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View of Qui se ressemble se rassemble-t-il? Lecture de quelques portraits d’André Breton, entre fragment et totalité

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Texte intégral

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Qui se ressemble se rassemble-t-il?

Lecture de quelques portraits d’André Breton, entre fragment et totalité

Noémie Suisse

Résumé

L'étude du corpus des représentations visuelles d’un écrivain pose la question du rapport entre fragment et totalité. Les portraits d’André Breton sont-ils gouvernés par un principe de dissémination, au nom d’une méfiance envers le principe d’unité qui gouverne le genre du portrait ? D’un point de vue macrostructural, l’ensemble de ces représentations peuvent-elles être subsumées en une image unique de l’écrivain ? Le morcellement des portraits d’André Breton ne voue pas son image à se décomposer dans une dispersion mortifère. Le corpus iconique que nous examinons deviendrait l’équivalent du corps disséminé de l’écrivain, dont l’écrivain collectionneur comme le lecteur s’attacherait à rassembler les morceaux.

Abstract

The visual representations of a writer form a corpus that questions the relationship between fragment and totality. This article asks whether the portraits of André Breton are ruled by a principle of dispersal due to a reaction against the classic principle of unity that governs the genre of the portrait ? Is it possible to claim that all these representations can be subsumed in one single image of the writer ? Breton’s fragmented portraits are not a synonym for decomposition and deadly dispersion. The images studied in this article suggest that they serve as the equivalent of the uncollected body of the writer, assembled by the reader as well as by the author himself as collector of his own image.

Keywords

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Art, pourquoi me déchires-tu de moi-même ?

OVIDE

L’étude du corpus des représentations visuelles d’un écrivain pose la question du rapport entre fragment et totalité selon deux perspectives. Il s’agit d’une part d’observer la nature des relations entre partie et tout qui s’établissent à l’intérieur d’un portrait. D’autre part, les portraits dont le chercheur fait la somme peuvent-ils être pensés comme autant de fragments susceptibles de former un tout, le corps-corpus iconique de l’écrivain ? Une formule d’Aragon extraite du Manifeste Dada

de 1920 énonce la thèse suivante : « Tout ce qui est moi est incompréhensible »1. On peut examiner

les portraits d’André Breton à la lumière de cette phrase en se rappelant le sens étymologique de l’adjectif : le corps de l’écrivain se com-prend-il grâce à l’image ? L’addition des représentations de l’auteur offre-t-elle une com-préhension inédite de ce dernier ? Ou au contraire, Breton pourrait-il reprendre à son compte le cri de Marsyas rapporté dans les Métamorphoses, « Art, pourquoi me

déchires-tu de moi-même »2 ?

L’ambition de cet article est d’amorcer une telle réflexion, dont les champs d’analyse sont pluriels, à partir de l’iconographie d’André Breton, et en réservant une attention particulière aux portraits réalisés dans l’entre-deux-guerres. Sur le plan de l’histoire littéraire, les deux décennies concernées sont celles de la naissance du Surréalisme et des efforts de théorisation de ses

représentants, pour « s’affranchir des contradictions »3 intellectuelles effectives ou potentielles qu’il

véhicule. Elles correspondent en outre au moment où André Breton s’impose dans le champ littéraire, construit donc, au sens littéral comme figuré, son image d’écrivain. L’étude des figurations d’André Breton dans cette période présente aussi l’intérêt d’interroger les représentations du groupe surréaliste dans son ensemble : plus qu’une partie d’un tout, le chef de file a ceci de particulier qu’il incarne le tout. La prise en compte de cette relation métonymique ne nous empêchera pas de tenter de saisir la spécificité des modalités de représentation d’André Breton dans les arts visuels, et la manière dont ce dernier préserve pour une part la maîtrise du faisceau d’images qui le mettent en scène. Nous envisagerons alors les moyens selon lesquels l’écrivain pallie l’absence de mainmise sur les portraits produits et diffusés par des tiers et le déficit d’unité qui découle de ce kaléidoscope d’images qui échappent à celui qu’elles représentent.

1. Louis ARAGON, Littérature, n° 13, 1920, pp. 2-3.

2. OVIDE, cité dans Nathalie BARBERGER, Le Réel de traviole, Lille, Presses Universitaires du Septentrion, 2002, p. 158. 3. C’est la formule utilisé par André Vielwahr pour qualifier la période de 1925 à 1930 (Voir André VIELWAHR,

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1. L’auteur en pièces détachées

