèse de ces chercheurs selon laquelle les théories sur l’enseignement continué de la lecture ne trouvent qu’un faible écho dans les pratiques effectives se confirme en partie. Ainsi, le résumé, les inférences ou encore les stratégies métacognitives restent très peu enseignés selon les dires des enseignants. Ces processus font pourtant partie des plus complexes mais, leur apprentissage reste aujourd’hui encore bien souvent à la charge des élèves. Il semblerait donc qu’il y ait une résistance entre l’élaboration de théories relatives à l’enseignement continué de la lecture et leur transposition dans les pratiques enseignantes.

2.3.2. Enseignement&explicite&

Au vu de leur complexité, il apparait clairement que nous ne pouvons pas laisser aux élèves le soin de développer par eux-mêmes les compétences liées à la compréhension en lecture : ces compétences doivent faire l’objet d’un enseignement explicite. Il ne suffit pas de mettre les élèves en situation de compréhension d’un texte pour qu’ils développent et mobilisent les processus requis. Ainsi, Fayol, David, Dubois et Rémond (2000) défendent l’idée d’une « instruction directe » qui devrait permettre au lecteur non seulement de développer son autonomie mais aussi de lui donner « le pouvoir d’agir sur les processus cognitifs impliqués dans la lecture » (p. 296). Cette notion de pouvoir nous semble tout aussi centrale que celle d’autonomie puisque toutes deux placent l’élève en tant qu’acteur dans le

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l’enseignement explicite. En premier lieu, cela passe par une valorisation du rôle de l’enseignant. Il devient un véritable guide pour les élèves et évalue et régule en permanence son intervention en fonction des besoins des élèves. De plus, l’autonomie de l’élève doit être l’objectif principal. Pour cela, il ne s’agit pas d’enseigner des habiletés, c’est-à-dire comment faire telle ou telle chose, mais bien des stratégies. La différence est de taille puisque l’élève doit « savoir non seulement comment faire, mais également quoi, pourquoi et quand le faire » (p. 32). Enfin, les situations proposées doivent être entières et signifiantes. Les situations sont complexes, et c’est l’étayage de l’enseignant qui évolue au fil de la progression et fait varier le niveau de complexité de la tâche.

Il nous semble pertinent de compléter cette vision de l’enseignement explicite par le modèle d’enseignement élaboré par Goigoux et Cèbe (2013). En effet, dans leur ouvrage didactique consacré à l’enseignement de la compréhension en lecture, ces auteurs ont fait le choix d’aborder cette problématique selon une « approche multidimensionnelle et intégrative ». Leur hypothèse rejoint les prescriptions de Giasson (2011) concernant la complexité des situations. Selon eux, un enseignement à partir d’un texte demandant la mobilisation de l’ensemble des compétences tout en restant proche de la pratique sociale de référence augmenterait non seulement le degré de compréhension, mais favoriserait également le transfert des stratégies. Dans le cadre précis de ce travail, nous nous attacherons donc, autant que possible, à proposer un enseignement qui puisse être qualifié d’explicite.

Notre intervention sous forme d’un dispositif ponctuel n’est pas forcément idéale afin d’enseigner efficacement l’ensemble des compétences, mais même les interventions de courte durée montrent leur efficacité et permettent d’augmenter le niveau de compétence des élèves (Fayol, et al., 2000).

3. …3au3service3de3l’opérationnalisation3en3classe3des3objets3à3 enseigner3

Notre réflexion nous a permis jusqu’à présent de définir les mécanismes de traduction des savoirs qui s’opèrent au sein des situations d’enseignement et d’avoir un aperçu global des théories de la compréhension en lecture et de son enseignement. Désormais, notre propos se focalisera plus en profondeur sur les théories sous-jacentes à l’opérationnalisation en classe des savoirs concernant la compréhension en lecture. Comme nous l’avons vu précédemment avec le modèle de la compréhension en lecture (Giasson, 1990/2011), le texte joue un rôle prépondérant dans cette activité. C’est pourquoi nous nous attarderons tout d’abord sur les

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choix des supports d’enseignement en abordant la question des textes opaques, des supports composites et le cas particulier de l’album de jeunesse. Par la suite nous nous concentrerons sur deux des compétences majeures de la compréhension en lecture d’un texte narratif : le personnage et le rapport ente le texte et l’image. Ce sont ces dernières qui seront au cœur de notre dispositif d’enseignement.