Le portrait de Max Ernst qui figure sur le carton de vernissage d’une exposition monographique

organisée par Yvonne Zervos en 1935 dans les locaux de la revue « Cahiers d’art »4 est

emblématique de l’esthétique de fragmentation qui domine le portrait surréaliste : le visage de l’artiste est en plusieurs morceaux, semblable à une surface vitrée qui aurait subi un choc. Le geste est iconoclaste, au sens propre du terme, brisant l’image photographique du sujet. Les portraits réalisés à l’occasion des jeux de « cadavre exquis » relèvent de la même opération de fragmentation du corps du sujet, du fait que les participants ajoutent au dessin initial leurs contributions successives, sans cohérence aucune. Un rêve de Breton raconté dans Arcane 17 développe la thématique du corps démembré en revisitant le mythe d’Osiris. Il est question des « quatorze

morceaux épars », obtenus après la « mutilation »5 du corps du dieu égyptien. Cette violence

exercée sur le corps apparaît comme un motif récurrent des années d’après-guerre hantées par les

« gueules cassées »6. Les poupées désarticulées d’un Hans Bellmer ne sont pas étrangères non plus

aux corps mutilés de Verdun. Au-delà des effets de l’expérience traumatique de la guerre, cette atteinte portée à l’intégrité du corps qui traverse les écrits comme les représentations plastiques de la période montre combien l’image stable, unique du corps, celle que la figuration mimétique du sujet favorisait, est mise à mal. Le portrait avait pour rôle, selon Hegel, d’exprimer « l’unité de

l’individualité spirituelle »7.

La loi du fragment s’impose désormais contre le règne de l’image unique et unitaire du sujet, censée reproduire l’unicité et l’unité de l’individu, au sens étymologique (l’être indivisible), et accusée de les produire de manière factice et fallacieuse. Quel portrait peut-on faire de « l’âme

errante »8 Nadja, au moi insaisissable à force de métamorphoses ? Du personnage féminin qui

donne son nom au célèbre récit d’André Breton, le lecteur n’aura accès qu’à des éléments épars, dans les illustrations qui accompagnent le texte : son regard, reproduit dans un photomontage qui multiplie ses « yeux de fougère », ses autoportraits au crayon. Si l’on compare le portrait de l’auteur à celui (ceux) de son héroïne, il apparaît que le livre présente au lecteur le visage de Breton dans son entièreté sous la forme d’un portrait très classique, réalisé dans le studio du photographe Henri

4. Carton de l’exposition « Max Ernst – dernières œuvres » organisée par Yvonne Zervos du 18 au 31 mai 1935.

5. « Ce corps, qui fut le siège de la toute-beauté et de la toute-sagesse, elle est condamnée à n’en rassembler que les

quatorze morceaux épars et encore la mutilation aura-t-elle été plus implacable puisque l’organe propre à transmettre la vie a été la proie des poissons » (André BRETON, Arcane 17, New York, Brentano’s, 1945, p. 146).

6. L’exposition « 1917 » au Centre Pompidou-Metz, du 26 mai au 24 septembre 2012 a proposé un aperçu de la manière

dont la représentation des corps dans la production artistique a été marquée par les épreuves du conflit (voir : http://www.centrepompidou-metz.fr/node/13872#onglet-0). Je remercie Anne Reverseau d’avoir attiré mon attention sur cette manifestation.

7. Georg Wilhelm Friedrich HEGEL, Esthétique, vol. 3, Paris, Flammarion, 1979, p. 57. 8. André BRETON, Nadja [1928], Paris, Gallimard, 2002, p. 82.

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Manuel. En étudiant le désir d’unité que traduisent les portraits de Breton dans la deuxième partie de ce travail, nous proposerons quelques hypothèses pour justifier ce traitement différentiel. On peut constater dès à présent que si le corps de l’écrivain n’est soumis à aucune « mutilation » proprement dite, certains portraits proposent une image fragmentée de l’écrivain. C’est le cas d’une photographie énigmatique de Breton, retrouvée dans ses archives de la rue Fontaine, sur laquelle le

visage de l’auteur semble partiellement immergé9. La partie inférieure de l’image est floue et la

perception des traits du visage est donc en partie brouillée. Une métaphore d’Aragon à propos des expériences d’écriture automatique pourrait décrire la position ambivalente de Breton sur le cliché

que nous commentons : ceux qui dorment, écrit-il, « parlent […] comme des noyés en plein air »10.

Le visage « noyé » de Breton plonge dans une eau stagnante qui rappelle le marécage, emblème du

texte poétique pour Aragon11. La vision stratifiée des couches de la conscience, empruntée à Freud,

fait que la poésie est associée à un imaginaire du bas, aux « dormantes eaux »12, troubles, de

l’inconscient. Ce double modèle du psychisme humain fragmenté, ou plus exactement sédimenté, influence nécessairement les portraits réalisés dans l’entre-deux-guerres, alors que des psychologues contemporains comme Bourget ou Ribot multiplient les études sur les maladies de la

volonté, « sur les intermittences pathologiques d’un moi qui s’émiette sans jamais se structurer »13.

Breton lui-même se montre particulièrement intéressé par le clivage du sujet, caractéristique de la psychose. Les fragments de portrait féminin qui émaillent Nadja sont eux-mêmes influencés par les planches photographiques des patientes hystériques de la Salpêtrière collectionnées par les surréalistes fascinés par le phénomène psychiatrique autant que par les images qui en rendaient compte. Ces images prennent la forme d’une accumulation d’instantanés dont l’assemblage échoue à proposer les portraits proprement dits des individualités distinctes. Le moi fractionné et pluriel de Breton que la photographie de Man Ray donne à voir met moins au jour une faille de type

pathologique que la « fascination quasi continuelle d’un éclatement de la personnalité »14 dont

Breton fait montre dans Nadja, comme l’a analysé Julien Gracq.

La division qui touche le plus la personne de Breton, dans les représentations iconiques que nous avons de l’écrivain, est la séparation entre la tête et le corps. Les moulages en plâtre de son

9. Portrait photographique anonyme d’André Breton dans son atelier vers 1920, reproduit dans le catalogue de

l’exposition André Breton au centre Pompidou en 1991. Source : Archives André Breton (www.andrebreton.fr). [http://www.andrebreton.fr/fr/item/?GCOI=56600100000980]

10. Louis ARAGON, L’Œuvre poétique, t. II, Paris, Messidor, 1990, p. 238. 11. ID., Le Paysan de Paris, Paris, Gallimard, 1926, p. 76.

12. André BRETON, Traité du style, Paris, Gallimard, 1928, p. 173.

13. Pierre-Jean DUFIEF, Les Écritures de l’intime de 1800 à 1914. Autobiographies, mémoires et correspondances, Paris,

Bréal, 2001, p. 143.

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visage en sont une première manifestation. Le procédé des « passe-têtes » sur lequel repose la plupart des portraits réalisés sur les stands forains, très fréquentés par les surréalistes, a donné lieu à un répertoire abondant de poses ludiques, grâce à l’effet de disproportion produit entre le tête du client qui dépasse du panneau de toile et le corps peint sur ce fond. Clément Chéroux a décrit le corpus abondant de ces portraits forains, analysé les techniques récréatives qu’ils mettent en

œuvre15. Le portrait forain le plus connu de Breton, où l’écrivain prend l’habit d’un clown16,

pervertit le principe ludique du travestissement de soi en personnage farcesque. En effet, il apparaît que la caricature n’agit pas à l’endroit où on l’attend : le modèle ne se prête pas à une métamorphose de sa personne en clown ou personnage haut en couleur de la comédie italienne, comme pourrait le suggérer le décor peint, dans un jeu d’auto-dérision. C’est le corps de Breton qui apparaît, pour ainsi dire, comme caricatural, dans la disproportion qu’il présente entre le visage et le corps. Dans sa biographie de Breton, Mark Polizzotti décrit le jeune homme de 17 ans qu’il était comme donnant aux autres « une impression de supériorité et de hauteur ». Il précise cette idée : « Ce qui frappe d’abord, c’est sa tête, légèrement disproportionnée en partie à cause de sa crinière

bouclée de longs cheveux châtain clair ramenés en vagues désordonnées au-dessus des oreilles »17.

Dans Les Couleurs de nos souvenirs, Michel Pastoureau évoque l’image qu’il conserve d’André Breton, que fréquentait régulièrement son père Henri Pastoureau : l’homme est « pourvu d’une énorme tête », se rappelle-t-il :

Plus que sa voix affectée et inquiétante pour l’oreille d’un enfant, c’était sa tête qui me faisait peur : elle me semblait vraiment disproportionnée par rapport au reste du corps et était entourée d’une chevelure anormalement dense et longue. Mon camarade Christian, qui habitait en face et dont la grand-mère était la gardienne de notre immeuble, disait qu’il avait

une tête de « sorcier d’Indiens ». De fait, il nous paraissait porter un masque.18

Et l’auteur de suggérer que « cette tête insolite » était peut être cause du « goût de Breton pour les

masques »19. Outre ces témoignages écrits, l’iconographie de Breton rend compte d’une certaine

disproportion entre la tête et le corps au profit de la première en superposant la figure de Breton à l’image de lion. Un portrait de Breton réalisé par Adolf Hoffmeister intitulé de manière explicite

André Breton, le Lion du Surréalisme fonde sa logique métaphorique sur « cet aspect léonin qui

contribua à [l]a légende »20 de Breton, selon un témoignage de Simone Kahn. Le dispositif forain

15. Clément CHÉROUX, « Portraits en pied... de nez », dans Études photographiques, n° 16, 2005, pp. 88-107. [En ligne],

URL : http://etudesphotographiques.revues.org/index721.html

16. Portrait d’André Breton à la fête foraine, janvier 1923. Source : Archives André Breton (www.andrebreton.fr).

[http://www.andrebreton.fr/fr/item/?GCOI=56600100162350]

17. Marc POLIZZOTTI, André Breton, Paris, Gallimard, 1999, p. 29.

18. Michel PASTOUREAU, Les Couleurs de nos souvenirs, Paris, Seuil, 2010, p. 17. 19. Ibid., p. 18.

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que nous étudions n’introduit donc pas une discordance à valeur comique, comme dans les expérimentations ludiques de la fin du siècle précédent, où l’on se plaisait à accoler une tête collée

sur un corps ne lui appartenant pas21, mais révèle la discordance inscrite dans la personne même du

modèle. Le sujet ne se ressemble pas parce qu’il ne se rassemble pas. La caractéristique physique n’est pas seulement anecdotique. Pensons à cette phrase de L’Immaculée conception : « de ce qui a

la tête sur les épaules abstiens-toi »22.