3.1. Le3choix3d’un3support3

D’une manière générale, lors de l’enseignement de la lecture, le choix du support est un élément central du processus. Lorsque nous nous référons à des méthodes d’enseignement, ce choix a été murement réfléchi par les concepteurs. Il est en différemment pour les textes intégraux que les enseignants décident de travailler avec leurs élèves. Dezutter, Larivière, Bergeron et Morisette (2007) se sont intéressés de plus près aux pratiques des enseignants de fin de primaire et de début de secondaire. À partir d’un questionnaire, ils ont sondé les pratiques de plus de 600 enseignants concernant la sélection des œuvres travaillées et les pratiques d’exploitation de ces œuvres. Il ressort de cette étude un élément surprenant : les enseignants du primaire travaillent plus d’œuvres intégrales que leurs collègues du secondaire. Le choix des œuvres est principalement guidé par le plaisir et l’intérêt des élèves, l’importance culturelle de l’œuvre et, enfin, les contraintes matérielles. Cette étude permet donc de mettre en avant les difficultés que peuvent éprouver les enseignants pour travailler avec leurs élèves des œuvres intégrales.

3.1.1. Textes&opaques&

Depuis le début des années 2000, une ligne de pensée se dessine quant au choix des supports d’enseignement de la lecture et de la compréhension. La complexité de l’activité de compréhension en lecture dépend bien évidemment de la complexité du texte utilisé comme support de travail. Lors de sa recherche en France auprès d’élèves de quatre classes en fin d’école primaire et de deux classes du début du secondaire, Vaubourg (2007) s’était fixé comme objectif ambitieux d’améliorer les compétences en compréhension en lecture de ces

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(1999) de proposer aux élèves des textes résistants, c’est-à-dire « des textes qui ne se laissent pas résumer aisément et/ou des textes qui ne livrent pas leur sens symbolique aisément » (p. 18). Tauveron oppose alors les textes réticents aux textes proliférants. Les textes réticents sont des textes lacunaires ou des textes qui empêchent délibérément la compréhension immédiate par le recours à un point de vue inattendu, à d’importantes ellipses ou encore en renversant l’ordre chronologique. Les textes proliférants, quant à eux, contiennent de nombreux éléments potentiellement polysémiques ce qui complique l’activité interprétative du lecteur. Plusieurs interprétations peuvent donc coexister ou se succéder au fil de la lecture.

Ce recours aux textes résistants, y compris chez les plus jeunes, est selon elle un moyen efficace de permettre aux élèves de construire rapidement une représentation fidèle à la réalité de l’activité de lecture : décoder ne suffit pas. Si le recours aux textes opaques ou résistants nous semble effectivement un moyen d’enseignement efficace de la compréhension en lecture, un devoir de réserve s’impose. C’est ce que suggère Quet (2007) en mettant en garde contre les méfaits de la surreprésentation de textes résistants dans le parcours d’apprentissage.

Non seulement il y a un risque de dégouter les élèves par la difficulté, mais les textes résistants peuvent concourir à construire une représentation erronée de la littérature. Quet s’interroge également sur la pertinence de recourir à des textes complexes pour l’enseignement des compétences de base. Il faut prendre en compte les capacités du lecteur car les sources de difficultés ne se situent pas toujours où on les attend. Ainsi, si la richesse didactique des textes résistants et opaques est plus ou moins unanimement reconnue, le recours à ce type de textes nécessite une vigilance particulière ainsi qu’un étayage accordant une attention particulière à la place du lecteur.