La dissociation qui se fait jour entre « la tête » et « les épaules » semble plaider pour une réévaluation du corps aux dépens de la tête, siège de l’esprit et symbole du rationalisme hégémonique du monde occidental, mis en cause avec vigueur dans le Manifeste du surréalisme de

1924. Breton hérite en cela de la conception dadaïste du sujet. Le « tableau rastadada »23 de Francis

Picabia en 1920 l’illustre avec humour. Le visage de l’artiste photographié est foulé aux pieds par des chaussures à talons. Ce n’est pas tant la chair qui bénéficie de l’anti-intellectualisme surréaliste

que le « fonds commun à tous les hommes »24, appelé dans l’Anthologie de l’humour noir le « soi »,

rattaché par Breton aux instincts primitifs du corps humain. Dans un article consacré aux rapports entre primitivisme et surréalisme, Philippe Sabot fait de Breton l’héritier de Nietzsche, philosophe qui se dresse contre les « contempteurs du corps » et distingue le Moi du Soi, « principe de

l’activité instinctive primordiale de l’être »25. Breton opère un rapprochement entre Nietzsche et

Freud sur cette question du « soi » à travers le personnage du Père Ubu d’Alfred Jarry :

On n’aura aucune peine à reconnaître dans le personnage d’Ubu l’incarnation magistrale du soi nietzschéen-freudien qui désigne l’ensemble des puissances inconnues, inconscientes, refoulées dont le moi n’est que l’émanation permise, toute subordonnée à la prudence.

Or le « véritable portrait de Monsieur Ubu » dessiné par Jarry en 1896 consiste en un personnage au corps particulièrement imposant. « Le devenir-primitif du poète » dont Philippe Sabot fait un impératif chez Breton passe par le primat du corps, réceptacle et témoin du jaillissement des

« puissances inconnues, inconscientes, refoulées »26 par la Tête, jusque dans une partie de son

iconographie. Parmi le dossier de photographies rassemblées par Breton en vue de la publication

Alain VIRMAUX & Odette VIRMAUX, Paris, La Manufacture, 1987, pp. 105-106.

21. Voir Albert BERGERET & Félix DROUIN, Les Récréations photographiques, Paris, C. Mendel, 1891 et Charles

CHAPLOT, La Photographie récréative et fantaisiste, Paris, C. Mendel, 1904. Voir aussi Clément CHÉROUX, « Les

récréations photographiques » dans Études photographiques, n° 5, novembre 1998, pp. 73-96. [En ligne], URL : http://etudesphotographiques.revues.org/index167.html

22. André BRETON & Paul ÉLUARD, L’Immaculée conception, Lausanne, L’Âge d’Homme, 2002, p. 215. 23. Francis PICABIA, Tableau Rastadada, 1920, Bibliothèque Paul Destribats, Paris.

24. André BRETON, La Clé des champs, Paris, Jean-Jacques Pauvert, 1967, p. 261.

25. Philippe SABOT, « Primitivisme et surréalisme : une synthèse impossible ? » dans Methodos, n° 3, 2003. [En ligne],

URL : http://methodos.revues.org/109?&id=109

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des Vases communicants, figure un cliché qui montre le visage de l’écrivain émergeant du creux

d’un arbre27. Le dispositif est semblable aux décors forains de carton pâte qui ménagent une

ouverture circulaire dans laquelle le modèle fait apparaître son visage. Celui de Breton qui émerge du tronc est de proportion infime au regard de l’immensité de l’arbre et ce, d’autant plus que le

photographe est éloigné de son objet28. La tête perd de sa préséance au profit du corps végétal qui

lui sert, littéralement, de tronc. « Le soi est à l’esprit humain ce que l’assise géologique est à la

plante »29 écrit aussi Breton. Le tronc et surtout les racines de l’arbre se substituent au corps du

sujet, témoignent de l’effort du poète de « redonner à l’homme civilisé la force de ses instincts

primitifs »30. Dans un article plus tardif intitulé « Présignalement », Breton fera état de son dégoût

pour la tête humaine31. La « tyrannie déséquilibrante de la tête »32 dénoncée avec force par Michaux

dans sa poésie, l’est aussi chez Breton, quoique de manière plus discrète. Cette mise en cause de la valeur démiurgique de la tête prend une coloration particulière chez Breton, au regard des caractéristiques de sa physionomie, comme nous avons pu l’observer auprès de ses biographes.