3.1.2. Le&support&composite&

La réflexion que mènent Bautier, Crinon, Delarue-Breton et Marin (2012) prolonge le raisonnement exposé précédemment sur le choix du support. Selon eux, les supports d’enseignement ont évolué au cours des dernières décennies pour devenir progressivement des supports composites, qui repensent fondamentalement « la façon de présenter le savoir, et sans doute même de le concevoir ». En opposition aux textes linéaires, les supports composites supposent la cohabitation de plusieurs systèmes sémiotiques différents dont les éléments, parfois discontinus, sont à mettre en relation les uns avec les autres. L’exigence cognitive pour le lecteur est donc bien plus importante. Dans le cas plus spécifique de l’album de jeunesse, le lecteur doit être en mesure de maitriser les codes propres à chaque composante sémiotique et gérer la relation entre le texte et l’image. Soulignons d’ailleurs que l’image n’a

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pas forcement une fonction illustratrice de redondance par rapport au texte, mais vient compléter le texte voire, le contredire. Le lecteur doit également gérer l’enchevêtrement des discours oraux et écrits, reconstruire la continuité du texte en conjuguant certains éléments qui peuvent être géographiquement très éloignés dans le texte ou les images et, enfin, prendre en compte les traces énonciatives de l’auteur qui transparaissent notamment au travers de « clin d’œil de connivence culturelle » (Bautier et al., 2012, p. 70). Soulignons également que ces deux codes différents ne sont pas nécessairement mis en œuvre par une seule et même personne, mais au contraire ils peuvent émaner de deux (ou plusieurs) personnes distinctes : auteur(s) et illustrateur(s), complexifiant encore la conjugaison de ces codes sémiotiques (Quet, 2007). Ces supports composites semblent proposer une richesse pour que les élèves développent leurs capacités en compréhension et en lecture dans la mesure où ils jouent sur l’ensemble des composantes à mettre en œuvre et posent le lecteur face à de véritables problèmes interprétatifs. Davantage présents au sein des dispositifs d’enseignement, ces supports composites sont également identifiés comme une source potentielle de difficulté pour les élèves (Bautier et al. 2012). C’est pour ces raisons que notre séquence didactique prendra appui sur un album de jeunesse, support composite que nous expliciterons plus en détail dans la suite de notre raisonnement.

3.1.3. &Le&cas&particulier&de&l’album&de&jeunesse&

Dans le cadre de cette étude, notre principal support de travail sera un album de jeunesse : support composite particulier. Ce type d’ouvrage est régulièrement utilisé dans les classes du primaire, y compris à Genève, où les albums de jeunesse sont notamment à la base de l’enseignement initial de la lecture par le biais de la méthode « À l’école des albums » (Perrin, Bouvard, Girard & Hermon Duc, 2007). Les albums sont également présents de plus en plus tardivement dans la scolarité, trouvant leur place jusqu’à la fin du primaire, voire au début du secondaire (Leclaire-Halté, 2008). Leclaire-Halté propose de définir cet objet particulier comme un « iconotexte ». Ce terme permet de mettre en avant la particularité des albums de jeunesse, à savoir de combiner à la fois un message textuel et un autre visuel. Elle

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pour affirmer que les albums de jeunesse ont une unité de travail particulière : la double page.

Enfin, lors de leur recherche auprès de six classes françaises concernant les pratiques effectives d’enseignement à partir d’albums de jeunesse, Leclaire-Halté, Audoin, Paté, Rondelli et Specogna (2009) mettent en avant l’idée que le travail à partir d’un iconotexte suppose une activité particulière chez le lecteur, et que cette dernière devrait faire l’objet d’un enseignement à part entière, notamment du point de vue de l’image et du rapport qu’elle entretient avec le texte. Les résultats de leur recherche montrent que, même si plusieurs enseignants affichent cet objectif, la traduction effective en classe de l’enseignement du rapport entre le texte et l’image est quasi inexistante.