Il va de soi que cette quête centrée autour du corps, siège supposé du reliquat primitif en l’homme, aux dépens de la tête, trouve des limites chez Breton. La querelle qui l’oppose à Georges Bataille en 1929 achève de situer le premier du côte du matérialisme et de cantonner le second à la défense de l’idéalisme, « qui la tête, qui le corps », pour reprendre le titre d’un article de Christophe

Halsberghe consacré au différend entre les deux écrivains33. Pour Bataille, « la tête de Breton, à

force de demeurer rivée sur un au-delà merveilleux, a perdu tout contact avec le corps »34.

L’écrivain dissident revendique une poétique « acéphale », du nom du mouvement ésotérique et de la revue homonyme créés en 1936 et érige la Tête en symbole de la dérive idéaliste de Breton, de la pensée raisonnante et totalitaire.

Ces considérations ne nous éloignent pas de notre projet d’analyse de l’iconographie de Breton : il apparaît en effet, que les portraits de l’écrivain postérieurs à la polémique violente qui

27. Portrait extrait du dossier de photographies réunies par André Breton pour illustrer Les Vases communicants. Source :

Archives André Breton (www.andrebreton.fr). [http://www.andrebreton.fr/fr/item/?GCOI=56600100061950#]

28. Le dossier préparatoire aux illustrations des Vases communicants rassemble deux clichés anonymes du même

modèle : un premier cadrage est centré sur le visage de Breton, en plan serré ; la distance entre l’objectif et l’arbre, sur le second cliché, est bien plus importante. Le visage de Breton, toujours au centre, mesure quelques millimètres seulement.

29. André BRETON, Anthologie de l’humour noir, Paris, Jean-Jacques Pauvert, 1966, p. 362.

30. Paul ÉLUARD, « L’évidence poétique », dans Œuvres complètes, t. I, Paris, Gallimard, 1968, p. 517. 31. André BRETON, « Présignalement », dans Œuvres complètes, t. III, Paris, Gallimard, 1999, p. 871.

32. Catherine MAYAUX, « Dessins commentés ou le fantôme du poète », dans Henri Michaux. Corps et savoir, s. dir.

Pierre GROUIX & Jean-Michel MAULPOIX, Paris, ENS Éditions, 1998, p. 26.

33. Christophe HALSBERGHE, « Qui la tête, qui le corps : l’affrontement Bataille-Breton », dans L’Histoire-Bataille.

L’écriture de l’histoire dans l’œuvre de Georges Bataille., s. dir. Laurent FERRI & Christophe GAUTHIER, Paris, École

des Chartes, 2006, pp. 71-84.

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oppose le groupe surréaliste à la communauté regroupée autour de Bataille, au sein de la revue

Documents, se complaisent dans une représentation céphalocentrée de Breton, qui s’oppose

radicalement à l’iconographie de Bataille et ses partisans.. Dans le pamphlet dirigé contre Breton,

intitulé Un cadavre, l’image de l’écrivain est réduite à un buste35. Les signataires veulent « avoir la

tête » du pape auto-proclamé du surréalisme, selon l’expression imagée, mais ce choix symbolise surtout la réduction de l’homme à une tête pensante, exerçant une censure inique sur ses pairs. Le portrait sélectionné par les pourfendeurs de Breton est celui qui figurait dans le photomontage

illustrant le numéro 12 de La Révolution surréaliste en décembre 192936. Le visage de Breton

s’affichait alors aux côtés de ses compagnons, dans une même pose, autour d’une reproduction d’une huile de Magritte « Je ne vois pas la… cachée dans la forêt ». Dans le pamphlet dirigé contre Breton, « Un cadavre », les yeux fermés ne suggèrent plus la richesse d’une vie intérieure source de création, mais deviennent le signe d’un recueillement de type religieux. Associés à la couronne d’épines, ils font aussi signe vers la mystique et la religiosité diffuse dont les activités surréalistes sont empreintes. Le photographe Boiffard, chargé de réaliser le montage, caricature Breton en un Christ à l’agonie. Dans le pamphlet collectif, Bataille assène la sentence finale : « Ci-gît le boeuf

Breton, le vieil esthète, faux révolutionnaire à tête de Christ »37. Détaché du tout (le photomontage

initial), le portrait-fragment est privé de sa signification originelle et devient portrait-charge : dans le seul choix de retirer la vignette de Breton du photomontage initial, on lit l’hostilité de Boiffard envers celui qui est accusé de mettre en avant son ego de manière éhontée. De même, détachée du tronc, la tête devient celle d’un « représentant d’une espèce innommable, animal à grande tignasse

et à tête à crachats »38, suivant les mots de Bataille.

À l’issue de ces réflexions, le constat suivant peut être dressé : une partie des représentations de Breton qui vont dans le sens du morcellement du corps échappent à l’intéressé et témoignent d’une intention polémique sinon malveillante. Parallèlement, il apparaît que l’auteur s’efforce de proposer une image unifiée de sa personne, à rebours de l’image éclatée d’une Nadja, symbole d’une fragmentation mortifère. Il convient d’examiner à présent les modalités selon lesquelles l’écrivain compose avec le kaléidoscope d’images élaborées et manipulées par des tiers, compose – au sens étymologique cette fois – une représentation sur laquelle il a une prise, qui lui ressemble et le rassemble.

35. Voir : http://www.christies.com/lotFinder/lot_details.aspx?intObjectID=3845228

36. Voir : http://www.centrepompidou.fr/education/ressources/ens-subversion/ens-subversion.html 37. Georges BATAILLE, Œuvres complètes, t. I, Paris, Gallimard, 1970, pp. 218-219.

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2. Le corps d’Osiris

Tremblant, je suis témoin de l’artifice sublime en quoi trouve le moyen de s’exécuter la loi énigmatique, imprescriptible : ce qui a été démonté en quatorze pièces doit être remonté

quatorze fois.39

L’auteur d’Arcane 17 témoigne dans cet extrait de sa foi dans la capacité d’Isis à rassembler les morceaux épars du corps de son époux, à défendre le corps, à en maintenir l’intégrité. « La loi énigmatique, imprescriptible » d’un retour à l’unité gouverne l’iconographie de Breton. Il ne s’agit pas de composer une unité factice en masquant les dissensions internes au sujet. L’importance de

l’intertexte mythologique et la nostalgie d’un paradis perdu40, où le moi n’était pas menacé par un

morcellement délétère, ne signifient pas que le corps intègre appartient à un seul âge d’or par définition révolu, ni qu’il ne serait accessible qu’à la femme-voyante, à l’existence précaire. Les représentations visuelles du corps du poète peuvent rémunérer le défaut d’unité dont Breton ne

cesse de faire le constat. L’homme peut enfin « s’appartenir tout entier »41 dans et grâce à l’image.

La lecture des textes esthétiques que Breton publie dans l’entre-deux-guerres témoigne de sa confiance dans la capacité de l’art à prendre en charge cette réunion. « Tout se cherche et est en voie

d’articulation »42 note-t-il, par exemple, à propos de l’œuvre graphique de Max Ernst. Dans Le

Surréalisme et la peinture, il fait une analyse comparable des tableaux de Hantaï dont les « éléments

mis en rapport ne pouvaient manquer un jour de s’étreindre jusqu’à fusionner »43. Le lexique est à la

fois technique et érotique : l’assemblage des éléments hétéroclites accouche d’une unité nouvelle. On pense ici naturellement au procédé du collage pratiqué de manière récurrente par les surréalistes, de même qu’au jeu du cadavre exquis. Historiquement, l’adjectif « exquis » renvoie à l’exercice d’une recherche, recherche ici menée en vue de construire un corps, et que l’on peut assimiler à un travail de marqueterie. Ce travail n’est pas seulement métaphorique. Il s’agit pour le poète de se constituer un corps susceptible d’assurer sa « survivance », selon le terme qu’affectionne Breton – non pas un « cadavre ». L’attention portée par Breton aux représentations visuelles de sa personne et la multiplication de ses portraits dans les publications surréalistes tiennent au même refus de s’en tenir à des bribes d’identité. Les créations plastiques dont il est l’auteur sont autant de « paysage[s]

menta[ux] »44 qui ne concurrencent pas les portraits réalisés par des tiers mais s’ajoutent à eux

comme un membre se joint à un autre membre pour (re)former le corps d’Osiris.

39. André BRETON, Arcane 17, Paris, Le Livre de Poche, 2001, p. 43.

40. Voir J.-D. HUBERT « André Breton et le paradis perdu », dans The French Review, n° 2, 1963, pp. 200-210. 41. André BRETON, Manifestes du surréalisme, Paris, Jean-Jacques Pauvert, 1962, p. 28.

42. Cité dans Elza ADAMOWICZ, Ceci n’est pas un tableau. Les Écrits surréalistes sur l’art, Paris, L’Âge d’homme, 2004. 43. André BRETON, Le Surréalisme et la peinture, Paris, Gallimard, 1965, p. 237.