Enfin, Van der Linden (2006) souligne également la particularité du destinataire multiple des albums de jeunesse. En effet, ces ouvrages s’adressent le plus souvent à des non- lecteurs ou à des lecteurs en cours d’apprentissage. Cela signifie, surtout pour les non- lecteurs, qu’ils ont besoin d’un intermédiaire pour accéder à l’ensemble de l’album. Ainsi, les albums de jeunesse ont parfois un discours multiple s’adressant tant aux enfants qu’aux adultes, qui servent de médiateurs et à qui ils adressent également des connivences.

3.2. Enseignement3de3composantes3fondamentales3

Terminons cet aperçu théorique en nous penchant davantage sur quelques composantes fondamentales de l’enseignement de la lecture. Nous avons pu constater que l’enseignement des stratégies de lecture doit faire l’objet d’un enseignement explicite (Giasson 1990/2011). Il existe à ce propos nombre de recherches et ouvrages didactiques pour guider les enseignants dans cette démarche. Nous avons donc pris le parti de nous pencher sur des composantes peut-être moins traitées dans la littérature scientifique : le rapport entre le texte et l’image, particulièrement pertinent dans le cadre de l’étude d’un album de jeunesse, et la notion de personnage, centrale pour l’étude d’un récit.

3.2.1. Gérer&le&rapport&texteDimage&

Le rapport qu’entretiennent le texte et l’image au sein des albums de jeunesse est au cœur du processus de lecture. Ce rapport est tellement central que Leclaire-Halté (2008) propose même de l’utiliser pour établir une classification des albums de jeunesse allant de l’album sans texte au texte illustré. Cette proposition est décriée par Van der Linden (2006) qui argumente que ce rapport entre texte et image évolue au fil des doubles pages et qu’il serait donc difficile de réduire un album à un rapport particulier. Pour autant, elle considère que cette notion est centrale et que le(s) décalage(s) et la/les complémentarité(s) entre texte et

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image méritent une analyse. Pour ce faire, elle propose un cadre comprenant trois relations différentes entre texte et image, influant chacune à sa manière sur la construction du sens. Il peut y avoir « redondance » : cela signifie qu’il y a congruence des propos entre le texte et l’image. Le texte et l’image peuvent, à d’autres moments, être en « collaboration ». Van der Linden préfère ce terme à celui de complémentarité car il permet de mettre en avant les interactions qu’entretiennent les deux pôles, chacun comblant les lacunes de l’autre. Enfin, il peut y avoir « disjonction » entre le texte et l’image. Il ne s’agit pas toujours de contradiction, mais plutôt d’une absence de point de convergence entre les deux discours.

Cette première classification est, somme toute, assez traditionnelle, prenant largement appui sur les travaux de Barthes dans le domaine de la publicité. Van der Linden apporte pour autant une spécificité lorsqu’elle se penche sur les fonctions respectives du texte et de l’image. En effet, il ne s’agit pas uniquement d’envisager le rôle de l’image par rapport au texte, mais plutôt d’essayer de définir, pour chaque double page, quelle est l’instance dominante et quelle est l’instance secondaire. Ainsi, elle identifie sept fonctions distinctes, qui nous serviront de base pour la suite de notre réflexion. La première est la fonction de répétition, où l’instance secondaire répète un message semblable à celui de l’instance dominante. La seconde fonction est celle de sélection, où le texte cible un élément parmi plusieurs présents dans l’image ou lorsque l’image est en lien avec un détail du texte, éludant par exemple une polysémie. Texte et image peuvent aussi avoir une fonction de révélation, à savoir qu’une des instances permet de donner du sens à l’autre. La fonction suivante est la fonction complétive, où l’intervention de la seconde instance permet de donner un sens global à la première en comblant ses manques. Van der Linden met en avant la fonction de contre- point, où les deux discours adoptent des points de vue différents ou se contredisent.