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Le portrait n’est donc pas un miroir qui reproduirait une identité déjà constituée, parfaitement identifiée et identifiable. Il est au contraire le moyen de se soustraire « aux fantasmes

angoissants du corps morcelé »45. La formule citée est de Lacan : elle est utilisée à propos du stade

du miroir, moment où le sujet « cherche dans le regard de l’Autre »46 l’unité rêvée. Les nombreux

portraits réalisés par d’« Autres » sont autant de fragments de l’identité de l’écrivain, que Breton s’attache à accumuler, à conserver avec le soin maniaque que l’on sait. Que l’écrivain ne prenne pas directement en charge la production des images qui le mettent en scène, comme dans le cas des autoportraits – fort rares – ou des portraits photographiques posés, ne l’empêche pas de retrouver une forme de maîtrise sur ces allo-portraits. La « démarche surréaliste tendant à provoquer une

révolution totale de l’objet »47 que Breton décrit dans sa conférence de 1936, « Crise de l’objet »,

est semblable à celle qu’il emploie vis-à-vis de ces images, considérées elles-mêmes comme des objets, photographiques ou plastiques. L’écrivain définit ainsi le geste artistique à l’origine du

ready-made : « action de détourner [un objet] de ses fins en lui accolant un nouveau nom et en le

signant, qui entraîne la requalification par le choix »48. La « requalification » à laquelle Breton

soumet les représentations iconiques de sa personne recouvre les opérations de sélection et de légendage auxquelles se livre l’écrivain-iconographe. Les pratiques d’archivage, de collection et de compilation se retrouvent également dans les albums photographiques privés qu’il réalise, imperméables au classement traditionnel suivant un ordre chronologique ou même thématique. Si le

processus sur lequel repose l’art photographique est la coupe, comme l’analyse Philippe Dubois49, le

collage des fragments obtenus permet de retrouver une forme de cohérence.

L’imagerie de l’écrivain est capable de construire un corps susceptible de rassembler des fragments que l’on croyait voués à rester dispersés. Le corpus iconique que nous examinons devient l’équivalent du corps disséminé de l’écrivain. Il est évident que l’ampleur de ce corpus condamne l’analyse à l’incomplétude. Mais, précisément, cette incomplétude est le lot de l’auteur comme du mouvement qui se situe dans sa phase d’émergence ; elle est surtout partie prenante de la pratique d’une collection, dont le désir d’exhaustivité est voué à n’être jamais satisfait. En somme, le portrait idéal, qui reflèterait de la manière la plus juste le moi, en proposerait une saisie complète, est nécessairement posthume. Les portraits successifs de Breton sont à l’image des objets qu’il collecte et dispose dans son appartement : c’est du cumul de pièces composites que naît une représentation unifiée du moi. « Je me suis rarement trouvé dans un lieu aussi extraordinaire », décrit James Lord,

45. Jacques LACAN, « Le stade du miroir… » (1936), Écrits, Paris, Seuil, 1966, p. 94. 46. Ibidem.

47. André BRETON, « Crise de l’objet », dans Cahiers d’art, n° 1-2, 1936, p. 22. 48. Ibidem.

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« je n’ai jamais vu tant de choses entassées dans un espace aussi limité. Et cependant cela compose

étrangement un tout, ce qui est bien le plus surprenant »50. Ce témoignage peut être mis en rapport

avec nos considérations sur les membra disjecta du corpus visuel auquel nous avons accès. Si l’on peut avancer le concept de ressemblance, comme y invite le titre de cet article, c’est une ressemblance qui « désassemble », telle que l’a décrite Georges Didi-Huberman : « La

ressemblance désassemble : elle crée le rapport mais non l’unité »51.

Il nous faut poursuivre le parallèle dressé entre le corpus iconique et le « mur Breton », en nous arrêtant sur cette formulation devenue usuelle. L’apposition du terme « mur » et du nom propre suggère qu’il y a identité entre les deux éléments. De fait, l’appartement de l’écrivain offre un portrait indirect de sa personne. Il devient donc nécessaire de penser un portrait débarrassé du sujet figuré dont la présence est normalement la règle du genre, capable d’en faire l’économie. L’appartement de Breton rappelle certes les cabinets de curiosité, mais, observe Didier Ottinger, le régime épistémologique sous lequel se place le poète surréaliste est tout à fait différent : un « passage du cosmologique au subjectif » s’est opéré et l’agrégat d’objets et d’œuvres ne répond plus au projet de constituer un microcosme, miroir du monde, mais correspond à une « curiosité de

soi »52. À cette expression du critique fait écho le titre d’un texte publié par Breton dans le premier

numéro de la revue Minotaure, « Picasso dans son élément »53. L’« élément » en question est

double : il désigne l’atelier parisien du peintre, rue La Boétie, et son atelier de sculpture de Boisgeloup, tous deux illustrés dans l’article par des photographies de Brassaï. Les clichés de l’atelier d’André Breton, sur lesquels l’écrivain figure ou non, se font de plus en plus nombreux au fil des décennies comme si l’appartement-iconothèque tenait de plus en plus lieu d’autoportrait. En 1966, Breton élabore le projet d’éditer un livre chez Skira dans la collection « Les Sentiers de la création ». Le livre, qui ne sera jamais terminé, devait présenter des reproductions de tableaux et objets que l’écrivain possède ou qu’il a possédés. Le titre envisagé était le suivant, Quelle ma

chambre au bout du voyage, allusion au titre de Xavier de Maistre Le Voyage autour de ma chambre. Le voyage autour de lui-même auquel Breton entendait convier le lecteur passe ainsi non

pas par l’écrit mais par l’image, la somme de celles-ci formant « une sorte d’autoportrait éclaté en

mille morceaux »54, suivant l’expression utilisé par Georges Didi-Huberman pour qualifier l’atlas

50. James LORD, Notes inédites pour Giacometti, cité dans Marc POLIZZOTTI, op. cit., p. 705.

51. Georges DIDI-HUBERMAN, « De ressemblance à ressemblance », dans Maurice Blanchot. Récits critiques, s. dir.

Christophe BIDENT & Pierre VILAR, Paris, Farrago/Scheer, 2003, p. 145.