Soulignons que dans de telles situations, la vérité pour le lecteur semble toujours pencher du côté de l’image. En outre, texte et image peuvent avoir une fonction d’amplification. C’est-à- dire que l’une en dit plus que l’autre, approfondit ou propose une interprétation sans qu’il n’y ait de contradiction. Enfin, la dernière fonction est celle de l’ignorance, les deux instances fonctionnant l’une sans l’autre.

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3.2.2. Le&personnage&

Dans le cas de la lecture littéraire d’un récit, on ne peut ignorer l’élément clé : la question des personnages. Il paraît en effet complexe de raconter une histoire sans personnage. Ces derniers ont un statut privilégié dans le cadre du récit puisqu’ils sont garants de la cohérence de l’intrigue (Glaudes & Reuter, 1998). Giasson (2011) a identifié, à partir de recherches menées aux Etats-Unis, plusieurs niveaux de compréhension du personnage. Cette compréhension progresse au fur et à mesure des apprentissages des élèves du primaire. Au début de leur apprentissage de la lecture, la compréhension des élèves se concentre sur les attributs externes des personnages tels que l’âge ou l’apparence physique. Par la suite, la compréhension s’affine et prend également en compte les qualités internes des personnages : leurs centres d’intérêt et leurs sentiments par exemple. Ce n’est que dans un troisième temps que les élèves parviennent à atteindre le cœur des personnages et à prendre aussi en compte leurs relations et leurs motivations. C’est vers cette compréhension que doit tendre l’enseignement de la notion de personnage à l’école primaire (Giasson, 2011).

Lorsqu’on on se penche sur l’étude des personnages, il est difficile de passer sous silence le modèle établi par Greimas (1966, cité par Reuter & Glaudes, 1998, p. 66). Bien que daté, il présente l’avantage de distinguer actants et acteurs. Les actants sont les forces agissantes communes à tout récit. On retrouve parmi elles le sujet, l’objet, l’adjuvant, l’opposant, le destinataire et le destinateur. La multitude de personnages envisageables ne correspond qu’à des acteurs incarnant l’un ou l’autre ou parfois plusieurs de ces actants. Cette restriction à six actants permet une meilleure analyse des relations entre les personnages.

Greimas met également en lumière les rôles thématiques des personnages, qui sont des propriétés que nous leur attribuons selon leur catégorie sociale. Ces rôles thématiques sont les prémices des stéréotypes, notion que Perrin (2010) place au centre des apprentissages concernant le personnage. En effet, il est selon elle primordial de construire les stéréotypes les plus courants avec les élèves pour leur permettre, non seulement de construire des archétypes relatifs plutôt aux traits psychologiques, mais aussi d’attribuer certaines caractéristiques entendues aux personnages stéréotypés afin de reconnaitre lorsqu’un stéréotype est pris en contre-point.

De plus, Perrin (2010) met également l’accent sur l’enseignement du repérage des personnages et de leur permanence. Cette permanence est incarnée notamment par ce que Glaudes et Reuter (1998) ont appelé des désignateurs. Les noms des personnages ainsi que les

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différentes reprises anaphoriques (déictiques, groupes nominaux, périphrases, etc.) sont autant de désignateurs possibles dans un même récit. La chaine de coréférences qu’ils constituent peut être plus ou moins claire, ce qui influe largement sur la lisibilité du texte et sur sa cohérence (Glaudes & Reuter). Enfin, la construction du personnage et de sa permanence, dans le cas particulier des albums de jeunesse, passe également par l’image. D’après la pensée de Tsimbidy (2008), la construction iconographique des personnages doit répondre à une contrainte majeure : quel que soit l’angle retenu, le personnage doit être reconnu. L’image peut d’ailleurs représenter un point d’ancrage pour le lecteur et remplacer une longue description de personnage dans le texte. Cette représentation peut prendre appui sur les conventions figuratives, ou au contraire, les détourner. Pour autant, la représentation du personnage n’est pas toujours indispensable. En effet, un personnage peut prendre vit dans l’image par des traces de sa présence ou même s’incarner dans des formes abstraites. Quelles que soient les orientations choisies, il apparait donc clairement que le traitement de l’image concourt également à la construction du personnage chez le lecteur et influe sur la lisibilité de l’intrigue.

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Problématique

À partir de la revue de littérature dressée précédemment il nous apparait clairement que l’enseignement de la compréhension en lecture est un domaine complexe. S’il demande aux élèves la mobilisation simultanée de plusieurs processus et stratégies distincts, il demande aux enseignants d’opérer des choix et d’élaborer des tâches pour enseigner explicitement les stratégies de compréhension. L’opérationnalisation de ces savoirs en savoirs à enseigner au travers d’un dispositif entraine immanquablement une transposition de ces savoirs. L’apport de Philippe (2004), mais aussi de Paun (2006) ou Schneuwly (1995) nous donne à penser qu’une autre traduction des savoirs intervient lorsque le dispositif est mis à l’épreuve en classe.

Cette recherche s’intéresse précisément à ce qui se joue dans la traduction des savoirs tant par l’enseignant que par les élèves, l’enseignement de la compréhension en lecture étant davantage considéré comme un support d’observation. En effet, la compréhension en lecture est un domaine non seulement très étendu, mais surtout, les recherches à son propos demandent du temps. De plus, il est difficile d’observer les stratégies cognitives mises en place par les élèves, lors de la lecture ou développées au fil des séances, sans un important dispositif, difficilement envisageable dans le cadre de ce projet de mémoire. C’est donc pour l’ensemble de ces raisons que l’enseignement de la compréhension en lecture devient davantage notre outil que notre objet d’étude.

Lors des situations d’enseignement, l’enseignant est en interaction quasi permanente avec ses élèves, et plus particulièrement lors de débats autour d’hypothèses interprétatives.

Les remarques des uns font écho à la pensée des autres, pouvant ainsi très rapidement faire dévier l’objet de discussion, voire l’objet d’enseignement. De leur côté, les élèves interagissent également entre eux. D’après le socio-constructivisme, ces interactions concourent également à l’élaboration du savoir chez les élèves. Ainsi, les savoirs visés et définis par les institutions comme étant à maitriser par les élèves sont traduits par les enseignants en fonction de leurs pratiques, afin d’être enseignés. Par la suite, lors de la mise en place effective de l’enseignement, une nouvelle traduction s’opère, fruit des interactions entre, d’une part, l’enseignant et ses élèves et, d’autre part, entre les élèves. Que devient alors le savoir initialement visé ?

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Ainsi, notre question de recherche vise à comprendre comment, pour une classe de 6P de Genève, s’opérationnalisent les prescriptions institutionnelles pour la compréhension en lecture, à travers une séquence d’enseignement basée sur un album de jeunesse.

Cette question principale se décline en trois sous-questions :

- Comment ces prescriptions institutionnelles et ces savoirs scientifiques se traduisent- ils en objets à enseigner ?

- Comment ces objets à enseigner s’opérationnalisent au sein d’un dispositif en tant qu’objets enseignés ?

- Quelles transformations de l’outil pour quelles transformations des objets d’enseignement ?

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Méthodologie de recherche

La problématique de ce travail est d’étudier la confection et la mise en place d’un dispositif d’enseignement de la compréhension en lecture auprès d’élèves du cycle 2 déjà lecteurs. Après plusieurs prises de contact, madame A.3, enseignante de 6P d’une école genevoise, a accepté de prendre part à cette recherche. C’est donc cela qui a guidé notre choix du degré d’enseignement de référence pour cette recherche.