52. Didier OTTINGER, « Le Mur », texte publié sur le site www.andrebreton.fr. http://www.andrebreton.fr/fr/item/?

GCOI=56600100228260

53. André BRETON, « Picasso dans son élément », dans Minotaure, n°1, 1933, pp. 4-29.

54. Georges DIDI-HUBERMAN, L’Image survivante : histoire de l’art et temps des fantômes selon Aby Warburg, Paris,

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iconographique Mnemosyne élaboré par Aby Warburg. En ce sens, la promenade silencieuse à

travers les collections de Breton que propose Fabrice Maze en filmant son atelier en 199455 peut être

considérée comme un portrait muet de l’écrivain. « Aucune parole, aucun commentaire qui nous

instruise », décrit Werner Spies. « Tout ce que le film fait voir, ce sont des objets »56. Ce que le film

« fait voir », au-delà des objets qui ornent les murs de l’atelier, n’est-ce pas somme toute André Breton lui-même ?

* * *

Notre réflexion sur le rapport entre fragment et totalité dans l’iconographie de Breton nous a amené à une première conclusion : les portraits de natures fort diverses que nous étudions sont autant de fragments dont l’agrégat forme une image ressemblante du modèle, au sens que Georges Didi-Huberman prête à cet adjectif. Malgré le caractère difficilement raccordable des morceaux du moi, la promesse de totalité guide le rapport de Breton à son image, le contraint à un travail d’Isis – comme on dit un « travail de Sisyphe ». Il reste à souligner que Breton n’est pas le seul acteur de cette tâche. La participation active du lecteur est sollicitée ; si la « ressemblance […] crée le rapport » plutôt qu’elle ne compose une unité factice, pour reprendre les termes de Georges Didi-Huberman, il revient au lecteur de mettre au jour ces rapports. Ce rôle confié au lecteur peut être mis en lien avec l’intérêt que porte Breton pour la peinture cubiste qui attribue au récepteur une mission déterminante. La réunification des points de vue partiels et pluriels est déléguée au spectateur. Le récepteur participe ainsi à l’acte créateur. Mais il s’agit ici d’un acte créateur tout à fait particulier puisqu’il s’agit de créer l’auteur, au sens où il importe de construire une image une et indivisible de son être, sans laquelle le morcellement le vouerait à une dispersion mortifère. « Car s’il faut que par une dialectique retorse il y ait dans le Texte, destructeur de tout sujet, un sujet à aimer, ce sujet est dispersé, un peu comme les cendres que l’on jette dans le vent après la mort

[...] »57 écrit Roland Barthes dans la préface de Sade, Fourier, Loyola. La mécanique que Barthes

voit à l’œuvre dans le texte peut être rapportée à l’image, en l’occurrence à celle qui nous préoccupe, l’image de l’auteur. Le lecteur a pour rôle de rassembler les cendres du « sujet à aimer » André Breton, démentant le vœu formulé par ses anciens compagnons dans le pamphlet Un cadavre

déjà cité : « Il ne faut pas que mort cet homme fasse de la poussière »58. La démarche des signataires

55. « L’Œil à l’État sauvage » est le titre du film réalisé par Fabrice Maze pour Arte et le Centre Georges Pompidou,

dans l’atelier d’André Breton, en 1994.

56. Werner SPIES, « Le mur d’André Breton », dans L’Œil, le mot, Paris, Christian Bourgois, 2007, p. 28. 57. Roland BARTHES, Sade, Fourier, Loyola, Paris, Seuil, 1971, p. 14.

58. L’expression, empruntée à Breton lui-même, a été utilisée à l’occasion de la diatribe portée contre Anatole France en

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est pour le moins paradoxale : reprenant le portrait d’identité de Breton pour illustrer leur plaquette, même dans une intention malveillante, ils contribuent à diffuser dans l’imaginaire collectif le visage de celui dont ils prononcent la mise à mort symbolique. Répandant ses cendres iconographiques, ils participent ainsi à l’entreprise d’élaboration identitaire menée de son vivant par le futur « cadavre » Breton.

Noémie Suisse (suissenoemie@yahoo.fr) est doctorante en littérature française à l’Université Paris VII-Denis Diderot. Elle réalise, sous la direction d’Éric Marty, une thèse consacrée à l’iconographie d’André Breton.

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