Le tableau ci-dessous récapitule les différentes étapes du processus de recherche qui seront explicitées et justifiées ci-après.

Dates et périodes Étapes

Octobre 2015 Analyse de l’album

Novembre 2015 Conception de la séquence d’enseignement

13 janvier 2016 Entretien avec l’enseignante afin de présenter la séquence 26, 27 et 29 janvier 2016

01 et 02 février 2016 Mise en œuvre du dispositif (captation vidéo)

10 février 2016 Entretien avec les deux enseignantes suite à l’implémentation Figure 2 : Calendrier de la recherche

1. &Papa&se&met&en&quatre&:3définition3des3lieux3d’obscurités3

Dans le cadre de cette étude, nous avons choisi d’étudier un album de jeunesse. Comme nous l’avons vu précédemment, ce type d’ouvrage est de plus en plus présent dans les classes, mais reste principalement cantonné aux premiers degrés de l’école primaire. Papa se met en quatre (2004) d’Hélène Riff est un support composite permettant un travail sur la compréhension en lecture avec des élèves plus âgés. Il nous parait indispensable d’analyser plus en profondeur les particularités de cet album, et plus spécifiquement les éléments opaques, c'est-à-dire ceux qui créent de la résistance à la compréhension. À cet égard, l’ensemble de notre analyse prend appui, d’une part, sur celles qui ont été réalisées par Van

3 Dans le respect de l’anonymat des participants, l’ensemble des prénoms du présent travail sont anonymisés.

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der Linden (2006, p. 150 et sq.) et d’autre part sur celle proposée par Ronveaux et Nicastro (2008).

Tout d’abord, du point de vue de l’intrigue, le scénario est assez banal et peut se résumer en quelques phrases. Une mère quitte le foyer familial pour une nuit afin d’aller chez le dentiste, laissant la garde des sept enfants au père. Ce dernier décide alors de nettoyer la cuisine de fond en comble avec les enfants. Une tache reste récalcitrante. Le père tente par tous les moyens de la faire disparaitre et perd patience avec ses enfants. Il les envoie au lit et continue seul sa lourde tâche. Ce sont les enfants qui découvrent, durant la nuit, que la tache n’était qu’une ombre projetée. Le lendemain, au retour de la mère, la tache noire a fait place à une autre, blanche cette fois-ci : par son frottement zélé, le père a usé le sol de la cuisine.

Les quatre premières doubles pages de l’album montrent une réticence importante, orientant le lecteur sur une fausse piste (Van der Linden, 2006). Jusqu’à quand part cette maman ? Est-ce qu’elle a un mouchoir parce qu’elle pleure ? L’ambiance de ces doubles pages accentue la lourdeur de l’atmosphère.

Si l’intrigue peut paraitre simple, ce n’est pas le cas pour les images qui sont, quant à elles, relativement éloignées des canons du genre. Les couleurs dominantes sont peu chatoyantes, avec un jeu sur les nuances de noir, gris et blanc. Le contraste est saisissant entre des aplats de couleurs et des traits fins, schématiques et représentant de petits éléments à l’échelle de la double page. Il y a également un contraste entre la profusion et la précision de certains détails alors que d’autres formes sont inachevées et freinent parfois l’identification des personnages (Van der Linden, 2006, p. 153). C’est notamment le cas pour les enfants, puisqu’il est rarement possible d’en identifier sept sur une double page.

Dans leur analyse du point de vue du texte, Ronveaux et Nicastro (2008) mettent en avant la multiplicité des narrateurs. Il s’agit tantôt des enfants, tantôt du père, avec des marques typographiques particulières et changeantes d’un personnage à l’autre : guillemets et police en italique, entre autres. De plus, à une plus petite échelle, cet album propose plusieurs jeux lexicaux, par exemple avec la formule du « Pamoi » ou encore en détournant certains

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